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2 Rois 6
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

1 Et les fils des prophètes dirent à Élisée : Tu le vois, le local où nous sommes assis devant toi, est trop petit pour nous ;

La hache retirée du Jourdain (1-7)

Ce miracle, qui a pour but le bien d’un des membres des communautés prophétiques, se rattache à ceux qui sont racontés à la fin du chapitre 4. Il en a été séparé pour donner place à l’histoire de Naaman ; peut-être y est-il postérieur. La communauté de prophètes dont il est ici parlé, est probablement celle de Jéricho, dans le voisinage du Jourdain (2 Rois 2.5).

Le local : non pas leur lieu d’habitation, car ils ne demeuraient pas en commun (voir 2 Rois 4.1), mais leur salle de réunion. Elle se trouvait être trop petite, en particulier quand Élisée visitait les prophètes et les rassemblait autour de lui.

2 nous irons, si tu le veux, jusqu’au Jourdain, nous y couperons chacun une poutre et nous nous y ferons un local pour s’y asseoir. Et Élisée dit : Allez.

Ils ne veulent rien faire sans son conseil, ni même sans sa présence (2-3)

3 Et l’un deux dit : Veuille, je te prie, venir avec tes serviteurs. Et il dit : J’irai. 4 Et il alla avec eux et ils vinrent au Jourdain et coupèrent du bois.

Au Jourdain. Les bords de ce fleuve sont riches en arbres de haute et de basse futaie.

5 Et comme l’un d’eux abattait sa poutre, son fer tomba dans l’eau et il s’écria : Ah ! Mon seigneur !
Et il était emprunté !

Emprunté : littéralement : demandé (Exode 12.35). Cette circonstance rendait la perte doublement pénible pour un homme pauvre.

6 Et l’homme de Dieu dit : Où est-il tombé ? Il lui montra la place et Élisée coupa un morceau de bois, l’y jeta, fit surnager le fer,

Fit surnager le fer. Plusieurs ont pensé qu’Élisée avait taillé en pointe la branche coupée et qu’en l’enfonçant dans l’eau elle avait précisément rencontré le trou de la hache destiné à recevoir le manche. Mais il n’est point dit qu’Élisée ait taillé le bois et l’auteur veut évidemment raconter un fait miraculeux. La pensée du récit est plutôt que le fer a, par l’effet d’une attraction miraculeuse, adhéré au bois plongé dans l’eau et a été ainsi ramené à la surface.

On a jugé un tel miracle indigne de Dieu. Mais il servait à montrer à des jeunes gens réunis pour son service, dans une époque de déchéance spirituelle, qu’ils pouvaient compter sur lui dans les plus petites comme dans les plus grandes détresses. C’est aussi la raison pour laquelle un incident aussi futile en apparence a paru digne d’être rapporté.

7 et il dit : Prends-le. Et il étendit sa main et le prit. 8 Et le roi de Syrie était en guerre avec Israël, et il tint conseil avec ses serviteurs et leur dit : Vous vous posterez dans tel et tel endroit.

Élisée et les Syriens (6.8 à 7.20)

Versets 8 à 23 — Mansuétude d’Élisée à l’égard des Syriens

Était en guerre. Il n’y avait pas guerre proprement dite ; c’étaient des incursions locales que se permettaient les Syriens.

9 Et l’homme de Dieu fit dire au roi d’Israël : Garde-toi de négliger ce lieu, car les Syriens y descendent.

De négliger ce lieu. Plusieurs traduisent : De passer par ce lieu, ce qui répond mieux au sens ordinaire du verbe, mais ne s’accorde pas avec ce qui suit.

10 Et le roi d’Israël envoya vers le lieu que l’homme de Dieu lui avait dit et le surveilla et s’y mit en garde. Et cela eut lieu non pas une fois, ni deux fois. 11 Et le cœur du roi du Syrie fut tout troublé de cela ; et il appela ses serviteurs et leur dit : Ne me ferez-vous pas connaître qui des nôtres est pour le roi d’Israël ? 12 Et un de ses serviteurs dit : Non, roi mon seigneur, car c’est Élisée, le prophète qui est en Israël, qui fait savoir au roi d’Israël les paroles que tu dis dans la chambre où tu couches. 13 Et il dit : Allez et voyez où il est, et je l’enverrai prendre. Et on lui fit ce rapport : Il est à Dothan.

Allez et voyez. C’était une inconséquence ; car il devait se dire qu’Élisée connaîtrait aussi son projet et le déjouerait, comme cela est arrivé.

Dothan. Voir Genèse 37.17, note.

14 Et il y envoya de la cavalerie, des chariots et une grande troupe, qui vinrent de nuit et cernèrent la ville. 15 Et le lendemain, matin, le serviteur de l’homme de Dieu se leva et sortit, et voici une troupe entourait la ville avec de la cavalerie et des chars ; et le garçon d’Élisée lui dit ; Hélas, mon seigneur, comment ferons-nous ? 16 Et Élisée dit : Ne crains pas : ceux qui sont avec nous sont plus nombreux que ceux qui sont avec eux.

Plus nombreux. Comme les Syriens entouraient toute la ville, il semble que les anges qui entouraient Élisée devaient être beaucoup moins nombreux que les Syriens, mais ils formaient une très épaisse muraille de défense autour de leur protégé. Cette vision accordée au serviteur d’Élisée à la demande du prophète représentait symboliquement une puissance protectrice infiniment supérieure à celle des assaillants. Elle était destinée à élever sa foi à la hauteur de celle de son maître qui pour lui-même n’avait pas besoin d’un pareil signe (comparez Jean 12.28-30).

17 Et Élisée pria en disant : Éternel, je te prie, ouvre ses yeux et qu’il voie !
Et l’Éternel ouvrit les yeux du garçon, et il vit ; et voici, la montagne était pleine de chevaux et de chariots de feu tout autour d’Élisée. 18 Et comme [les Syriens] descendaient vers lui, Élisée pria l’Éternel et dit : Frappe, je te prie, cette nation d’aveuglement. Et il les frappa d’aveuglement selon la parole d’Élisée.

Et comme les Syriens descendaient… Il faut admettre qu’un gros de Syriens était campé sur la colline plus élevée qui domine à l’est celle de Dothan et qu’ils s’avançaient de là pour attaquer la ville. D’autres traduisent : Ils (Élisée et son serviteur) descendaient vers lui (vers Aram, c’est-à-dire les Syriens), ce qui est un peu forcé.

Cette nation. Dans le même sens que Josué 3.17 : cette multitude. La prière d’Élisée a la puissance de fermer les yeux des uns aussi bien que d’ouvrir ceux des autres (verset 17). Cet aveuglement, semblable à celui de l’ivresse, rappelle celui des habitants de Sodome produit par le pouvoir des deux anges ; c’est un état dans lequel, tout en voyant, on est incapable d’apprécier ce qu’on voit.

19 Et Élisée leur dit : Ce n’est pas ici le chemin et ce n’est pas ici la ville. Suivez-moi et je vous conduirai vers l’homme que vous cherchez. Et ils les conduisit à Samarie.

Vers l’homme que vous cherchez. Sous ce mensonge apparent se cache une vérité. Entre lui et eux existe une impénétrable muraille : la volonté divine qui les empêche de s’emparer de lui. Cette muraille ne tombera que quand ils seront arrivés à l’endroit où il les conduit et où ils ne pourront plus rien contre lui.

Samarie : située à 16 km au sud de Dothan.

20 Et quand ils furent arrivés à Samarie, Élisée dit : Éternel, ouvre leurs yeux et qu’ils voient !
Et l’Éternel ouvrit leurs yeux, et ils virent ; et voici, ils étaient au milieu de Samarie.

Ouvre leurs yeux : Fais cesser l’état d’aveuglement dans lequel ils sont plongés.

21 Et le roi d’Israël dit à Élisée, lorsqu’il les vit : Frapperai-je, frapperai-je, mon père ? 22 Et Élisée dit : Tu ne frapperas point. Est-ce des gens que tu as pris par ton épée et par ton arc, que tu frapperais ? Mets devant eux du pain et de l’eau, qu’ils mangent et boivent et qu’ils s’en aillent vers leur seigneur.

On peut traduire ou : Frappe-t-on ceux qu’on a faits prisonniers ? Réponse : Non, ce serait une cruauté. Mais dans les mœurs anciennes, c’était ce qui se faisait fréquemment. Ou bien : Tu n’aurais le droit de les frapper que s’ils avaient été faits prisonniers par ta main. Mais ce sens ne s’accorde pas avec la particule d’interrogation qui est dans le texte. Nous expliquons donc : En les frappant, frapperais-tu des gens que tu as toi-même faits prisonniers ? À cette condition seule cet acte serait légitime.

23 Et il leur fit un grand repas, et ils mangèrent et burent, et il les renvoya, et ils s’en allèrent vers leur seigneur ; et les troupes de Syrie ne continuèrent plus à venir dans le pays d’Israël.

En amassant ainsi des charbons ardents sur la tête de ces ennemis, le roi servait les intérêts d’Israël bien mieux qu’en les massacrant cruellement.

Ne continuèrent plus… Ce n’est pas à dire que la paix ne fut plus troublée entre les deux peuples (comparez verset 24), mais cela signifie que ces razzias des Syriens cessèrent pour un temps. Israël recouvra ainsi quelque sécurité. C’est peut-être à ce moment-là qu’il faut placer l’incident de Naaman, qui suppose un temps de paix entre Israël et la Syrie. La petite fille qui fut l’instrument de l’arrivée du général syrien avait sans doute été emmenée dans l’une de ces razzias qui avaient précédé (comparez le terme guedoudim avec 2 Rois 5.2).

24 Et il arriva après ces choses que Ben-Hadad, roi de Syrie, rassembla toute son armée et monta contre Samarie et l’assiégea.

Siège et délivrance de Samarie (6.24 à 7.20)

Ben-Hadad : Ben-Hadad II, fils de Ben-Hadad I (1 Rois 15.18). Il avait fait d’abord à deux reprises la guerre à Achab ; il avait été battu et épargné (1 Rois 20.30-32). Plus tard, leurs troupes s’étaient unies pour combattre Salmanasar II, roi d’Assyrie, qui les avait battus à Karkar. Enfin, devant Ramoth de Galaad, Achab, uni à Joram de Juda, avait perdu la vie en défendant cette ville contre l’armée syrienne qui cherchait à s’en emparer. Ben-Hadad reparaît ici, vers la fin de sa vie, comme l’ennemi invétéré d’Israël.

25 Et il y eut une si grande famine dans Samarie et une si grande détresse qu’une tête d’âne valait quatre-vingts sicles d’argent, et le quart de kab de fiente de pigeon cinq sicles d’argent.

Une tête d’âne, le quart de kab de fiente de pigeon : les aliments les plus méprisables et dégoûtants. L’âne en Orient est un animal impur et la loi mosaïque en interdit la consommation (Deutéronome 14.3-5), comme le fait aussi le Coran.

Quatre-vingts sicles : environ 1,2 kg d’argent.

Kab, mesure de capacité qui ne se trouve mentionnée qu’ici ; c’était d’après les rabbins la dix-huitième partie de l’épha, qui contenait à peu près trente litres (Ésaïe 5.10 ; Lévitique 5.11). Quelques-uns ont entendu l’expression de fiente de pigeon d’une espèce de graine qui, chez les Arabes, porte le nom de fiente de moineau.

Cinq sicles : soit 75 grammes, environ.

26 Et comme le roi d’Israël passait sur la muraille, une femme lui cria, disant : Secours-moi, mon seigneur le roi !

Samarie était bâtie sur une colline haute de cent vingt mètres et était entourée de puissantes murailles.

27 Et il lui dit : Puisque l’Éternel ne te secourt pas, avec quoi te secourrai-je ? Avec l’aire ou avec le pressoir ?

Expression d’impuissance : Dieu seul peut faire ce que tu me demandes. Je n’ai en provision ni pain, ni vin !

28 Puis le roi lui dit : Qu’as-tu ? Et elle dit : Cette femme m’a dit : Donne ton fils et nous le mangerons aujourd’hui, et demain nous mangerons mon fils.

Le roi remarque que c’est autre chose que la faim qui la préoccupe et lui demande explication.

Ton fils : accomplissement de Lévitique 26.29 et Deutéronome 28.53-57. Comparez Lamentations 2.20 ; Lamentations 4.10. Un fait pareil s’est renouvelé lors du siège de Jérusalem par Titus. L’histoire profane ne cite pas de traits semblables.

29 Et nous avons cuit mon fils et nous l’avons mangé ; et quand je lui ai dit le jour suivant : Donne ton fils, que nous le mangions, elle a caché son fils. 30 Lorsque le roi entendit les paroles de cette femme, il déchira ses vêtements ; et il passait sur la muraille, et le peuple vit qu’il avait un sac sur sa chair, en dessous.

Déchira ses vêtements, en signe d’horreur.

Un sac sur sa chair. Les témoins de la scène remarquèrent alors ce signe de contrition et comprirent que le roi s’associait à la détresse du peuple.

31 Et il dit : Qu’ainsi Dieu me fasse et qu’ainsi il y ajoute, si la tête d’Élisée, fils de Saphat, demeure sur lui aujourd’hui !

Joram en voulait-il à Élisée d’avoir conseillé une résistance qui amenait des conséquences si épouvantables et promis faussement la délivrance ? Il avait attendu celle-ci comme fruit de la pénitence que prêchait Élisée et maintenant, en ne la voyant pas venir, il se retournait contre lui. Dans tous les cas nous avons constaté déjà qu’il ne devait pas être animé de sentiments bienveillants à l’égard de ce prophète (2 Rois 3.11-14).

32 Or Élisée était dans sa maison, et les Anciens étaient assis avec lui ; et le roi envoya un de ses serviteurs auprès de lui. Et avant que le messager arrivât vers lui, Élisée avait dit aux Anciens : Voyez-vous ! Ce fils de meurtrier a envoyé quelqu’un pour me couper la tête. Voyez, quand le messager arrivera, fermez la porte et repoussez-le avec la porte. N’entend-on pas derrière lui les pas de son maître ?

Les Anciens : les notables du peuple réfugiés à Samarie. On les consultait dans les circonstances graves (1 Rois 20.7).

Ce fils de meurtrier ; Joram, fils d’Achab, assassin de Naboth.

Le messager, chargé de tuer Élisée.

Les pas de son maître ? Élisée est averti miraculeusement non seulement de l’arrivée de ce messager, mais de celle de Joram, qui le suit de près. Joram venait-il pour s’assurer de l’exécution de son ordre, ou au contraire accourait-il dans un mouvement de repentance pour le rétracter ? On comprend mieux dans le second cas qu’à cette victoire du bon esprit dans le cœur du roi le prophète réponde par la promesse de délivrance (2 Rois 7.1). Le texte est si concis dans tout ce passage qu’il n’est pas aisé à comprendre.

33 Comme il parlait encore avec eux, on vit descendre vers lui le messager. Et il dit : Voici, ce mal vient de l’Éternel, comment m’attendrais-je encore à l’Éternel ?

Vers lui : vers Élisée.

Et il dit. Évidemment il s’agit de Joram lui-même, qui avait suivi le messager. On ouvrit la porte pour le roi et c’est lui qui prononce les paroles suivantes. Il cherche à provoquer par cette déclaration désespérée une parole décisive du prophète qui l’a encouragé à la résistance.