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Nombres 25
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Nombres 25

Affaire de Baal-Péor

Le chapitre 25 raconte un nouveau péché d’Israël. Pendant son campement dans les plaines de Moab, le peuple était en contact avec les Moabites et les Madianites qui avaient cherché à le perdre par les malédictions de Balaam. Le passage Nombres 31.16 nous apprend que ce fut cet homme qui, en passant à son retour chez les Madianites, leur donna le conseil de travailler à séduire Israël par l’impureté et l’idolâtrie, ce qui attirerait sur lui le courroux de Dieu plus sûrement que toutes les malédictions qu’il aurait pu lui-même prononcer.

Plusieurs critiques pensent que ce récit provient de deux sources qui n’étaient pas entièrement d’accord, l’une attribuant la séduction d’Israël aux Moabites (versets 1 à 5 ; jéhoviste), l’autre aux Madianites (versets 6 à 18 ; élohiste) ; la première parlant d’un supplice infligé par Moïse, d’après l’ordre de l’Éternel ; la seconde d’une plaie envoyée par l’Éternel lui-même. Nous ne contestons pas que chaque source n’ait pu avoir conservé quelques traits qui lui sont particuliers ; mais nous verrons que les différences prétendues peuvent se résoudre sans difficultés.

1 Et Israël demeurait à Sittim : et le peuple commença à se livrer à l’impureté avec les filles de Moab.

Sittim : les acacias, ou Abel-Sittim : la prairie des acacias, d’après Nombres 33.49. Ce dernier passage montre que cet endroit était l’une des extrémités du campement ; c’était donc l’un des points où la rencontre avec les voisins était la plus fréquente.

Les filles de Moab. Moab était le peuple le plus rapproché ; mais nous avons vu Nombres 22.4, combien les Madianites habitant cette contrée étaient intéressés aussi à la ruine d’Israël. Nombres 33.49 prouve même que c’était d’eux que partait le complot de sorte que l’on ne doit pas s’étonner de voir, verset 6, une fille madianite prendre part à son exécution.

2 Et elles invitèrent le peuple aux sacrifices de leur dieu ; et le peuple mangea et se prosterna devant leur dieu.

Elles invitèrent… L’impureté faisait partie des cultes idolâtres, très particulièrement chez les peuples orientaux.

Leur dieu : Baal-Péor, une divinité dont la représentation était on ne peut plus indécente. Les sacrifices offerts en son honneur étaient suivis de banquets profanes et de pratiques obscènes.

3 Et Israël s’attacha à Baal-Péor, et la colère de l’Éternel s’enflamma contre Israël.

Baal-Péor. Baal : Seigneur, est le nom du dieu suprême (probablement le soleil) adoré chez tous les peuples cananéens, les Ammonites l’appelaient Moloch : roi ; les Moabites, Camos : le dominateur, quand ils l’adoraient en qualité de dieu de la guerre.

Péor : épithète de sens inconnu. Ce nom désignait aussi la ville consacrée à ce dieu (Beth-Péor Deutéronome 3.29, à huit kilomètres à l’est de la plaine du Jourdain où campait Israël) et encore la montagne sur laquelle son sanctuaire était élevé (Rosch-happeor, Nombres 23.28).

S’attacha à : le terme hébreu a quelque chose d’ignoble ; il désigne la participation aux orgies commises en l’honneur du dieu. Cet acte d’idolâtrie, sans exemple dans le récit du voyage des Israélites au désert, était d’autant plus coupable qu’il était commis par la nouvelle génération au moment où elle allait entrer dans la Terre promise. Aussi a-t-il laissé une trace profonde dans la mémoire du peuple (Josué 22.17 ; Osée 9.10 ; Psaumes 106.28).

Et la colère de l’Éternel s’enflamma. Les parallèles Nombres 11.33 ; Nombres 14.37 ; Nombres 16.22 ; Nombres 16.46, montrent qu’il ne s’agit pas seulement d’un mouvement intérieur en Dieu, mais d’une colère manifestée par un phénomène sensible, qui n’a pu être que la plaie mortelle dont il est parlé versets 8 et 9.

4 Et l’Éternel dit à Moïse : Prends tous les chefs du peuple, et pends les [coupables] devant l’Éternel, à la face du soleil, et l’ardeur de la colère de l’Éternel se détournera d’Israël.

Prends : réunis-les pour t’assister dans l’exécution qui doit avoir lieu.

Pends les coupables. Il semble au premier coup d’œil que le pronom les ne puisse désigner que les chefs du peuple ; mais le verbe prendre au commencement du verset ne convient pas à ce sens et montre que ceux-ci sont des aides que Dieu donne à Moïse (verset 5). Le mot les se rapporte donc à l’expression le peuple (verset 1) et désigne ceux du peuple qui s’étaient rendus coupables.

Le verbe traduit par pendre signifie probablement démembrer, disloquer (Genèse 32.25 ; 2 Samuel 21.6 ; 2 Samuel 21.9 ; 2 Samuel 21.13). On a traduit crucifier, empaler ; mais ces supplices n’étaient pas en usage chez les Juifs ; il ne s’agit pas non plus de les pendre vivants ; car le verset 5 montre que les coupables devaient être tués (par le glaive) avant d’être pendus et exposés (Deutéronome 21.22-23).

À la face du soleil : en un lieu découvert et en plein jour, afin que tout le peuple fût témoin de ce châtiment exemplaire. Les cadavres devaient être retirés avant la nuit (Deutéronome 21.22-23).

Et l’ardeur de la colère… Le fléau cessera.

5 Et Moïse dit aux juges d’Israël : Tuez chacun ceux de ses gens qui se sont attachés à Baal-Péor.

Aux juges d’Israël : les juges institués Exode 18.19-26, auxquels les chefs de tribus devaient livrer les coupables et qui avaient à prononcer la sentence.

Ceux de ses gens : les Israélites soumis à sa juridiction (Exode 18.21). Cette exécution était la satisfaction donnée à la sainteté de l’Éternel et devait faire cesser la plaie.

6 Et voici qu’un homme des fils d’Israël arriva et amena vers ses frères une Madianite, sous les yeux de Moïse et sous les yeux de toute l’assemblée des fils d’Israël, qui pleuraient à l’entrée de la Tente d’assignation.

Et voici… Quand venait de commencer ou allait commencer l’exécution de ces ordres, survint un fait inouï et qui paraissait impossible.

Et amena… Les autres Israélites, pour se livrer à l’idolâtrie et à la débauche, s’étaient rendus au sanctuaire de Péor. Mais celui-ci pousse l’impudence jusqu’à introduire l’étrangère dans le camp même de l’Éternel.

Qui pleuraient : sur le péché commis et la plaie qui en était la punition.

À l’entrée de la Tente. Il semble que ce fut devant le sanctuaire même que le coupable osa passer pour se rendre à sa demeure.

Phinées : qui se trouvait parmi ceux qui menaient deuil.

7 Voyant cela, Phinées, fils d’Éléazar, fils d’Aaron le sacrificateur, se leva du milieu de l’assemblée et prit une lance dans sa main. 8 Et il entra après l’homme d’Israël dans l’arrière-tente, et il les perça tous les deux, l’homme d’Israël et la femme, par le ventre. Et la plaie s’arrêta parmi les fils d’Israël.

Dans l’arrière-tente (koubba). Ce mot, dérivé de l’arabe, où il signifie endroit voûté (d’où par l’intermédiaire de l’espagnol notre mot alcôve), désigne cette partie de la tente reculée qui, chez les riches Bédouins, sert d’appartement aux femmes et de chambre à coucher.

Cet acte de Phinées n’était point l’accomplissement d’un devoir officiel ; c’était l’inspiration subite d’une sainte indignation. Il est resté comme un exemple sur lequel les Juifs ont basé ce qu’on a appelé le droit des zélotes, en quelque sorte la loi de Lynch israélite, d’après laquelle tout israélite, en cas de mépris flagrant de l’honneur de Dieu, peut intervenir sans jugement contre le coupable.

Et la plaie s’arrêta. Ce résultat, qui devait être celui du châtiment des coupables, fut immédiatement obtenu par l’acte de Phinées ; voir l’effet tout semblable du parfum de l’encensoir d’Aaron, Nombres 16.46-47.

9 Et ceux qui moururent de la plaie furent au nombre de vingt-quatre mille.

Vingt-quatre mille : le fléau avait frappé d’une manière plus terrible que celui du chapitre 16 ; le péché était beaucoup plus grave. Paul dit 1 Corinthiens 10.8 : vingt-trois mille ; probablement d’après une forme de citation usitée chez les rabbins, qui envisageaient peut-être le vingt-quatrième millier comme comprenant tous les coupables que les juges avaient déjà fait exécuter (verset 5).

10 Et l’Éternel parla à Moïse en disant : 11 Phinées, fils d’Éléazar, fils d’Aaron le sacrificateur, a détourné ma fureur de dessus les fils d’Israël, parce qu’il a été animé de ma jalousie au milieu d’eux ; et je n’ai point consumé les fils d’Israël dans ma jalousie. 12 C’est pourquoi, déclare que je lui accorde mon alliance de paix ;

L’acte de Phinées, qui avait fait une profonde impression sur le peuple tout entier, devient l’occasion d’une glorieuse promesse.

Mon alliance de paix (comparez Ézéchiel 34.25 ; Ézéchiel 37.26) : une alliance qui, en assurant la paix entre Dieu et Phinées, garantit à celui-ci et à sa famille le maintien du privilège de la grande sacrificature.

13 et ce sera pour lui et pour sa postérité après lui l’alliance d’un sacerdoce perpétuel, parce qu’il a été jaloux pour son Dieu, et qu’il a fait propitiation pour les fils d’Israël.

Un sacerdoce perpétuel. La charge de souverain sacrificateur avait été conférée à Aaron et à ses fils après lui ; Aaron avait laissé deux fils, Eléazar et Ithamar et Eléazar avait déjà succédé à son père. Phinées reçoit ici la promesse que lui et ses descendants occuperont cette charge à perpétuité (autant qu’elle durera). C’est ce qui est arrivé, malgré une interruption à l’époque des juges, durant laquelle la ligne d’Ithamar occupa pendant quelque temps, nous ignorons pourquoi, la grande sacrificature ; dès le règne de Salomon (1 Rois 2.35), la famille d’Eléazar recouvra son privilège, qu’elle posséda jusqu’au temps des Maccabées. Alors commença la dissolution de la théocratie qui se consomma sous la domination romaine et mit fin au sacerdoce héréditaire.

14 Et le nom de l’homme d’Israël tué, qui avait été frappé avec la Madianite, était Zimri, fils de Salu, prince d’une maison patriarcale des Siméonites.

L’acte de Phinées était d’autant plus remarquable que les deux coupables étaient des personnages de haut rang, l’un prince d’une des principales subdivisions de la tribu de Siméon ; l’autre, fille d’un prince madianite.

15 Et le nom de la femme tuée, de la Madianite, était Cozbi, fille de Tsur, chef de tribu, [c’est-à-dire] de maison patriarcale, chez les Madianites.

Chef de tribu. Le terme ummoth était celui par lequel étaient désignées les tribus madianites (Genèse 25.16) ; il est expliqué par le terme correspondant chez les Israélites : maison patriarcale.

Tsur est appelé prince au verset 18. Il est rangé parmi les rois de Madian que battirent les Israélites (Nombres 31.8).

16 Et l’Éternel parla à Moïse, en disant : 17 Traitez les Madianites en ennemis, et tuez-les ;

Cet ordre montre que les Madianites étaient les vrais instigateurs du complot qui avait failli perdre les Israélites, comme ils l’avaient été de celui par lequel Balaam avait été appelé pour les maudire (Nombres 22.4, note). Le chapitre 31, où est racontée la guerre d’extermination contre les Madianites, forme la suite naturelle de ce récit.

On voit que le récit n’offre aucune des incohérences qu’on y a trouvées.

18 Car ils vous ont traités en ennemis en vous séduisant par leurs ruses au moyen de Péor, et au moyen de Cozbi, fille d’un prince de Madian, leur sœur, tuée le jour de la plaie survenue à l’occasion de Péor.