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Jérémie 9
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Jérémie 9

Infidélité du peuple

  • La mauvaise foi détruisant toute vie sociale, versets 2 à 9
  • désolation prochaine de Jérusalem, versets 10 à 16
  • appel des pleureuses, versets 17 à 22
  • l’unique sujet de confiance, versets 23 et 24
  • la fausse circoncision
1 Qui changera ma tête en eaux et mes yeux en source de larmes, pour que je pleure nuit et jour les blessés de la fille de mon peuple ! 2 Qui me donnera au désert une cabane de voyageurs ! J’abandonnerais mon peuple et je m’en irais d’avec eux ; car ils sont, eux, tous des adultères ; c’est une assemblée d’infidèles ;

Selon le texte hébreu, ce verset est le premier du chapitre 9.

Cabane de voyageurs : khan ou caravansérail, comme on en voit encore en Orient ; hangar vide où s’abritent les voyageurs.

Toutes les âmes saintes ont éprouvé ces moments de lassitude au contact des souillures du monde qui les environnait ainsi David (Psaumes 55.7-8) ; Élie (1 Rois 19.4) ; Jésus lui-même (Marc 9.19). Mais Dieu les appelait à la lutte et ne leur a point permis de se réfugier dans la solitude.

Une assemblée d’infidèles. Le premier de ces termes désigne d’ordinaire les réunions solennelles du peuple de Dieu ; il est employé ici par ironie, comme si nous disions : une église d’incrédules.

3 ils bandent leur langue comme leur arc, pour mentir ; ce n’est pas par la vérité qu’ils règnent dans le pays, car ils vont de mal en mal et ne me connaissent pas, dit l’Éternel.

Ils bandent leur langue. La langue est l’arc et le mensonge le trait.

Ils règnent : le prophète parle des administrateurs du peuple.

4 Gardez-vous chacun de son ami, et ne vous fiez à aucun frère ; car tout frère ne fait que supplanter, et tout ami va calomniant.

Supplanter : allusion à la conduite de Jacob et à son nom.

5 Chacun dupe l’autre ; ils ne disent pas la vérité ; ils exercent leur langue à mentir ; ils se travaillent à mal faire.

Ils exercent : ils s’étudient à bien mentir.

Ils se travaillent à… ironique : ils se donnent autant de peine pour faire du mal que l’on doit s’en donner pour faire le bien.

6 Tu habites au milieu de la mauvaise foi ; c’est par mauvaise foi qu’ils refusent de me connaître, dit l’Éternel.

Tu habites : Dieu parle au prophète.

Le mensonge souille leur relation avec Dieu aussi bien que leur conduite entre eux et avec le prophète.

Les fondre au creuset : même image Jérémie 6.28-30 ; le châtiment est représenté comme le seul moyen de purification qui reste encore au pouvoir de Dieu.

7 C’est pourquoi l’Éternel des armées parle ainsi : Voici, je vais les fondre au creuset pour les éprouver ; car que faire avec la fille de mon peuple ? 8 C’est un dard meurtrier que leur langue ; elle ne dit que mensonge ; de la bouche on dit : Paix, à son prochain, et dans le cœur on lui dresse des embûches.

Dard meurtrier. Comparez Romains 3.13.

On saluait en disant : Paix vous soit donné ! (Matthieu 10.12-13 ; Jean 20.19-21) !

9 Et pour toutes ces choses je ne les punirais pas, dit l’Éternel ; et je ne me vengerais pas d’une nation comme celle-là !

Reproduction textuelle de Jérémie 5.9.

10 Sur les montagnes j’élèverai une complainte et des lamentations ; sur les pâturages du désert, un chant de deuil ; car ils sont brûlés au point que personne n’y passe ; on n’y entend plus la voix des troupeaux ; depuis l’oiseau des cieux jusqu’au bétail, tous ont fui, s’en sont allés ;

Plus de villes, plus d’hommes, plus de bétail, plus même d’oiseaux ; plus que des chacals !

11 et je ferai de Jérusalem des tas de pierres, un repaire de chacals ; et je ferai des villes de Juda une solitude où personne n’habite. 12 Quel est l’homme sage, qui comprenne ces choses ? Et celui à qui la bouche de l’Éternel a parlé, qu’il les fasse connaître ! Pourquoi le pays est-il détruit, brûlé comme le désert, où personne ne passe.

Le peuple ne saurait répondre à cette question si simple sans se condamner lui-même. C’est pourquoi Dieu répond à sa place.

13 Et l’Éternel a dit : C’est qu’ils ont abandonné ma loi que j’avais mise devant eux ; qu’ils n’ont point écouté ma voix, et ne l’ont point suivie ; 14 mais ils ont marché selon l’endurcissement de leur cœur ; ils ont suivi les Baals que leurs pères leur ont enseignés.

Leur ont enseignés. Le père devait enseigner la loi du vrai Dieu à ses enfants (Deutéronome 4.9). Mais le nom de Baal avait remplacé celui de Jéhova dans ces instructions domestiques.

15 C’est pourquoi l’Éternel des armées, le Dieu d’Israël, parle ainsi : Voici, je vais nourrir ce peuple d’absinthe et je l’abreuverai d’eaux empoisonnées ;

L’absinthe. Plante très amère, non mangeable. Cet aliment et ce breuvage repoussants sont l’image des maux du siège, de la prise de la ville et enfin de l’exil qu’ils seront contraints de subir.

Eaux empoisonnées : Lamentations 3.15 ; Lamentations 3.19 ; Apocalypse 8.10-11.

16 et je les disperserai parmi des nations que ni eux, ni leurs pères n’ont connues, et j’enverrai l’épée après eux jusqu’à ce que je les aie exterminés.

L’épée après eux : par exemple, après ceux d’entre eux qui s’enfuiront en Égypte. Comparez Jérémie 42.16 et Jérémie 44.1-30. Combien d’autres furent massacrés sur le chemin de l’exil !

Jusqu’à ce que… Cette menace ne concernait que les impies. Ce passage est une reproduction de Lévitique 26.33 et Deutéronome 28.64.

17 Ainsi a dit l’Éternel des armées : Pensez à commander les pleureuses, et qu’elles viennent ! Envoyez chez celles qui savent, et qu’elles viennent ;

Lugubre ironie ; n’oubliez pas de faire les apprêts de vos propres funérailles ! Il faudra des pleureuses et il les faudra même toutes prêtes et habiles. Il ne faut donc plus tarder à les assurer. Les pleureuses étaient louées en temps de deuil pour multiplier ces manifestations bruyantes de la douleur par lesquelles les peuples du Midi et de l’Orient croient honorer ceux qui ne sont plus ; Jérôme nous les dépeint, chez les Hébreux de son temps, entonnant leurs chants funèbres, la poitrine nue, les cheveux épars. Ces lamentations avaient leur rituel et leurs formulaires qu’il fallait apprendre ; de là l’expression : celles qui savent ; c’est-à-dire celles qui sont le plus expertes dans leur art. Le talent d’exécution devra se montrer digne des circonstances.

18 qu’elles se hâtent et élèvent sur nous des lamentations ; que nos yeux fondent en larmes et que nos paupières ruissellent d’eau ! 19 Car une voix de lamentations a été entendue de Sion : Comment sommes-nous maltraités, confondus à ce point que nous abandonnions le pays, parce qu’on a renversé nos demeures ? 20 Femmes, écoutez la parole de l’Éternel, et que votre oreille reçoive la parole de sa bouche : enseignez à vos filles une lamentation et chacune à sa compagne un chant de deuil ;

Le prophète invite les mères israélites à faire enseigner à leurs filles le métier de pleureuses ; car c’est le seul qui sera en rapport avec la catastrophe imminente.

21 car la mort est montée par nos fenêtres, elle est entrée dans nos palais pour retrancher l’enfant de la rue et les jeunes gens des places publiques.

Car la mort. Comme un voleur ou un ennemi.

Pour retrancher… En vidant les maisons, la mort vide par là même les rues et les places publiques.

22 Parle : Ainsi a dit l’Éternel : Le cadavre de l’homme est tombé comme du fumier sur la surface d’un champ, et comme la javelle derrière les moissonneurs, sans que personne la ramasse.

Comme la javelle. Le moissonneur coupe des poignées d’épis avec la faucille puis il les jette derrière lui sur le champ, afin qu’elles soient ramassées par l’ouvrier qui le suit. Les hommes tués seront semblables à des javelles jetées à terre par le grand moissonneur et il n’y aura personne pour relever et inhumer tous ces cadavres. Même pensée sous d’autres images Jérémie 8.1-3.

23 Ainsi a dit l’Éternel : Que le sage ne se glorifie pas de sa sagesse, et que le fort ne se glorifie pas de sa force ; que le riche ne se glorifie pas de sa richesse ;

La cause de la ruine (verset 23) et le moyen du salut (verset 24). Ce qui a perdu Israël, c’est la confiance en sa propre politique et en ses propres ressources, en argent et en hommes. Ce qui pourrait le sauver, ce serait de renoncer à toute force et sagesse propre et de mettre sa confiance dans le Dieu qui s’est fait connaître à lui et dont la grâce et la justice sont ses seuls appuis solides. Comparez 1 Corinthiens 1.31.

24 mais que celui qui se glorifie se glorifie en ceci : d’avoir du bon sens et de me connaître, parce que je suis l’Éternel qui fais miséricorde, droit et justice sur la terre ; car c’est à cela que je prends plaisir, dit l’Éternel. 25 Voici, des jours viennent, dit l’Éternel, où je châtierai tout circoncis incirconcis,

Ce passage obscur est susceptible de trois interprétations :

  1. On peut traduire : je châtierai tout circoncis avec (littéralement dans) l’incirconcis.
  2. Cette traduction ferait bien comprendre pourquoi Juda se trouve mêlé dans l’énumération suivante à divers peuples païens et incirconcis. Il partagera leur sort comme il a partagé leur infidélité. Le sens est simple, clair. Mais cette traduction est difficile à défendre.
  3. On peut appliquer cette expression du prophète (selon la seule traduction vraiment naturelle : le circoncis incirconcis), à Juda et à Juda uniquement, en ce sens que, tout en étant extérieurement circoncis, Juda a le cœur infidèle des incirconcis. C’est à ce titre que Juda serait jeté, dans l’énumération suivante, au milieu des nations incirconcises de corps et de cœur qui l’avoisinent, afin de lui faire bien comprendre que, malgré sa circoncision corporelle, il n’en sera pas moins jugé et châtié comme tous les incirconcis : pour ton incirconcision de cœur, tu seras châtié, aussi bien que tes voisins incirconcis (verset 25) et que tous les Gentils en général (verset 26).
  4. L’expression : circoncis incirconcis, peut être appliquée non à Juda seulement, mais encore à ces nations dont les noms accompagnent le sien. Il faut nécessairement admettre dans ce cas que la circoncision était en usage chez ces peuples. Nous n’avons pas de preuve historique en faveur de cette manière de voir, si ce n’est à l’égard des prêtres égyptiens. Mais on pourrait supposer qu’il en avait été primitivement ainsi chez les quatre autres peuples qui descendaient soit d’Abraham (Édomites et Ismaélites du désert), soit de Lot (Moabites et Ammonites). Le prophète dans ce cas dirait à Juda : S’agit-il de la circoncision du corps ? Tu n’es en rien supérieur à ces quelques nations qui la pratiquent aussi bien que toi (verset 25). S’agit-il de celle du cœur ? Tu es sur la même ligne que tous les peuples païens en général, car tu n’es pas moins vicieux qu’eux tous (verset 26).

Que l’on admette le second ou le troisième sens, l’intention de ces versets est en tout cas de montrer que là où règne l’incirconcision du cœur, le jugement de Dieu ne sera pas arrêté par la circoncision du corps et que par conséquent Juda ne doit se faire aucune illusion sur le sort qui l’attend aussi bien que ses voisins idolâtres. C’est exactement la pensée développée par saint Paul Romains 2.25 et suivants.

Ceux qui se rasent les tempes : épithète désignant, comme Jérémie 25.23 et Jérémie 49.32, quelques tribus arabes. Hérodote dit (III, 8) que les Arabes se coupent les cheveux en rond et se rasent le tour des tempes en l’honneur de Bacchus. Toutes ces pratiques étaient interdites par la loi (Lévitique 19.27) à cause de leur affinité avec l’idolâtrie.

26 l’Égypte, Juda, Édom, les fils d’Ammon, Moab et tous ceux qui se rasent les tempes, les habitants du désert ; car toutes les nations sont incirconcises, et toute la maison d’Israël est incirconcise de cœur.