Appuyez sur Entrée pour rechercher ou ESC pour annuler.

Juges 3
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

1 Et ce sont ici les nations que l’Éternel laissa subsister pour éprouver par elles Israël, tous ceux qui n’avaient pas connu toutes les guerres de Canaan,

Avant de commencer son récit, l’auteur résume l’état des choses au moment où il va le reprendre à l’égard des nations cananéennes ; voir comme morceau parallèle Josué 13.4-6. Il divise ces peuples en deux groupes, l’un formant un demi-cercle autour d’Israël, versets 3 et 4 ; l’autre habitant en commun avec lui dans la Terre Sainte, versets 5 et 6. Le premier groupe comprend les Philistins au sud-ouest, les Cananéens (Josué 13.4, note) et les Sidoniens dans la plaine maritime au nord-ouest et les Héviens habitant dans le Liban au nord. Les pays appartenant aux peuples de ce premier groupe étaient bien destinés à être un jour la propriété d’Israël ; mais nous avons déjà indiqué la circonstance qui probablement empêcha la conquête primitive de s’étendre jusqu’à eux : ce fut l’établissement d’une partie considérable du peuple, deux tribus et demie, dans les contrées à l’est du Jourdain. Ainsi diminué, le peuple qui avait passé le Jourdain n’était plus assez nombreux pour occuper ces vastes territoires. Dieu aurait pu sans doute, par un acte de sa puissance, détruire ces nations environnantes. Mais en les laissant subsister, il avait un but que l’auteur indique dans les versets 1 et 2. Les nouvelles générations n’avaient pas pris part à la guerre de conquête ; pour entretenir chez elles l’esprit militaire, si nécessaire à un peuple constamment exposé à des invasions, Dieu se servit de l’hostilité continuelle de ces peuples voisins ; Israël dut, vis-à-vis d’eux, se tenir en état constant de défense. Quant au second groupe, il est composé de peuplades habitant en dedans des limites d’Israël. Le narrateur n’excuse point les Israélites de l’infidélité par laquelle ils les laissèrent subsister ; il montre au contraire que ce fut de cette faute que découlèrent toutes leurs infidélités subséquentes.

2 et cela seulement pour l’instruction des générations des fils d’Israël, afin de leur enseigner la guerre, à ceux-là du moins qui ne l’avaient pas connue auparavant : 3 cinq princes des Philistins, et tous les Cananéens et les Sidoniens, et les Héviens qui habitaient la montagne du Liban, depuis la montagne de Baal-Hermon jusqu’à l’entrée de Hamath.

Cinq princes des Philistins : les cinq rois des cinq villes formant la confédération des Philistins.

Et tous les Cananéens : voir Josué 13.4, note.

Sidoniens : sur la côte de Phénicie.

Héviens : voir Genèse 10.17, note.

Baal-Hermon ou Baal-Gad, au pied du Hermon, limite des conquêtes de Josué vers le nord (Josué 11.17).

L’entrée de Hamath : beaucoup plus au nord, dans la grande vallée de la Célésyrie ; voir Ésaïe 10.9 ; Nombres 34.8 et Josué 13.5, notes. C’est jusque-là que devait primitivement s’étendre la conquête.

4 Et ils servirent à mettre Israël à l’épreuve, pour savoir s’ils obéiraient aux commandements que l’Éternel avait prescrits à leurs pères par Moïse.

La lutte que les Israélites devaient soutenir avec eux n’était pas une lutte matérielle seulement, mais aussi de nature morale et religieuse.

5 Et les fils d’Israël habitèrent au milieu des Cananéens, des Héthiens, et des Amorrhéens, et des Phéréziens, et des Héviens, et des Jébusiens.

Cananéens : dans les plaines de l’intérieur.

Héthiens : ceux d’Hébron ou de Béthel par exemple (Genèse 23.10 ; Juges 1.26), voir Genèse 10.15, note.

Amorrhéens : dans les montagnes.

Phéréziens : Genèse 13.7, note.

Héthiens : Genèse 10.17, note.

Jébusiens : Genèse 10.16, note.

6 Et ils prirent leurs filles pour femmes, et ils donnèrent à leurs fils leurs propres filles, et ils servirent leurs dieux. 7 Et les fils d’Israël firent ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel, et ils oublièrent l’Éternel leur Dieu et ils servirent les Baals et les Aschères.

L’histoire des juges (3.7 à 16.31)

Cette partie, qui forme le corps du livre des Juges, se divise en une série de morceaux, les uns plus courts, les autres plus longs, ces derniers commençant en général par la formule : Et les fils d’Israël firent ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel.

Versets 7 à 11 — Othniel

Les Baals et les Aschères : voir Juges 2.11-13, notes.

8 Et la colère de l’Éternel s’enflamma contre Israël et il les vendit à Cuschan-Rischathaïm, roi de Mésopotamie. Et les fils d’Israël furent asservis à Cuschan-Rischathaïm huit ans.

Vendit : Juges 2.14.

Cuschan-Rischathaïm. Le nom de Cuschan est dérivé de celui de Cusch et désigne un représentant de ce peuple des Cuschites qui occupait l’immense contrée qui va des bords de l’Océan Indien, à travers la vallée du Tigre et de l’Euphrate, jusqu’à l’Éthiopie en Afrique. La tribu dont Cuschan ici nommé était un chef, habitait au nord de la Mésopotamie et avait étendu ses conquêtes dans l’Asie occidentale, comme précédemment les cinq rois dont parle Genèse 14.1 et, plus tard, les Assyriens et les Babyloniens.

Rischathaïm. Ce nom, qui en hébreu signifie double méchanceté, était probablement une transformation hébraïque de l’un de ses titres.

Roi de Mésopotamie : Genèse 24.10, note.

9 Et les fils d’Israël crièrent à l’Éternel, et l’Éternel leur suscita un libérateur qui les délivra : Othniel, fils de Kénaz, frère cadet de Caleb.

Othniel : ma force est Dieu : le vaillant frère cadet de Caleb, qui avait épousé sa nièce Acsa à la suite de la prise d’Hébron (Josué 15.17, note ; Juges 1.13). Nous n’avons aucun détail sur sa victoire qui par ses suites paraît avoir été décisive.

Il jugea : délivra Israël de l’ennemi qui l’opprimait. Voir l’Introduction.

10 Et l’Esprit de l’Éternel fut sur lui, et il jugea Israël et il sortit pour combattre, et l’Éternel livra entre ses mains Cuschan-Rischathaïm, roi de Mésopotamie, et sa main fut puissante contre Cuschan-Rischathaïm. 11 Et le pays fut en repos quarante ans, et Othniel, fils de Kénaz, mourut. 12 Et les fils d’Israël recommencèrent à faire ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel, et l’Éternel fortifia Eglon, roi de Moab, contre Israël, parce qu’ils faisaient ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel.

Ehud et Samgar (12-31)

L’Éternel fortifia Églon. Voulant punir son peuple, le Dieu d’Israël, qui d’après l’auteur est en même temps le maître des païens, donna à Églon la force nécessaire pour exécuter ce châtiment.

13 Et il s’adjoignit les fils d’Ammon et les Amalékites, et il marcha contre Israël et le battit, et ils prirent possession de la ville des Palmiers.

L’oppression précédente venait du nord-est ; celle-ci vient du sud-est (Moab) de l’est (Ammon) et du sud (Amalékites). Moab n’était pas reconnaissant d’avoir été épargné par Israël (Deutéronome 2.9).

La ville des Palmiers : Jéricho. C’est peut-être alors que les Kéniens quittèrent cette contrée pour aller s’établir dans le désert de Juda, au sud (Juges 1.16). Jéricho n’avait pas été relevée comme ville forte avec murailles et portes (Josué 6.26), mais comme lieu d’habitation ; elle put facilement être prise.

14 Et les fils d’Israël furent asservis dix-huit ans à Eglon, roi de Moab.

Asservis. Ils furent épargnés, à la condition de payer un tribut annuel (verset 15).

15 Et les fils d’Israël crièrent à l’Éternel, et l’Éternel leur suscita un libérateur : Ehud, fils de Guéra, Benjamite, qui était gaucher. Et les fils d’Israël envoyèrent par lui un présent à Eglon, roi de Moab.

Fils de Guéra : soit descendant de Guéra, petit-fils de Benjamin (1 Chroniques 8.3), soit fils d’un Guéra postérieur. La tribu de Benjamin, sur le sol de laquelle les Moabites s’étaient établis, était par là même celle qui avait le plus à souffrir de leur oppression.

Gaucher. La suite montrera l’intention de ce détail.

16 Et Ehud se fit une épée à deux tranchants, d’une aune de long, et il la ceignit sous son vêtement, sur sa hanche droite.

Sur sa hanche droite, contre l’usage ordinaire ; de manière à pouvoir facilement la tirer de la main gauche.

17 Et il offrit le présent à Eglon, roi de Moab ; or Eglon était un homme très gras.

Très gras. Ce détail prépare ceux du verset 22. La scène se passa un peu à l’est de Jéricho, entre le Jourdain et Guilgal qui était, à 8 km à l’ouest du fleuve. Églon n’était pas à Jéricho même.

18 Et lorsqu’il eut achevé d’offrir le présent, il renvoya les gens qui l’avaient apporté.

Achevé d’offir le présent. C’était une longue cérémonie, car il s’agissait sans doute d’un tribut en nature, comme bestiaux et produits divers (Genèse 43.25) ; cela donnait lieu à une procession.

19 Et lui-même il revint depuis les pierres taillées qui sont près de Guilgal et il dit : Ô roi, j’ai un mot à te dire en secret. Et le roi dit : Retirez-vous !
Et tous ceux qui se tenaient devant lui sortirent.

Ehud accompagne quelque temps à leur retour les porteurs du tribut, mais depuis les pierres taillées, c’est-à-dire les idoles (Deutéronome 7.25 ; Ésaïe 21.9 ; Jérémie 8.19), il revient sur ses pas, sous l’impulsion d’une inspiration d’en-haut. Est-ce la vue de ces idoles moabites sur le sol israélite qui l’indigne tout à coup et qui lui inspire le projet qu’il va exécuter ?

Guilgal : Josué 4.19 ; Josué 5.9-10.

Personne ne soupçonnait cet homme, qui venait de payer le tribut et qui paraissait désarmé.

Retirez-vous ! : Silence ! C’est le sens propre du mot hébreu, mais on peut aussi le traduire comme nous l’avons fait.

20 Et Ehud s’approcha du roi ; il était assis dans la chambre haute réservée pour lui, pour prendre le frais, et Ehud dit : J’ai pour toi une parole de Dieu. Et le roi se leva de son siège.

S’approcha : comme pour lui parler tout bas.

Chambre haute : construite sur le toit plat de la maison.

Une parole de Dieu. Il y a de l’ironie dans ce terme.

Se leva : sans doute en signe de respect pour un message divin ; Ehud lui a annoncé une communication de Dieu (Elohim). Ce mot désigne la divinité en général et non pas le Dieu national des Hébreux (Jéhova). Comparez Nombres 23.18, où Balaam invite Balak à se lever, pour recevoir l’oracle qui lui est destiné.

21 Alors Ehud avança la main gauche, prit l’épée qui était sur sa hanche droite et la lui enfonça dans le ventre. 22 Et la poignée elle-même entra après la lame, et la graisse se referma sur la lame, car il ne retira pas l’épée de son ventre, et la lame sortit par derrière.

Le sujet que nous donnons au verbe sortit (la lame), n’est pas dans le texte. Il est peu probable que ce soit Ehud, puisqu’il est expressément nommé au commencement du verset suivant. Ce pourrait être Elglon, mais la suite ne s’expliquerait que difficilement.

Par derrière. Le mot hébreu ne se retrouve nulle part. Il indique une séparation et peut désigner soit le point de séparation entre les deux jambes, soit un endroit retiré, comme un lieu d’aisances, soit les excréments, comme ce que l’on jette à l’écart. Le premier sens est admissible si la lame est sous-entendue comme sujet ; mais la forme hébraique (le local) ne convient guère à ce sens. Le second supposerait Églon comme sujet de sortit et signifierait que, déjà transpercé, il fit effort pour se retirer dans le lieu d’aisances, tandis qu’Ehud courait à la porte extérieure pour s’enfuir. Dans le troisième sens, ce serait Ehud qui serait sujet du verbe, ce qui n’est point naturel au point de vue grammatical.

23 Et Ehud sortit au portique, ferma sur lui les portes de la chambre haute et tira le verrou.

Et Ehud sortit au portique. Le mot hébreu traduit par portique ne se présente également nulle part ailleurs. Il semble indiquer une rangée de colonnes, d’arbres, de degrés ; c’est donc ou un corridor ou un escalier, celui par lequel on pouvait descendre directement de la chambre haute au vestibule de la maison. Ehud s’éloigne par là au lieu de sortir par la porte par laquelle on entrait ordinairement et qui donnait sur la terrasse.

Il ferma. Il faut sous-entendre ici les mots : Et avant de sortir. Il ferme intérieurement la porte s’ouvrant sur la terrasse.

Sur lui : sur Églon (Genèse 7.16) ; et lui-même sortit par l’escalier de derrière.

24 Et quand il fut sorti, les serviteurs du roi vinrent et ils virent que les portes de la chambre haute étaient fermées au verrou. Et ils dirent : Sans doute, il se couvre les pieds dans la chambre de fraîcheur.

Les serviteurs, à leur retour, trouvant la porte de devant fermée, pensent que c’est le roi lui-même qui a mis le verrou.

Il se couvre les pieds : satisfait la nature (1 Samuel 24.4).

25 Et ils attendirent si longtemps qu’ils en étaient honteux, et voici, comme il n’ouvrait pas les portes de la chambre haute, ils prirent la clé et ouvrirent, et voici leur maître gisait par terre, mort.

Après une longue attente, qui leur semble ridicule, ils se décident à entrer au moyen de la clef qui du dehors pouvait repousser le verrou.

26 Pendant qu’ils tardaient, Ehud s’enfuyait ; il dépassa les pierres taillées et se sauva dans la Séira.

Mais grâce à cette attente. Ehud a eu le temps de s’enfuir.

Dans la Séira. Ce mot signifie : pays hérissé, il désigne peut-être la partie méridionale de la montagne d’Éphraïm, couverte de bois et où nous pouvons penser qu’habitaient des gens de la tribu de Benjamin, à laquelle appartenait Ehud.

27 Et quand il fut arrivé, il sonna de la trompette dans la montagne d’Éphraïm, et les fils d’Israël descendirent avec lui de la montagne, et il était à leur tête. 28 Et il leur dit : Suivez-moi, car l’Éternel a livré entre vos mains les Moabites, vos ennemis. Et ils descendirent à sa suite et ils s’emparèrent des gués du Jourdain [pour les fermer] aux Moabites, et ne laissèrent passer personne. 29 Et ils battirent Moab en ce temps-là, environ dix mille hommes, tous robustes et vaillants, et pas un n’échappa.

Tous robustes…, littéralement : tous gras ; l’élite de l’armée.

30 Et Moab fut en ce jour humilié sous la main d’Israël et le pays fut en repos quatre-vingts ans.

Quatre-vingts ans : non qu’Ehud ait pu juger le peuple aussi longtemps ; mais les heureux effets de sa victoire se firent sentir durant tout ce temps, au moins dans cette portion du pays.

31 Et après lui, il y eut Samgar, fils d’Anath ; et il battit les Philistins, six cents hommes, avec un aiguillon à bœufs. Et lui aussi délivra Israël.

Samgar. C’est ici un épisode de l’histoire d’Israël qui s’est passé au sud-ouest de la Terre Sainte, du côté des Philistins, pendant le cours des quatre-vingts ans de repos procurés par la victoire d’Ehud. Un conflit quelconque avec les Philistins fut l’occasion de cet exploit de Samgar : car il n’est pas question encore d’une oppression exercée par ce peuple.

Un aiguillon à bœufs. Les agriculteurs en Palestine et en Syrie se servent de cet instrument, surtout pendant les labours. Il a en général 2 à 2,5 mètres de longueur et, à l’extrémité la plus large, 15 cm de circonférence. Il est muni à l’un des bouts d’une pointe de fer très aiguë, l’aiguillon proprement dit et à l’autre bout d’une étroite lame de fer pour nettoyer le soc de la charrue de la terre qui s’y attache.

Nous devons nous représenter Samgar à la tête de ses gens qu’il entraînait par son courage.

Lui aussi délivra Israël : la contrée d’Israël la plus voisine des Philistins.

Samgar est le premier des six juges appelés petits.