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Onction
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet Westphal Bost

Les onctions étaient très-fréquentes parmi les Hébreux. Ils s’oignaient et se parfumaient par principe de santé et de propreté. Ils oignaient les cheveux, la tête, la barbe (Genèse 38.6-7). Dans les festins et dans les cérémonies de jouissance, ils oignaient tout le corps, et quelquefois seulement la tête ou les pieds (Psaumes 132.2). L’onction s’employait aussi sur les morts, pour les garantir de la corruption et de la puanteur (Marc 14.8 ; 16.1 ; Luc 23.56). On oignait les rois et les grands prêtres pour la cérémonie de leur inauguration (Exode 29.29 ; Lévitique 4.5 ; Juges 9.8 ; 1 Samuel 9.16 ; 1 Rois 1.45). On oignait même les vases sacrés du tabernacle et du temple, pour les sanctifier et les consacrer au service du Seigneur (Exode 30.26).

Ce terme d’onction en général signifie une sanctification particulière, une destination au culte de Dieu, à un usage saint et sacré. Par exemple, Jacob, allant en Mésopotamie, oignit d’huile la pierre sur laquelle il avait reposé et où Dieu lui avait fait voir une vision (Genèse 28.18). Cette onction était une espèce de dédicace de cette pierre, pour devenir un autel dédié au Seigneur. Quelques années après il revint au même lieu et consacra de nouveau cette pierre par l’onction sainte (Genèse 35.14). Dieu lui-même révèle à Moïse (Exode 30.23) la manière de faire l’huile, ou le parfum d’onction dont les prêtres et les vases du tabernacle devaient être oints. On y emploie les huiles et les parfums les plus exquis ; il ajoute : Cette huile ou ce parfum me sera consacré dans toutes les races ; la chair de l’homme ne s’en oindra point, et vous n’en ferez point de cette corn position pour vos usages ordinaires ; tout hotu, ni qui en composera de pareil et en donnera à un autre sera exterminé de son peuple. Ézéchiel reproche à son peuple d’avoir employé à son usage de pareil parfum (Ézéchiel 23.41).

L’onction que l’on donnait aux personnes consacrées à Dieu, et aux ornements sacrés, et aux ustensiles du temple et du tabernacle, aux autels, aux bassins, les tirait de l’usage commun et ordinaire et les élevait à une dignité nouvelle, les rendait saints, sacrés et inviolables. L’onction que reçut alors Aaron avec ses fils influa sur toute sa race, qui devint par là toute dévouée au service du Seigneur et consacrée à son culte. Or voici les cérémonies qui s’observèrent dans la consécration d’Aaron et de ses fils (Lévitique 8.1-11) : Moïse, les ayant amenés à la porte du tabernacle devant tout le peuple, les lava, les présenta au Seigneur, comme pour les lui faire agréer ; il revêtit Aaron de tous ses ornements pontificaux, et l’oignit d’huile sacrée en la répandant sur sa tête (Exode 29.7). Il la répandait sur ses cheveux, et elle coula sur sa barbe et sur sa tunique (Psaumes 132.2). On oignit même ses habits. Les rabbins croient qu’on répandit l’huile sur sa tête en forme de 10 ou de croix de saint André, ou, selon d’autres, en forme de caph ou D. Plusieurs croient que pour les simples prêtres fils d’Aaron, on leur oignit seulement les mains. On ne donna aucune onction aux lévites.

Ces cérémonies se continuèrent sept jours de suite. Les rabbins enseignent que tant que l’huile ou le parfum d’onction composé par Moïse dura, on oignit ainsi tous les grands prêtres qui succédèrent à Moïse pendant sept jours ; mais qu’après que ce parfum fut fini, on se contenta d’installer le grand prêtre en le revêtant pendant sept jours de suite de ses habits sacrés. Les grands prêtres oints de la première façon s’appelaient sacrificateurs oints (Lévitique 4.3 ; 5.16), et celui qui avait été simplement installé par la cérémonie des habits, initié par les habits. Ils disent qu’on ne fit jamais de nouvelle huile après que celle de Moïse fut consommée : on croit qu’elle dura jusqu’à la captivité de Babylone. Mais les Pères de l’Église croient que l’onction des grands prêtres dura jusqu’à la venue du véritable Oint, du Messie, qui est Jésus-Christ. D’ailleurs Moïse ne défend nulle part de renouveler ou de composer de nouveau de ce parfum. Il semble même qu’il n’en marque si bien la composition qu’afin qu’on en pût faire de semblable dans le besoin.

Quant à l’onction des rois, elle n’est point commandée dans Moïse ; mais nous en voyons distinctement la pratique dans l’histoire sacrée. Samuel donne l’onction à Saül (1 Samuel 10.1). On renouvela cette onction à Galgal quelque temps après, lorsque Saül eut délivré Jabès de Galaad de la violence de Naas, roi des Ammonites (1 Samuel 11.15). Le même Samuel reçoit ordre du Seigneur de donner l’onction royale au jeune David (1 Samuel 16.13). Et comme sa royauté fut fort contestée par la maison de Saül, on la renouvela jusqu’à trois fois, y compris cette première onction dont nous venons de parler ; il fut ensuite sacré à Hébron (2 Samuel 2.4) par la tribu de Juda, après la mort de Saül ; et enfin encore à Hébron par tout Israël (2 Samuel 5.1-4), après la mort d’Abner. Absalon s’étant révolté contre le roi son père, se fit aussi donner l’onction royale (2 Samuel 19.10) ; et Salomon, ayant eu pour concurrent dans la succession du royaume son frère Adonias (1 Rois 1.34-38), fut oint par le grand prêtre Sadoc et par le prophète Nathan.

Nous ne voyons pas que les rois d’Israël pratiquassent ordinairement cette cérémonie. Le prophète Élie reçoit ordre du Seigneur (1 Rois 19.15-16) de donner l’onction royale à Hazael pour régner sur la Syrie, et à Jéhu, fils de Namsi, pour régner sur Israël. Dieu n’exécuta pas cet ordre par lui-même ; mais, quelques années après, Élisée, son disciple, exécuta cet ordre sur la personne de Jéhu. C’est le seul roi d’Israël dont l’onction soit distinctement marquée dans le texte sacré. Mais pour les rois de Juda, on en trouve plusieurs exemples jusqu’à la destruction de ce royaume, principalement Jorsqu’il y avait quelque difficulté sur la succession a la couronne : par exemple, sous Joas, et sous Joachas, fils de Josias, qui n’était pas l’aîné des enfants de ce prince. Depuis le retour de la captivité, l’onction ne s’est plus pratiquée pour les rois (2 Rois 23.30) ni même pour les prêtres, si l’on en croit les Juifs.

Enfin il est parlé dans l’Écriture de l’onction des prophètes, mais on n’a aucune connaissance de la manière dont elle se faisait ; on doute même qu’on leur ait donné réellement l’onction. Élie est envoyé pour oindre Élisée prophète en sa place (1 Rois 19.16). Mais dans l’exécution Élie ne fait autre chose à Élisée, sinon de lui mettre son manteau sur les épaules. Aussitôt Élisée quitte ses bœufs et sa charrue, et se met à la suite d’Élie. Il est donc très-croyable que le mot d’onction, en cet endroit, est mis pour une simple destination ou vocation à la prophétie.

L’onction du Christ, du Messie, de l’Oint du Seigneur par excellence était figurée par toutes celles dont nous venons de parler ; elle est prédite dans les Psaumes (Psaumes 44.8). Et dans Isaïe (Isaïe 61.1) : L’esprit de Dieu est sur moi, parce que le Seigneur m’a donné l’onction, etc. Et dans Daniel (Daniel 9.24) : Soixante-dix semaines sont déterminées afin que le péché prenne fin, que la justice éternelle arrive, et que la prophétie et la vision s’accomplissent, et que le Saint des saints reçoive l’onction. [Voyez Messie].

Dans le christianisme, nous reconnaissons l’onction spirituelle de Jésus-Christ, le vrai oint du Père (Luc 4.18 Actes 4.27 ; 10.10), qui nous a oints par sa grâce (2 Corinthiens 1.21), qui nous a scellés de son sceau, et nous a donné le gage du Saint-Esprit qui habite dans nos cœurs. Nous y reconnaissons aussi l’onction naturelle. Saint Marc (Marc 6.13) nous apprend que les apôtres ayant été envoyés par Jésus-Christ pour prêcher dans toute la Judée, y faisaient plusieurs merveilles, qu’ils oignaient les malades et les guérissaient au nom du Seigneur. Saint Jacques (Jacques 5.44) veut que lorsqu’il y aura un malade parmi les fidèles, ils fassent venir les prêtres de l’Église, lesquels prieront pour lui, en lui donnant l’onction avec l’huile au nom du Seigneur. Il dit que la prière accompagnée de foi guérira le malade, que le Seigneur le soulagera ; et s’il est dans le péché, qu’il lui sera remis. Et voilà sur quoi est fondé le sacrement d’extrême-onction, que l’Église reconnaît comme institué par Jésus-Christ et qu’elle met au rang des sept sacrements, auxquels la grâce sanctifiante est promise.