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Michée 6
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Michée 6

Les conditions morales du salut (chapitres 6 et 7)

Des magnifiques perspectives de l’avenir (chapitres 4 et 5), le prophète revient à l’état moral du peuple dans le moment présent. Cet état présent vient en effet de lui être rappelé par la pensée du jugement purificateur annoncé Michée 5.9-13 ; il développe maintenant les conditions morales du salut promis. Cette partie rappelle par son caractère lyrique, psalmique, intime, des morceaux tels que Habakuk chapitre 3 et Ésaïe chapitres 40 à 66. Elle se divise en deux sections, qui correspondent aux deux chapitres :

  1. Exhortation à la repentance et menace du jugement mérité ; ces deux idées sont développées sous la forme dramatique d’un procès entre l’Éternel et son peuple, aboutissant à la condamnation formelle de ce dernier, chapitre 6.
  2. Confession du peuple repentant et promesse du salut, chapitre 7.

Le procès de l’Éternel avec le peuple (chapitre 6)

  1. Préambule, versets 1 et 2 : le prophète annonce l’intention de Dieu de plaider contre Israël.
  2. Le procès, versets 3 à 8 :
    1. Dieu accuse. À tous ses bienfaits, Israël a répondu par la plus persistante ingratitude, versets 3 à 5
    2. le peuple, se sentant coupable, offre de satisfaire à toutes les exigences que Dieu pourra formuler, versets 6 et 7
    3. le prophète oppose à toutes ces œuvres extérieures, qu’il déclare vaines, l’obéissance sincère que la loi de Dieu réclame, verset 8
  3. L’injustice du peuple appelle un châtiment sévère et inévitable, versets 9 à 16.
1 Écoutez donc ce que dit l’Éternel : Lève-toi, plaide devant les montagnes, et que les collines entendent ta voix !

Préambule (1-2)

Voir, sur l’idée d’un procès que Dieu soutient contre son peuple, Osée 4.1, note ; comparez Ésaïe 1.18.

Le prophète commence par exhorter Israël à écouter ce que dit l’Éternel : il ordonne à son serviteur de plaider pour lui, comme son chargé d’affaires ou son avocat, contre son peuple.

Plaide devant (littéralement avec, c’est-à-dire ici : en société, en présence, de…) et non contre les montagnes (comme quelques-uns traduisent). Le verset 2 fait voir que les montagnes ne figurent pas ici comme accusées, mais comme témoins. L’accusé, c’est Israël. Les montagnes sont appelées en témoignage par l’Éternel contre le peuple, parce étant là de toute antiquité, elles ont assisté à tout ce que Dieu a fait pour Israël et ont vu comment celui-ci a, dès le commencement, répondu à ses bienfaits. Comparez le début du cantique de Moïse, imité par Michée (Deutéronome 32.1) et Ésaïe 1.2.

2 Écoutez, montagnes, et vous, immuables fondements de la terre, le procès de l’Éternel ! Car l’Éternel a un procès avec son peuple et il va plaider contre Israël.

Immuables fondements : témoins toujours présents. Comparez les collines éternelles, Genèse 49.26 ; voir aussi Deutéronome 33.15.

Le prophète obéit à l’appel divin : il s’adresse aux montagnes et les invite à assister au procès qui va s’instruire. Le début de ce discours : Écoutez, qui ouvre la dernière partie de notre livre, correspond à celui de la première partie (Michée 1.2).

Son peuple. Le droit de l’Éternel, de contester avec lui, n’est donc pas douteux.

3 Mon peuple ! Que t’ai-je fait ? En quoi t’ai-je causé de la peine ? Réponds-moi.

Le procès (3-8)

Versets 3 à 5 — Le discours d’accusation prononcé par le prophète au nom de l’Éternel

L’Éternel parle avec l’accent de l’amour attristé, demandant pour quelle cause son peuple l’a abandonné.

T’ai je causé de la peine : par des exigences excessives (Ésaïe 43.23) ou des promesses non accomplies (Jérémie 2.5 ; Jérémie 2.31). Bien au contraire, c’est Israël qui a fatigué Dieu par ses infidélités (Ésaïe 43.24).

Réponds-moi, c’est-à-dire : défends-toi, si tu le peux, en m’accusant !

4 Car je t’ai fait monter de la terre d’Égypte, je t’ai racheté de la maison de servitude, et j’ai envoyé devant toi Moïse, Aaron et Marie.

Le car suppose cette réponse sous-entendue à la question du verset 3 (en quoi t’ai-je causé… ?) : en rien, car bien plutôt je t’ai comblé de mes bienfaits !

Le verset 4 rappelle le grand bienfait auquel Israël devait son existence nationale : la sortie d’Égypte, l’acte de grâce fondamental qui renfermait implicitement toutes les grâces subséquentes (Amos 2.10 ; Jérémie 2.6). La grandeur de ce bienfait est relevée par l’expression : maison de servitude, tirée d’Exode 20.2. Puis l’Éternel rappelle le don qu’il a fait à Israël affranchi de prophètes et de médiateurs, pour être ses conducteurs à travers le désert jusqu’en Canaan : Moïse, l’homme avec qui Dieu parlait face à face comme un ami avec son ami ; Aaron, le sacrificateur, intercesseur et révélateur de la volonté divine par l’urim et le thummim ; Marie, leur sœur, celle qui entonne le cantique de louanges et qui porte Exode 15.20 le titre de prophétesse.

5 Mon peuple, souviens-toi donc du dessein qu’avait formé Balak, roi de Moab, et de ce que lui répondit Balaam, fils de Béor, de Sittim jusqu’à Guilgal, afin que tu connaisses les justices de l’Éternel.

Nouvelle preuve toute spéciale de la grâce divine envers Israël : la malédiction projetée par Balak, changée dans la bouche de Balaam en bénédiction. Cette bénédiction releva le courage d’Israël, en lui montrant que l’Éternel était tellement avec lui que même ses ennemis étaient obligés de le bénir.

Les mots : de Sittim à Guilgal, dépendent grammaticalement du verbe répondit (bien que la réponse de Balaam n’ait pas été donnée pendant le trajet de l’une de ces localités à l’autre). Ils rappellent les bienfaits accordés aussitôt après la bénédiction de Balaam et qui en furent la manifestation en acte.

Sittim, est la dernière station d’Israël au pays de Moab (Nombres 25.4), Guilgal, la première au-delà du Jourdain (Josué 4.19). Entre ces deux stations se placent la victoire sur les Madianites, qui cherchaient à perdre Israël, en l’entraînant dans l’idolâtrie, le passage du Jourdain et l’entrée en Canaan, enfin la circoncision à Guilgal, par laquelle la génération née au désert fut admise dans l’alliance et le peuple entier rentra dans une relation normale avec Dieu. Dans tous ces faits, Israël doit reconnaître les justices de l’Éternel, c’est-à-dire des œuvres qui prouvent sa fidélité, sa justice envers son peuple.

6 Avec quoi me présenterai-je devant l’Éternel, me prosternerai-je devant le Dieu Très-Haut ? Irai-je au-devant de lui avec des holocaustes, avec des veaux d’un an ?

Israël répond (6-7)

Il s’avoue coupable et demande seulement par quel moyen il pourra apaiser la colère de l’Éternel. Ce n’est pas directement à Dieu qu’il pose cette question, mais au prophète, interprète de sa volonté.

La première pensée qui se présente à lui, c’est de se servir du moyen que Dieu lui-même a institué pour entretenir la communion entre son peuple et lui : les sacrifices ; il se déclare prêt à accomplir pour lui être agréable toutes les œuvres extérieures qu’il pourra exiger.

Veaux d’un an : non que ce soient les seuls qu’il fût permis de sacrifier ; mais ils étaient réputés les meilleurs (Lévitique 9.3).

7 L’Éternel prendra-il plaisir à des milliers de béliers, à des myriades de torrents d’huile ? Donnerai-je mon premier-né pour mon forfait, le fruit de mes entrailles pour le péché de mon âme ?

Béliers : c’étaient, avec les veaux, les victimes les plus usuelles. La quantité est ici relevée, comme la qualité l’a été à propos des veaux.

L’huile ne devait manquer dans aucune offrande (voir Nombres 15.1 et suivants).

Tout cela, Israël serait prêt à le donner. Mais dans le sentiment de l’insuffisance probable de tous ces dons pour couvrir une faute aussi grave qu’est la sienne envers Dieu, il va plus loin encore et il offre le sacrifice de ce qu’il a de plus cher : de son premier-né. Il est mu en cela par le sentiment bien juste que ce que Dieu réclame, c’est le sacrifice de l’homme lui-même, mais il oublie que c’est un holocauste spirituel que l’Éternel demande (voir Genèse chapitre 22) et non l’holocauste sanglant qui est à ses yeux une abomination païenne et ne peut, par conséquent, racheter les crimes de l’homme (voir l’exemple du roi de Moab sacrifiant son fils aîné, 2 Rois 3.27). Sans doute encore, les premiers-nés appartenaient spécialement et de droit à l’Éternel ; mais ils devaient être rachetés, non sacrifiés (Exode 13.12 et suivants).

8 Ô homme, il t’a déclaré ce qui est bon ; et qu’est-ce que l’Éternel demande de toi, sinon de faire ce qui est droit, d’aimer la miséricorde et de marcher humblement avec ton Dieu ?

Réponse du prophète à la demande du peuple (versets 6 et 7). Il repousse toutes ces offres et rappelle à Israël ce qu’il doit lui-même fort bien connaître : les exigences morales de la loi de Jéhova. Que demandes-tu là ? Lui dit-il ; tu sais bien que ton Dieu te demande d’autres choses.

Il t’a déclaré… : par la bouche de Moïse ; voir par exemple Deutéronome 10.12 et suivants.

Michée résume les obligations morales d’Israël en trois mots : droiture, miséricorde (justice et charité envers le prochain ; ces deux termes résument toute la seconde table de la loi) ; humilité devant Dieu : ce terme résume la première table. Sans cette justice sincèrement pratiquée, les sacrifices ne sont que des formes vides auxquelles Dieu ne prend nul plaisir. Comparez 1 Samuel 15.22 ; Osée 6.6.

9 La voix de l’Éternel s’élève contre la ville, et celui qui est sage prendra garde à ton nom : Écoutez la verge et celui qui l’a ordonnée !

Proclamation du jugement (9-16)

Jugement sévère, car, hélas ! La conduite du peuple est tout l’opposé de cette justice.

C’est Jéhova lui-même, le juge et non plus le prophète, qui prononce la sentence.

La ville : Jérusalem, la capitale dans laquelle se concentre le péché du peuple tout entier (comparez Michée 1.5).

Celui qui est sage, littéralement, la sagesse. Le mot rare, employé ici, signifie proprement : solidité, substance, réalité. Ce terme abstrait est employé pour désigner l’attitude de l’homme sérieux, solide, prudent, qui, au lieu de se heurter à la loi de Dieu, prend garde à la révélation de sa volonté et s’efforce d’y conformer sa conduite. Le nom de Dieu est la révélation de son être intime.

Écoutez la verge… Forme elliptique, pour dire : Écoutez l’annonce de la verge… La verge est ici, comme dans Ésaïe 10.5 ; Ésaïe 10.24 (comparez Ésaïe 28.15), le peuple étranger dont l’invasion accomplira sur Israël les jugements de Dieu. Dans Ésaïe, l’Assyrien est expressément désigné par ce terme comme l’instrument du châtiment divin.

10 Y a-t-il encore dans la maison de l’injuste des trésors iniques et un épha amoindri, abominable ?

Michée justifie cette sentence en dénonçant l’injustice qui règne dans le peuple. Il le fait sous forme de question, pour mieux réveiller la conscience d’Israël.

Trésors iniques : acquis par des moyens injustes. Comparez Michée 2.1-2 ; Michée 3.1-3, Michée 3.9-10.

Un épha amoindri, littéralement : un épha de consomption, c’est-à-dire trop petit. Comparez Amos 8.5 ; Deutéronome 25.14. Le contraire : l’épha de justice (Lévitique 19.36). L’épha est une mesure pour les solides (blé, etc.) de la contenance probable de 10 litres.

Abominable, provoquant la malédiction divine (Deutéronome 25.16).

11 Serais-je pur, avec des balances iniques, et de faux poids dans le sac ?…

C’est le prophète qui parle, comme représentant de la conscience du peuple. Celui-ci ne peut se déclarer innocent, puisque des péchés comme celui qui vient d’être stigmatisé, se commettent incessamment dans son sein.

De faux poids, littéralement : pierres à peser que l’on portait dans une bourse (Proverbes 16.11).

12 Cette ville, ses riches sont pleins de violence et ses habitants profèrent le mensonge, et leur langue n’est que tromperie dans leur bouche !

Cette ville, littéralement : elle : Jérusalem (verset 9). Comparez verset 10.

13 Moi donc, à mon tour, je vais te rendre malade de coups, et je te dévasterai à cause de tes péchés !

Le châtiment qu’attireront infailliblement ces iniquités (13-16)

Moi donc, à mon tour… : juste rétribution des crimes du peuple et surtout des violences exercées sur les petits.

Malade de coups : même image dans Ésaïe 1.5 et suivants.

La menace s’adresse au peuple de la capitale et du pays de Juda tout entier (verset 16). Comparez Lévitique 26.18 ; Lévitique 26.24, etc.

14 Tu mangeras, mais tu ne seras pas rassasiée, et l’inanition sera au-dedans de toi ; tu emporteras, mais tu ne sauveras pas, et ce que tu sauveras, je le livrerai à l’épée.

Le pays sera dévasté (verset 13) ; on fuira dans les forteresses ; là, on sera en proie à la famine et ceux qui s’y seront réfugiés finiront par tomber au pouvoir de l’ennemi avec ce qu’ils y auront sauvé. Comparez Lévitique 26.25-26 ; Jérémie 50.37  ; et l’accomplissement Jérémie 52.6 (comparez 2 Rois 6.25).

15 Tu sèmeras, mais tu ne moissonneras pas ; tu presseras l’olive, mais tu ne t’oindras point d’huile ; le moût, mais tu ne boiras point de vin.

C’est l’ennemi qui recueillera tout. Comparez Deutéronome 28.39 et suivants ; Ésaïe 62.8 et suivants ; Amos 5.11.

16 On observe les ordonnances d’Omri et toutes les pratiques de la maison d’Achab, et vous marchez selon leurs conseils ; afin que je te livre à la désolation et les habitants du pays aux sifflets, et que vous portiez l’opprobre de mon peuple !

Ce verset clôt tout le morceau en rappelant, d’une part, le péché (le début du verset reprend l’idée des versets 10 à 12, de l’autre, le châtiment (la fin du verset reprend celle des versets 13 à 15).

C’est par son impiété que le peuple s’attire tous ces maux. Comparez Ésaïe 65.7. Les ordonnances d’Omri, qu’on observe avec une exactitude extrême (ce qu’indique la forme du verbe hébreu), désignent le culte de Baal, dont Achab, fils d’Omri, roi d’Israël, avait fait la religion officielle dans son royaume. Ce culte est rapporté directement à Omri, comme fondateur de la dynastie maudite qui l’a introduit (comparez Athalie, fille d’Achab, appelée fille d’Omri, 2 Chroniques 22.2). Omri lui-même, d’ailleurs, avait fait pire que tous les rois avant lui. Voir 1 Rois 16.25 ; 1 Rois 16.31 et suivants. Michée ne peut avoir écrit ceci qu’au temps d’Achaz ou dans les premières années du règne d’Ézéchias, avant la grande réforme qui abolit l’idolâtrie en Juda (voir l’introduction).

Toutes les pratiques de la maison d’Achab : persécution des vrais prophètes et autres crimes, comme par exemple le meurtre de Naboth (voir 1 Rois chapitres 18, 21, 22).

Afin que… Ironie : comme si vous aviez formé le dessein d’attirer sur vous une ruine pareille à celle de la maison d’Achab. Cette expression relève le caractère conscient et opiniâtre de leur péché, par lequel ils s’obstinent à provoquer le châtiment.

Désolation : voyez la prédiction de la dévastation complète, Michée 3.12.

Sifflets : railleries ; l’opprobre : il consiste pour le peuple de Dieu à être livré aux païens (Ézéchiel 36.20). Le terme : vous portiez…, s’adresse aux individus israélites qui auront tous à porter leur part de l’opprobre national.