Apocalypse 0.0 comparé dans 29 versions de la Bible.
Les « Louis Segond » | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Les Bibles d'étude | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Les « autres versions » | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Lemaîtstre de Sacy (1701) | Apocalypse 0.0 (SAC) | APOCALYPSE DE SAINT JEANL’apocalypse, ou le livre des révélations faites à saint Jean l’Évangéliste, lorsqu’il était exilé dans l’île de Patmos, ne contient presque autre chose que l’histoire de ce qui s’était passé depuis le premier avènement de Jésus-Christ, et les prophéties de ce qui doit arriver jusqu’à la consommation des siècles ; et cela sous des figures, des emblèmes et des allégories qui en rendent l’intelligence difficile, et le sens obscur et presque inintelligible ; mais, entre ce grand nombre de figures et d’hiéroglyphes difficiles à entendre, et à appliquer même à des choses qui sont déjà arrivées, il ne laisse pas d’y avoir non-seulement des instructions très-propres à nourrir et à soutenir la foi des fidèles, et des avertissements terribles et capables de réveiller l’assoupissement de ceux qui vivent dans le dérèglement et dans l’amour des biens et des plaisirs de ce monde ; on y fait sentir la grandeur et la magnificence de la béatitude promise à ceux qui seront fidèles à Jésus-Christ et les horreurs et les châtiments épouvantables qui attendent ceux qui lui seront infidèles ; on y décrit les combats et l’antipathie qu’il y aura jusqu’à la fin du monde, entre les habitants de Jérusalem, c’est-à-dire les élus de Dieu, et ceux de Babylone, c’est-à-dire le démon et ses enfants ; on y établit presque partout la divinité de Jésus-Christ, son règne éternel, et le triomphe de ses disciples, la résurrection générale, la gloire des saints et la majesté de la toute-puissance de Dieu. Les trois premiers chapitres ne sont pas si obscurs que les suivants ; saint Jean y exhorte à la fidélité des sept Églises d’Asie, qu’il avait gouvernées longtemps, et y parle de ce qui s’y passait alors ; il y loue les uns, et y menace les autres. Le quatrième chapitre et les suivants contiennent les prophéties de l’avenir, sous des figures et des hiéroglyphes obscurs et cachés, et prédisent la destruction du règne de l’idolâtrie et l’établissement de celui de Jésus-Christ, mais tout cela d’une manière obscure et mystérieuse ; et ce qui cause cette obscurité, c’est que l’on y apporte comme des histoires passées, celles qui n’arriveront que longtemps après ; qu’on y décrit avec une magnificence extraordinaire des événements très-médiocres, et le renversement de quelques monarchies, comme on ferait celui de toute la nature ; que l’apôtre y copie les anciens prophètes, et se sert souvent de leurs expressions, et qu’il y fait fréquemment des allusions aux ustensiles et aux ornements du temple de Jérusalem ; qu’il y décrit d’abord en général des choses qu’il rapporte ensuite dans tous leurs détails. Jusqu’au chap. XIX inclusivement, toutes les prophéties semblent regarder le renversement de l’empire romain idolâtre, l’établissement paisible et tranquille de l’Église ; et les trois derniers, qui sont certainement les plus obscurs, contiennent des prophéties qui prédisent le règne de l’antechrist et le jugement dernier. Au reste, on peut dire que ce livre n’est pas moins admirable par les mystères qu’il contient que par l’élévation et la majesté de ses expressions ; que son obscurité ne vient que de la faiblesse de notre intelligence, et du peu de connaissance que nous avons des rapports qu’elles peuvent avoir avec les événements qui y sont décrits : c’est la pensée de saint Denis d’Alexandrie, rapportée par Eusèbe, Hist., lib. VII, cap. XX ; et c’est ce qui a fait dire à saint Jérôme, Lettre à Paulin, que ce livre renferme autant de mystères qu’il y a de paroles, mais qu’ils nous sont cachés ; saint Irénée, avant eux, lib. V, cap. XXX, avait dit la même chose, et saint Augustin le dit ensuite. (Voyez de Civit. Dei, lib. XX, cap. VII et VIII, et in Psalm., LXIV et CXXXVI.) Tous les anciens Pères, à la réserve d’un très-petit nombre, ont reconnu saint Jean l’Évangéliste pour l’auteur de ce livre, et l’ont compris au nombre des Écritures canoniques. (Voyez saint Justin, Dialog. cum Tryphon. ; saint Irénée, lib. IV, cap. XXXVII et L, et lib. V, cap. XXX, rapporté par Eusèbe, lib. V, cap. VIII ; Tertullien, lib. de Prœscript. et contr. Marcion. lib. IV ; saint Clément d’Alexandrie, Stromat., lib. VI ; Origène, Periarchon, lib. I, et tract. XII sur saint Matthieu, et cité par Eusèbe, Hist., lib. VI, cap. XIX ; saint Cyprien, Epist. V, Epist. XXV, Epist. LI, et lib. de Lapsis.) (Voyez Hippolyte, lib. de Consummat. seculi. ; Optat, lib. II, n. 6 ; la troisième conférence de Carthage ; saint Épiphane, Hœres. LI ; saint Hilaire, Prolog. in Psalm., et saint Augustin, de Doctr. christ., lib. II, cap. VIII.) Il a été reçu et mis au nombre des livres saints dans les catalogues des conciles de Carthage, III, can. XLVIII, ann. 397, et can. XXIV, ann. 419 ; dans les conciles de Rome, sous Innocent Ier et sous Gélase, ann. 494 ; dans le quatrième concile de Tolède, can. XXII, ann. 633 ; et par le concile de Trente, sess. IV, de Canon. Script. Il est vrai qu’il a été omis dans le catalogue du concile de Laodicée, et dans celui de saint Cyrille de Jérusalem, et que saint Jérôme, Epist. ad Dardan., qui le reçoit, convient, ainsi qu’Eusèbe, que plusieurs ne le recevaient pas ; que Gaïus, ancien prêtre de Rome, le rejette comme l’ouvrage de Cérinthe, et que c’est sans doute sur le témoignage de ce prêtre que saint Denis d’Alexandrie a dit que plusieurs attribuaient ce livre à cet hérétique, quoique ce Père ne convînt pas avec lui des erreurs dont il accusait cet ouvrage. (Voyez Eusèbe, Hist., lib. III, cap. XXII, et lib. VII, cap. XX.) Tertullien, aux deux endroits cités ci-dessus, soutient l’autorité de ce livre contre Cerdon et contre Marcion, qui le rejetaient ; et Philastrius, évêque de Bresse, Hœres., XIV, met au nombre des hérétiques ceux qui ne veulent pas reconnaître son autorité. On croit que saint Jean l’Évangéliste écrivit ce livre lorsqu’il était relégué dans l’île de Patmos, comme nous l’avons dit, l’an 94 de l’ère vulgaire, soixante et un ans après la mort de Jésus-Christ, deux ans environ avant son Évangile, et quatre ans avant ses trois Épîtres. Eusèbe dit que ce fut sous la persécution de Domitien, Hist., lib. III, cap. XIV. | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Grande Bible de Tours (1866) | Apocalypse 0.0 (GBT) | L’APOCALYPSE | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Darby (1885) | Apocalypse 0.0 (DBY) | Introduction à l’Apocalypse22 chapitres1. Généralitésa) ProphétieSeul livre prophétique du Nouveau Testament, l’Apocalypse constitue la clef de voûte de la parole de Dieu. De même que la Bible commence par une révélation concernant le passé (Gen. 1), elle s’achève avec une révélation au sujet de l’avenir. Les jugements de Dieu occupent une place importante dans ce texte très solennel de l’Apocalypse ; il s’agit pourtant d’un livre très beau, qui nous permet de découvrir l’accomplissement des voies de Dieu jusqu’à la gloire éternelle. Comme toutes les prophéties bibliques, le thème de l’Apocalypse n’est pas facile à comprendre. Pour cette raison, on appelle parfois cet écrit, bien à tort, « le livre aux sept sceaux ». De nombreux chrétiens le négligent. Dans l’Ancien et le Nouveau Testament, une pensée fondamentale ressort de la prophétie biblique : l’avènement, encore futur, du Seigneur Jésus pour dominer sur la création entière, de même que les circonstances qui précèdent cette venue, particulièrement en relation avec Israël, le peuple terrestre de Dieu. En revanche, l’assemblée du Dieu vivant, corps de Christ, n’est pas mentionnée dans les prophéties de l’Ancien Testament. Elle fait l’objet d’un mystère divin qui n’est révélé que dans le Nouveau Testament (comp. Eph. 3.2-11). De plus, dans les prophéties du Nouveau Testament, l’assemblée ne tient qu’un rôle secondaire. Compagnie céleste, elle n’attend pas les événements de la fin, mais la venue du Seigneur Jésus pour chercher les siens, et cet enlèvement des croyants peut survenir à tout moment (comp. Apoc. 22.7, 12, 20). Or les prophéties de la Bible, celles de l’Apocalypse aussi, concernent presque exclusivement les temps situés après l’enlèvement de l’Église. Au cours des âges, divers essais ont été faits pour interpréter l’Apocalypse, et cela de différentes manières. Les représentants d’une école orientée vers le passé voient dans ce livre le combat de la chrétienté grandissante contre la Rome païenne. La lutte se termine par la victoire de la foi. D’autres exégètes se penchent sur l’histoire et veulent trouver, au moyen de ce texte, une description de toute la période du christianisme. Cette manière d’expliquer les choses était populaire surtout à l’époque de la Réforme : Luther par exemple voyait dans le pape l’Antichrist. Les adeptes de la méthode spiritualiste (intellectuelle) considèrent l’Apocalypse comme un livre intemporel qui décrit par un langage symbolique la lutte entre le bien et le mal. Afin d’interpréter correctement ce livre, le lecteur doit considérer les chapitres 4 à 22 comme se rapportant à des événements futurs (voir : 2. Son but et son sujet). Les Pères de l’Église avaient déjà reconnu en partie ce principe. L’Apocalypse est l’aboutissement de toutes les prophéties bibliques. Son contenu demeure incompréhensible à celui qui ne connaît pas les prophètes de l’Ancien Testament, particulièrement Ézéchiel et Daniel. Les paroles du Seigneur en Matthieu 24 et 25 et les deux épîtres de l’apôtre Paul aux Thessaloniciens s’avèrent également nécessaires pour saisir le contenu du dernier livre de la Bible. Le langage de l’Apocalypse est en grande partie symbolique. L’explication de telles figures ne peut être trouvée qu’en relation avec toutes les Saintes Ecritures, mais plus particulièrement avec la prophétie dans son ensemble ; Pierre écrit en effet « qu’aucune prophétie de l’écriture ne s’interprète elle-même » (2 Pierre 1.20). b) Son auteur et sa dateAvec l’Apocalypse nous sommes en présence du seul livre du Nouveau Testament qui mentionne explicitement Jean comme auteur. On y trouve quatre fois son nom (chap. 1.1, 4, 9 ; 22.8). Déjà Justin Martyr (env. 100-165), Irénée (env. 140-220) et le canon de Muratori (fin du 2e siècle) attestent la paternité de l’apôtre Jean, auteur du quatrième évangile et de trois épîtres. Irénée rapporte en outre que Jean écrivit l’Apocalypse vers la fin du règne de Domitien. Cet empereur romain exerça le pouvoir entre 81 et 96. Selon le verset 9 du chapitre 1, Jean était exilé sur l’île de Patmos, à quelque 75 km de la côte d’Asie mineure. Depuis cet endroit, vers l’an 95, l’apôtre écrivit la révélation de Jésus Christ, obéissant ainsi au commandement de Dieu. Certes, concernant l’auteur du texte, des divergences d’opinion sont apparues, en particulier depuis Dionysius, évêque d’Alexandrie et disciple d’Origène (seconde moitié du 3e siècle). Des doutes étaient émis en raison des différences entre l’Apocalypse et les autres écrits de l’apôtre Jean quant à l’enseignement, en raison aussi du langage très simple, teinté d’araméen et d’hébreu, employé dans ce livre. Il n’y a cependant aucune raison fondée de douter que l’apôtre Jean soit l’auteur de l’Apocalypse. c) Ses destinatairesRemarquons, au début et à la fin de l’Apocalypse, le caractère typique d’une lettre. A la suite des paroles d’introduction, nous trouvons la salutation : « Jean, aux sept assemblées qui sont en Asie : Grâce et paix à vous, de la part de celui qui est, et qui était, et qui vient » (chap. 1.4). Comme la plupart des épîtres du Nouveau Testament, le livre se termine par : « Que la grâce du Seigneur Jésus Christ soit avec tous les saints. » Vouloir tirer la conclusion que l’Apocalypse n’est adressée qu’aux sept assemblées d’Asie mineure mentionnées au début du texte serait méconnaître l’intention du Saint Esprit. Les derniers mots de ce livre, adressés à tous les saints, démentent déjà une telle pensée. Mais l’introduction aussi montre clairement que la révélation est destinée à l’ensemble des chrétiens. Tous ceux qui lisent ou entendent les paroles de cette prophétie sont appelés bienheureux. Expression de la perfection divine, le nombre sept des assemblées d’Asie mineure (chap. 1.11 et chap. 2 et 3) évoque précisément l’Église (ou l’Assemblée) entière. 2. Son but et son sujetDès le premier verset, Dieu révèle son intention et mentionne déjà les événements qui seront décrits dans tout le livre : « Montrer à ses esclaves les choses qui doivent arriver bientôt ». Au centre de ces faits futurs, le lecteur discerne la personne de Jésus Christ, le Fils de Dieu et le Rédempteur. Dans le premier chapitre, nous voyons le juste Juge, et dans le dernier, Celui qui vient bientôt. De plus, tout au long de l’Apocalypse, le Seigneur Jésus est celui qui agit. La clé de la division de l’Apocalypse est donnée par le texte lui-même. Nous lisons : « Ecris donc
L’expression « les choses que tu as vues » se rapporte à la vision des versets 12 à 18 du chapitre 1 : le Seigneur Jésus se tient comme juge de son assemblée, au milieu des sept lampes d’or. « Les choses qui sont » ne peuvent concerner que les sept épîtres aux assemblées des chapitres 2 et 3 ; ces églises représentent, symboliquement, l’ensemble de la chrétienté depuis le début jusqu’à la fin de son histoire. « Les choses qui doivent arriver après celles-ci », c’est-à-dire les événements futurs suivant l’enlèvement de l’Assemblée sont décrites à partir du chapitre 4.1. Jean entend les paroles : « Monte ici, et je te montrerai les choses qui doivent arriver après celles-ci. » Tout ce qui est présenté au long des chapitres 4 à 22 ne se déroulera donc qu’après la période actuelle de la grâce ; les croyants (représentés par les vingt-quatre anciens, chapitre 4.4) seront alors déjà introduits dans la gloire céleste. En lisant les chapitres 4 et 5, nous voyons d’abord Dieu en tant que Créateur et Dominateur, puis le Seigneur Jésus comme l’Agneau immolé et les croyants rassemblés dans le ciel autour du trône de Dieu. Dans la section suivante (chapitres 6 à 11), l’ouverture des sept sceaux du livre par l’Agneau, puis le retentissement des sept trompettes, déclenchent deux séries de plaies et de châtiments effroyables. La septième trompette conduit déjà à l’accomplissement du mystère de Dieu et à l’avènement de Christ dans son règne millénaire. Les chapitres 12 et 13 présentent le peuple d’Israël pendant ce temps d’épreuve, Satan précipité du ciel sur la terre, ainsi que les deux hommes forts de cette période : le chef de l’Empire romain reconstitué et l’Antichrist. Dans les chapitres 14 et 15, nous voyons deux groupes de martyrs de ces temps-là ; au chapitre 16, avec les sept coupes du courroux de Dieu, une troisième série de jugements est présentée ; le jugement sur Babylone, la chrétienté apostate, est le thème des chapitres 17 et 18 ; enfin, le chapitre 19 relate l’apparition de Christ sur la terre. Les chapitres 20 à 22 donnent des descriptions du Millénium et de l’état éternel avec le nouveau ciel et la nouvelle terre. L’Apocalypse se termine par de sérieux appels du Seigneur Jésus, adressés aux hommes en général et aux croyants en particulier. 3. Ses particularitésLes titres de Christ dans l’Apocalypse :
4. Analyse succincte de son contenu
Tiré de « Vue d’ensemble du Nouveau Testament », | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Amiot & Tamisier (1950) | Apocalypse 0.0 (AMI) | APOCALYPSE DE SAINT JEANL’attribution de l’Apocalypse à l’apôtre saint Jean est fondée, comme l’authenticité des autres écrits néotestamentaires, sur le témoignage des Pères et écrivains ecclésiastiques des premiers siècles. Saint Justin, saint Irénée, Clément d’Alexandrie, Tertullien, le Canon de Muratori sont très nets à cet égard. Au milieu du IIe siècle cependant, saint Denys d’Alexandrie, impressionné par l’abus que faisaient de l’Apocalypse les millénaristes (Voir la note sur XX, 1-6), en refuse la paternité à saint Jean et influence quelque temps la tradition orientale ; mais dans la suite, l’unanimité se refait sur le nom de l’apôtre, comme en Occident où elle n’a jamais été entamée. L’Apocalypse se donne explicitement comme l’œuvre de saint Jean : I, 1, 4, 9 ; XXII, 8. L’auteur jouit évidemment sur les Églises d’Asie auquel il adresse son écrit (I – III) d’un crédit et d’une autorité exceptionnelle, ce qui s’accorde très bien avec la tradition sur son séjour à Éphèse. Il y a entre l’Apocalypse, le quatrième Évangile et les épîtres johanniques une parenté indéniable : de part et d’autre le Christ est appelé le Verbe, l’agneau, le pasteur ; de part et d’autre on rencontre la comparaison de l’eau vive, le recours à des expressions caractéristiques : vie, lumière, vaincre, garder un précepte, témoigner, être véridique ; de part et d’autre on assiste à un conflit dramatique entre la lumière et les ténèbres et un rôle essentiel est attribué à l’Esprit-Saint. Personne n’hésiterait sur l’unité d’auteur si n’apparaissaient aussi des différences : la langue de l’Apocalypse est heurtée, parfois incorrecte, moins pure que celle de l’Évangile ; le style a moins d’aisance. Mais ces particularités tiennent sans doute au genre littéraire si spécial de l’Apocalypse, et aussi à ce que saint Jean l’a rédigée lui-même dans les circonstances difficiles de son séjour à Patmos, tandis que pour l’Évangile il a probablement recouru à un secrétaire, plus expert que lui dans le maniement de la langue grecque (Voir l’Introduction à l’Évangile de saint Jean). A quoi il faut ajouter que l’œuvre d’un faussaire n’aurait pas réussi à s’imposer ; c’est ainsi que l’Église a rejeté les Apocalypses apocryphes de Paul et de Pierre. D’après le témoignage de saint Irénée, l’Apocalypse a été écrite à la fin du règne de Domitien (81-96) ; la quatorzième année de ce règne, précisent Eusèbe et saint Jérôme, donc en 94 ou 95, quelques années avant l’Évangile. Jean, après avoir, selon Tertullien, subi sans dommage à Rome le supplice de l’huile bouillante, avait été envoyé en exil à Patmos (I, 9), où il était peut-être astreint au travail des mines. De là, il envoie à sept Églises de la province d’Asie (le chiffre 7 symbolise sans doute l’Église universelle) un message d’encouragement et d’espérance. Le conflit entre l’Église et l’Empire, qui s’était manifesté une première fois sous Néron, vient de rebondir d’une manière plus redoutable, par suite de la prétention de Domitien à se faire adorer et à exiger de tous la participation au culte de Rome et d’Auguste. L’Empire en se divinisant lui-même entend utiliser le sentiment religieux à des fins politiques. Les chrétiens ne peuvent que se refuser à cette idolâtrie ; ils vont donc faire figure de mauvais citoyens et d’opposants irréductibles ; ils se trouvent engagés dans une lutte sans merci et sans issue apparente. De plus, les Églises d’Asie n’ont pas toutes gardé leur ferveur première et elles sont en butte à des tendances hérétiques, d’ailleurs assez mal définies. C’est à cette situation angoissante et complexe que saint Jean va faire face dans le message dramatique et grandiose de l’Apocalypse où, en vrai fils du tonnerre (Marc III, 17 ; Luc IX, 49, 54), il va décrire le combat gigantesque du Christ et de l’Église contre Satan et toutes les forces du mal, et annoncer avec une indéfectible assurance la victoire du Rédempteur. Le genre apocalyptique, qui nous étonne et nous déroute, était familier aux Juifs et aux chrétiens convertis du judaïsme, par certains chapitres d’Isaïe (XXIV, XXVII), le livre de Daniel et de nombreux écrits non canoniques : Hénoch, Jubilés, psaumes de Salomon, IVe livre d’Esdras, Apocalypses de Baruch, Abraham, Moïse, etc. Ce genre n’est pas de soi obscur (apocalypse signifie révélation), mais il comporte un symbolisme violent et pas toujours cohérent, des images convenues et hyperboliques, une curieuse mystique des nombres. Les visions se terminent souvent dans la perspective de la consommation finale et du jugement dernier, sans intervalles chronologiques marqués, à la manière des anciens prophètes. Des animaux fantastiques et monstrueux symbolisent des collectivités ; toute la nature est associée aux événements décrits. L’auteur glisse facilement d’un symbole à un autre, sans prendre la peine de les accorder : le Christ est un fils d’homme, un agneau, un pasteur, un cavalier terrible, l’époux de l’Église ; l’Église elle-même est tour à tour une femme, un temple, une cité, une fiancée, etc. Les nombres ont une signification assez constante : trois indique un caractère divin ; quatre a un caractère cosmique (les quatre vents) ; sept symbolise la perfection ; trois et demi et six l’imperfection ; douze la plénitude et la stabilité. Chercher dans l’Apocalypse la description anticipée des événements actuels serait en méconnaître totalement le but ; les visions qui s’y succèdent sont, pour une bonne part, parallèles et simultanées et embrassent toute la vie de l’Église jusqu’à la fin des temps. C’est du moins l’interprétation qui nous paraît la plus probable. Il y a cependant un point d’appui dans les événements récents (persécutions de Néron et de Domitien), envisagés comme types des luttes qui suivront ; de même, pour l’avenir, la chute de l’Empire romain annoncée par saint Jean symbolise la défaite de tous les adversaires de l’Église. L’Apocalypse est par excellence l’Évangile du Christ ressuscité ; nulle part ailleurs peut-être sa divinité et son triomphe ne sont aussi fortement affirmés. Sa victoire, acquise en droit par la résurrection et l’ascension, se réalise peu à peu en fait, en attendant son retour glorieux. Un souffle intense de foi, de confiance et d’espoir traverse ces prophéties mystérieuses, à la fois « palais de cristal et puits de ténèbres » (Huby). Il s’en dégage une leçon essentielle et qui restera toujours actuelle : le devoir pour tout chrétien de rendre témoignage au Christ, parmi les tribulations et les persécutions, au besoin par le martyre, mais avec la certitude de la victoire finale. L’Église militante et l’Église triomphante ne font qu’un ; saint Jean les distingue à peine, tant le passage de l’une à l’autre est assuré, grâce au sacrifice rédempteur de l’Agneau. | ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Langues étrangères |