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Orient
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet Westphal Bost

Les Hébreux marquent l’orient par kedem qui signifie le devant ; le couchant, par le derrière ; le midi, par la droite ; et le septentrion, par la gauche ; suivant la situation d’un homme qui aurait le visage tourné à l’orient. Ils désignent assez souvent, sous le nom d’Orient, non-seulement l’Arabie Déserte et les pays de Moab et d’Ammon qui étaient véritablement à l’orient de la Palestine, mais aussi l’Assyrie, la Mésopotamie, la Babylonie, la Chaldée, qui sont autant au septentrion qu’à l’orient de la Judée. Voyez ci-devant Kedem, où nous avons montré que sous le nom de Kedem ou d’Orient, les Hébreux entendaient souvent les pays de delà l’Euphrate, et ceux qui dans la rigueur sont autant au nord qu’à l’orient de la Palestine.

Orient

Les prophètes donnent quelquefois le nom d’Orient au Messie : Ecce vir, Oriens nomen ejus, dit Zacharie (Zacharie 6.12). Et ailleurs (Zacharie 3.8) : Tzemath : Je ferai venir mon serviteur l’Orient. L’Hébreu ne lit pas l’Orient, mais le Germe, le Rejeton. Jésus-Christ est le Germe, le Rejeton de la maison de David. Il est aussi l’Orient, le Soleil de justice qui se lève pour nous éclairer et pour nous tirer des ombres de la mort. On donne au Messie le même nom de Germe dans Isaïe (Isaïe 4.2 ; Jérémie 23.5 ; 33.15) ; et cette dénomination est une espèce de prophétie de sa naissance miraculeuse d’une vierge [L’Orient est le berceau des peuples de l’Occident. Jusqu’en 1837 nous avions fait peu de progrès dans la conquête et la pacification de la régence d’Alger. M. Dureau de la Malle a voulu en rechercher les causes ; la géognosie et l’éthuologie les lui ont révélées, et il a fait sur ce sujet un mémoire, lu à l’académie des sciences dans la séance du 10 avril 1837, et inséré dans le tome 4 des Comptes rendus des travaux de cette assemblée, pages 547-550. Nous allons extraire de ce mémoire un long passage dans lequel se trouve confirmé le récit de Moïse touchant la patrie primitive du genre humain, la dispersion des peuples.

Dans une position géographique donnée, dit M. Bureau de la Malle, la nature du sol et sa forme, qui résultent de causes toutes géognostiques, établissent les principales questions de l’existence des peuples, de leurs mœurs, de leurs habitudes et du rôle qu’une contrée a joué sur la scène du monde. Ce n’est pas seulement un climat à-peu-près uniforme qui fait de l’Inde supérieure, de la Perse, de l’Asie Mineure, de la Syrie, de la Grèce, de l’Italie, du midi de l’Allemagne et de la France, de toute la péninsule Ibérique, une région physique distincte ; c’est encore l’uniformité de leur constitution géognostique rlconnue aujourd’hui depuis Lisbonne jusqu’au Liban, ét même depuis les pentes orientales de l’Immaüs jusqu’aux points où les chaînes des Pyrénées, des montagnes espagnoles et portugaises, vont se perdre dans l’Atlantique. Les peuples de ces diverses contrées pouvaient, dans leurs migrations à travers cette large bande, retrouver avec le même ciel, les mêmes qualités du sol, les mêmes formes, les mêmes aspects, les mêmes productions, et toutes les circonstances physiques qui exercent une si puissante influence sur les peuples dans l’enfance de la civilisation.

Tout changeait, au contraire, de nature et d’aspect, si l’on se dirigeait, ou vers le nord, ou vers le midi. Là deux régions géognostiques d’une immense étendue ouvraient encore, de l’Orient à l’Occident, deux nouvelles voies aux mouvements des peuples, l’une en suivant les plaines sablonneuses de l’Arabie et de l’Afrique, l’autre à travers les immenses steppes des terrains tertiaires du nord de l’Asie et de l’Europe.

Ces antiques migrations des peuples, depuis longtemps effacées des pages de l’histoire, sont tracées en caractères indélébiles dans la constitution géologique du globe, dans les éléments de notre langage, dans le type et dans les formes de nos animaux domestiques. Ce grand événement de l’histoire primitive,.aucun monument écrit ne l’atteste, et cependant nul fait historique n’est mieux prouvé.

En moins de cinquante ans, les recherches patientes des philologues ont établi sur des témoignages irrécusables l’analogie et la filiation des idiomes indo-persans avec les langues anciennes et modernes de l’Europe.

Une étude longue et consciencieuse de l’histoire ancienne des animaux m’a démontré que la plus grande partie de nos espèces domestiques est originaire de l’Asie. Ainsi l’histoire naturelle, quoique procédant par d’autres moyens que la philologie, confirme ce fait remarquable : c’est que, antérieurement aux temps historiques, ii est venu dans notre Occident une grande immigration de peuples orientaux qui, s’avançant de l’est à l’ouest, à travers une vaste zone dont le climat, dont la constitution géognostique, dont les qualités du sol et les productions étaient semblables, nous ont apporté les éléments de leur langage, leur civilisation adulte, et les animaux qui en indiquent l’origine et le progrès. Les recherches que j’ai entreprises sur l’histoire ancienne de nos oiseaux domestiques, de nos céréales et de nos plantes usuelles n’ont fait jusqu’ici que confirmer ce résultat.

Maintenant l’histoire positive doit être appelée en témoignage.

L’empire persan naît avec Cyrus et grandit sous ses successeurs. La configuration du terrain, le climat et les productions ont posé d’avance les jalons de la marche et du terme de ses conquêtes. De l’Imniaüs au Caucase, du Caucase au Taurus et au Liban, tout se soumet sans résistance, tout s’amalgame en peu d’années. C’est que les lois invariables de la nature et du climat avaient doué ces vastes régions du même ciel, du même sol, des mêmes productions ; c’est que les conséquences nécessaires de ces lois immuables avaient créé chez les habitants de cette zone l’identité de langage, l’identité de culture, enfin l’analogie de mœurs, d’habitudes et d’usages qui dérivent inévitablement de ces conditions naturelles et sociales.

L’ambition ne connaît point de bornes. Darius et ses successeurs aspirent à reculer les limites de leur immense empire. Le hasard ou la liberté sauvent la Grèce, que sa configuration, sa communauté d’origine exposaient à un danger imminent. La nature seule triomphe des bataillons innombrables de Darius dans les steppes herbeuses de la Scythie, tout comme elle anéantit d’un souffle les armées de Cambyse, dans les déserts arides et sablonneux de la Libye. La nature dit à l’invasion, comme Jéhovah à la mer : Jusqu’ici, pas plus loin.

Alexandre paraît en un moment dans tout l’univers, c’est-à-dire dans cotte vaste zone analogue à la Grèce de climat, de mœurs et de langage, qu’occupait l’empire persan. Il Fait plus ; il y sème la civilisation grecque ; mais cette plante exotique ne peut croître ni prendre racine dans les plaines glacées de la Transoxiane et dans les sables brûlants de l’Arabie. C’est un autre monde ; ce sont d’autres mœurs.

Rome, guerrière en naissant, semble avoir été fondée pour conquérir, gouverner et discipliner l’univers. Son histoire, si longue et si variée, doit servir de pierre de touche pour signaler le faux alliage, s’il en existe, dans la théorie que j’ai entrepris d’établir. Dans presque toute la zone montagneuse que j’ai signalée, dans la région des céréales, des peuples agricoles et sédentaires, elle porte ses aigles victorieuses, et le vol de l’oiseau de Jupiter n’est pas plus rapide que ses conquêtes. Où s’arrêtent les invasions successives de l’ambitieuse usurpatrice ? À l’est et au sud, devant les déserts brûlés de la Mésopotamie, de l’Arabie et de l’Afrique. Au nord, devant les marais et les forêts épaisses du terrain tertiaire de la Hollande et de la Germanie. Trajan ne franchit un moment ces limites naturelles que pour les voir tout à coup abandonnées. Ici l’exception confirme la règle. La loi du sol, du climat, qui commande les mœurs et les habitudes, cette loi puissante reste immuable, et prouve que le bras le plus fort, que les courages les plus fermes sont des roseaux qui ploient devant les forces irrésistibles de la nature.

La régence d’Alger nous offre dans sa constitution géognostique les deux zones qui ont déterminé, de l’orient à l’occident, l’émigration des peuples agriculteurs, et, du sud-ouest au nord-ouest, celle des peuples nomades. Aussi deux races bien distinctes s’y touchent sans se confondre. Ce sont, dans l’antiquité, les Numides et les Berbères ; de nos jours, les Arabes et les Cabaïles. Ici, comme dans les différentes zones que j’ai indiquées, la constitution géognostique du sol et le climat qui en dépend ont déterminé invariablement les différentes espèces de productions, de cultures et d’habitations, de mœurs, d’habitudes et d’usages qui en sont la conséquence obligée. Tels sont les faits positifs que nous présente l’histoire.

Quelles sont les premières colonies qui s’établissent sur la côte et dans les chaînes de l’Atlas qui avoisinent la mer ? C’est une population syrienne, chananéonne, habitante des montagnes de la Syrie et de la Palestine. Ici l’idiome diffère entièrement de l’idiome indo-persan. C’est le type, c’est la forme, c’est l’origine sémitique qui prédomine dans le Punique et qui envahit le Berbère. Cependant ces peuples, quoique différents de langage, conservent le mode d’habitation et de culture des peuples sortis de la souche indopersane, tant la constitution géologique d’une contrée a d’influence sur les inclinations dominantes des peuples. Voyez, au contraire, les Arabes. S’élançant, à la voix de Mahomet, de leurs plateaux déserts de l’Arabie, ils traversent en courant la Syrie et l’Afrique, et, en moins de cinquante ans, ils établissent entièrement leur domination sur toutes les plaines longitudinales qui s’étendent entre le grand et le petit Atlas, depuis l’Égypte jusqu’aux confins de l’empire de Maroc. Certes, la ferveur de l’islamisme naissant, l’audace et le mépris de la mort qu’il inspire à ses sectateurs ne peuvent pas seuls expliquer le fait d’une conquête si complète et si instantanée. C’est qu’ils trouvaient sur leur route des peuples déjà nomades, parlant une langue analogue, ayant des mœurs et des usages semblables, le cheval et le chameau pour montures, une tente de feutre pour maison, la polygamie pour règle conjugale, enfin les habitudes de guerre, de pillage, de liberté sans frein, d’indépendance sauvage, héritage que leur avaient transmis leurs ancêtres sortis, vingt siècles auparavant, des plaines sablonneuses de l’Arabie.

Nous ajouterons ce passage de M. Poujoulat, qui nous fait entrevoir les destinées réservées à l’Orient, et nous explique une parole du Sauveur (Jean 11.16).

Il n’est pas d’unité politique applicable aux diverses sociétés de notre globe, et à laquelle l’empire de l’univers soit dévolu ; mais il est une loi plus belle, plus haute, plus irrésistible, la loi chrétienne, qui doit conquérir le monde. Le progrès social, c’est la marche perpétuelle vers l’unité ; l’unité morale étant seule possible, c’est elle qui sera le dernier mot du genre humain. La civilisation évangélique, depuis dix-huit siècles, a poursuivi son chemin à travers les vévolutions.et la chute des États ; elle a marché tantôt avec le bâton de l’apôtre, et tantôt avec l’épée du guerrier. Dieu se sert parfois des passions des hommes et des malheurs des peuples pour l’établissement de la vérité. Le travail du monde sur lui-même est un travail de destruction, et souvent la Providence permet que les ruines soient fécondes. Oui, l’unité morale est le destin suprême de l’univers. La France, qui fit les guerres de la croix, ce mouvement magnifique vers l’unité chrétienne, la France, qui se montra toujours à la tête des sociétés européennes, a sa place marquée dans ce beau renouvell’ornent de l’humanité. Son génie est un génie conquérant ; donnez-lui une idée ou un glaive ; il faut qu’elle aille en avant, qu’elle s’élance au loin par ses armées, par ses écrivains ou par ses missionnaires. Le partage de l’Orient ne se fera pas sans nous ; il serait aussi difficile d’étouffer le génie d’une grande nation que d’arrêter un soleil dans sa course.

Une belle part est réservée au sacerdoce français dans ce mouvement de rénovation qui doit planter la croix sur toutes les capitales de l’Asie… L’Orient quittera le pâle linceuil de l’erreur pour revêtir la radieuse robe de la vérité ; il échappera à la nuit de l’islamisme comme le ressuscité de Béthanie avait échappé à la nuit du cercueil, et c’est surtout le sacerdoce français qui, debout en face du cercueil moral de l’Asie, appellera le divin maître à la délivrance de cet autre Lazare.

Les diverses nations se réuniront donc un jour sous une même loi morale, et ce n’est pas’en vain que la puissance de la va, peur, ce prodigieux moyen de rapprocher les distances, a été donnée à notre Ige.On ne verra plus qu’un seul troupeau et un seul pasteur. Quand s’accompliront ces temps, Jérusalem sera pour l’Asie une seconde Rome catholique. C’est alors que le genre humain, parvenu à l’unité chrétienne, sa fin dernière, sera trouvé assez beau pour être appelé dans les royaumes de la gloire incréée ; c’est alors que Dieu enlèvera de la terre la grande famille, comme on cueille un fruit mûr. ». [M. Poujoulat, Histoire de Jérusalem, C. 33 tome 2 pages 487-90].