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Romains 10
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Romains 10

L’erreur d’Israël touchant l’abolition du régime légal

Paul souhaite le salut des Israélites ; il rend témoignage à leur zèle pour Dieu ; mais ce zèle manque de discernement. Ils méconnaissent le mode de justification établi par Dieu et ne s’y soumettent pas, car ils cherchent à se justifier eux-mêmes. Christ met fin au régime de la loi pour quiconque croit (1-4).

La justice qui vient de la foi, opposée à la justice qui vient de la loi

  1. Le salut accordé gratuitement, à la seule condition de croire du cœur et de confesser de la bouche Jésus ressuscité, le Seigneur. L’apôtre cite une parole de Moïse, qui définit la justice légale : l’homme qui accomplira les prescriptions de la loi vivra. Au contraire, la justice par la foi se définit elle-même en interdisant à l’homme de chercher à conquérir le ciel et de regarder avec effroi le séjour des morts, car c’est nier l’œuvre rédemptrice de Christ. Elle lui déclare que la parole du salut est tout près de lui, dans sa bouche et dans son cœur, car il sera sauvé s’il confesse Jésus comme le Seigneur et s’il croit que Dieu l’a ressuscité des morts (5-11)
  2. Le salut accordé à tous ceux qui croient. L’Écriture proclame que tout croyant sera sauvé. Il n’y a donc plus de différence entre le Juif et le Grec ; ils ont le même Seigneur, abondant en grâces pour tous ceux qui l’invoquent. Une parole de Joël, en effet, promet le salut à quiconque invoquera le nom du Seigneur (12-13)
1 Frères, le bon plaisir de mon cœur et ma prière à Dieu pour eux, c’est qu’ils soient sauvés.

Israël a méconnu l’avènement de la justice qui vient de la foi et qui sauve gatuitement tous les hommes (1-13)

Grec : Le bon vouloir de mon cœur et la prière (la demande) à Dieu pour eux est en salut, c’est-à-dire que bon vouloir et requête ont pour objet leur salut.

Au moment d’exposer l’erreur et la faute de son peuple, Paul proteste de son amour pour Israël. À Romains 9.1, en abordant le douloureux problème du rejet d’Israël il avait fait entendre une protestation plus véhémente encore.

Il interpelle ses lecteurs : frères, comme il le fait ailleurs quand il va exprimer une pensée qui lui tient à cœur et qu’il lui importe de faire saisir à ses lecteurs (Romains 1.13 ; Romains 7.1-4 ; Romains 8.12).

Plusieurs de ceux-ci d’ailleurs étaient, en tant que Juifs de race, spécialement intéressés à l’explication que Paul va donner du rejet d’Israël. Les vérités qu’il leur fera entendre seront rendues plus émouvantes par l’affirmation préalable de son attachement à son peuple.

Au lieu de pour eux, quelques majuscules portent : pour Israël. C’est une correction qui a été faite en vue de la lecture au culte public, où ce verset ouvrait une nouvelle péricope.

2 Car je leur rends le témoignage qu’ils ont du zèle pour Dieu mais non selon une juste connaissance ;

Voilà le motif (car) de son affection pour les Juifs : il peut leur rendre témoignage qu’ils ont du zèle pour Dieu, mais non selon une juste connaissance.

Leur amour pour Dieu, leur empressement à pratiquer sa loi, à célébrer le culte, à observer les prescriptions rituelles n’étaient pas éclairés. Le verset suivant dira en quoi ils manquaient de connaissance.

3 car ne connaissant pas la justice de Dieu, et cherchant à établir leur propre justice, ils ne se sont pas soumis à la justice de Dieu.

Ne connaissant pas… d’autres traduisent « méconnaissant » il ; il s’agit plutôt d’ignorance involontaire. Cette ignorance toutefois a pour cause première l’orgueil et l’incrédulité.

Sur la justice de Dieu, voir Romains 1.17, note ; Romains 3.21, note.

Le sens spécial de ce terme est indiqué par l’antithèse : leur propre justice.

L’idée énoncée dans ce verset sera développée dans le reste du chapitre. Elle est le second point de l’enseignement de Paul sur le rejet d’Israël. Comparez Romains 9.1, note.

4 En effet, la fin de la loi, c’est Christ pour la justification de tout croyant.

Grec : En justice à tout croyant, pour lui servir de justice, pour lui procurer gratuitement la justice.

Ce verset indique la raison (car) pour laquelle les Juifs ne pouvaient parvenir à la justice par la pratique des œuvres légales : Christ est la fin de la loi.

Les uns restreignent ce terme de loi à la loi mosaïque, d’autres l’étendent à tout le régime légal, auquel le païen lui-même était astreint par sa conscience, quand il cherchait à se sauver en obéissant à « la loi écrite dans son cœur » (Romains 2.14-16).

Comme il est question spécialement des Juifs (verset 3), on peut se demander si le sens du mot loi n’est pas limité à la législation donnée par Moïse. La même question se pose dans Romains 3.19-21 (voir les notes).

La fin peut signifier le but. C’est à Christ que tend toute l’économie légale, par ses symboles, ses types, ses commandements destinés à préparer les cœurs à recevoir Christ, en faisant naître en eux le sentiment du péché et le besoin du salut. La loi est « un pédagogue pour nous conduire à Christ » (Galates 3.24).

Mais l’ensemble de notre passage et surtout le complément : (grec) en justice à tout croyant, font plutôt penser que l’apôtre prend le mot fin dans le sens « d’abolition : » la loi a fini son ministère elle n’a plus de rôle à jouer dans l’acquisition du salut, dès l’instant où Christ apporte un nouveau moyen de justification, qui est offert à la foi. Jésus lui-même a enseigné (Luc 16.16) que la loi était une institution préparatoire et temporaire qui devait prendre fin à l’avènement du royaume de Dieu.

Le pouvoir de la loi et son ministère de condamnation cessent totalement pour ceux qui ont recours à la grâce. Paul oppose cette grande vérité à l’erreur Juive du salut car les œuvres, qui crée la propre justice (verset 3) ; puis il fera ressortir, dans versets 5-13, le contraste entre l’économie de la loi et le nouveau moyen du salut, la justice de la foi.

Mais Christ n’est la fin de la loi que pour le croyant, pour celui qui, par la foi, saisit la vraie justice et réalise, par une sanctification toujours plus complète, ce que la loi ordonne, mais ne peut donner.

5 Moïse, en effet, écrit de la justice qui vient de la loi : L’homme qui aura fait ces choses vivra par elle.

Grec : Moïse écrit de la justice qui vient de la loi : l’homme qui les aura faites (les choses que prescrit la loi) vivra par elle (par la justice).

Telle est la leçon de B, majuscules, admise par beaucoup d’exégètes.

Les éditeurs lui préfèrent généralement le texte de Codex Sinaiticus, A, B, : Moïse écrit que l’homme qui aura fait la justice qui vient de la loi, vivra par elle.

La parole citée se lit Lévitique 18.5. Comparez Galates 3.12 ; Luc 10.28. C’est là, en effet, une voie de salut, mais à condition de faire parfaitement toutes ces choses prescrites dans la loi.

Quiconque essaie sérieusement de marcher dans cette voie reconnaît bientôt, avec douleur et humiliation, qu’elle est impraticable et que, pour arriver au but : vivre, il faut prendre la voie de la grâce, que l’apôtre va opposer à la première dans les versets qui suivent.

6 Tandis que la justice qui vient de la foi parle ainsi : Ne dis pas en ton cœur : Qui montera au ciel ? c’est en faire descendre Christ ;

Dans versets 6-8, Paul emprunte plusieurs expressions à Deutéronome 30.11.14.

Dans ce passage, Moïse, après avoir énuméré les ordonnances de la loi et exhorté les Israélites à les pratiquer, ajoute, pour repousser la pensée que la volonté de Dieu est difficile à connaître et à faire : « Ce commandement, que je te prescris aujourd’hui, n’est pas quelque chose de trop élevé pour toi ni de trop éloigné. Il n’est pas dans les cieux pour que tu dises : qui montera pour nous aux cieux et l’ira prendre pour nous le faire entendre, afin que nous l’accomplissions ? Et il n’est pas de l’autre côté de la mer pour que tu dises : qui ira pour nous de l’autre côté de la mer et l’ira prendre pour le faire entendre, afin que nous l’accomplissions ? Car la parole est tout près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur, pour que tu l’accomplisses ».

Ce passage du Deutéronome, Paul ne le cite pas expressément, il ne dit pas comme au verset 5 « Moïse écrit de la justice de la foi ». C’est la justice qui vient de la foi, qui parle ainsi et se définit elle-même ; et Paul n’ajoute pas non plus qu’elle parle « en Moïse ». Les termes qu’il lui prête sont donc de simples réminiscences du passage du Deutéronome.

Au verset 8 seulement, nous avons une citation directe de Deutéronome 30.14. Il faut avoir égard à ce fait, en la question que l’on a soulevée : Paul prétend-il donner une explication des paroles de Moïse, en révéler le vrai sens caché ? Ou se sert-il seulement des termes employés par Moïse en les détournant le sachant et le voulant de leur sens primitif ?

Dans le premier cas, il tomberait sous le reproche d’interprétation arbitraire, d’exégèse rabbinique ; car dans le Deutéronome les mots : « qui montera aux cieux… qui traversera la mer ? » s’entendent de la recherche anxieuse de la volonté de Dieu, tandis que Paul les comprend des efforts de la propre justice. Il substitue à « aller de l’autre côté de la mer », descendre dans l’abîme, parce que cette image convient mieux a sa pensée.

Puis il oppose à ces efforts de la propre justice Christ et son œuvre rédemptrice, auxquels le Deutéronome ne fait aucune allusion.

Enfin, au verset 8, où nous avons une citation expresse de Deutéronome 30.14, la parole, dans le Deutéronome, signifie « le commandement » que l’israélite peut accomplir, puisqu’il l’a « dans la bouche », le récite fréquemment et « dans le cœur », c’est-à-dire l’aime et y demeure attaché.

Pour Paul, la parole, c’est la parole de la foi que nous prêchons.

D’autre part, si l’on suppose que Paul a employé tous ces termes en ayant conscience qu’il changeait leur sens, on ne comprend plus bien le but et l’utilité de ces emprunts ou de ces allusions. À quoi bon faire parler la justice de la foi dans les termes de Moïse, si elle leur donne un sens différent ?

Il nous paraît donc probable que l’apôtre n’a pas eu clairement conscience de détourner le passage du Deutéronome de son sens premier, en l’appliquant, comme il le fait, à la justice qui vient de la foi.

Cette application lui était suggérée par le fait que, dans le Deutéronome, il est question de la révélation et de la connaissance de la loi de Dieu, tout autant que de son accomplissement. Or, la révélation de la loi n’atteignait son but : créer une relation normale entre l’homme et Dieu, que par le don du salut gratuit offert à la foi.

En outre, le verset que l’apôtre cite expressément : la parole est près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur, rappelle l’admirable prophétie de Jérémie (Jérémie 31.33), qui s’est accomplie sous la nouvelle alliance par l’œuvre de la régénération.

Paul a donc pu voir, sans trop d’arbitraire, dans les paroles de Moïse, comme un pressentiment de la justice nouvelle et parfaite que l’Évangile apporterait aux hommes ; et il a trouvé ingénieux de définir la justice de la foi dans les expressions mêmes employées par le législateur d’Israël pour définir la justice de la Loi.

Sous l’alliance nouvelle, dire encore : qui montera au ciel ? chercher à mériter la vie éternelle par de bonnes œuvres, c’est faire descendre Christ du ciel, de ce ciel où il est monté après avoir accompli son œuvre rédemptrice, où il règne et d’où il communique par son Esprit à ceux qui croient en lui, la sainteté et la vie, tout ce qu’il leur faut pour parvenir au Père et avoir part à l’éternité bienheureuse (Éphésiens 2.6 ; Éphésiens 4.8).

D’autres, avec moins de raison, pensent que faire descendre Christ du ciel, c’est nier qu’il en soit déjà descendu lors de son incarnation et demander qu’il vienne encore une fois (Jean 1.17-18 ; Jean 3.13 ; Jean 6.38 ; 1 Timothée 1.15). Mais l’on peut objecter à cette explication que celui qui cherche sa justice dans les œuvres ne réclame pas la venue d’un Sauveur il croit pouvoir s’en passer ; et par là, il dépouille Christ de sa dignité de médiateur entre Dieu et les pêcheurs.

Dire encore : qui descendra dans l’abîme ? demander avec une conscience troublée par le sentiment du péché : qui nous retirera du séjour des morts ? c’est ramener Christ d’entre les morts, c’est nier que déjà il est « mort pour nos offenses et ressuscité pour notre justification », qu’il a vaincu, par sa mort et sa résurrection glorieuse, le péché et la mort, qu’il a accompli, par son sacrifice, toute l’œuvre de notre rédemption. C’est là précisément l’incrédulité que l’apôtre reproche aux Juifs.

Ainsi, ce qui a été impossible à l’homme tant qu’il n’avait que la justice de la loi, lui est offert en Christ. Par la foi, il entre en possession de tous les droits de son Sauveur, de sa justice, de sa vie. Il n’a plus, pour être justifié et sauvé, qu’a « croire du cœur et à confesser de la bouche » (verset 9).

7 ou : Qui descendra dans l’abîme ? c’est faire remonter Christ d’entre les morts. 8 Mais que dit-elle ? La parole est près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur. C’est la parole de la foi, que nous prêchons ; 9 vu que, si de ta bouche tu confesses Jésus comme Seigneur et si tu crois dans ton cœur que Dieu l’a ressuscité des morts, tu seras sauvé.

Vu que la parole du salut par la foi est près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur, tu seras sauvé, si tu confesses de ta bouche, etc.

D’autres traduisent : à savoir que et voient dans verset 9 le contenu de la parole de la foi que nous prêchons.

L’apôtre place la confession avant la foi, parce que dans la parole du Deutéronome « la bouche » est nommée avant « le cœur ». Il remonte ainsi de l’effet à la cause, de la manifestation extérieure à la conviction qui la produit.

Confesser Jésus comme Seigneur, tel est le sens de l’original, plutôt que : « confesser le Seigneur Jésus ». Cette confession implique toute l’obéissance de la foi.

Croire que Dieu l’a ressuscité des morts, c’est embrasser toute l’œuvre rédemptrice du Christ, dont sa résurrection a été le couronnement (Romains 4.25, note). Ceux qui nient la résurrection de Jésus-Christ, ou la déclarent indifférente, n’ont pas compris que ce fait, générateur de l’expérience chrétienne, est l’objet suprême de la foi qui sauve (1 Corinthiens 15.17).

10 Car c’est du cœur qu’on croit pour parvenir à la justice, et c’est de la bouche qu’on confesse pour parvenir au salut.

Grec : Car du cœur on croit pour la justice et de la bouche on confesse pour le salut.

L’apôtre transforme la déclaration du verset précèdent en un principe général. Il revient à l’ordre dans lequel les deux actes se succèdent : la foi du cœur d’abord, puis la confession de la bouche.

Justice et salut ne sont pas deux termes synonymes, qui seraient employés seulement pour imprimer à la phrase le parallélisme poétique.

Le salut est le but ; la justice, ou justification, est la condition du salut et le gage donné au croyant qu’il y parviendra (Romains 5.9 ; Romains 5.10). Car la justification qui ne produirait pas le salut c’est-à-dire la délivrance finale du péché et de la mort, ne serait pas la vraie justification.

De même, il y a corrélation entre croire et confesser : toute foi qui ne s’affirmerait pas par la confession ne serait pas une foi authentique. « J’ai cru c’est pourquoi j’ai parlé ».

L’apôtre montre de quelle importance la confession de la foi est pour l’Église et pour chaque chrétien, en nous la présentant ici comme une partie intégrante de l’œuvre du salut et en faisant de la fidélité à confesser une condition, la seule qu’il énonce, pour parvenir au salut.

C’est bien ainsi que l’entendait l’Église des premiers siècles, puisque, même dans les temps où la confession emportait le sacrifice de la vie, elle excluait de son sein ceux qui n’avaient pas le courage de rendre ce témoignage (comparez 1 Timothée 6.12 et suivants ; Hébreux 4.14 ; Hébreux 10.23).

11 En effet, l’Écriture dit : Quiconque croit en lui ne sera point confus.

Grec : Tout croyant en lui ne sera point confus.

Paul ajoute tout au texte d’Ésaïe (Ésaïe 28.16), qu’il cite pour le reste exactement d’après les Septante.

Ce mot tout a une grande importance : la gratuité du salut (versets 6-10) le rend accessible à tous les hommes. Pour l’orgueil des Juifs, ce second fait était plus difficile à accepter que le premier. L’apôtre énonce, au verset 12, le fait que le salut est offert sans distinction à tous et il montre, au verset 13 qu’il était annoncé par les prophètes.

12 Car il n’y a pas de différence entre le Juif et le Grec, car tous ont le même Seigneur, riche pour tous ceux qui l’invoquent.

La loi, qui n’avait été donnée qu’à Israël, établissait une différence entre le Juif et le Grec (Éphésiens 2.14).

Le salut gratuit met tous les hommes sur le même pied, il réunit Juifs et Grecs en un seul corps. Car (grec) le même Seigneur est de tous (comparez Actes 10.34-36), et ce Seigneur est riche pour tous ceux qui l’invoquent.

Le Seigneur, c’est Christ, comme le montrent versets 9-11, la richesse qu’il possède et confère, ce sont les dons de sa grâce (Éphésiens 4.8), l’invocation dont il est l’objet de la part des fidèles, c’est l’adoration et la prière, qui constitueraient une idolâtrie, si Christ n’était Dieu (Actes 2.21 ; Actes 7.59 ; Actes 22.16 ; 1 Corinthiens 1.2).

13 Car quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé.

Ce salut destiné à tous, à la seule condition qu’ils invoquent le Seigneur, avait été annoncé déjà par Joël 2.32.

En appliquant à Jésus-Christ cette parole que le prophète avait dite de l’Éternel, Paul montre qu’il ne le sépare pas de Dieu, dont il est la parfaite révélation. Cette dignité suprême et unique, attribuée au Fils, ressort aussi du titre de Seigneur, que lui donnent les écrivains du Nouveau Testament, car c’est par ce mot que les Septante traduisent toujours le nom de « Jéhovah » ou de « l’Éternel ».

14 Comment donc invoqueront-ils Celui en qui ils n’ont pas cru ? Et comment croiront-ils en Celui dont ils n’ont pas entendu parler ? Et comment en entendront-ils parler sans quelqu’un qui prêche ?

Le salut a été prêché à tous, mais tous ne croient pas

Le salut gratuit, accordé à quiconque invoque le nom du Seigneur, suppose que tous en reçoivent le message et que des messagers leur soient envoyés à cet effet. Leur mission a été annoncée par le prophète. Mais tous n’ont pas prêté l’oreille à l’Évangile. Ésaïe déjà se plaignait de l’accueil fait à sa prédication (v. 14-16)

L’incrédulité d’Israël est sans excuse, car il a entendu la prédication de l’Évangile et la conversion des gentils avait été prédite par les prophètes

La foi est donc produite par la prédication de Christ. Les Israélites l’ont entendue, car elle a retenti par toute la terre. Israël ne peut invoquer pour excuse l’ignorance où il était des desseins de Dieu. Moïse et Ésaïe ont annoncé que les gentils parviendraient au salut et qu’Israël demeurerait rebelle (17-21).

Les questions du verset 14 et suivants sont une conséquence (donc) de l’affirmation du verset 13. Elles donnent à l’exposé le ton d’une discussion. L’apôtre polémique contre les Juifs qui s’opposent à ce que l’Évangile soit annoncé aux païens.

Si le salut est offert gratuitement à tous les hommes, il faut que tous entendent parler du Seigneur pour être en mesure d’invoquer son nom.

Et pour qu’ils entendent parler de lui, il faut quelqu’un qui prêche (grec un prêchant).

Certains interprètes estiment que pour rendre exactement l’original, il faut traduire : « Comment croiront-ils en Celui qu’ils n’ont pas entendu ? Et comment l’entendront-ils (par la bouche de ses apôtres), sans quelqu’un qui prêche ? » Mais la traduction que nous avons conservée donne un sens plus naturel.

15 Et comment y aura-t-il des prédicateurs, s’ils ne sont pas envoyés ? Selon qu’il est écrit : Qu’ils sont beaux les pieds de ceux qui annoncent de bonnes nouvelles !

Grec : Et comment prêcheront-ils

La prédication, à son tour, suppose l’apostolat. Cet apostolat a été annoncé dans Ésaïe 52.7.

La citation présente une variante. Le texte de notre traduction est celui de Codex Sinaiticus, B, A, C, Versions égyptiennes, Pères. Les autres documents portent : « qu’ils sont beaux les pieds de ceux qui annoncent (grec évangélisent) la paix, de ceux qui annoncent de bonnes nouvelles » (grec évangélisent de bonnes choses).

Plusieurs exégètes et critiques admettent toutefois que les mots : de ceux qui annoncent la paix, ont été omis par mégarde. Paul s’écarte des Septante pour se rapprocher du texte hébreu.

Si l’on considère comme authentiques les mots : de ceux qui annoncent la paix sa citation ne se distingue de l’original que par l’absence des mots : « sur les montagnes » et le pluriel au lieu du singulier : « celui qui annonce ».

Les Septante suivent un texte tout différent : « J’arrive comme la belle saison sur les montagnes, comme les pieds de celui qui annonce (grec évangélise) une prédication de paix, comme celui qui annonce de bonnes choses…  »

Codex Sinaiticus et quelques majuscules portent l’article : les bonnes nouvelles ou les biens. Ce texte implique une allusion aux biens promis, que devait apporter le règne du Messie.

Les Juifs incrédules ne veulent pas que l’Évangile soit annoncé aux païens ; ils admettent tout au plus une propagande parmi les nations en faveur du régime légal. Paul montre, en se fondant sur les prophètes, que la prédication du salut à tous les hommes est conforme à la volonté de Dieu.

Si Israël avait été fidèle à sa vocation, il serait devenu le messager de l’Évangile auprès de toutes les autres nations. L’œuvre de la mission parmi les païens est dans l’essence de l’Évangile ; l’Église qui néglige ce devoir se suicide ou plutôt montre qu’elle est déjà morte.

16 Mais tous n’ont pas obéi à la bonne nouvelle ; car Ésaïe dit : Seigneur, qui a cru à notre prédication ?

Pour devenir l’apôtre de la bonne nouvelle auprès des gentils, Israël aurait dû, lui le premier et tout entier, accueillir l’Évangile avec foi ; mais malheureusement tous les Juifs n’ont pas obéi à la bonne nouvelle. Une faible minorité seulement a cru.

D’autres interprètes entendent par tous, tous les gentils, ou tous les hommes, Juifs et gentils indistinctement. Ils pensent que Paul fait allusion aux résultats très modestes de la prédication évangélique.

Mais l’idée de l’incrédulité d’Israël domine tout ce chapitre et les versets qui suivent montrent bien que c’est d’elle qu’il s’agit. Cette incrédulité de son peuple était le sujet de la plainte du prophète. Ésaïe 53.1, est cité conformément à la version des Septante.

L’apostrophe : Seigneur ! manque dans l’hébreu. Comparer Jean 12.38.

17 Ainsi, la foi vient de l’audition ; et l’audition se produit par la parole de Christ.

Ce verset renferme, sous forme de conclusion (ainsi), un résumé des versets 14-16 et plus spécialement la répétition des deux idées énoncées au verset 14. Il sert de transition au développement suivant, où l’apôtre montre ce qu’a d’inexcusable la conduite d’Israël.

La foi vient de l’audition et l’audition se produit par la parole de Christ. La parole de Christ est la leçon de Codex Sinaiticus, B, C, D, etc. Les autres documents portent : la parole de Dieu.

La parole de Christ est, suivant les uns, l’ordre qu’il donne à ses apôtres d’annoncer l’Évangile à tous les hommes (Matthieu 28.19) ; suivant les autres, l’enseignement de Christ, toute la révélation salutaire qu’il a apportée au monde et qui est le point de départ et le fondement de la prédication chrétienne. L’emploi du mot parole, dans versets 8 et 18, est plus favorable à ce dernier sens.

18 Mais je dis : N’ont-ils pas entendu ? Oui, certes, leur voix est parvenue à toute la terre, et leurs paroles jusqu’aux extrémités du monde.

Les questions qui suivent (versets 18 et 19) expriment les raisons que l’on pourrait alléguer encore pour excuser Israël. L’apôtre montre leur inanité.

La prédication de l’Évangile, les Juifs ne l’ont-ils pas entendue ? Oui, certes, la voix des messagers de l’Évangile est parvenue à toute la terre et leurs paroles jusqu’aux extrémités du monde.

Ces termes sont empruntés au Psaumes 19.5 Paul leur donne un sens différent de celui qu’ils ont dans leur contexte ; là il s’agit du langage « des cieux qui racontent la gloire du Dieu fort » L’apôtre ne cite pas proprement ce passage et surtout ne le donne pas comme une preuve scripturaire. L’emploi des mots du Psaume résulte d’une simple réminiscence.

19 Mais je dis : Israël ne l’a-t-il pas su ? Moïse, le premier, dit : J’exciterai votre jalousie à l’égard de ce qui n’est pas une nation ; je provoquerai votre colère à l’égard d’une nation privée d’intelligence.

L’apôtre pose une seconde question, dans laquelle il écarte encore une circonstance atténuante que l’on pourrait faire valoir en faveur d’Israël : l’ignorance où ce peuple aurait été de la destination universelle du salut et du fait que l’Évangile devait être prêché aux païens et reçu par eux.

Dans l’original on lit : Israël n’a-t-il pas su (ou connu) ?

Les interprètes sont divisés sur le complément sous-entendu de ce verbe.

Plusieurs donnent à celui-ci le sens de « comprendre » et pensent qu’il a pour régime l’Évangile.

Les Juifs l’ont entendu (verset 18), mais peut être ne l’ont-ils pas compris. La citation par laquelle l’apôtre répond à la question posée n’est pas favorable à cette explication. Elle fait allusion à la vocation des gentils ; et c’est sur ce fait que porte la question : Israël n’a-t-il pas su ?

Moïse, le premier, parce qu’il précède tous les prophètes et que les écrits qui lui sont attribués se trouvent en tête du recueil canonique.

La citation est tirée de Deutéronome 32.21, où l’on lit dans l’hébreu : « Je provoquerai leur jalousie par ce qui n’est point un peuple ; j’exciterai leur colère par une nation insensée ». Le sens de ces paroles, dans l’original, est : l’infidélité des Israélites, qui « ont excité la jalousie de Dieu par ce qui n’est point Dieu et l’ont irrité par leurs vaines idoles » (première partie de Deutéronome 32.11), sera punie par le choix que l’Éternel fera d’un autre peuple.

L’expression : provoquer la jalousie, suppose l’image des relations conjugales aux rapports de Dieu avec son peuple. Osée (Osée 1 à Osée 3) développe cette image.

Si l’Éternel à son tour provoque la jalousie d’Israël, son épouse infidèle, c’est dans l’espoir que le peuple, se sentant abandonné, éprouvera le besoin impérieux de revenir son divin époux qu’il a trop longtemps offensé. Le chapitre suivant énoncera clairement cette espérance de la conversion d’Israël.

20 Et Ésaïe s’enhardit jusqu’à dire : J’ai été trouvé par ceux qui ne me cherchaient point, et je suis apparu à ceux qui ne me demandaient pas.

Ésaïe 65.1, cité en partie d’après l’hébreu, en partie d’après les Septante.

L’hébreu porte : « J’ai exaucé ceux qui ne demandaient rien, je me suis laissé trouver par ceux qui ne me cherchaient point ».

Ésaïe s’enhardit jusqu’à dire (grec s’enhardit et dit)…

Le prophète montre sa hardiesse, non en proférant une parole qui pouvait exciter contre lui la haine de son peuple, mais en énonçant une vérité aussi inouïe.

La plupart des interprètes actuels pensent que la parole citée annonçait la conversion de la portion du peuple israélite qui était devenue infidèle au moment où le prophète écrivait. Paul aurait vu dans ces Israélites déchus un type des gentils et se serait cru ainsi autorisé à appliquer à ces derniers la promesse prophétique.

Toutefois on peut alléguer des raisons sérieuses en faveur de l’opinion que le prophète déjà pensait à la conversion des païens. Il énonce en tout cas dans cette parole la loi fondamentale du règne de Dieu : le salut est accordé comme une grâce et non comme la récompense des efforts et des mérites de l’homme.

Le prophète et l’apôtre opposent l’un et l’autre ce principe à l’orgueilleuse propre justice des Israélites.

21 Mais à l’égard d’Israël, il dit : Tout le jour j’ai tendu mes mains vers un peuple désobéissant et contredisant.

Ésaïe 65.2, cité d’après les Septante, qui ajoutent au texte hébreu : et contredisant.

Cette seconde citation à l’égard d’Israël (et non contre Israël) complète la précédente (verset 20) ; elle met en opposition la conduite d’Israël avec celle des gentils.

Tandis que ceux-ci acceptent le salut qui leur est gratuitement offert, Israël, obstiné dans les voies de la propre justice et voulant à tout prix maintenir ses privilèges, a repoussé ce salut, qu’il devait recevoir comme une pure grâce faite à tous sans distinction.

Son refus, inspiré par de tels motifs d’orgueil et d’égoïsme, est sans excuse. Dieu devait rejeter ce peuple désobéissant et contredisant qui s’était lui-même exclu du salut.

Et cependant, si justifié que soit le rejet d’Israël, il n’est pas le dernier mot de son histoire. Dieu, dont les pensées ne sont pas nos pensées (Ésaïe 55.8 ; Ésaïe 55.9), saura tirer, de la faute même de son peuple, le salut des nations d’abord et finalement celui d’Israël lui-même : c’est la grande espérance que l’apôtre exposera au chapitre suivant.