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Matthieu 14
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Matthieu 14

Les sentiments d’Hérode

La renommée de Jésus parvenant jusqu’à Hérode, il s’imagine que Jésus est Jean ressuscité (1-2).

Le récit de la mort de Jean-Baptiste

  1. L’emprisonnement du prophète motivé par le blâme qu’il avait prononcé sur l’union adultère d’Hérode avec la femme de son frère. Hérode voulait le faire mourir, mais il était retenu par la crainte du peuple (3-5).
  2. La danse de la fille d’Hérodias. À la fête anniversaire de la naissance d’Hérode, la fille d’Hérodias dansa devant les convives ; Hérode lui promit ce qu’elle demanderait. Elle, à l’instigation de sa mère, demanda la tête de Jean-Baptiste (6-8).
  3. L’exécution de Jean. Hérode, attristé, mais lié par son serment et par la crainte de l’opinion, envoya décapiter Jean dans la prison. Sa tête fut présentée sur un plat à la jeune fille, qui la porta à sa mère (9-11).

La retraite de Jésus

Les disciples-de Jean, après avoir rendu les derniers devoirs à leur maître, viennent annoncer sa mort à Jésus. Celui-ci se retire à l’écart, mais la foule le suit (12-13).

1 En ce temps-là, Hérode le tétrarque entendit parler de la renommée de Jésus.

Retraite à Betsaïda (chapitre 14)

Versets 1 à 13 — Mort de Jean-Baptiste

En ce temps-là, expression vague, parait reporter la pensée vers l’époque de la visite de Jésus à Nazareth (Matthieu 13.54-58).

Marc, très complet dans ce récit et Luc, qui le donne en abrégé, placent l’événement entre l’envoi et le retour des disciples, donc à une époque antérieure. On sait que Matthieu ne s’attache point à l’ordre chronologique.

Hérode, que Josèphe appelle Antipas, était un des nombreux fils d’Hérode le Grand (Matthieu 2.1 et suivants) et frère d’Archélaüs (Matthieu 2.22).

Il régnait sur la Galilée et la Pérée avec le titre de tétrarque, c’est-à-dire quatrième gouverneur, ou prince qui partageait avec trois autres le gouvernement du pays.

Il résidait habituellement à Tibériade, ville qu’il avait fondée au bord du lac, ornée de magnifiques constructions et nommée en l’honneur de l’empereur Tibère. Mais il séjournait, à l’époque de l’emprisonnement et de la mort de Jean-Baptiste, selon le témoignage de Josèphe (Antiquités Juives, XVIII, 5, 2), dans la forteresse de Machaerus ou Machéronte, dans la Pérée, parce qu’il était en guerre avec Arétas, roi d’Arabie, dont il avait répudié la fille. C’est là que se déroula la scène tragique que l’évangéliste va raconter (verset 3 et suivants).

Hérode entendit parler de la renommée grandissante de Jésus. Cette expression ne signifie pas qu’il n’eût eu jusque-là aucune connaissance de lui, mais bien qu’à ce moment « son nom devenait célèbre », comme l’observe Marc (Marc 6.14).

2 Et il dit à ses serviteurs : C’est Jean-Baptiste ; c’est lui qui est ressuscité d’entre les morts ; et c’est pour cela que des puissances miraculeuses agissent en lui.

Grec : que les puissances (miracles) agissent énergiquement en lui.

Cette expression indique plutôt le pouvoir de faire des miracles que les miracles eux-mêmes.

Les paroles d’Hérode trahissent sa mauvaise conscience : il est saisi d’effroi à la pensée qu’un envoyé de Dieu agit avec puissance dans le pays.

Le meurtre de Jean-Baptiste, qui avait eu lieu auparavant et que Matthieu va raconter, inspire à ce prince débauché une crainte superstitieuse qui s’allie très bien avec l’incrédulité (voir Marc 6.16, note) et que d’autres dans son entourage partageaient avec lui (Luc 9.7).

3 Car Hérode, ayant fait arrêter Jean, l’avait fait lier et mettre en prison, à cause d’Hérodias, la femme de Philippe, son frère ;

Le texte grec, d’après une variante très autorisée, dit littéralement : Hérode l’avait mis en réserve dans la prison.

Matthieu avait déjà mentionné (Matthieu 4.12) cette arrestation de Jean ; il la reprend ici au moment de raconter sa mort.

Par un double adultère, Hérode Antipas avait répudié sa femme légitime, la fille d’Arétas et épousé la femme de son frère.

Ce frère est appelé, ici et en Marc 6.17, Philippe.

Or Hérode Antipas avait bien un frère de ce nom, qui fut tétrarque de l’Iturée et de la Trachonitide (Luc 3.1, note), mais ce dernier ne fut pas l’époux d’Hérodias : il fut son gendre, ayant épousé, dans la suite, sa fille Salomé, celle même qui joue un si triste rôle dans notre récit.

Hérodias était la femme d’un autre frère d’Antipas, nommé Hérode, qui ne figure pas dans l’histoire. Il faut donc admettre que celui-ci portait aussi le nom de Philippe, ou, ce qui est plus probable, que les évangélistes l’ont confondu avec Philippe le tétrarque (Le nom de Philippe est omis par D, quelques copies de l’Itala et la Vulgate).

Hérodias, fille d’Aristobule et de Bérénice et petite-fille d’Hérode le Grand, était la nièce d’Antipas, en même temps que sa belle-sœur (voir Josèphe, Antiquités Juives, XVIII, 5, 1 et 4).

4 car Jean lui disait : Il ne t’est pas permis de l’avoir.

Cette courageuse répréhension, que le fidèle serviteur de Dieu devait payer de sa vie, se fondait à la fois sur le septième commandement et sur Lévitique 18.16 ; Lévitique 20.21.

5 Et voulant le faire mourir, il craignait la foule, parce qu’on le regardait comme un prophète.

Marc Marc 6.19-20 nous apprend que ces desseins meurtriers furent inspirés à Hérode par Hérodias ; car lui-même, au moment où Marc nous le dépeint, avait des sentiments tout différents pour Jean-Baptiste (voir Marc 6.19, note et comparez Luc 9.9).

Au reste cette crainte qu’il avait de la foule et qui le retenait, nous est aussi confirmée par Josèphe (Antiquités Juives, XVIII, 5, 2).

6 Mais comme on célébrait le jour de la naissance d’Hérode, la fille d’Hérodias dansa au milieu de l’assemblée, et plut à Hérode ;

Quelques interprètes admettent sans raison que le jour de la naissance d’Hérode serait ici l’anniversaire de son avènement au trône, considéré comme anniversaire de la naissance du roi.

La fille d’Hérodias s’appelait Salomé et était née du premier mariage de sa mère. Elle épousa plus tard son oncle le tétrarque Philippe (Josèphe, Antiquités Juives, XVIII, 5.4).

Sa danse était sans doute accompagnée de poses et de mouvements voluptueux, à la manière orientale. Quel contraste criant entre cette danse d’une jeune fille et l’acte tragique qui va s’accomplir dans la prison (voir Adolphe Monod, Sermons, 2e série, page 245, « Danse et martyre ») !

7 de sorte qu’il promit avec serment de lui donner ce qu’elle demanderait. 8 Elle donc, poussée par sa mère : Donne-moi, dit-elle, ici, sur un plat, la tête de Jean-Baptiste. 9 Et le roi fut attristé, mais à cause de ses serments et des convives, il commanda qu’on la lui donnât,

Le fait qu’Hérode fut attristé n’est point en contradiction avec le verset 5, puisque ce n’était pas par ses propres sentiments, mais par une lâche complaisance pour Hérodias qu’il en voulait à la vie de Jean.

Il avait d’ailleurs offert de riches présents, mais non la tête d’un homme qu’il estimait au fond du cœur ; et l’on conçoit que cette brusque demande le troublât profondément.

Seul, il l’aurait sans doute refusée, sans se croire lié par ses serments. Mais en présence de ses convives, au milieu d’une cour brillante et échauffée par le festin, la vanité d’un faux point d’honneur l’emporta dans son esprit.

10 et il envoya décapiter Jean dans la prison. 11 Et sa tête fut apportée sur un plat, et donnée à la jeune fille, et elle la porta à sa mère.

Ce récit si simple, si bref, ne fait que mieux ressortir l’horreur des faits.

Cette tête sanglante de l’homme de Dieu donnée, sur un plat, à une jeune fille, qui la porte à sa mère !

Il est évident que les récits des évangélistes supposent que toute cette tragédie se passa sur l’heure, pendant la fête qu’Hérode célébrait alors. On conçoit à peine pourquoi les exégètes soulèvent et discutent longuement la question de savoir où pouvait être la prison de Jean et comment il put être ainsi mis à mort et sa tête apportée sur-le-champ.

Hérode, il est vrai, résidait ordinairement à Tibériade ; mais l’historien Josèphe, dont il n’y a pas la moindre raison de suspecter le témoignage, nous dit expressément que Jean fut mis en prison dans la forteresse de Machaerus, où Hérode avait de magnifiques appartements, que cet événement coïncida avec sa guerre contre Arétas ; que même « les Juifs attribuèrent la défaite de son armée à un juste jugement de Dieu à cause d’une action si injuste ».

Quoi donc de plus naturel que d’admettre que toute la scène se passa dans ce château fort où la cour d’Hérode se trouvait alors et qu’ainsi tout fut accompli en fort peu de temps ?

12 Et ses disciples vinrent et emportèrent le corps, et l’ensevelirent ; et ils vinrent l’annoncer à Jésus. 13 Mais Jésus l’ayant appris, se retira de là sur une barque en un lieu désert, à l’écart. Et les foules l’ayant su, le suivirent à pied, de diverses villes.

Marc (Marc 6.30 et suivants) et Luc (Luc 9.10 et suivants), adoptant une chronologie différente (verset 1, note), donnent pour motif de ce voyage au-delà de la mer le désir qu’avait Jésus de procurer à ses disciples quelque temps de solitude et de repos, après leur retour de leur mission.

D’après Matthieu le motif de Jésus aurait été la pensée de se retirer à l’écart, pour ne pas exciter contre lui la persécution, après le meurtre du précurseur et au moment où l’attention d’Hérode venait de se porter sur lui (verset 1).

Y a-t-il contradiction ? Quelques interprètes l’ont pensé. Mais comme, d’après le second et le troisième Évangile eux-mêmes, cette retraite de Jésus eut lieu aussitôt après la mort de Jean-Baptiste, le motif indiqué par Matthieu peut avoir influé sur la conduite de Jésus sans que l’autre fût exclu. Et le repos qu’il désirait pour ses disciples et pour lui-même devait être rempli de méditations sérieuses sur la catastrophe qui venait de mettre fin à la vie du précurseur, le maître vénéré qui avait amené la plupart d’entre eux à suivre « l’Agneau de Dieu » (Jean 1.35 et suivants).

À pied, en faisant le tour de l’extrémité septentrionale du lac. Ce lac était entouré de plusieurs villes, alors très peuplées. De là ces foules.

14 Et étant sorti, il vit une grande multitude ; et il fut ému de compassion envers eux, et il guérit leurs malades.

Une journée de travail

Ému de compassion à la vue des foules qui l’avaient suivi, il guérit leurs malades (14).

Les préparatifs du repas du soir

Le soir étant venu, les disciples, inquiets pour cette multitude qui n’avait rien à manger, demandent à Jésus de la congédier. Donnez-leur vous-mêmes à manger ! Répond Jésus. Mais, disent-ils, nous n’avons ici que cinq pains et deux poissons. Apportez-les-moi, leur dit-il (13-18).

Le repas

Ayant fait asseoir la foule sur l’herbe, il prend les pains et bénit Dieu ; puis rompant les pains, il les donne aux disciples, qui les distribuent au peuple. Tous sont rassasiés et l’on remplit douze paniers des morceaux qui restent (19-21).

Multiplication des pains (14-21)

Étant sorti de la retraite solitaire où il avait passé quelques heures avec ses disciples, Jésus, à la vue de cette grande multitude, est ému de compassion (grec ému dans ses entrailles), soit à cause de tous ces malades qu’on lui amenait pour qu’il les guérit, soit à cause de l’état de délaissement moral de ce pauvre peuple, qui était à ses yeux « comme des brebis qui n’ont point de berger » (Marc 6.34).

15 Mais le soir étant venu, les disciples s’approchèrent de lui, disant : Ce lieu est désert, et l’heure est déjà passée ; renvoie donc les foules, afin qu’elles s’en aillent dans les bourgades, et qu’elles achètent des vivres.

L’heure était déjà passée, c’est-à-dire que la journée était déjà très avancée, ou que l’heure même où se prenait le repas du soir était passée.

Cette sollicitude pour le peuple parait avoir été inspirée aux disciples par la compassion de leur Maître (verset 14).

D’après saint Jean (Jean 6.5), ce fut Jésus lui-même qui prit l’initiative et la parole des disciples ne fut que la réponse à sa question.

Quoi qu’il en soit, cet entretien prouve qu’il y avait là un besoin réel, digne de la compassion de Jésus et que le Sauveur ne fit point un usage inutile de sa puissance créatrice en multipliant les pains, comme le prétend la critique négative.

16 Mais Jésus leur dit : Elles n’ont pas besoin de s’en aller ; donnez-leur vous-mêmes à manger.

Cet ordre étrange, destiné à éprouver la foi des disciples, ils l’exécuteront réellement (verset 19).

17 Et ils lui disent : Nous n’avons ici que cinq pains et deux poissons. 18 Et il dit : Apportez-les-moi ici.

Avec quelle majestueuse assurance Jésus sait ce qu’il va faire de cette insuffisante provision !

19 Et après avoir commandé aux foules de s’asseoir sur l’herbe, il prit les cinq pains et les deux poissons, et levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction. Puis ayant rompu les pains, il les donna aux disciples, et les disciples les donnèrent à la foule.

Grec : il bénit, il prononça la bénédiction, que le père de famille prononçait avant le repas. Luc (Luc 9.16) fait porter la bénédiction sur les pains, qui auraient été consacrés par elle. Jean (Jean 6.11) dit : « il rendit grâce ».

Il y eut donc à la fois dans l’âme du Sauveur le sentiment de la reconnaissance envers Dieu pour ce qu’il avait donné et le dessein d’implorer la bénédiction divine sur ce peu de biens pour les multiplier (comparer Matthieu 26.26-27 ; 1 Timothée 4.4-5). Quel exemple et quelle consolation pour le pauvre dont la provision est insuffisante !

Les disciples accomplissent avec une humble obéissance l’ordre qu’ils ont reçu (verset 16) ; ils donnent ce qu’ils ont (verset 17) et c’est dans leurs mains que s’accomplit le miracle.

Si Jésus avait d’avance multiplié les pains, de manière à en mettre sous leurs yeux une immense provision, cela eût mieux convenu à leur manque de foi, mais Dieu ne procède jamais ainsi dans la dispensation de ses grâces. Il exerce la foi et l’obéissance, tout en donnant abondamment.

20 Et tous mangèrent, et furent rassasiés ; et on emporta douze paniers pleins des morceaux qui restaient.

Ce fut Jésus qui ordonna aux disciples de recueillir ces morceaux de surplus, « afin que rien ne se perde ».

Ces paniers étaient de petits sacs de voyage en jonc ou en paille. Chaque disciple en avait un et le remplit.

21 Or ceux qui avaient mangé étaient environ cinq mille hommes, sans compter les femmes et les petits enfants.

Ce miracle, accompli, comme celui de Cana, sur la nature inanimée, sur les éléments purement matériels, est devenu pour le rationalisme de toutes les écoles, une pierre d’achoppement.

Dans les guérisons de malades, il reste à la raison des ressources pour expliquer la délivrance de ces malheureux par une influence morale exercée sur eux, sans s’élever jusqu’au surnaturel.

Mais ici ! L’un de ces docteurs ne voit dans notre récit qu’une pure légende ou un mythe né dans l’imagination des premiers disciples (Strauss).

Un autre nous raconte que Jésus fit simplement rassembler, puis distribuer avec ordre, les petites provisions que la foule avait apportées avec elle (Paulus).

De Wette pense que ce récit est la forme symbolique qu’a revêtue dans la tradition l’instruction de Jésus (Jean 6) sur le pain spirituel ou pain de vie. Et, d’après lui, on a prétendu que, comme il était impossible de se représenter la réalité du fait, il n’y avait qu’à s’en tenir aux leçons religieuses qu’en tire Jésus (Jean 6).

Mais que deviennent ces leçons, si elles reposent sur une invention légendaire ?

Lange enfin, voit dans notre récit, non une multiplication du pain matériel, mais bien de sa force nutritive, en sorte que chacun fut rassasié de la part la plus minime qu’il reçut.

Mais les douze paniers du surplus ?

La question n’est pas dans l’interprétation plus ou moins ingénieuse du récit. Elle est tout entière dans l’idée qu’on se fait de la personne de Jésus-Christ.

Celui qui a dit : « Toute puissance m’a été donnée au ciel et sur la terre », avait-il le pouvoir d’accomplir un acte de création ? S’il l’avait, tout est dit, car une création ne s’explique pas.

Or, ce miracle est attesté unanimement par les quatre évangiles, il est confirmé par l’impression qu’en reçut la foule et bien plus encore par l’autorité du Sauveur, qui le prend pour texte d’un de ses plus profonds discours et qui même en appelle directement à cet acte de sa puissance (Marc 8.19-20. Comparer Jules Bovon, Théologie du Nouveau Testament, p. 290 et suivants, 310 et suivants).

Quant au but immédiat du miracle, il est évident : le Sauveur voulait, dans sa compassion pour une multitude pauvre et défaillante qui s’était attachée à ses pas pour entendre sa parole, lui procurer un secours nécessaire et faire envers elle une grande et touchante œuvre de charité.

22 Et aussitôt, Jésus obligea ses disciples à monter dans la barque et à le précéder sur l’autre rive, pendant qu’il renverrait la foule.

Les disciples dans la barque, Jésus sur la montagne

Jésus aussitôt contraint ses disciples à se rembarquer. Il congédie la foule et se retire sur la montagne, où il reste seul, en prières (22-23).

Jésus vient au secours des disciples

Les voyant battus par la tempête, à la quatrième veille de la nuit, Jésus vient à eux, marchant sur les eaux. Ils sont remplis de frayeur, mais Jésus les rassure (24-27).

Pierre va à la rencontre de Jésus

Pierre dit au Seigneur : Si c’est toi, ordonne que j’aille vers toi sur les eaux. Jésus lui ayant dit de venir, Pierre descend de la barque et marche sur les eaux. Mais troublé à la pensée du danger, il enfonce et appelle Jésus à son aide. Jésus le saisit par la main et lui reproche son manque de foi (28-31).

La tempête apaisée, impression produite

Ils montent dans la barque et le vent cesse aussitôt. Ceux qui sont dans la barque se prosternent devant Jésus en le proclamant le Fils de Dieu (32-33).

Guérisons dans le pays de Génézareth

À son retour dans cette contrée, Jésus est reconnu. On envoie chercher partout les malades et on les lui amène. Ils sont guéris par le seul attouchement de son vêtement (34-36).

Jésus marchant sur la mer, guérisons dans le pays de Génézareth (22-36)

Codex Sinaiticus, C, la syriaque de Cureton, suivis par Tischendorf, omettent le mot aussitôt : mais ces autorités ne sont pas décisives. En tout cas le mot est dans Marc et il correspond à la situation.

En effet, la foule, enthousiasmée par ce qu’elle venait de voir et d’entendre, s’agitait autour de Jésus ; elle voulait même le proclamer roi (Jean 6.15), raison pressante pour lui d’échapper aussitôt à ces ovations bruyantes pour se retirer dans la solitude (verset 23).

De là encore ce terme inusité : il obligea, contraignit les disciples à s’embarquer pour le précéder sur l’autre rive, c’est-à-dire pour Bethsaïda (Marc 6.45) ou Capernaüm (Jean 6.17).

Les disciples pouvaient croire qu’il voulait les suivre à pied plus tard et il leur répugnait de se séparer de lui.

23 Et après qu’il l’eut renvoyée, il monta sur la montagne, à l’écart, afin de prier ; et comme le soir était venu ; il était là seul.

Solitude et prière : Jésus lui-même après tous ses travaux de la journée, éprouve le besoin de retremper son âme dans la communion de son Père céleste.

Combien plus ceux qui le suivent de si loin dans l’activité et le combat !

Le soir désigne une heure avancée de la soirée (comparer verset 15).

24 Or la barque, déjà au milieu de la mer, était battue par les flots ; car le vent était contraire.

Le mot déjà semble indiquer que jusqu’au milieu de la mer, c’est-à-dire pendant une heure environ (25 ou 30 stades, Jean 6.19), la navigation n’avait point rencontré d’obstacles, mais que là les disciples furent surpris par un de ces vents violents, qui se lèvent : soudain sur les lacs entourés de montagnes (Matthieu 8.24, note).

B et plusieurs versions, après au milieu de la mer, ajoutent ces mots : elle était éloignée de plusieurs stades de la terre.

25 Mais à la quatrième veille de la nuit, il vint à eux, marchant sur la mer.

Le texte reçu dit : « Jésus vint ; » mais l’évangéliste, au souvenir de cette scène, n’a pas besoin de nommer celui qui apparut aux siens comme le Sauveur : il vint.

La quatrième veille de la nuit était entre trois et six heures du matin

Les veilles, de trois heures chacune commençaient à six heures du soir. Les disciples avaient donc lutté contre la tempête la plus grande partie de la nuit et ils étaient en danger (comparer Matthieu 8.25).

Mais Jésus, plutôt que de les laisser périr, vient à eux marchant sur la mer.

Le rationalisme s’est mis en frais d’inventions pour supprimer ce fait surnaturel. La plus ridicule est celle qui consiste à traduire sur la mer par sur le bord de la mer ! Tout cela pour nier que le Fils de Dieu dominât sur les forces de la nature dont il est pourtant le Roi.

26 Et les disciples, le voyant marcher sur la mer, furent troublés, disant : C’est un fantôme ! Et de frayeur ils crièrent.

Le mot fantôme (grec phantasma) signifie une apparition du monde des esprits.

Les disciples partageaient la croyance populaire de leur temps (Luc 24.37). Ainsi, à la crainte du danger se joint une nouvelle frayeur, tandis que c’est le secours qui s’approche !

27 Mais aussitôt Jésus leur parla, disant : Rassurez-vous ; c’est moi, n’ayez point peur.
C’est par sa voix qu’il se fait connaître.
— Chrysostome

Calme majesté de la puissance divine du Sauveur au sein de la tempête ! Tendre compassion pour les siens qu’il rassure et console, même avant de les sauver !

28 Et Pierre, lui répondant, dit : Seigneur, si c’est toi, ordonne que j’aille vers toi sur les eaux.

Que cela est bien dans le caractère de Pierre : ardeur qui ne se donne pas le temps de la réflexion, vif amour pour son Maître dont il veut être le premier à embrasser les genoux !

29 Jésus lui dit : Viens. Et Pierre, étant descendu de la barque, marcha sur les eaux et vint vers Jésus.

Parole de puissance divine, majestueuse assurance de dominer la nature, pour son disciple, aussi bien que pour lui-même ! Il accorde la permission parce que l’éducation d’une telle âme devait se faire par l’expérience (comparer Matthieu 26.69-75).

Le texte reçu dit : « pour venir vers Jésus ».

La variante adoptée, d’après Tischendorf sur l’autorité de B, C : et il vint, est plus en harmonie avec cette scène, car Pierre parvint réellement jusqu’à son Maître (verset 31).

30 Mais voyant le vent, il eut peur ; et comme il commençait à enfoncer, il s’écria, disant : Seigneur, sauve-moi !
Dans la mesure de sa foi, il était porté par les eaux.
— Bengel

Mais voyant la puissance du vent, le doute et la peur le privèrent de la force de cette foi qui le soutenait. Cependant il lui reste assez de confiance pour crier vers son Sauveur, et cela, suffit pour sa délivrance.

Le texte reçu, avec C, D et la plupart des majuscules ajoute au mot vent le qualificatif de fort.

31 Et aussitôt Jésus, ayant étendu la main, le saisit et lui dit : Homme de petite foi, pourquoi as-tu douté ?

Grec : hésiter, se tourner de deux côtés.

Pourquoi ? Pierre n’avait que trop de raisons de douter ; mais la question du Sauveur signifie que là où il est présent, ces raisons n’existent plus.

Matthieu seul a conservé cet épisode relatif à Pierre, quoique le récit de Jésus marchant sur la mer se retrouve dans Marc et Jean.

La critique négative en a conclu que ce trait de la vie du disciple a été ajouté au récit par une tradition postérieure. Mais sur quoi se fonde cette supposition ? L’expérience de Pierre, l’une des plus touchantes et des plus instructives de sa vie, n’est-elle pas dans son caractère et digne du Maître qui fait son éducation ?

32 Et quand ils furent entrés dans la barque, le vent s’apaisa. 33 Et ceux qui étaient dans la barque vinrent et se prosternèrent devant lui, disant : Tu es véritablement le Fils de Dieu.

Ceux qui étaient dans la barque ne paraissent pas être les disciples seulement, mais d’autres encore qui faisaient la traversée avec eux. Leur foi en Jésus comme Fils de Dieu, dont l’expression s’échappe de leur cœur à la suite de cette scène, n’y a pas été éveillée seulement par la majesté et la puissance divines que le Seigneur vient de faire paraître, mais plus encore par sa parole qu’ils avaient entendue dans cette journée si mémorable pour eux.

34 Puis ayant passé à l’autre bord, ils vinrent dans le pays de Génézareth.

Le pays (grec terre) de Génézareth est situé sur le bord occidental du lac de ce nom, dans la basse Galilée.

Josèphe décrit cette contrée comme remarquable par la douceur et la fertilité de son climat.

35 Et les gens de ce lieu-là l’ayant reconnu, envoyèrent par toute la contrée d’alentour, et on lui amena tous les malades. 36 Et ils le priaient qu’ils pussent seulement toucher le bord de son vêtement, et tous ceux qui le touchèrent furent guéris.

Grec : sauvés, ou plutôt comme l’exprime le verbe grec composé, entièrement sauvés. Il s’agit bien, avant tout, de la guérison de ces malades, mais le terme est choisi à dessein comme pouvant exprimer beaucoup plus (comparer Matthieu 9.21-22, note).

Dans ce dernier passage, on voit aussi une pauvre femme malade, guérie en touchant le bord du vêtement du Sauveur ; mais ce qui la guérit, ce fut, d’une part, « la puissance qui sortait de lui » (Luc 8.46) et d’autre part, la foi qu’elle avait en lui.

Telles furent aussi les guérisons sommairement rapportées ici. Il n’y a rien dans ces guérisons qui autorise les superstitions qu’on voudrait appuyer sur un tel exemple.