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Romains 14
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Romains 14

Les divergences au sujet des aliments

Faites accueil à celui qui est faible dans la foi, sans entrer avec lui dans des discussions. L’un mange de tout, l’autre seulement des légumes ; le premier ne doit pas mépriser son frère, ni celui-ci juger celui-là. Ce n’est pas votre affaire de juger le serviteur d’autrui ; le jugement appartient à son Maître, qui est puissant pour l’affermir (1-4).

Les divergences au sujet des jours fériés

Celui-ci considère tel jour comme plus sacré que tel autre, tandis que pour celui-là tous les jours sont égaux. Que chacun ait une conviction entière et personnelle. Celui qui observe le jour le fait pour le Seigneur ; de même celui qui mange de tout et celui qui ne mange pas de tout, car ils rendent grâces à Dieu (5, 6).

Vivre et mourir pour le Seigneur, loi de la vie chrétienne

Nul ne vit, nul ne meurt pour lui-même. Nous sommes au Seigneur, qui nous a acquis par sa mort et sa résurrection (7-9).

Dieu le seul Juge

Tu n’as pas à juger ton frère, car nous devons tous comparaître devant le tribunal de Dieu, selon la parole du prophète. Chacun rendra compte pour soi-même (10-12).

1 Quant à celui qui est faible dans la foi, accueillez-le sans décisions de controverses.

Les rapports entre les forts et les faibles en la foi 14.1 à 15.13

Versets 1 à 12 — Exhortation aux deux partis à se respecter mutuellement

L’apôtre vient de présenter le commandement de l’amour fraternel comme l’accomplissement de toute la loi (Romains 13.8-10).

C’est ce qui l’amène peut-être à penser à ce groupe de chrétiens de Rome qui mettaient leur conscience à se refuser certains aliments et à observer certains jours et qui étaient exposés par là même à méconnaître l’importance bien plus grande du commandement de l’amour, tandis que, d’autre part, les chrétiens plus éclairés pouvaient être entraidés, par des discussions avec les premiers, à transgresser ce commandement.

C’est peut-être aussi la recommandation de « ne pas prendre soin de la chair » (Romains 13.14), qui conduit l’apôtre à parler de chrétiens qui paraissaient pratiquer cette règle par leur abstinence.

Quoi qu’il en Soit, Paul avait été informé de la situation intérieure de l’Église de Rome, des divisions dont elle était menacée par les divergences de vues entre les « forts » et les « faibles ». C’est ce qui l’oblige à traiter le sujet de leurs relations réciproques. Il abordait ainsi une application spéciale des principes qu’il avait posés touchant les rapports entre chrétiens (Romains 12.9 et suivants).

Celui qui est faible dans la foi, celui dont la foi est faible sur un point particulier, accueillez le ; montrez-vous bienveillants à son égard. Cette exhortation s’adresse à toute l’Église.

Les faibles n’étaient donc qu’une petite minorité. Il n’est pas probable que Paul leur ait, le premier, appliqué cette épithète de faibles.

On les désignait ainsi dans l’Église de Rome et Paul adopte cette désignation parce qu’elle correspondait à la vérité. Ces chrétiens, qui se faisaient des scrupules de manger de la viande et se croyaient tenus d’observer certains jours, étaient réellement faibles dans la foi ; ils n’avaient pas compris tout le conseil de Dieu, ni cru à la plénitude de sa grâce ; ils ne saisissaient pas la glorieuse liberté dont jouit l’enfant de Dieu, après que Christ l’a affranchi des servitudes légales (Galates 5.1 et suivants ; Colossiens 2.20).

Mais ils étaient sincères dans leur erreur et ils ne faisaient pas des abstinences et des observances auxquelles ils se soumettaient pour leur compte personnel, une règle pour tous, ni une condition du salut.

Si tel avait été le cas, Paul les aurait combattus énergiquement, comme il avait fait pour les judaïsants qui troublaient les Églises de Galatie (Galates 3.1 et suivants), comme il fit plus tard pour les faux docteurs de Colosses (Colossiens 2.8, suivants).

Lui, si sévère et inflexible à l’égard de ceux qui prétendaient imposer l’observation de la loi et établir leur justice par les œuvres, en anéantissant la grâce, lui qui pétrissait ces judaïsants des noms de « faux apôtres » et de « séducteurs » (2 Corinthiens 11.13) et traitait leur enseignement de « doctrines de démons » (1 Timothée 4.1), nous le trouvons ici plein du plus tendre support envers ces âmes faibles et timorées qui s’affligeaient seulement de voir leurs frères sans scrupules à l’égard de ce qu’ils estimaient défendu au chrétien. Il réprouve avec vivacité les jugements sévères dont ils étaient l’objet. Il les prend sous sa protection et plaide en leur faveur auprès des forts (comparez Romains 15.1), recommandant a ceux-ci de les supporter avec charité, de condescendre à leur infirmité, de les aimer comme des frères.

Quelles leçons l’exemple de l’apôtre donne aux chrétiens de tous les temps !

Les opinions varient sur l’origine et la race des faibles, les uns voient en eux d’anciens païens, les autres des Juifs. Les premiers se fondent sur le fait que la loi de Moïse n’interdit pas l’usage de toute viande (verset 2), mais seulement celui de la chair de certains animaux (Actes 10.14), et en concluent que les faibles sont des païens, conduits par des vues dualistes à regarder la matière comme mauvaise par elle-même.

Les autres considèrent les faibles comme des chrétiens d’origine juive, parce qu’ils faisaient une distinction entre les jours (verset 5) ; observer des jours de fête et le sabbat en particulier, demeurait la préoccupation persistante de ceux qui avaient été élevés sous la loi. Cette dernière opinion nous parait la plus vraisemblable.

On ne peut nier qu’il y avait dans l’Église de Rome une minorité judéo-chrétienne. Les faibles se recrutaient dans son sein. Sous l’influence d’idées d’origine païenne, beaucoup de Juifs en étaient venus à condamner l’usage de la viande et même du vin (verset 21). Tel était le cas des esséniens, ces ascètes qui formaient des colonies de moines sur les bords de la mer Morte et qui s’étaient répandus dans beaucoup de contrées.

Les faibles de Rome n’étaient cependant pas des esséniens, car ceux-ci condamnaient aussi le mariage et faisaient de leurs abstinences une question de principe. Paul aurait été obligé de les combattre comme les faux docteurs de Colosses (Colossiens 2.20 et suivants).

Ce qui prouve aussi que les faibles étaient des chrétiens d’origine juive, c’est la manière dont l’apôtre invoque en leur faveur l’exemple de Christ qui, pour eux, « s’est fait serviteur de la circoncision » (Romains 15.8). Il faut remarquer enfin qu’ils n’osaient manger de la viande parce qu’ils estimaient cet aliment impur en soi, tandis que certains membres de l’Église de Corinthe (1 Corinthiens 8) étaient retenus par la crainte que la viande achetée sur le marché ne provint de bêtes sacrifiées aux idoles.

Les derniers mots du verset, par lesquels l’apôtre caractérise l’accueil qu’il recommande de faire au faible, sont traduits par la plupart : « sans discussions d’opinions ». Mais le premier mot grec est le substantif d’un verbe qui signifie : juger, décider entre des opinions, des partis ; le second est rendu imparfaitement par « opinions ». Il signifie proprement le dialogue, la discussion qu’un homme a avec lui-même ou avec d’autres.

L’apôtre veut dire : que les forts s’abstiennent, en accueillant les faibles, de juger leurs pensées, leurs délibérations, leurs hésitations (Philippiens 2.14), ou de trancher les questions controversées.

2 L’un a la foi pour manger de tout ; l’autre, qui est faible, ne mange que des légumes.

L’un (grec) croit manger de tout, il a une foi assez ferme pour manger de tous les aliments, sans distinction.

L’autre (grec) étant faible, mange des légumes. Il s’abstient de viande, afin de maintenir la chair dans la dépendance de l’esprit, ou par crainte de consommer des aliments impurs.

3 Que celui qui mange ne méprise point celui qui ne mange pas ; mais aussi que celui qui ne mange pas ne juge point celui qui mange, car Dieu l’a accueilli.

Celui qui mange… qui ne mange pas,… il faut sous-entendre « de tout ».

Le motif invoqué : car Dieu l’a accueilli, pourrait être opposé tout à la fois au mépris du fort pour le faible et au jugement téméraire que le faible porte sur le fort ; l’apôtre adresserait son exhortation à l’un et à l’autre.

Cependant la suite (verset 4) montre que l’apôtre a plus spécialement en vue le faible et son penchant à juger celui qui use de sa liberté de chrétien.

C’est donc seulement de celui qui mange qu’il dit : Dieu l’a accueilli ; il lui a fait grâce et l’a destiné au salut et à la vie éternelle. La conduite de Dieu envers nous doit toujours être la mesure de notre conduite envers nos frères.

4 Qui es-tu, toi qui juges le serviteur d’autrui ? C’est pour son propre maître qu’il se tient debout ou qu’il tombe. Mais il sera maintenu debout, car le Maître est puissant pour le maintenir debout.

Grec : À son propre Seigneur il se tient debout ou tombe mais il sera maintenu debout, car le Seigneur est puissant pour le maintenir debout.

Le Seigneur est la leçon de Codex Sinaiticus, B, A, C.

D, Majuscules portent : Dieu.

Le verbe se tenir debout est souvent rendu par subsister devant Dieu (Romains 11.20 ; Luc 21.36 ; Apocalypse 6.17).

Juger ton frère n’est pas ton affaire, c’est celle de son Maître.

Il sera maintenu debout, ajoute l’apôtre, parlant le langage de la charité, bien différent de celui de l’orgueil qui juge et qui condamne, même sous prétexte de prendre intérêt au salut du prochain.

5 Celui-ci, en effet, estime un jour plus qu’un autre jour ; celui-là estime tous les jours égaux. Que chacun soit pleinement persuadé dans son propre entendement.

Grec : L’un juge un jour à côté d’un jour, l’autre juge chaque jour.

C’est ici une seconde pratique au sujet de laquelle les chrétiens de Rome différaient d’opinion et devaient apprendre à se supporter.

Il s’agit du sabbat, des nouvelles lunes et d’autres fêtes auxquelles des chrétiens convertis du judaïsme ne pouvaient se résoudre à renoncer.

L’apôtre ne se prononce pas entre les deux pratiques opposées pour condamner absolument l’une et approuver l’autre sans réserve. Il veut que chacun soit libre d’agir selon sa conscience, sans être jugé par les autres.

Tout ce qu’il demande, c’est que chacun soit pleinement persuadé, pour ne pas agir sous l’impulsion d’autrui ou sous le joug de traditions qu’il suivrait sans réfléchir. Il sait qu’en cherchant à se faire une conviction personnelle, éclairée par l’Esprit de Dieu, le faible s’affranchira graduellement de ses préjugés, de ses vains scrupules et acquerra une connaissance toujours plus complète de l’Évangile, par laquelle il sera mis en possession des privilèges de la liberté chrétienne.

6 Celui qui observe tel jour l’observe pour le Seigneur. Et celui qui mange, c’est pour le Seigneur qu’il mange, car il rend grâces à Dieu. Et celui qui ne mange pas, c’est pour le Seigneur qu’il ne mange pas, et il rend grâces à Dieu.

Grec : … Observe au Seigneur,… mange au Seigneur, … ne mange pas au Seigneur ; ils sont à leur Maître, c’est pour lui qu’ils vivent, en vue de lui qu’ils agissent.

Dans quelques documents, on lit encore : et celui qui n’observe pas le jour n’observe pas au Seigneur. Cette phrase manque dans la plupart des majuscules.

L’action de grâces à Dieu sanctifie pour l’un sa viande, pour l’autre ses légumes (verset 2 ; comparez 1 Corinthiens 10.25-31, notes).

Il faut remarquer une nuance. « Celui qui mange de tout mange pour le Seigneur, car il rend grâces à Dieu ; » son action de grâces prouve que c’est bien pour le Seigneur qu’il mange. « Celui qui ne mange pas ne mange pas pour le Seigneur, et il rend grâces à Dieu ; » par sa modération et sa frugalité même, il témoigne à Dieu sa reconnaissance.

Ce qui importe, dans les choses qui ne sont pas clairement commandées ou défendues c’est que nous fassions tout dans un esprit de filiale obéissance à Dieu et rien en suivant notre volonté propre.

7 En effet, nul de nous ne vit pour lui-même et nul de nous ne meurt pour lui-même.

L’apôtre explique et motive (en effet) son affirmation précédente que les chrétiens observent les jours, s’abstiennent et mangent « pour le Seigneur », en constatant que le chrétien ne s’appartient plus ; dans la vie comme dans la mort, son être entier est consacré au Seigneur.

S’il vit, c’est pour servir le Seigneur ; s’il meurt, c’est pour aller auprès du Seigneur (1 Thessaloniciens 5.10 ; Philippiens 1.20). Son unique préoccupation est de servir le Seigneur (2 Corinthiens 5.6-9).

Soit donc que nous vivions, soit que nous mourions, nous appartenons au Seigneur ; nous ne sommes pas seulement à lui par le désir de notre cœur, mais nous lui appartenons (grec nous sommes de lui) en fait, par une relation réelle fondes sur l’œuvre du salut, que Christ a accomplie pour nous et par laquelle il nous a acquis comme sa propriété (verset 9).

Par même moyen aussi nous est prescrite la règle qu’il nous faut tenir à vivre et à mourir, c’est à savoir qu’encore qu’il nous prolonge la vie en continuelles misères et langueurs, nous n’appétions (cherchions) point toutefois de sortir d’ici devant le temps ; et au contraire, s’il nous rappelle au milieu de la fleur de notre âge, que nous soyons toujours prêt de partir
— Calvin
8 Car soit que nous vivions, nous vivons pour le Seigneur ; soit que nous mourions, nous mourons pour le Seigneur. Soit donc que nous vivions, soit que nous mourions, nous appartenons au Seigneur. 9 Car c’est pour cela que Christ est mort et qu’il a repris vie : pour être le Seigneur des morts et des vivants.

Car c’est pour cela que Christ est mort et a repris vie, est la leçon de Codex Sinaiticus ; B, A, C.

D, Itala, Irénée ont : a vécu et est mort et est ressuscité. C’est une correction, née du désir de faire une place à la vie terrestre de Jésus.

Il a repris vie (grec), il a vécu ; mais, après : il est mort, ce verbe ne peut s’entendre que de la vie du Christ ressuscité et glorifié.

Par sa mort, Jésus nous a rachetés et acquis à lui (1 Corinthiens 6.19 ; 2 Corinthiens 5.14-15). L’empire qu’il a fondé par sa mort, il l’étend par sa vie dans la gloire, par l’action qu’il exerce en se servant de ses disciples pour conquérir le monde (Matthieu 28.19 ; Éphésiens 4.8 ; Philippiens 2.8-11).

Il est ainsi le Seigneur des morts, de ceux qui ont achevé leur carrière terrestre, et des vivants, de ceux qui poursuivent encore leur course ici-bas.

10 Or toi, pourquoi juges-tu ton frère ? Ou toi aussi, pourquoi méprises-tu ton frère ? Car tous nous comparaîtrons devant le tribunal de Dieu.

Christ étant notre Maître est aussi notre seul Juge.

Or, s’il en est ainsi, pourquoi juges-tu ton frère ? dit l’apôtre au faible, puis se tournant vers le fort : ou toi aussi, de ton côté, pourquoi méprises-tu ton frère ?

Jugement et mépris sont également déraisonnables, car nous comparaîtrons tous devant le tribunal de Dieu.

Quelques documents ont : tribunal de Christ, conformément à l’idée plus généralement exprimée dans le Nouveau Testament que Christ remplira l’office de juge suprême (2 Corinthiens 5.10 ; Matthieu 25.31 ; Jean 5.27 et suivants) ; mais la grande majorité des manuscrits portent de Dieu.

Ce jugement, qui sera rendu devant le tribunal de Dieu, sera infaillible. C’est le seul jugement équitable, parce que celui qui le prononcera connaîtra toutes les circonstances et les appréciera selon sa justice et sa miséricorde parfaites. La perspective de ce jugement définitif nous interdit de porter sur notre prochain des jugements téméraires (verset 4 ; comparez Matthieu 7.1).

Dans ce passage comme dans 2 Corinthiens 5.10, l’apôtre enseigne que les chrétiens seront tous soumis au jugement dernier. D’après d’autres paroles du Nouveau Testament, il semble que leur privilège soit précisément de « ne pas venir en jugement. » (Jean 3.18 ; Jean 5.24 ; 1 Corinthiens 11.31).

Ces déclarations toutefois ne signifient pas que le chrétien n’ait plus rien à faire avec le jugement suprême, mais seulement qu’il peut envisager ce jugement avec la sérénité de celui qui est assuré en Christ de n’être point condamné. Pour lui, le jugement sera l’acte solennel par lequel Dieu reconnaîtra qu’il est parfaitement sauvé en Christ (comparez 5.9-11).

11 Car il est écrit : Je suis vivant, dit le Seigneur, tout genou fléchira devant moi, et toute langue donnera gloire à Dieu.

Ésaïe 45.23 ; comparez Philippiens 2.9-11.

12 Ainsi chacun de nous rendra compte pour lui-même.

La plupart des documents portent : rendra compte à Dieu.

Ce complément est omis par B et deux majuscules Il a été probablement ajouté au texte primitif.

La pratique de l’Église romaine, qui impute aux uns les œuvres surérogatoires des autres et constitue avec les mérites des saints le trésor des indulgences qu’elle octroie aux pécheurs, est en contradiction flagrante avec le principe énoncé dans ce verset.

13 Ne nous jugeons donc plus les uns les autres, mais décidez plutôt ceci : ne pas placer de pierre d’achoppement ni d’occasion de chute devant votre frère.

Ne pas scandaliser

Ne nous jugeons pas les uns les autres, mais appliquons notre perspicacité à ne donner aucun scandale à notre frère. Rien n’est impur en soi ; mais une chose devient impure pour qui la croit telle. Attrister ton frère, en prenant un aliment, est contraire à la charité. Ne cause pas de la sorte la perte de celui pour qui Christ est mort. Que votre liberté ne soit pas calomniée. Le royaume de Dieu ne consiste pas à pouvoir manger et boire de tout ; il est dans la justice, la paix et la joie que donne le Saint-Esprit. Servir Christ de cette manière nous assure l’approbation de Dieu et des hommes (13-18).

Rechercher la paix et l’édification mutuelle

Ne pas détruire l’œuvre de Dieu pour une question d’aliments. Si tout est pur, un aliment devient impur pour celui qui le mange avec une mauvaise conscience. Tu fais bien de t’abstenir de tout ce qui scandalise ton frère (19-21).

Conclusion

Tu as une foi plus éclairée : garde-la pour toi en présence de Dieu. Heureux qui n’a pas à se juger pour savoir ce qu’il peut approuver. Celui qui a des doutes, quand il mange un aliment, pèche. Tout ce qui ne procède pas de la foi est péché (22, 23)

Exhortation aux forts : les égards dûs aux faibles (13-23)

Dans ce verset qui fait transition à la suite, Paul s’adresse encore aux deux partis par un jeu de mots hardi, il leur montre sur quoi ils doivent faire porter leur perspicacité et leur penchant à juger : ne nous jugeons plus les uns les autres, mais (grec) jugez plutôt ceci, de ne pas placer au frère une pierre d’achoppement, c’est-à-dire un obstacle où il pourrait se heurter et qui le ferait trébucher, ou une occasion de chute (ce dernier mot manque dans A), soit un moyen de le faire tomber tout à fait. Cette recommandation s’adresse plus spécialement aux forts.

Le fort est involontairement et inévitablement un danger pour le faible, en ce qu’il peut devenir pour lui une cause de chute.
— Schlatter (Comparer 1 Corinthiens 8.7-13, notes.)
14 Je sais et je suis persuadé dans le Seigneur Jésus que rien n’est impur par soi-même ; seulement, si quelqu’un pense qu’une chose est impure, pour lui elle est impure.

Paul exprime par deux verbes : je sais et je suis persuadé, sa conviction qu’aucune chose créée par Dieu n’est impure par soimême.

Cette conviction, il l’a dans le Seigneur Jésus, non seulement en s’appuyant sur telle de ses déclarations (Marc 7.15, etc.), mais en se pénétrant de son esprit et en demeurant dans sa communion.

Il n’en est pas moins convaincu, que si un chrétien estime dans sa conscience tel aliment impur, cet aliment est impur pour lui (comparer verset 20).

15 Car si, à cause d’un aliment, ton frère est contristé, tu ne te conduis plus selon l’amour. Ne fais pas périr, par ton aliment, celui pour qui Christ est mort.

Le verset 14 était une parenthèse ;

Le verset 15 donne le motif (car) de l’exhortation du verset 13 : ne fournir aucun scandale à nos frères. Le texte reçu introduit ce verset par or ; c’est une fausse correction, provoquée par l’impossibilité de relier verset 15 au verset 14 par car.

L’amour, tel est le grand principe en vertu duquel tout chrétien évite de contrister son frère, c’est-à-dire de le scandaliser dans sa conscience.

16 Que l’on ne médise donc pas de votre bien.

Grec : Que votre bien ne soit pas blasphémé.

Par votre bien beaucoup d’interprètes entendent la doctrine évangélique, la foi chrétienne ou le royaume de Dieu, le souverain bien des chrétiens.

Ceux qui seraient portés à le blasphémer à en dire du mal, seraient dans ce cas les gens du dehors, le monde. La recommandation de l’apôtre signifierait : N’allez pas par vos disputes sur des aliments exposer le christianisme à être mal jugé et calomnié par les infidèles. Mais si Paul pensait à des jugements portés par des païens il aurait dû le dire.

Le contexte fait plutôt penser au jugement que les faibles portent sur les forts. S’adressant à ceux-ci, comme dans les versets précédents, Paul leur dit : N’exposez pas votre bien de croyants affranchis de la loi et possesseurs de la liberté chrétienne à être blâmé, apprécié défavorablement par les faibles.

17 Car le royaume de Dieu, ce n’est pas le manger et le boire ; mais il est justice et paix et joie dans l’Esprit-Saint.

Le royaume de Dieu n’est pas le manger et le boire : manière concise et vive de dire que le règne de Dieu, ce saint état de communion vivante avec lui, de vraie liberté dans l’obéissance constante aux directions de son Esprit, ne consiste pas dans la licence de manger et de boire ce que bon nous semble, sans égards pour les scrupules de nos frères.

Son principe constitutif, c’est l’action de l’Esprit-Saint qui seul nous introduit dans la communion avec Dieu et nous y maintient et qui produit en nous la justice, c’est-à-dire le pardon des péchés et la sainteté de la vie, la paix avec Dieu d’abord (Romains 5.1), puis avec nos frères et une sainte joie qui affranchit l’âme de ses pénibles anxiétés (1 Thessaloniciens 1.6) et la dispose à la bienveillance envers le prochain.

Ces sentiments, entretenus par le Saint-Esprit, se manifestent d’abord dans les rapports de l’âme avec Dieu ; mais ils ont ensuite leur répercussion dans nos relations avec nos frères (comparez Galates 5.22).

18 Car qui sert le Christ en cela est agréable à Dieu et approuvé des hommes.

Grec : Celui qui sert le Christ en ceci, dans la justice, la paix et la joie qui sont l’essence du royaume de Dieu, est agréable à Dieu, puisque ces dispositions sont l’œuvre de son Esprit et il est impossible qu’il ne soit pas approuvé des hommes.

19 Ainsi donc, recherchons ce qui contribue à la paix et à l’édification mutuelle.

Conclusion (ainsi donc) sous forme d’exhortation à travailler à l’édification mutuelle (grec l’édification, celle les uns pour les autres).

Ce mot d’édification renferme une image dont le sens est souvent arbitrairement restreint. Édifier signifie « bâtir ».

Dans le Nouveau Testament, ce terme est appliqué d’abord au développement intérieur du chrétien : sentiment, connaissance, volonté, tout doit croître en lui et s’élever harmonieusement pour faire de lui un saint temple (1 Corinthiens 3.16 ; 1 Corinthiens 8.1 ; 1 Corinthiens 14.3 ; Actes 20.32).

Mais l’image est aussi et surtout employer pour figurer le développement de l’Église dans la construction de laquelle les chrétiens entrent comme des pierres vives (1 Pierre 2.5 ; 1 Corinthiens 3.10 ; Éphésiens 2.21-22 ; Actes 9.31).

À cette œuvre d’édification collective tous doivent concourir ; l’édification doit être vraiment mutuelle.

20 Ne détruis pas l’œuvre de Dieu pour un aliment. Toutes choses, il est vrai, sont pures ; mais toute chose devient mauvaise pour l’homme qui en mange étant scandalisé.

L’œuvre de Dieu dans ton frère, sa foi, sa vie chrétienne. Ce que Dieu a édifié, ne le démolis pas (comparez verset 15, note).

Mais une chose devient mauvaise… (grec) mais c’est mauvais pour l’homme qui mange moyennant achoppement, dans des circonstances où il y a achoppement ; cela doit probablement se rapporter au faible qui, en mangeant, agit contre sa conscience et est ainsi scandalisé.

D’autres le rapportent au fort, qui donne du scandale en mangeant. Ils invoquent le verset suivant en faveur de ce sens.

Mais l’explication que nous admettons se justifie mieux d’après le contexte général : (comparez verset 14) Paul explique comment L’œuvre de Dieu peut être détruite par un aliment, quand même toutes choses sont pures.

21 Il est bien de ne pas manger de viande, de ne pas boire de vin, de n’user de rien par quoi ton frère est scandalisé.

Il est bien de ne pas manger de viande ni boire de vin (grec) ni en quoi ton frère s’achoppe.

Le plus simple est de sous-entendre : user d’une chose par laquelle le faible est scandalisé. Paul pense à quelque aliment autre que la viande et le vin, ou à telle jouissance permise en elle-même.

La charité conseille au chrétien de s’abstenir de tout ce qui pourrait être une occasion de chute pour un frère quand même il aurait pour soi la liberté d’en user.

Ce principe trouve, aujourd’hui encore, son application dans l’usage des boissons alcooliques et dans mainte autre circonstance où la liberté chrétienne doit être sacrifiée aux égards dus à la conscience des faibles.

La plupart des éditeurs modernes se fondant sur Codex Sinaiticus, A, C, omettent les mots qui, dans B, D, majuscules, se lisent à la fin du verset : ou est scandalisé ou est faible. Codex Sinaiticus porte : est contristé au lieu de s’achoppe.

22 Tu as la foi ; garde-la par devers toi, devant Dieu. Heureux celui qui ne se juge pas soi-même en ce qu’il approuve.

Codex Sinaiticus, B, A, C portent : la foi que tu as.

Cette leçon est généralement rejetée.

Tu as la foi… met le croyant en évidence pour l’opposer à celui qui doute (verset 23).

Tu as une foi éclairée et forte ; garde-la (grec aie-la) par devers toi, pour toi-même, dans ton cœur, devant Dieu. Ne crains pas d’en rien perdre parce que, par amour pour ton frère, tu auras renoncé à certaines libertés, que ta conviction te donnait.

Ce n’est pas le sacrifice de cette conviction elle-même que Dieu te demande. Garde-la devant Dieu qui la connaît et ne te presse pas de l’afficher à tout propos en public.

Le chrétien reçoit la foi et les lumières qu’elle lui procure d’abord pour lui-même, pour qu’elle lui donne accès auprès de Dieu et le fasse vivre dans sa communion. S’il en use à cette fin, il ne sera pas entraîné par elle à s’enorgueillir, à mépriser ou à scandaliser ses frères plus faibles et moins éclairés.

Heureux celui qui ne se juge pas soimême, c’est-à-dire qui n’a pas à examiner anxieusement sa ligne de conduite pour savoir si ce qu’il approuve est bien, s’il prend le bon parti. Il s’agit de celui qui a une conviction éclairée et ferme.

L’apôtre lui fait sentir son avantage, auquel il oppose (verset 23) la triste condition de « celui qui doute ». La traduction : « celui qui ne se condamne pas dans ce qu’il approuve », est inadmissible.

23 Mais celui qui doute est condamné s’il mange, parce que cela n’est pas venu de la foi ; or, tout ce qui ne vient pas de la foi est péché.

L’apôtre, qui a plaidé jusqu’ici la cause des faibles, afin qu’ils ne fussent point juges ni méprisés par les forts, n’entend point excuser ni encourager les hésitations et les variations d’un esprit indécis.

Sans la foi, qui donne une ferme conviction, il n’y a pas de vraie moralité. Ce qui le prouve, c’est le cas spécial dont Paul s’est occupé dans ce chapitre et auquel il revient dans les premiers mots de notre verset.

Voici un homme qui doute s’il y a, oui ou non, péché à manger de certains aliments et qui pourtant en mange : il est condamné par le fait même qu’il a mangé ; à son propre point de vue, il a commis un péché. Cet homme agira-t-il mieux dans un cas plus grave, lorsque, en présence d’une tentation plus redoutable, il sera sans conviction et sans force ?

L’apôtre indique ce qui rend coupable l’acte de celui qui mange dans ces conditions : cet acte ne vient point de la foi. Puis il proclame ce principe général : tout ce qui ne vient point de la foi est péché.

Il faut se garder, si l’on veut saisir la pensée de l’apôtre dans sa profondeur et rester dans le vrai, de donner ici au mot foi le sens d’une simple conviction individuelle et subjective, de la persuasion où l’on est, à chaque moment donné (verset 5), sans égard à l’inspiration qui a formé cette conviction.

Le mot de foi n’est appliqué dans l’Écriture qu’à la confiance du cœur en Dieu, à l’obéissance à sa volonté qu’il nous a révélée. Pour autant que cette foi suppose des idées et forme des convictions, elle les marque de son empreinte.

La foi, dans notre passage, n’est donc pas une conviction quelconque. C’est de la foi chrétienne qu’il est question dans tout ce chapitre (comparez verset 1, note).

La faiblesse des faibles provient précisément du vague et de l’obscurité de leur foi en Christ. Cette foi est faible relativement à son objet, Christ : elle ne saisit pas le salut qu’il apporte, l’affranchissement qu’il procure dans toute leur étendue. Elle l’est aussi quant à ses fruits : elle ne donne ni certitude, ni paix, ni joie ; elle n’éclaire ni ne vivifie la conscience ; elle abandonne l’homme, dans chaque cas donné, à toute l’incertitude, à toutes les fluctuations d’une volonté indécise.

Quand il obéit ainsi à ses propres inspirations et n’est pas conduit par l’Esprit de Dieu, tout ce qu’il fait, même ses bonnes œuvres, porte le triste caractère du péché.

La foi seule, par laquelle l’homme sort de lui-même pour vivre en Dieu, dans son obéissance, dans son amour, donne à ses œuvres leur caractère moral.

Remarque bien cette déclaration universelle contre toutes les œuvres faites sans la foi et garde-toi des fausses gloses inventées par plusieurs docteurs.
— Luther
Dieu regarde l’obéissance intérieure du cœur, de laquelle seule dépend toute l’estime de nos œuvres. Or quelle obéissance y a-t-il en cela, quand l’homme entreprend quelque chose, de laquelle il n’est point certain qu’elle soit approuvée de Dieu ? Le mot de foi est ici mis pour une résolution arrêtée en l’esprit et ferme certitude… qui soit conçue de la vérité de Dieu et en procède. Or comme l’esprit fidèle ne se peut en nulle part assurément arrêter qu’en la parole de Dieu, il faut que, par ce passage, toutes inventions de servir Dieu et toutes œuvres qui ont pris leur origine dedans le cerveau des hommes s’en aillent en fumée. Car quand Paul condamne tout ce qui n’est pas de la foi, il rejette tout ce qui n’est point fondé sur la Parole de Dieu et approuvé en elle. Et cependant cela seul ne suffit pas, que ce que nous faisons soit approuvé par la Parole de Dieu ; il faut encore que l’esprit étant muni de cette certitude et ferme persuasion, s’emploie à l’œuvre avec allégresse. Ainsi donc, le commencement ou fondement de bien vivre et droitement est, qu’étant appuyés sur la Parole de Dieu, afin que nos esprits ne soient en branle d’un côté et d’autre, nous marchions assurément et hardiment où que Dieu nous appelle.