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Psaumes 72
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Psaumes 72

Le roi juste et la gloire de son règne

Dans cette prière, destinée sans doute à être adressée à Dieu par le peuple, en faveur de ses rois, nous voyons se dessiner devant nous l’image du roi idéal, tel qu’Israël pouvait l’attendre, ensuite des promesses faites à David (2 Samuel 7.1). C’est un roi juste (versets 1 à 4), dont l’influence sera éternellement bénie (versets 5 à 7), dont l’empire sera universel (versets 8 à 11). Il ne devra son autorité qu’à la bienveillance et à la miséricorde qu’il témoignera aux malheureux (versets 12 à 15). Aussi les vœux de prospérité que son peuple forme pour lui dépassent-ils tout ce que l’on a jamais pu souhaiter au meilleur des bienfaiteurs (versets 16 et 17).

On a cru devoir jadis, à cause de la note du verset 20, attribuer le psaume à David, priant pour Salomon. Mais nous ne trouvons ici ni les images vives et nombreuses familières à David, ni les élans ardents de ses prières, ni ses appels répétés au Dieu d’Israël. Le nom de Dieu n’est prononcé qu’une fois (verset 1) ; l’allure tranquille et majestueuse de ce beau psaume rappelle plutôt la nature calme et réfléchie de Salomon. Si l’on voit en ce dernier l’auteur de cette prière, il faut admettre qu’il l’a composée à l’usage de son peuple, au moment où les débuts de son règne éveillaient de grandes espérances. Et il est certain que le caractère du psaume convient à un tel règne. Tandis que les grands psaumes de David (110, 18, 68 ,2) parlent de lutte et de victoire sur les puissances ennemies, l’idéal de Salomon est un règne de paix ; la vertu à laquelle il aspire est moins la valeur guerrière que la justice, qui protège l’innocent et relève l’opprimé (1 Rois 3.9) (d’Orelli).

Mais quelle distance pourtant entre Salomon et le roi de notre psaume ! Aussi est-ce avec raison, dit encore d’Orelli, qu’après le déclin rapide de sa gloire, ce psaume a été envisagé comme une prophétie relative à un lointain avenir. Fruit de la promesse, il a contribué à son tour à former en Israël l’attente messianique. Nous attendons encore son plein accomplissement. Si le roi lui-même, juste et sauveur, est déjà là, nous demandons encore chaque jour que son règne vienne.

1 De Salomon.
Ô Dieu, donne tes jugements au roi
Et au fils du roi ta justice !

Le roi juste (1-4)

Donne tes jugements. La fonction primitive et principale d’un roi est de rendre la justice, il doit être dans ses jugements l’interprète de Dieu même (1 Rois 3.28 ; Ésaïe 11.3 ; Psaumes 45.7 ; Romains 13.4-5).

Au fils du roi. Les monarques de l’antiquité aimaient à se dire rois par droit de naissance et à rappeler qu’ils l’étaient, pour ainsi dire, avant que de naître.

2 Qu’il juge ton peuple avec justice
Et selon le droit les affligés ;

Tes affligés. Le possessif tes doit être remarqué. Dieu envisage ceux qui souffrent injustement comme étant particulièrement siens (Psaumes 69.27).

3 Que les montagnes portent pour le peuple [le fruit de] paix,
Et les collines aussi, sous un règne de justice.

Le fruit de la paix. L’hébreu schalom, exprime, en même temps que l’idée de paix, celle d’une prospérité que rien ne vient troubler. De belles cultures couvrant les pentes des montagnes sont le signe d’une administration juste et sage.

4 Qu’il fasse droit aux affligés du peuple,
Qu’il délivre les enfants du pauvre
Et qu’il humilie l’oppresseur !

Les enfants du pauvre : voués, semble-t-il, par leur naissance à une misère sans remède.

5 Que l’on te craigne, tant que durera le soleil
Et que luira la lune, d’âge en âge.

Influence éternellement bénie de ce roi (5-7)

Que l’on te craigne. Si le pronom te se rapporte à Dieu, ce passage signifie que la justice, fidèlement rendue, fera régner dans le peuple la crainte de Dieu, et cela, non d’une manière passagère, mais à toujours. C’est ainsi que l’entendent, entre autres interprètes, Calvin et Delitzsch. Mais, comme tous les versets qui précèdent et qui suivent celui-ci parlent du roi, il semble plus naturel d’envisager aussi ce vœu comme le concernant. Dans ce cas, ce trait, véritablement messianique, accentue le caractère prophétique du psaume entier.

6 Qu’il soit comme la pluie qui descend sur un pré fauché,
Comme les averses qui arrosent la terre.

Qu’il soit comme la pluie. L’image de campagnes fertiles (verset 3) est toujours devant les veux du psalmiste ; la bénédiction qu’attire sur le pays un roi juste est comparée à la pluie qui fait repousser l’herbe après qu’on l’a fauchée. David, dans le tableau qu’il fait, avant de mourir, d’un règne juste, emploie des images analogues (2 Samuel 23.4).

7 Qu’en ses jours le juste fleurisse,
Et que la paix abonde jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de lune.

La paix, toujours avec l’idée de prospérité. Comparez, verset 3.

8 Qu’il domine d’une mer à l’autre mer,
Depuis le fleuve jusqu’aux extrémités de la terre.

Empire universel (8-11)

Jusqu’aux extrémités de la terre. Comparez : Psaumes 2.8 ; Psaumes 22.28. À l’idée de la permanence d’un règne de justice s’ajoute celle d’une étendue illimitée accordée à ce royaume. D’une mer (la Méditerranée), la pensée du psalmiste se porte jusqu’à l’autre mer lointaine, qu’il se représente là où il n’y a plus de terres, et, d’autre part, du fleuve (l’Euphrate) elle va jusqu’à l’extrême occident.

9 Que les habitants du désert se prosternent devant lui,
Et que ses ennemis lèchent la poussière.

Les habitants du désert : les peuples nomades, à droite et à gauche du golfe d’Arabie, choisis à dessein pour représenter les hommes les plus sauvages et les plus indomptables.

Lèchent la poussière : posture humiliante de suppliants.

10 Les rois de Tharsis et des îles apporteront des dons,
Les rois de Schéba et de Séba offriront des présents ;

Tharsis : au sud-ouest de l’Espagne ; le point le plus éloigné du monde connu des Hébreux (voir Jonas 1.3).

Les îles : les pays découpés qui forment le bassin de la Méditerranée.

Schéba, dans l’Arabie heureuse ; contrée riche en or, dont la reine vint visiter Salomon (1 Rois 10.1).

Séba, en Éthiopie. Voir Ésaïe 43.3.

11 Tous les rois se prosterneront devant lui,
Toutes les nations le serviront. 12 Car il délivrera le pauvre qui crie à lui
Et l’affligé qui n’a personne pour l’aider.

Le roi miséricordieux (12-15)

Le secret d’un développement inouï de ce règne, c’est qu’il sera celui de la bonté et de la pitié, bien différent en cela des empires de la terre, dans lesquels les pauvres et les petits ne comptent pas.

13 Il aura pitié des malheureux et de l’indigent,
Et il sauvera la vie des pauvres.

Il aura pitié, hébreu : Il ressentira profondément avec… Comparez le terme souvent appliqué par les évangélistes à Jésus : Il fut ému de compassion, terme qui, dans le grec, désigne une vive douleur intérieure.

14 Il rachètera leur âme de la violence et de la fraude,
Et leur sang sera précieux devant ses yeux. 15 Et il vivra, et il lui donnera de l’or de Schéba ;
On priera pour lui continuellement,
Chaque jour on le bénira.

Et il vivra. C’est, pensons-nous, du pauvre qu’il s’agit ; grâce à son roi, il vivra.

Il lui donnera. Est-ce le pauvre relevé qui apporte au roi des présents ? Est-ce le roi qui enrichit le malheureux ? Cette seconde alternative est la plus probable, car comment le pauvre pourrait-il apporter de l’or ? Le roi, non content de faire droit au misérable, le met en état de vivre hors de peine. Il s’attire ainsi les bénédictions de son peuple.

16 Que les blés abondent dans le pays jusqu’au sommet des montagnes,
Que leurs épis ondoient comme les cèdres du Liban,
Et que les hommes fleurissent dans les villes comme l’herbe de la terre.

Bénédictions promises à un tel règne (16-17)

Le psalmiste lui-même formule les prières dont il vient de parler (verset 15).

Comme les cèdres du Liban. La vue de ces innombrables épis se courbant sous le vent produira la même impression que celle des forêts du Liban.

Comme l’herbe : image de fraîcheur, de beauté et d’abondance.

17 Que son nom subsiste à toujours ;
Tant que durera le soleil, que son nom se perpétue ;
Que l’on se bénisse en lui,
Et que toutes les nations le proclament heureux !

Que l’on se bénisse en lui : allusion à la promesse faite à Abraham (Genèse 22.18). Ce roi idéal sera au plus haut degré ce que Dieu avait en vue, en promettant au patriarche une postérité tellement bénie, que toutes les nations désireraient avoir part à son bonheur.

18 Béni soit l’Éternel Dieu, le Dieu d’Israël,
Qui seul fait des choses merveilleuses !

Ces paroles de louange, tout à fait indépendantes du psaume, sont de la main des scribes qui ont divisé notre recueil en cinq livres (voir Introduction). Elles forment la clôture du deuxième livre. Cette doxologie est plus développée que celle qui termine le premier livre (Psaumes 41.14). Le verset 19 est comme un écho du psaume qui précède.

19 Béni soit à jamais le nom de sa gloire,
Et que toute la terre soit remplie de sa gloire !
Amen, amen. 20 Fin des prières de David, fils d’Isaï.

Cette annotation, distincte à la fois du psaume et de la doxologie, doit avoir formé la clôture d’un ancien recueil renfermant principalement les prières de David. Des rédacteurs postérieurs ont sans doute remanié ce recueil, en y introduisant des cantiques de date plus récente (47, 48, 66, 67, 69, etc.). Ils ont laissé subsister cette annotation primitive, qui reste vraie, en ce sens que nous avons apparemment dans nos deux premiers livres, le noyau principal d’un recueil de cantiques formé peu après l’époque de David.

Si, comme nous l’avons reconnu possible, ce psaume 72 est de Salomon, on pourrait supposer avec Delitzsch que ce roi lui-même prit soin de recueillir les prières de son père ; il aurait ajouté, comme clôture du livre, ce cantique, où lui-même exposait, sous forme de prière, la vision grandiose de la royauté idéale, telle qu’il l’entrevoyait.