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Jésus
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet Westphal Bost

Jésus-Christ (1)

Fils de Dieu, vrai Messie, Sauveur du monde, engendré du Père avant tous les siècles, égal et consubstantiel au Père, quant à sa nature divine ; inférieur au Père, et consubstantiel à la race humaine, quant à sa nature humaine ; le premier et principal objet des prophéties, figuré et promis dans tout l’Ancien Testament, attendu et désiré des anciens patriarches, l’espérance et le salut des nations, la gloire, le bonheur et la consolation des chrétiens. Le nom ineffable de Jésus, ou, comme le prononcent les Hébreux, Jéhosuah, ou Josuah, signifie Sauveur, celui qui sauvera. Personne n’a jamais porté ce nom avec tant de justice, et n’en a si parfaitement rempli la signification que Jésus-Christ, Sauveur du monde, qui nous a sauvés du péché et de l’enfer, et nous a mérité le ciel par le prix de son sang [Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, Vrai Messie, est donc la seconde personne de la très-sainte Trinité, le Verbe. Les patriarches, les Israélites l’ont connu sous ce nom, Memra ; c’est lui qui, préludant à la restauration du genre humain, leur est souvent apparu dans des circonstances majeures ou significatives, sous le titre d’envoyé ou d’ange, qui est celui que Jésus-Christ se donne lui-même dans l’Évangile. Voyez Ange, note ; Memra, Verbe]

Il y avait six mois que l’ange Gabriel avait annoncé à Zacharie la naissance future de son fils Jean-Baptiste, précurseur du Messie, lorsque Dieu envoya le même ange (An du monde 4000, Avant. Jésus-Christ 9 mois) à Nazareth, ville de Galilée, vers la Vierge Marie, fiancée à Joseph, de la tribu de Juda (Luc 1.26). L’ange étant entré où elle était, lui dit : Je vous salue, vous à qui une grâce a été faite ; le Seigneur est avec vous ; vous êtes bénie entre toutes les femmes. Marie ayant entendu ces paroles, en fut troublée ; mais l’ange la rassura et lui dit Vous avez trouvé grâce devant. Dieu ; vous concevrez et enfanterez un fils, à qui vous donnerez le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé le Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père ; et il régnera éternellement sur la maison de Jacob. Marie lui demanda : Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d’homme ? L’ange lui répondit : Le Saint-Esprit surviendra en vous, et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre. C’est pourquoi le fruit saint qui naîtra de vous sera appelé le fils de Dieu. Et sachez qu’Élisabeth, votre cousine, a aussi conçu un fils dans sa vieillesse, et que voici déjà le sixième mois de sa grossesse ; parce qu’il n’y a rien d’impossible à Dieu. Alors Marie lui dit : Voici la servante du Seigneur ; qu’il me soit fuit selon votre parole.

Environ neuf mois après cela, on publia dans la Judée un édit de l’empereur Auguste (Luc 2.1-3), qui ordonnait que tous les hommes allassent se faire enregistrer dans la ville de leur naissance, ou de leur origine. Joseph, qui était de la tribu de Juda et de la famille de David, aussi bien que Marie, son épouse, se rendirent, ensemble à Bethléem ; et pendant qu’ils étaient en ce lieu, le temps de Marie étant accompli, elle enfanta son fils.(voir note de l’édition papier pour de plus amples renseignements), elle le mit dans une crèche de l’étable, où ils avaient été obligés de se loger, n’ayant pu trouver de place dans l’hôtellerie. On doute si notre Sauveur naquit la même nuit que la sainte Vierge arriva à Bethléem, ou quelques jours après. Le sentiment le plus commun est que ce fut la même nuit : mais le texte de l’Évangile, qui porte que pendant qu’ils étaient en ce lieu, elle enfanta son premier-né, semblerait plutôt favoriser le sentiment contraire.

Or il y avait aux environs de Bethléem des bergers qui passaient la nuit dans les champs, veillant à la garde de leurs troupeaux. Tout d’un coup l’ange du Seigneur se présenta à eux ; une lumière divine les environna, et ils ouïrent ces paroles : Je viens vous annoncer une nouvelle qui sera pour tout le peuple un grand sujet de joie ; car il vous est né aujourd’hui dans la cité de David un Sauveur, qui est le Christ, le Seigneur. Or voici la marque à laquelle vous le reconnaîtrez : Vous trouverez un enfant emmailloté, couché dans une crèche. Au même instant il se joignit à l’ange une multitude de l’armée céleste, louant Dieu et disant : Gloire soit à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. Alors les bergers allèrent en diligence à Bethléem, où ils trouvèrent Marie et Joseph, et l’enfant couché dans une crèche ; et à ces marques ils reconnurent la vérité de ce qui leur avait été dit touchant cet enfant.

Le huitième jour, où l’enfant devait être circoncis (An du monde 4000, de Jésus-Christ 1, Avant l’ère vulgaire 3), étant arrivé, il fut nommé Jésus, qui était le nom que l’ange avait annoncé, avant qu’il fut conçu dans le sein de sa mère. Quelques jours (ou plutôt mois) après, ou vit arriver de l’Orient à Jérusalem des mages (Matthieu 2.1) qui cherchaient le nouveau-roi des Juifs, et qui disaient qu’un nouvel astre leur était apparu dans leur pays, qui désignait la naissance de ce nouveau prince. À ces paroles toute la ville fut émue ; et Hérode, qui était alors à Jéricho (Josèphe) où il se faisait traiter de la maladie dont il mourut, en ayant été informé, fit venir les prêtres ; et leur ayant demandé où le Christ devait naître, ils lui répondirent que c’était à Bethléem. Alors s’étant diligemment enquis du temps de l’apparition de l’étoile, il dit aux mages d’aller trouver le nouveau roi, et qu’aussitôt qu’ils l’auraient vu, ils vinssent lui en donner avis afin qu’il allât aussi l’adorer. Ils partirent ; et aussitôt l’étoile qu’ils avaient vue en Orient, leur apparut de nouveau, et les conduisit à Bethléem, où elle s’arrêta sur le lieu où était l’enfant. Ils y entrèrent, adorèrent Jésus, lui offrirent leurs présents ; et la nuit suivante, l’ange du Seigneur les ayant avertis de la mauvaise disposition d’Hérode, ils s’en retournèrent par une autre route dans leur pays.

Quarante jours après la naissance de Jésus, le temps de la purification de Marie étant arrivé (Luc 1.22), elle alla au temple de Jérusalem présenter son Fils premier-né, et offrir les victimes que la loi prescrivait pour les femmes après leurs couches. Le saint vieillard Siméon, rempli du Saint-Esprit, vint au temple dans le même temps ; et, prenant Jésus entre ses bras, rendit grâces à Dieu, en disant qu’il mourrait content, puisqu’il avait vu le Sauveur, qui était l’attente d’Israël. Il s’y trouva aussi une sainte veuve nommée Anne, qui loua Dieu de ce qu’elle avait vu, et qui annonça la venue du Messie dans Israël.

Comme Joseph et Marie se disposaient à s’en retourner à Nazareth, un ange avertit Joseph en songe de se sauver en Égypte avec Jésus [Lorsque les parents de Jésus eurent accompli les prescriptions de la loi à raison de sa naissance, ils retournèrent à Nazareth, où ils ne restèrent que peu de temps, après quoi ils revinrent à Bethléem, dans l’intention de s’y fixer. C’est après leur retour en cette ville que les mages y arrivèrent pour rendre leurs hommages au nouveau roi des Juifs, et que l’ange avertit Joseph d’emmener l’enfant eu Égypte], parce qu’Hérode devait bientôt chercher l’enfant, pour le mettre à mort (Matthieu 2.13-18). En effet, Hérode voyant que les mages s’étaient retirés, sans le venir trouver, en conçut une grande colère ; et craignant que ce nouveau roi ne vint pour le dépouiller, il envoya à Bethléem, et y fit mettre à mort, tant dans la ville que dans les confins, tous les enfants mâles au-dessous de deux ans. Hérode mourut peu de temps après ce massacre, et Archélaüs, son fils, lui succéda. Or l’ange du Seigneur apparut à Joseph dans l’Égypte, quelques mois après la mort d’Hérode, et lui dit qu’il pouvait retourner en Judée, parce que celui qui en voulait à la vie de l’enfant était mort (Ce séjour en Égypte est attesté par plusieurs auteurs païens). Mais étant en Judée, comme il apprit qu’Archélaüs y régnait, il ne jugea pas à propos d’y demeurer. Il aima mieux aller à Nazareth, qui était une petite ville de Galilée, où le royaume d’Archélaüs ne s’étendait pas. Jésus-Christ y demeura soumis à Joseph et à Marie, et travailla même du métier de son père, qui était, à ce qu’on croit, charpentier, jusqu’à la trentième année de l’ère vulgaire, qui était la trente-troisième de son âge.

Jésus étant âgé de douze ans (An du monde 4012, de Jésus-Christ 12, de l’ère vulgaire 9), alla à Jérusalem avec Joseph et Marie, pour célébrer la Pâque (Luc 2.42-52). Après y avoir satisfait à ce que la loi commandait, Joseph et Marie reprirent le chemin de Nazareth ; et croyant que Jésus était avec quelques-uns de leurs parents ou de leurs amis, ils marchèrent un jour entier, sans entrer en défiance sur son absence. Mais le soir l’ayant cherché inutilement, ils s’en retournèrent le lendemain à Jérusalem, où ils le trouvèrent dans le temple assis au milieu des docteurs, les interrogeant et les écoutant. Joseph et Marie lui témoignèrent la peine où il les avait mis ; mais il leur répondit qu’ils pouvaient bien penser qu’il ne serait que dans le temple de son Père ; comme s’il eût voulu leur insinuer qu’il était inutile de le chercher ailleurs. Il s’en retourna à Nazareth avec eux, et continua d’y vivre dans une grande soumission.

Jean-Baptiste, fils de Zacharie, après avoir vécu dans le désert jusqu’à l’âge de trente-deux ans (An du monde 4032, de Jésus-Christ 31, de l’ère vulgaire 28), vint sur le Jourdain prêcher le baptême de la pénitence, et annoncer que le Messie, que l’on attendait depuis si longtemps, était enfin arrivé, qu’il était au milieu des Israélites, qu’il avait déjà le van à la main, et qu’il était disposé à nettoyer son aire et à jeter la paille au feu (Matthieu 3.1-11 ; Luc 3.15-16). Comme tout le monde venait à Jean, pour être baptisé, Jésus y vint comme les autres (An de Jésus-Christ 33, ère v. 30). Jean, à qui le Saint-Esprit le fit reconnaître, l’empêchait, disant ; C’est à vous à me baptiser. Jésus lui répondit : Laissez-moi faire ; il faut que j’accomplisse ainsi toute justice (Matthieu 3.15 ; Luc 3.21-22). Jean lui donna le baptême. Et comme Jésus sortait de l’eau et faisait sa prière, les cieux s’ouvrirent, et le Saint-Esprit descendit sur lui en forme de colombe ; et on entendit une voix, qui disait : Vous êtes mon Fils bien-aimé, en qui j’ai tais ma complaisance.

Après cela, Jésus fut conduit par l’esprit dans le désert, pour y être tenté par le démon ; et après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim ; et le tentateur s’approchant, lui dit de changer en pain les pierres qu’il lui présenta. Jésus le renvoya, en lui disant que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui sort de la bouche de Dieu, c’est-à-dire, de ce que Dieu veut bien lui donner pour lui servir de nourriture, ou de ce qui a reçu de Dieu la vertu de nourrir. Ensuite le démon le transporta sur une haute montagne, et lui dit qu’il lui donnerait tous les royaumes de la terre, qu’il lui désignait avec la main, s’il voulait l’adorer. Mais Jésus le réprima, en lui disant : Il est écrit : Vous adorerez le Seigneur votre Dieu. Enfin le démon le transporta sur le parapet d’une des galeries du temple, ou sur la balustrade qui régnait sur le haut de ce superbe édifice ; et il lui dit de se jeter en bas, puisqu’il est écrit : Il a commandé à ses anges, et ils vous recevront entre leurs mains, de peur que vous ne heurtiez vos pieds contre la pierre. Mais le Fils de Dieu lui répondit

Vous ne tenterez point le Seigneur votre Dieu. Alors le démon le laissa pour un temps ; et les anges vinrent lui servir à manger.

Quelque temps après, Jean-Baptiste étant allé baptiser à Béthabara, au delà du Jourdain, Jésus passa par là, s’en retournant en Galilée ; Jean le vit, et dit à deux de ses disciples : Voilà l’agneau de Dieu (la Victime salutaire), voilà celui qui ôte les péchés du monde. Alors ces deux disciples suivirent Jésus ; allèrent au lieu où il demeurait, et demeurèrent tout ce jour-là avec lui. Sur le soir, André, qui était l’un des deux, ayant trouvé Simon, son frère, l’amena À Jésus ; et Jésus lui dit (Jean 1.29-44) Vous êtes Simon, fils de Jona, ou de Joanna ; vous vous appellerez ci-près Cépha, c’est-à-dire, pierre ou rocher.

Le lendemain Jésus partit pour s’en aller à Nazareth ; il était accompagné d’André, de Pierre, et de cet autre disciple qui avait d’abord été trouver Jésus avec eux, et que quelques-uns veulent avoir été Barthélemy, ou Jacques, fils de Zébédée. Comme donc Jésus marchait, il rencontra Philippe, et lui dit de le suivre. Philippe le suivit ; et Philippe, ayant trouvé Nathanaël, Iui dit : Nous avons trouvé le Messie, qui est Jésus de Nazareth, fils de Joseph. Nathanaël lui répondit : Peut-il venir quelque chose de bon de Nazareth ? Philippe repartit : Venez, et voyez-le vous-même. Jésus, voyant venir Nathanaël, dit de lui : Voilà un vrai Israélite, dans lequel il n’y a point de fraude. Nathanaël répondit : d’où me connaissez-vous ? Jésus répliqua : Avant que Philippe vous ait appelé, je vous ai vu sous le figuier. On conjecture que Nathanaël y était alors en prière, et y demandait à Dieu qu’il lui fit connaître le Messie. Alors Nathanaël lui répondit : Je crois bien que vous êtes le Fils de Dieu, le roi d’Israël. Jésus lui dit : Vous verrez bien d’autres choses, lorsque les cieux s’ouvriront, et que les anges monteront et descendront sur le Fils de l’homme. C’est ainsi que le Sauveur s’appelait souvent par humilité, et pour marquer sa nature humaine.

De Béthabara, Jésus, vint à Cana de Galilée, où, étant prié d’une noce avec sa mère et ses disciples, il changea l’eau en vin, et fit un premier miracle (Jean 2.12-25). De là, il alla à Capharnaüm, où il demeura peu de jours avec sa mère et ses disciples, parce qu’il voulait aller à Jérusalem, pour y célébrer la Pâque. Étant arrivé dans le temple, il en chassa les changeurs, et les marchands qui vendaient des animaux et des oiseaux pour les sacrifices et comme on lui demandait, par quelle autorité il en usait ainsi, il répondit : Détruisez ce temple, et je le rebâtirai, dans trois jours : ce qu’il entendait de sa mort et de sa résurrection. Il fit plusieurs miracles en cette occasion, et plusieurs crurent en lui ; mais il ne se fiait point à eux, parce qu’il connaissait leur inconstance. C’est là, la première Paque qu’il ait célébrée depuis qu’il eut commencé à prêcher et à se manifester. Ce fut durant son séjour a Jérusalem, que Nicodème le vint trouver la nuit, et lui dit qu’il fallait que Dieu fût avec lui, puisqu’il faisait de si grands miracles (Jean 3). Jésus lui parla de la nouvelle naissance, de la régénération, qui sont comme la première porte qui donnent entrée dans la religion chrétienne ; Il lui déclara aussi qu’il était la lumière du monde, et le Fils de Dieu descendu du ciel. Nicodème eut quelque peine à entrer dans les mystères que Jésus-Christ lui découvrit alors, mais la suite fera voir que sa foi et sa conversion furent solides et véritables.

De Jérusalem, Jésus, au lieu de retourner en Galilée, demeura en Judée, et alla sur le Jourdain, où il commença à baptiser du baptême de l’eau et du Saint-Esprit, que Jean-Baptiste avait promis et annoncé, et que Jésus-Christ venait d’expliquer à Nicodème. Aussitôt qu’il eut commencé à baptiser, il vint à lui une foule de gens pour recevoir son baptême : C’étaient principalement ses disciples qui donnaient ce sacrement ; pour lui, sa principale occupation était d’instruire et de prêcher. Le nombre de ceux qui venaient à lui fut si grand, que les disciples de Jean-Baptiste en conçurent de la jalousie, et en témoignèrent leur peine à leur maître mais Jean leur répondit qu’il n’était point le Messie, qu’il n’était que son précurseur et son paranymphe. Il est l’Époux, et je ne suis que l’ami de l’époux (Jean 3.22).

Jean-Baptiste, ayant été arrêté, et mis en prison par les ordres d’Hérode le tétrarque, ainsi que nous l’avons dit dans l’article de Jean-Baptiste, Jésus craignant que les Pharisiens, qui étaient ses ennemis déclarés, ne portassent Pilate à l’arrêter aussi, sous prétexte qu’il était suivi par une grande foule de peuple, jugea à propos de se retirer dans la Galilée (Jean 4.1-2), qui était de la tétrarchie de Philippe, et où Pilate n’avait aucun pouvoir. En chemin, il s’arrêta près la petite ville de Sichar, qui était habitée par des Samaritains. Jésus-Christ s’assit, tout fatigué auprès du puits de Jacob, et envoya ses disciples dans la ville pour y acheter quelque nourriture. Pendant leur absence une femme de la ville vint pour puiser de l’eau ; Jésus lui demanda à boire. Elle lui témoigna sa surprise, de ce qu’un Juif lui demandait de l’eau ; parce que les Juifs et les Samaritains n’ont aucun commerce entre eux, si ce n’est dans l’extrême nécessité. Jésus l’instruisit, lui dit qu’il était en état de lui donner une eau vive qui rejaillit jusqu’à la vie éternelle ; que le temps est venu que l’on adorera le Père, non pas seulement à Jérusalem ou à Garizim, mais dans tous les pays du monde, et qu’on lui rendra un culte vrai, pur et spirituel. La Samaritaine lui dit que l’on attendait bientôt le Messie qui devait lever tous les doutes et enseigner toute vérité. Jésus lui déclara, d’une manière expresse : Je le suis, moi, qui vous parle.

Sur ces entrefaites, les disciples étant arrivés de la ville de Sichem, pressaient Jésus de manger. Mais il leur dit, qu’il avait une autre nourriture qu’ils ne connaissaient point, qui était d’accomplir la volonté de sou Père. La femme étant allée à Sichem, y raconta l’entretien qu’elle avait eu avec Jésus, et dit qu’assurément cet homme était un prophète, et qu’il lui avait dit tout ce qu’elle avait jamais fait. Ceux de Sichem vinrent prier Jésus d’entrer dans leur ville. Il y entra, y demeura deux jours, et plusieurs crurent en lui (Jean 4.43).

Étant arrivé dans la Galilée, il prêchait dans les synagogues. Il vint à Nazareth, sa patrie (Luc 4.14-30), il y prêcha, et se fit à lui-même l’application d’un passage d’Isaïe (Isaïe 61.1-2) qui parle du Messie ; et dit qu’il était celui que le prophète avait annoncé. Ceux de Nazareth admiraient sa doctrine ; mais la bassesse de son origine leur donnait du scandale, et Jésus ne fit aucun miracle parmi eux ; il leur fit même quelques reproches, de leur incrédulité, et leur dit que nul prophète n’est honoré dans sa patrie. Ce qui les remplit d’une telle colère, qu’ils le menèrent sur le haut de la montagne où leur ville était bâtie, pour le précipiter ; mais Jésus passant au milieu d’eux, sans qu’ils le pussent arrêter, alla fixer sa demeure ordinaire à Capharnaüm, quoiqu’il n’y ait demeuré que peu de temps jusqu’à sa mort ; car il allait tantôt dans un lieu, et tantôt dans un autre, prêchant, enseignant, et guérissant les malades qui lui étaient amenés de tous côtés.

Il vint à Cana pour la seconde fois ; et comme il y était, un officier du roi Hérode vint le trouver pour lui, demander qu’il guérit son fils, qui était malade à Capharnaüm. Jésus lui dit qu’il pouvait s’en retourner et que son fils était guéri. Comme il s’en retournait, ses gens lui vinrent dire que son fils était guéri dès le jour précédent à la septième heure, c’est-à-dire, à une heure après midi, qui était le moment auquel Jéssus lui avait dit que son fils était guéri (Jean 4.46).

Quelques jours après, étant sur la mer de Tibériade, il appela pour la seconde fois, Pierre et André, son frère, qui étaient alors occupés à la pêche. Étant allé un peu plus loin, il vit les deux frères, Jacques et Jean, fils de Zébédée, qui étaient aussi dans leur nacelle, et il les appela de même (Matthieu 4.18-20).

Étant un jour de sabbat dans la synagogue de Capharnaüm, il y guérit un démoniaque, et, étant sorti de la synagogue, il entra dans la maison de Simon, et guérit la belle-mère de cet apôtre, laquelle avait, une grande fièvre (Marc 1.21-29). Sur le soir, ceux de la ville qui avaient des malades les apportèrent à la porte de la maison où était Jésus, et il les guérit tous. Le lendemain, de très grand matin, il se retira seul dans un lieu désert, pour y prier. Pierre et les autres disciples allèrent l’y trouver, et lui dirent que les troupes le cherchaient. Mais il les mena par les villes et les bourgades de la Galilée, où il annonça le royaume de Dieu. Sa réputation se répandit par toute la Syrie, et on lui en voyait des malades de toute part (Matthieu 8.23).

À son retour de ce voyage, il revint à Capharnaüm, et étant comme accablé par la multitude qui venait pour l’entendre, il se mit dans la barque de Simon-Pierre, et de là il commença à enseigner le peuple, qui était sur le rivage. De là il dit à Pierre d’avancer en pleine mer, et de jeter ses filets. Pierre obéit, et il prit une si grande quantité de poissons que ses filets se rompaient (Luc 5.12 ; Matthieu 9.2), Après cela il guérit un lépreux et plusieurs autres malades, entre autres un paralytique, que l’on descendit dans la maison où il était, par le toit, n’ayant pu le faire passer par la porte, à cause de la foule qui assiègeait le logis. De là, Jésus alla sur le lac de Génésareth, et il appela, à sa suite Matthieu, autrement Lévi, publicain de profession. Voyez Matthieu.

Jésus étant allé à Jérusalem pour y célébrer la fête de Pâque, y guérit un paralytique, qui était depuis trente-huit ans sur la piscine de Béthesda. Ce malade ayant emporté son lit le jour du sabbat, causa une espèce de scandale parmi les Juifs, lesquels ayant su que c’était Jésus qui le lui avait commandé, résolurent de le faire mourir, comme destructeur de la loi, et comme blasphémateur ; parce que, dans un discours qu’il leur avait fait, il avait déclaré que Dieu était son Père (Jean 5.1-45). Étant sorti de Jérusalem, comme il passait par les champs au milieu des froments presque mûrs, un jour de sabbat, ses disciples pressés de la faim, froissaient des épis dans leurs mains pour en manger le grain. Les Pharisiens le trouvèrent mauvais, et s’en plaignirent à Jésus comme d’un violemment du sabbat. Jésus justifia la conduite de ses disciples par l’exemple de David, qui dans la nécessité mangea les pains de propitiation qu’on avait ôtés de devant le Seigneur quelques jours auparavant, et par celui des prêtres, qui travaillent dans le temple le jour du sabbat. Enfin, il leur dit nettement qu’il était plus grand que le temple, et que comme maître du sabbat, il pouvait dispenser de la loi qui en ordonne l’observation.

Le jour du sabbat suivant, étant dans la synagogue de Capharnaüm, il y guérit un homme qui avait une main sèche, et fit voir aux pharisiens qu’il n’y avait en cela rien de contraire à la loi. Les pharisiens, irrités, complotèrent avec les hérodiens, que nous croyons être les sectateurs de Judas le Gaulonite (Voyez Hérodiens), de faire périr Jésus. Mais le Sauveur se retira à Capharnaüm, et alla sur la mer de Tibériade, ou il fut suivi par une foule de gens qui venaient pour l’entendre, et pour être guéris de leurs maladies (Matthieu 12.9-10-22). Se voyant accablé de la foule, il passa la mer, et alla seul sur une montagne, où il passa la nuit en prières. Le lendemain au matin il descendit, appela ceux de ses disciples qu’il désigna, leur donna le nom et la mission d’apôtres, c’est-à-dire, d’envoyés. Et s’étant assis sur une butte qui était au bas de la montagne il commença à enseigner les apôtres et le peuple qui y était venu de toutes parts, et leur fit cet admirable sermon de la montagne, qui comprend le précis de toute sa doctrine, et l’abrégé de tout l’Évangile (Matthieu 5.6-7). Il y déclare qu’il fait consister la béatitude, dans la pauvreté, dans la douleur, dans les larmes de la pénitence, dans l’amour de la justice, dans l’exercice des œuvres de miséricorde, dans la pureté de cœur, dans l’amour de la paix, dans la souffrance, dans les persécutions, dans le mépris que l’on fait des biens, des honneurs, de l’estime du monde. Il fait voir qu’il ne vient pas pour détruire la loi, mais pour la perfectionner, et pour la rétablir dans sa pureté, contre les mauvaises explications des pharisiens.

Il montre ensuite qu’il vient établir une plus grande perfection que la loi n’avait fait, et qu’il défend plusieurs choses ; par exemple, le divorce, que la loi tolérait ; qu’il condamne non-seulement les mauvaises actions, mais aussi les mauvais désirs. Il leur donne une formule de prières dans le Pater noster, qui est aussi une excellente leçon de morale. Il condamne l’hypocrisie, la vanité, l’avarice, les inquiétudes pour acquérir ou pour conserver les biens de ce monde, les jugements téméraires. Il recommande l’oraison, la charité, l’amour des ennemis. Il donne cette règle générale pour se conduire envers le prochain, de ne faire à autrui ce que nous ne voudrions pas que l’on nous fît. Enfin il conclut, en disant qu’il ne suffit pas de dire et de croire, mais qu’il demande des œuvres, et que c’est sur nos œuvres que nous serons condamnés ou absous au jour du jugement. Après ce discours, on lui présenta un lépreux, qu’il toucha, qu’il guérit, et à qui il dit de s’aller montrer aux prêtres.

De là il revint à Capharnaüm, où un centenier gentil l’envoya prier par les principaux juifs de la vile de venir dans sa maison rendre la santé à un de ses serviteurs, qui était dangereusement malade. Comme il était en chemin pour y aller, cet homme lui envoya de ses amis, pour lui témoigner qu’il ne se croyait pas digne qu’il prît la peine de venir ; mais qu’il suffisait qu’il dit une parole, pour guérir sou serviteur (Matthieu 8.5-13 ; Luc 7.1-9). Enfin le centenier, voyant que Jésus-Christ avançait toujours, vint lui-même, et lui dit qu’il ne s’estimait pas digne de le recevoir dans sa maison ; mais qu’il dit seulement une parole, et que son serviteur serait guéri. Jésus admira sa foi, et dit qu’il n’avait rien trouvé de tel parmi les Juifs mêmes ; et en même-temps il guérit son serviteur. Jésus, de Capharnaüm, alla à Naïn, où il ressuscita le fils d’une veuve, lequel était déjà dans le cercueil, et que l’on portait en terre (Luc 7.10-30). Étant entré dans la ville, un pharisien, nommé Simon, l’invita à dîner ; et pendant qu’il était à table, une femme de la ville, qui était connue pour pécheresse, vint arroser ses pieds de ses larmes, et les essuyer avec ses cheveux. Simon se scandalisa de ce qu’il se laissait toucher par cette femme : mais Jésus lui fit voir que cette femme ayant témoigné beaucoup de repentir et d’amour, avait aussi mérité que Dieu lui accordât le pardon. En même temps il la renvoya, en lui disant que ses péchés étaient remis.

Ayant parcouru toute la Galilée, il revint à Capharnaüm, où il se trouva si accablé de la foule de ceux qui le suivaient, qu’à peine avait-il le temps de manger. Ses parents, ayant été informés de la presse où il était, vinrent pour l’en tirer, disant qu’il était hors de lui même (Marc 3.20). Le texte grec de cet endroit est obscur. Quelques-uns le traduisent par : Il était tombé en défaillance ; d’autres, il avait perdu l’esprit ; ou, il était sorti de sa maison, comme un homme à lier, et qu’on veut empêcher de courir les rues et les campagnes ; ou enfin : il était comme ravi en extase, et comme un homme rempli d’un enthousiasme, qui lui ôte la présence d’esprit. La sainte Vierge était du nombre de ceux qui venaient pour tirer Jésus de la foule ; mais elle y était sans doute dans des sentiments fort éloignés de ceux des autres parents du Sauveur, qui ne croyaient pas en lui (Jean 7.5). On avertit donc Jésus que sa mère et ses parents le demandaient : mais étendant sa main vers ses disciples, et vers ceux qui l’écoutaient, il dit : Voilà qui sont ma mère et mes parents ; ce sont ceux qui m’écoutent, et qui font la volonté de mon Père. Il guérit au même endroit un possédé, qui était aveugle et muet (Matthieu 12.22). Les pharisiens, jaloux de lui voir faire tant de merveilles, disaient qu’il ne chassait les démons qu’au nom de Béelsébub, prince des diables ; et ils lui demandaient un prodige qui fût tel, qu’un ne pût l’attribuer qu’à la puissance de Dieu. Mais Jésus-Christ leur dit qu’il ne leur en donnerait point d’autre que celui du prophète Jonas, c’est-à-dire le miracle de sa résurrection glorieuse, qui est comme le couronnement de tous ses prodiges.

L’après dîner, Jésus alla sur le bord de la mer de Tibériade ; et le peuple s’étant assemblé autour de lui, il monta sur une barque, et commença de là à parler au peuple, pour n’être pas accablé de la foule. Il leur proposa diverses paraboles (Matthieu 13.1-26 ; Luc 8.18) ; par exemple, celle du semeur, de la lampe qui se met sur le chandelier, celle de l’ivraie que l’homme ennemi sème dans le champ pendant la nuit, celle du grain de moutarde, et celle du levain. Il proposa ces paraboles au troupes, sans les leur expliquer ; et lorsqu’il fut de retour à la maison, ses disciples le prièrent de leur en découvrir le sens. Il le fit, et continua à leur en proposer de nouvelles ; celle du trésor caché, celle de la perle que l’on achète, en vendant tout ce que l’on a ; et celle du filet jeté dans la mer, qui ramasse toutes sortes de poissons, bons et mauvais. Sur le soir, après qu’il leur eut expliqué ces paraboles, il entra dans une barque, pour passer la mer de Tibériade. Mais pendant la nuit il s’endormit ; et une tempête s’étant élevée, la nacelle se trouva en danger d’être submergée. Les disciples éveillèrent Jésus. Il commanda aux vents, et rendit aussitôt le calme à la mer (Matthieu 8.23 ; Luc 8.23-25).

Il arriva au bord du canton de Gerasa, à l’orient de la mer qu’il venait de passer. Il y avait là deux fameux démoniaques ; un entre autres, qui était possédé d’une légion de démons. Il vint au-devant de Jésus ; et les démons se plaignaient par sa bouche, qu’il venait les tourmenter avant le temps. Ils le prièrent de ne les point envoyer dans l’abîme de l’enfer, mais plutôt dans un troupeau de porcs, qui paissaient là auprès. Jésus leur accorda ce qu’ils demandaient : et aussitôt le troupeau, qui était d’environ deux mille pitres, alla se précipiter dans la-mer de Tibériade ; et le démoniaque se trouva délivré. Les Géraséniens effrayés de ce prodige, et craignant quelque nouvelle perte, prièrent Jésus de se retirer de leur pays. Il repassa la mer ; et étant à peine arrivé sur le bord, Jaïr, prince de la synagogue de Capharnaüm, le vint prier de rendre la santé à sa fille unique, âgée de douze ans. Comme il allait dans la maison de Jaïr, une femme qui était incommodée d’une perte de sang, fut guérie, ayant touché secrètement le bord de sa robe. Un peu après on vint dire à Jaïr que sa file était morte. Mais Jésus l’exhorta à avoir la foi ; et étant entré dans la maison, il ressuscita la fille, lui fit donner à manger, et recommanda que l’on tint le miracle secret (Matthieu 9.18-26).

Comme il allait à Nazareth, sa patrie, deux aveugles vinrent lui demander instamment la vue. Ils le suivirent jusque dans la maison, et il leur accorda ce qu’ils demandaient (Marc 6.1-2). Presque en même temps il guérit un possédé qui était muet. Étant entré dans la synagogue de Nazareth, il y prêcha d’une manière-qui fut admirée de tout le monde.

Mais ses concitoyens se disaient l’un à l’autre : N’est-ce pas le fils de ce charpentier ? Sa mère ne s’appelle-t-elle pas Marie, et ses frères et sœurs ne sont-ils pas parmi nous ? Jésus quitta cette ville et n’y retourna plus, disant qu’un prophète n’est sans honneur que dans sa patrie (Matthieu 13.54-58). Peu de temps après il envoya ses disciples par tout le pays (Matthieu 9.36 ; 10.1-17) pour prêcher la venue du royaume de Dieu. Il les fit partir deux à deux, avec la puissance de faire des miracles ; mais il leur fit défense de porter ni provisions, ni armes, ni habits à changer, ni deux paires de sandales. Il leur dit d’entrer dans les maisons des plus gens de bien, d’y demeurer sans changer légèrement de demeure, et d’y recevoir la nourriture qu’on voudrait bien leur donner. Jésus de son côté alla prêcher dans tout le pays. Et lorsque les disciples et les apôtres eurent achevé le cours de leur mission, ils en vinrent rendre compte à leur maître, qui remercia Dieu de l’heureux succès qu’il avait donné à leur prédication.

Cependant Jésus était toujours suivi d’une grande multitude de peuple ; et pour prendre quelque repos, il était obligé de se dérober à leurs importunités. Un jour il passa le lac de Génésareth, ou la mer de Tibériade, qui est la même chose, et se retira sur une montagne à l’écart, avec ses apôtres. Mais les troupes ayant su qu’il était passé, le suivirent, en faisant le tour par terre, et arrivèrent au pied de la montagne où il était, dans le désert de Bethsaïde. Jésus étant descendu de la montagne, guérit les malades qu’on lui présenta, et commença à enseigner le peuple. Comme le jour commençait à baisser, les apôtres remontrèrent à Jésus qu’il était temps de renvoyer le peuple, afin qu’il pût aller dans les bourgades acheter de quoi se nourrir. Jésus leur répondit : Donnez-leur à manger vous-mêmes. Ils s’en excusèrent sur l’impossibilité où ils étaient de le faire. Alors il leur demanda combien ils avaient de pains, et ayant appris qu’ils avaient cinq pains et deux poissons, il fit asseoir le peuple sur le gazon, et leur fit servir si abondamment à manger, qu’ils furent rassasiés et qu’on ramassa encore douze paniers pleins des restes des deux pains et des deux poissons. Or ceux qui mangèrent étaient au nombre d’environ cinq mille hommes, sans compter les femmes et les enfants (Matthieu 14.15-21 ; Marc 6.35-44 ; Luc 9.11-17).

Le peuple, sensible à un si grand bienfait, avait résolu de prendre Jésus et de le choisir pour roi ; mais le soir il contraignit ses disciples d’entrer dans la barque et de repasser la mer, pendant que lui était sur la montagne, où il passa la plus grande partie de la nuit à prier, Les apôtres ayant eu le vent contraire pendant toute la nuit, au lieu d’aller à Bethsaïde, où ils avaient dessein d’aborder, furent obligés de tourner du côté de Tibériade et de Capharnaüm ; et le lendemain, au point du jouir, ils se trouvèrent à vingt-Cinq ou trente stades du bord. Alors ils virent un homme qui marchait sur la mer de leur côté, et qui faisait mine de les vouloir passer. Ils crurent que c’était un fantôme, et furent saisis de frayeur. Mais Jésus les rassura eu leur disant que c’était lui. Saint Pierre lui demanda permission d’aller vers lui en marchant sur les eaux. Jésus le lui permit, et Pierre marcha quelque temps sur l’eau sans enfoncer. Mais ayant vu une vague qui le menaçait, il eut peur, et commençant à enfoncer, il cria : sauvez-moi, Alors Jésus le retint par la main. Les disciples prièrent le Sauveur d’entrer dans leur barque. Il y entra et aussitôt elle se trouva à bord (Matthieu 14.13-34 ; Jean 6.16-21 ; Marc 6.47-53).

Les troupes, qui n’avaient pas vu Jésus enter dans la barque avec ses disciples, crurent qu’il était demeuré dans le désert de Bethsaïde, et elles l’y cherchaient avec empressement pour le faire roi, Mais quelques barques de Tibériade étant arrivées au même endroit, leur apprirent que Jésus était auprès de Tibériade. Aussitôt les troupes retournèrent au deçà de la mer, et vinrent trouver Jésus, qui, durant cet intervalle, s’était rendu à Capharnaüm. Elles lui demandèrent comment il était venu ; et Jésus leur répondit qu’elles le cherchaient non à cause des miracles, mais à cause de la nourriture qu’il leur avait donnée. Il les exhorta à chercher une nourriture qui ne périt point. Il leur dit qu’il était le pain du ciel, infiniment plus excellent que la manne que leurs pères avaient mangée dans le désert, et que sa chair était vraiment nourriture, et son sang vraiment breuvage. Ce discours étonna le peuple et fut cause que plusieurs disciples abandonnèrent Jésus. Alors il demanda à ses apôtres s’ils voulaient aussi s’en aller. Mais Pierre lui répondit qu’il avait dans lui les paroles de la vie éternelle, qu’il était le vrai Christ et le Fils du Dieu vivant (Jean 6.22-71).

Comme la fête de Pâques approchait, Jésus se disposa à aller à Jérusalem. Les évangélistes ne nous apprennent pas ce qu’il y fit ; ils ne marquent pas même expressément ce voyage, Saint Jean dit seulement que le miracle de la multiplication des cinq pains se fit peu avant la fête de Pâques (Jean 6.4-5). Lorsqu’il fut de retour en Galilée, quelques pharisiens se scandalisèrent de ce que ses disciples ne lavaient pas leurs mains avant que de se mettre à table. Mais Jésus les renvoya en leur reprochant leur hypocrisie et leur attachement superstitieux, à de vaines observances, pendant qu’ils négligeaient les principaux, devoirs de la loi (Matthieu 15.10-20 ; Marc 7.14-23). Étant allé du côté de Tyr et de Sidon, une femme phénicienne ou Cananéenne vint lui demander qu’il rendis la santé à sa fille. Jésus ne lui répondit rien d’abord. Mais comme elle continuait à crier, et que ses apôtres le priaient de la renvoyer, et de lui accorder sa demande, il répondit : Je ne suis envoyé que vers les brebis qui sont égarées du troupeau d’Israël, voulant dire que les grâces n’étaient pas pour les gentils comme les Phéniciens. Lorsqu’il fut arrivé dans la maison, cette femme, sans se rebuter, vint se jeter à ses pieds, le suppliant de rendre la santé à sa fille : Jésus lui répondit : Il n’est pas juste de donner aux chiens le pain des enfants. Il est vrai, répliqua-t-elle, mais au moins les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. Jésus admira sa foi et lui accorda ce qu’elle demandait (Matthieu 15.22-28)

Il continua sa route vers Sidon, et remontant vers les sources du Jourdain, il vint vers la Décapole, au delà de la mer de Tibériade, où il guérit un homme sourd et muet. Il monta sur une montagne à l’écart, où il demeura trois jours. Lorsqu’il en descendit, il trouva une infinité de malades à qui il rendit la santé. Puis il fit distribuer à toute la multitude sept pains et quelques petits poissons, que ses apôtres avaient pris pour leurs provisions. Le nombre de ceux qui mangèrent était de quatre mille hommes, sans compter les femmes et les enfants. Ils furent tous rassasiés, et il en demeura encore sept paniers pleins des restes que l’on recueillit (Matthieu 15.32-39 ; Marc 8.1-10).

Jésus s’embarqua aussitôt et alla à Magédan, dans le canton de Dalmanutha (Voyez l’article correspondant), vers les sources du Jourdain. Comme il y était, quelques pharisiens et quelques saducéens vinrent lui demander un signe du ciel. Il leur dit, comme il avait déjà fait dans une autre occasion, qu’il n’avait point d’autre signe à leur donner que celui de Jonas, ce qui marquait sa résurrection future. Et à l’égard d’un signe ou d’un miracle dans le ciel, il leur témoigna que s’ils étaient aussi attentifs à examiner les temps et les prophéties qui regardaient la venue du Messie, qu’ils étaient habiles à prévoir le beau ou le mauvais temps par l’inspection du ciel, ils auraient bientôt découvert que les temps marqués dans les prophètes étaient accomplis, et qu’il était le Messie promis et attendu depuis tant de siècles.

Il s’embarqua ensuite sur la mer de Tibériade, et il vint à Bethsaïde, où il guérit un aveugle. Et étant allé du côté de Césarée de Philippe (Matthieu 16.13-20 ; Marc 8.27-30 ; Luc 9.18), il demanda à ses disciples qui l’on disait qu’il était. Ils lui répondirent que les uns disaient qu’il était Élie, d’autres Jérémie, d’autres Jean-Baptiste ou quelqu’un des anciens prophètes. C’est que les Juifs croyaient une espèce de métempsycose, et que les âmes passaient quelquefois d’un corps dans un autre, en sorte qu’un même corps pouvait avoir plusieurs âmes. Et vous, répondit Jésus, que pensez-vous de Moi ? Pierre lui dit : Vous êtes le Christ, le Fils de Dieu. Jésus loua sa foi et lui dit : Vous êtes

Pierre, et sur ce Roc je bâtirai mon Église. Les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle. Tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, ce que vous aurez délié sur la terre sera aussi délié dans le ciel. Il leur ordonna de ne dire à personne qu’il était le Christ. Il leur prédit ensuite les maux et les affronts qu’il devait souffrir à Jérusalem, et il dit aux troupes : Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il renonce à soi-même, qu’il porte sa croix et me suive. Celui qui veut conserver sa vie la perd et celui qui la perd pour l’amour de moi la conserve. Je vous dis en vérité qu’il y en a quelques-uns ici qui ne mourront point qu’ils n’aient vu le royaume de Dieu, qui doit venir avec sa puissance. Il parlait apparemment de sa transfiguration, qui arriva six jours après.

Il mena donc trois de ses apôtres, Pierre, Jacques et Jean, fils de Zébédée, sur une haute montagne à l’écart, que l’on croit être le Thabor, où s’étant mis en prières pendant la nuit, il parut tout d’un coup brillant de gloire. Ses habits devinrent blancs et éclatants comme la neige. Les trois apôtres, qui s’étaient d’abord endormis, se réveillèrent à la clarté de cette lumière, et furent témoins de la transfiguration de leur maître. Ils virent avec lui Moïse et Élie, qui parlaient de tout ce qu’il devait endurer. Pierre, tout hors de lui-même, dit à Jésus : Seigneur, il fait bon que nous soyons ici, si vous l’agréez, nous y ferons trois tentes de verdure ; une pour vous, et deux autres pour Moïse et pour Élie. L’Écriture remarque qu’il était si transporté de joie, qu’il ne savait ce qu’il disait. Pendant ce temps, Moïse et Élie disparurent, et les apôtres ouïrent une voix, qui leur dit : Celui-ci est mon

Fils Bien-aimé, en qui j’ai mis ma complaisance : écoutez le. À cette voix ils se prosternèrent, saisis de frayeur. Mais Jésus les releva, et leur dit le matin en descendant de la montagne, de ne découvrir à personne ce qu’ils avaient vu, jusqu’après sa résurrection (Matthieu 17.1-9 ; Marc 9.1-8 ; Luc 9.28-36).

Étant descendus de la montagne ; ils vinrent trouver les autres disciples, qui étaient au milieu d’une grande troupe, et en dispute avec les scribes, sur ce qu’ils n’avaient pu guérir un jeune homme, qui était muet, lunatique, épileptique et possédé du démon. Dès que Jésus parut, tout le monde vint au-devant de lui par honneur ; et le père du jeune homme lui demanda avec instance la guérison de son fils. Jésus la lui accorda ; et le démon quitta le corps qu’il possédait. Lorsque le Sauveur fut entré dans la maison, les disciples lui demandèrent pourquoi ils n’avaient pu guérir cet homme. Mais il répondit que c’était à cause de leur peu de foi, et que cette sorte de démon n’est chassée que par la prière et par le jeûne (Matthieu 17.19-21 ; Marc 9.18-29).

Il continuait toujours à prêcher par la Galilée, et avait soin de préparer ses apôtres à voir sa passion et sa mort, en leur parlant souvent de ses souffrances. Mais ils ne comprenaient rien à ce qu’il leur disait, et même ils disputaient entre eux en chemin de la primauté. Jésus et Pierre arrivèrent les premiers à Capharnaüm ; et les receveurs des deux drachmes et du demi-sicle par tête, que chaque Juif était obligé de donner au temple par an, vinrent demander à Pierre, si son Maître voulait les payer. Jésus prévint Pierre avant qu’il lui en parlât ; et lui ayant montré que comme Fils de Dieu, il n’était pas obligé de payer ce tribut, il lui dit d’aller à la mer, qui était toute voisine de Capharnaüm, de jeter sa ligne, et que le premier poisson qu’il tirerait lui fournirait de quoi payer pour eux deux. Pierre y alla, et le premier poisson qu’il prit, avait sous sa langue un statère, ou un sicle d’argent, que saint Pierre donna aux receveurs, pour Jésus et pour lui (Matthieu 17.24-27).

Au même moment les autres disciples arrivèrent, et par une suite de la dispute qu’ils avaient eue en chemin sur la primauté, ils demandèrent à Jésus qui serait le plus grand dans le royaume des cieux. Le Sauveur qui savait ce qui s’était passé entre eux, leur dit que pour devenir le premier, il fallait chercher à être le dernier ; et prenant un petit enfant, il leur dit que s’ils voulaient entrer dans le royaume des cieux, ils devaient devenir comme cet enfant (Matthieu 18.1-5). Il ajouta qu’on ne doit point mépriser le moindre de ceux qui croient en lui, puisque leurs anges voient toujours la face du Père céleste. Il leur donna ensuite des règles pour la correction fraternelle, et saint Pierre à cette occasion lui demanda combien de fois il devait pardonner à son frère ? s’il lui pardonnerait jusqu’à sept fois ? Jésus lui dit : Non-seulement jusqu’à sept fois, mais jusqu’à septante fois sept fois. Il ajouta la parabole du serviteur, à qui son maître avait remis une somme de dix mille talents, et qui n’avait point voulu avoir de compassion d’un de ses serviteurs qui lui devait cent deniers. Le maître fit arrêter ce mauvais serviteur, et le livra aux exécuteurs de la justice, jusqu’à ce qu’il eût payé toute sa dette, Dieu en usera de même envers ceux qui ne pardonneront pas à leurs frères (Matthieu 18.10-15, 21-35).

Jésus allant à Jérusalem pour la fête de la Pentecôte, dans la dernière année de sa vie envoya devant lui ses disciples, pour prêcher dans les lieux où il devait venir lui-même après eux. Il leur répéta les mêmes commandements qu’il leur avait déjà donnés, et leur accorda le même pouvoir de guérir les malades, et de chasser les démons. Un jour, ayant envoyé quelqu’un de ses apôtres dans un bourg des Samaritains, pour lui préparer un logement, on ne voulut pas l’y recevoir. Jacques et Jean, fils de Zébédée, lui demandèrent s’il voulait qu’ils fissent descendre le feu du ciel sur cette bourgade ? Mais Jésus leur dit qu’ils ne savaient à quel esprit ils appartenaient ; que pour lui, il était venu, non pour perdre, mais pour sauver les hommes (Luc 9.51-56). C’est peut être ce zèle trop ardent de ces deux disciples qui leur fit donner le nom de Boanergès, ou fils du tonnerre (Marc 3.17).

S’avançant toujours vers Jérusalem, le Sauveur alla loger chez deux sœurs, Marthe et Marie, qui demeuraient à Béthanie, à trois quarts de lieue de Jérusalem. Marthe s’empressait à préparer à manger pour Jésus et pour sa suite, pendant que Marie était assise à ses pieds, et écoutait tranquillement sa parole. Marthe s’en plaignit familièrement à Jésus. Mais il lui répondit : Marthe, vous vous occupez à bien des choses ; une seule chose est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part, qui ne lui sera point ôtée (Luc 9.38-42).

Comme il était sur le mont des Oliviers, vis-à-vis de Jérusalem, ses disciples le prièrent de leur donner une formule de prières, comme Jean-Baptiste en avait donné aux siens. Jésus leur répéta l’oraison dominicale, qu’il leur avait déjà donnée dans le sermon sur la montagne (Matthieu 6.9-12), et continua à leur parler des qualités, et de la force de la prière. Jésus ayant guéri un possédé qui était muet, les pharisiens l’accusèrent de ne chasser les démons qu’au nom de Béelsébub. Mais Jésus, après avoir réfuté leur calomnie par ce raisonnement, que le règne de Satan ne peut être divisé, et qu’il le serait, si Satan chassait ses suppôts des corps qu’ils possèdent, il commença à invectiver fortement contre eux (Luc 11.14-28-36) ; il le fit encore avec plus de vivacité dans un repas où il fut invité par un pharisien, et où l’on trouva mauvais qu’il ne lavât pas ses mains avant que de se mettre à table (Luc 11.38-51). Il donna aux peuples et à ses disciples plusieurs instructions durant cette fête de la Pentecôte (Luc 11-13), qu’il serait malaisé de rapporter toutes en particulier.

On peut voir les auteurs des Concordes et des Harmonies des Évangiles.

Comme il était encore dans Jérusalem, quelques pharisiens lui dirent qu’Hérode avait envie de le faire mourir. Jésus, qui savait toutes choses leur répondit : Dites à ce renard que je guéris les malades encore aujourd’hui et demain, et que dans trois jours j’achève ma course. Il voulait marquer par cette énigme que le temps de sa vie ne serait pas désormais bien long, et que ni Hérode, ni aucun autre n’empêcherait qu’il ne fournit toute sa carrière (Luc 13.31-35). Vers le même temps on lui dit que Pilate avait mêlé le sang de quelques Galiléens à leurs sacrifices ; il répondit que ces Galiléens n’étaient pas les plus coupables de ce pays, et il recommanda à ceux qui lui parlaient, la pénitence, et les menaça qu’ils périraient, s’ils ne se convertissaient (Luc 12.1-9).

À son retour de Jérusalem, il vint à Capharnaüm, où, étant à manger chez un pharisien, on lui présenta un hydropique pour le guérir. Les pharisiens l’observaient, pour voir s’il le guérirait ce jour-là, qui était jour de sabbat. Il le guérit, et leur dit pour justifier sa conduite : Si quelqu’un de vos bestiaux tombait dans un fossé le jour du sabbat, ne l’en tireriez-vous pas ce jour-là ? Et ils ne purent lui répondre un seul mot. Ayant aussi remarqué la manière pleine de vanité dont les conviés de ce repas prenaient les premières places, il leur donna sur cela de fort belles leçons, et leur dit que quand ils donnaient à manger, il fallait inviter des personnes qui pussent leur en savoir gré, et qui ne fussent pas en état de leur rendre la pareille, afin que dans la résurrection des justes, Dieu leur en accordât la récompense (Luc 14.1-14). En parcourant la Galilée, il était toujours suivi d’une grande troupe de peuple, et il ne manquait pas de leur inspirer que l’essentiel de sa doctrine était le renoncement à ses proches, à ses commodités, et à soi-même ; et que sans cela, il ne fallait pas se flatter d’être son disciple (Luc 14.15-17).

Étant arrivé à Capharnaüm, il ne dédaignait pas de parler, de converser, de manger même avec des publicains et des pécheurs. Les pharisiens en murmuraient, mais il leur proposa la parabole d’un homme qui avait cent brebis, et qui en ayant perdu une, quitta les quatre-vingt-dix-neuf autres, et alla chercher celle qui s’était égarée ; il la trouva, la chargea sur ses épaules, et la ramena à sa maison, où il fit une grande fête avec ses amis. Rien ne marque mieux que cela son extrême amour pour la conversion des pécheurs. Il leur proposa encore celle de l’enfant prodigue, qui revient au même but (Luc 14-15).

Il eut dessein d’aller à Jérusalem à la fête des Tabernacles, qui se célébrait au mois d’octobre, et qui, cette année 32 de l’ère vulgaire, et 35 de Jésus-Christ, tombait le 13 octobre. Il y alla par le pays de delà le Jourdain ; et en chemin il eut occasion de donner au peuple et à ses disciples diverses instructions sur l’usage des biens temporels, sur le divorce, sur l’aumône, sur le scandale, et sur d’autres devoirs que l’on peut voir dans les chapitres (Luc 16-17) de saint Luc. Cependant ceux de ses parents qui ne croyaient pas en lui, le sollicitaient de se rendre à Jérusalem, afin, disaient-ils, qu’il se manifestât au monde, et que les disciples qu’il avait faits dans les voyages précédents, se confirmassent dans la créance qu’ils avaient en lui. Jésus ne leur dit point qu’il y voulût aller ; il leur dit seulement qu’ils pouvaient y aller eux-mêmes ; mais que pour lui, son temps n’était pas encore venu. Les huit jours de la fête étaient déjà à moitié, lorsqu’il parut au temple, et qu’il commença a y enseigner. Les Juifs, qui savaient qu’il n’avait pas étudié, admiraient sa doctrine. Il leur déclara que sa doctrine n’était pas la sienne, mais celle du Père céleste qui l’avait envoyé. Il y avait sur son sujet une grande rumeur parmi le peuple, et l’on était fort partagé à cet égard : les uns disant qu’il était le Messie, et les autres soutenant qu’il ne l’était pas. On voulut se saisir de lui, et on envoya du monde pour cela ; mais on ne le put arrêter, parce que son heure n’était pas encore venue (Jean 7.14-53).

Le dernier jour de la fête des Tentes ou des Tabernacles, Jésus étant an milieu du temple, criait : Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive ; et il sortira de son cœur des fleuves d’eau vive. Ces discours augmentaient la diversité de sentiments qui était parmi le peuple. Les prêtres et les pharisiens soutenaient fortement qu’il ne pouvait être prophète, puisqu’il était de Galilée. Le peuple, touché des prodiges qu’il faisait, ne pouvait presque douter qu’il ne fût prophète, et même le Messie. Le soir étant venu, chacun se retira, et Jésus alla passer la nuit sur la montagne des Oliviers (Jean 8.1-11) ; le lendemain il revint au temple, et les pharisiens lui amenèrent une femme surprise en adultère, et lui demandèrent d’une manière captieuse ce qu’il en fallait faire. Jésus ne leur répondit point, mais il écrivait sur la terre comme par manière de passe-temps ; puis se relevant, il leur dit : Que celui d’entre vous qui est sans péché lui jette la première pierre. Puis il recommença à écrire comme auparavant. Ses accusateurs, craignant qu’il n’en dît davantage, se retirèrent les uns après les autres ; et Jésus dit à la femme : Personne ne vous a-t-il condamnée ? Je ne vous condamnerai pas non plus. Allez, et ne péchez plus (Jean 8.1-11).

Ce récit ne se lisait pas autrefois dans quelques anciens exemplaires de l’Évangile de saint Jean. Les autres évangélistes n’ont pas parlé de cet événement. Eusèbe dit que Papias avait raconté cette histoire, l’ayant apprise des apôtres, aussi bien que plusieurs autres qui ne se trouvaient pas dans les Évangiles. La plupart des anciens Pères grecs ne l’ont point lue ; et de tous les commentateurs grecs qui sont dans la Chaîne de saint Jean, aucun ne l’a expliquée. Maldonat assure que de tous les manuscrits grecs qu’il a consultés il n’en a trouvé aucun qui lût cette histoire, si ce n’est un exemplaire qui contenait le commentaire de Léontius sur saint Jean ; et encore Léontius n’en dit-il pas un mot dans son explication ; et le texte grec qui lui est joint est marqué par des obéies ou broches, pour désigner qu’il est contesté et étranger à cet endroit. Les Arméniens l’ont retranché de leur Bible. Ni la traduction gothique d’Ulphilas, ni la syriaque imprimée à Paris et à Londres, ne l’ont point lu. Euthyme, qui vivait au commencement du douzième siècle, avoue qu’il n’est pas dans les meilleurs manuscrits, ou qu’il y est marqué d’une obéie ou broche, comme y ayant été fourré et ajouté après Coup.

Mais on répond à cela que la plupart des manuscrits grecs qu’ont consultés Théodore de Bèze, Robert Étienne et M. Mille lisent le passage en question, et qu’il y en a très-peu de grecs aujourd’hui où il ne se trouve ; qu’on n’en connaît aucun latin où il ne soit ; que parmi les manuscrits syriaques, arabes et cophtes, il y en a peut-être plus qui le lisent qu’il n’y en a d’autres. Enfin Tatien, qui vivait l’an 160 de Jésus-Christ, et Ammonius, qui vivait l’an 220, l’ont reconnu et inséré dans leur Harmonie des Évangiles, d’où Eusèbe l’a pris pour l’insérer dans la sienne. L’auteur des Constitutions Apostoliques, saint Jérôme, saint Ambroise, saint Augustin, la Synopse attribuée à saint Athanase, reconnaissent cette histoire pour authentique. La plupart des plus habiles critiques, même protestants, la reconnaissent de même. Enfin, après la décision du concile de Trente qui a déclaré la Vulgate authentique, il n’est plus permis de douter de l’authenticité de ce passage. Quant à la conduite qu’a tenue Jésus-Christ envers cette femme, on peut consulter les commentateurs et ce que nous en avons dit ci-devant, sous le nom Adultère, Voyez aussi Femme Adultère. Retournons à l’histoire de Notre-Seigneur.

Le lendemain du jour que cela s’était passé dans le temple, Jésus, passant par la rue, vit un homme qui était aveugle dès sa naissance. Ses disciples lui demandèrent si c’était en punition de ses propres péchés, ou de ceux de ses parents, que cet homme était né aveugle. Jésus leur dit que ce n’était ni pour l’une ni pour l’autre de ces deux raisons ; mais afin que les œuvres de Dieu se manifestassent en lui. Eu même temps, crachant à terre, il fit une espèce de boue détrempée avec sa salive, en frotta les yeux de l’aveugle-né, et lui dit d’aller laver ses yeux dans la fontaine de Siloé. L’aveugle y alla, et revint parfaitement guéri. Ce miracle fit grand bruit, parce que l’aveugle était fort connu. Le lendemain on l’amena aux pharisiens pour savoir comment il avait été guéri. Il le leur raconta. Or la guérison s’était faite le jour du sabbat ; et les pharisiens soutenaient que Jésus n’était pas un vrai prophète, puisqu’il violait le sabbat. Les parents de l’aveugle furent aussi appelés. Ils rendirent témoignage à la vérité de la guérison de leur fils ; mais ils n’osèrent s’expliquer davantage, craignant les mauvais traitements des pharisiens. Comme l’aveugle guéri soutenait fortement que Jésus était un homme de bien et un prophète, on le chassa du temple. Le lendemain Jésus le rentontra, et lui dit : Croyez-vous au Fils de Dieu ? Et qui est le Fils de Dieu, répliqua l’aveugle ? Jésus lui dit : C’est moi-même. Aussitôt cet homme se jeta à ses pieds, et l’adora (Jean 9.35-41). [Voyez Aveugle-né].

Après cela Jésus retourna en Galilée : mais il n’y demeura pas longtemps, parce qu’il voulait assister à la fête de la dédicace du temple, renouvelé et nettoyé par Judas Machabée (1 Machabées 4.52), et qui se célébrait au mois de décembre (Cette année-là, le 15 décembre, 22 de Casleu). Jésus, allant donc à cette fête, passait par le milieu de la Galilée et de la Samarie ; et étant proche d’une certaine ville ; dix lépreux lui crièrent de loin : Jésus Maître, ayez pitié de nous. Il leur dit : Allez, montrez-vous aux prêtres. Comme ils y allaient, ils se trouvèrent guéris. L’un d’eux, qui était Samaritain, revint à Jésus pour le remercier. Jésus lui dit : N’y en a-t-il pas dix de guéris ? Où sont donc les neuf autres ? Allez ; votre foi vous a sauvé (Luc 17.11-17). Étant dans le temple, les pharisiens lui demandèrent : Quand viendra le royaume de Dieu ? Il répondit qu’il ne viendrait pas d’une manière éclatante et qui se fit remarquer, mais que le royaume de Dieu était au milieu d’eux. À cette occasion, il donna diverses instructions à ses apôtres sur la vigilance, sur la prière assidue, et sur l’humilité opposée à la présomption, marquée dans la parabole du publicain et du pharisien qui allèrent au temple pour prier (Luc 17.20-37 ; 18.1-10).

Jésus marchant dans le temple, dans le portique de Salomon, les Juifs l’environnèrent, et lui dirent : Jusqu’à quand nous tiendrez-vous en suspens ? Si vous êtes le Christ, dites-le nous. Je vous l’ai déjà dit, répondit Jésus et vous ne le croyez point d’ailleurs les œuvres que je fais le prouvent assez. Si vous étiez de mes brebis et de mon troupeau, vous le croiriez. Mon Père et moi ne sommes qu’un.

Alors ils prirent des pierres pour le lapider. Mais il leur dit : Je vous ai Comblés de bienfaits : est-ce pour cela que vous voulez me lapider ? Ils lui dirent : Ce n’est point pour vos bienfaits, mais pour vos blasphèmes, parce que vous voulez passer pour Dieu. Il leur dit : N’est-il pas écrit : J’ai dit : Vous êtes des dieux. Si donc ceux à qui Dieu a parlé sont qualifiés dieux, pourquoi-dites-vous que je suis blasphémateur en me disant Fils de Dieu, puisque Dieu m’a envoyé et sanctifié ? Ils voulaient ensuite encore l’arrêter ; mais il se tira de leurs mains. Étant sorti de Jérusalem, il alla au delà du Jourdain, à Béthabara, où Jean-Baptiste avait baptisé, et il y demeura environ un mois. Plusieurs Juifs l’y vinrent trouver, Et crurent en lui, disant que Jean-Baptiste n’avait fait aucun miracle, mais que Jésus en avait fait un grand nombre (Jean 10.34-41).

Pendant qu’il était au delà du Jourdain (An du monde 4036, de Jésus-Christ 36, de l’ère vulgaire 33), Lazare, frère de Marthe et de Marie, tomba malade ; et on envoya pour en informer Jésus ; il dit que cette maladie n’allait point à la mort, mais à la manifestation des œuvres de Dieu. Il demeura encore deux jours au même lieu, cependant Lazare mourut ; alors il dit à ses disciples que Lazare était mort, et en même temps il prit le chemin de la Judée, quoique ses disciples le dissuadassent d’y aller, disant que les Juifs cherchaient à le faire mourir. Étant arrivé à Béthanie, il trouva que Lazare était mort et enterré depuis quatre jours : Marthe étant venue au-devant de Jésus, lui dit : Seigneur, si vous aviez été ici, mon frère ne serait pas mort. Jésus lui répondit ; Il ressuscitera. Marie étant aussi arrivée peu de temps après, Jésus fut touché de ses larmes, et ayant demandé où était le tombeau, il s’y fit mener, le fit ouvrir, appela Lazare à haute voix ; et le ressuscita. Ce miracle fit grand bruit dans Jérusalem, et les prêtres en conclurent qu’il fallait faire mourir Jésus. Mais le Sauveur se retira à Ephrem sur le Jourdain (Jean 11.45-54), où il demeura jusqu’au [mardi] 24 mars, qui était le 4 de nisan.

Alors Jésus se mit en chemin pour venir à Jérusalem pour la dernière Pâque et pour y souffrir la mort. Il avertit ses apôtres de tout ce qui lui devait arriver dans ce voyage, mais cela était pour eux un mystère inconnu. Jésus approchant de Jéricho, un aveugle qui sut son arrivée lui demanda la vue, et l’obtint sur-le-champ, à cause de sa grande foi. Lorsque le Sauveur fut dans la ville, il vit un publicain nommé Zachée ; qui était monté sur un sycomore, pour le considérer dans la foule, et il s’invita à loger chez lui ; Zachée, ravi de cet honneur, se convertit et fit une pleine restitution de ce qu’il pouvait avoir pris aux pauvres (Luc 18-19). Le lendemain sortant de la ville, Jésus rendit la vue à deux aveugles, dont l’un s’appelait Bartimée, ou fils de Timée, fort connu dans ce pays-là (Matthieu 20.29-44 ; Marc 10.46-53).

Jésus arriva à Jérusalem quelques jours avant la fête de Pâque, mais il ne parut pas sitôt dans le temple, à cause de la mauvaise volonté des Juifs. Six jours avant cette fête, comme il était à table à Béthanie, dans la maison de Simon, surnommé le Lépreux, Marie, sœur de Lazare, répandit une boîte de nard d’épi fort précieux sur les pieds du Sauveur, et les essuya de ses cheveux. Les disciples, et surtout Judas Iscarioth, le trouvèrent mauvais, croyant que cette libéralité était mal placée, et il qu’il aurait mieux valu vendre ce parfum et le donner aux pauvres ; mais Jésus prit la défense de Marie et dit que ce qu’elle venait de faire était comme un prélude de l’embaumement qui se devait bientôt faire de son corps mort (Jean 12.10-12 ; Matthieu 26.6-13 ; Marc 14.3-9).

Le lendemain au matin, qui était le lundi 30 mars, et 10 de nisan, cinq jours avant la Pâque, Jésus, étant parti de Béthanie, s’avança vers Jérusalem, et étant près de Bethphagé, il y envoya deux de ses disciples, et leur dit de lui amener une ânesse et un ânon, afin qu’il pût monter l’ânon, et entrer ainsi à Jérusalem, afin d’accomplir les prophéties (Zacharie 9.9). Il entra donc ainsi dans la ville comme en triomphe, suivi d’une grande multitude de peuple qui criait : Hosanna au fils de David ! Béni soit le Roi qui vient au nom du Seigneur. Il alla au temple au bruit de ces acclamations, et il en chassa ceux qui y exerçaient un trafic sordide, renversa les chaises de ceux qui vendaient des colombes, et les tables des changeurs qui étaient là, en faveur des étrangers qui venaient à Jérusalem des provinces éloignées, et qui n’avaient pas de la monnaie du pays. Il guérit aussi les aveugles et les boiteux qui étaient dans ce saint lieu ; et les prêtres et les scribes s’étant formalisés des acclamations que l’on faisait en son honneur, il leur dit que si, les peuples se taisaient, les pierres crieraient (Matthieu 21.15 ; Marc 11.1-11 ; Luc 19.29-46 ; Jean 12.12-19).

Le soir il sortit de la ville et se relira à Béthanie ; et le lendemain matin, le mardi 31 de mars, et le 11 de nisan comme il retournait à Jérusalem, il eut faim et s’approcha d’un figuier qui avait des feuilles, pour y chercher du fruit, mais n’y en ayant point trouvé, parce que ce n’était pas la saison des figues, il le maudit, et aussitôt l’arbre commença à se sécher. Étant arrivé dans le temple, il en chassa de nouveau les marchands qu’il y trouva. Les princes des prêtres cherchaient l’occasion de l’arrêter, mais ils craignaient le peuple, qui était dans l’admiration de ses discours. Sur le soir, il s’en retourna à Béthanie (Matthieu 21.18-19). Le mercredi suivant, 12 de nisan et 1 d’avril, comme il revenait à Jérusalem avec ses disciples, ils virent le figuier séché et le montrèrent à Jésus ; il en prit occasion de relever le mérite et la force de la foi, qui peut même, avec le secours de Dieu, transporter les montagnes. Ce jour-là, étant dans le temple, les princes des prêtres et les sénateurs vinrent lui demander de quelle autorité il faisait ce qu’il faisait ; mais à son tour il leur fit une demande qui les déconcerta ; il leur dit : Le baptême de Jean, était-il du ciel ou des hommes ? Ils n’osèrent dire ni l’un ni l’autre ; s’ils avaient répondu : Il était du ciel, Jésus-Christ leur aurait répliqué : Pourquoi donc ne l’avez-vous pas reçu ? Et s’ils avaient dit : Il était de la terre, tout le peuple les aurait lapidés, parce qu’il tenait Jean pour un prophète. Ils lui répondirent donc qu’ils n’en savaient rien ; Jésus leur dit : Et moi je ne vous dis pas aussi de quelle autorité je fais cela (Matthieu 21.20-29 ; Marc 11.20-26).

S’adressant ensuite aux prêtres, aux docteurs et aux pharisiens, il leur proposa quelques paraboles, qui avaient toutes pour objet de leur montrer que Dieu était près de les rejeter, à cause de leur infidélité, et d’appeler en leur place les gentils pour composer son Église. C’est à quoi tendaient les paraboles des deux fils, qui ayant été envoyés travailler à la vigne par leur père, l’un dit qu’il y allait et n’y alla pas, et l’autre refusa d’abord d’y aller et y alla ensuite ; et celle des vignerons, qui, au temps des vendanges, maltraitèrent les serviteurs et tuèrent le fils du père de famille ; et enfin celle du festin auquel les conviés ne voulurent pas venir, et auquel on fit entrer des étrangers qu’on ramassa de tous côtés (Matthieu 21.28-46 ; 22.1-22 ; Luc 20.9-26 ; Marc 12.1-17).

Après cela les hérodiens, les saducéens et les pharisiens vinrent les uns après les autres lui faire des questions captieuses. Les hérodiens lui demandèrent s’il fallait payer le tribut à César. Jésus leur ayant montré que l’argent qui avait cours dans le pays portait l’empreinte de César, conclut qu’il fallait rendre à César ce qui était à lui, et à Dieu ce qui lui était dû. Les saducéens lui demandèrent à qui serait une femme après la résurrection, laquelle aurait épousé successivement les deux frères. Jésus leur dit qu’à la résurrection les hommes ne se marieraient point, mais qu’ils seraient comme les anges de Dieu. Enfin il répondit aux pharisiens qui lui demandaient lequel était le plus grand commandement de la loi, que c’était celui de l’amour de Dieu, et que le second était celui de l’amour du prochain (Matthieu 22.22-46 ; Luc 20.27-39 ; Marc 12.18-34). Après cela il commença à invectiver fortement contre les pharisiens, et à découvrir leur hypocrisie et les abus qu’ils introduisaient dans la monde et dans la pratique de la loi (Matthieu 23.1-39).

Sur le soir, Jésus sortant du temple, ses disciples lui firent remarquer les beautés de cet édifice et les richesses des présents qui y étaient. Jésus leur dit qu’il viendrait un temps que le temple serait tellement détruit, qu’il n’y resterait pas pierre sur pierre. Et lorsqu’il fut hors la ville, sur le mont des Oliviers, à l’opposite du temple, ils lui demandèrent quand on verrait l’accomplissement de ce qu’il venait de dire de la ruine du temple. Alors il commença à leur parler du siège prochain de Jérusalem par les Romains, qui arriva environ trente-quatre ans après. Il leur en marqua diverses circonstances, et leur dit que la race qui vivait alors ne mourrait point que l’on ne vit l’exécution de ce qu’il disait. Il mêla à son discours quelques traits que l’on explique d’ordinaire du jugement dernier, et qui ne peuvent en effet s’entendre à la lettre du dernier siège de Jérusalem (Matthieu 24 ; Luc 21 ; Marc 13). Il leur proposa après cela quelques paraboles qui tendaient à les tenir dans l’attente et dans la vigilance : par exemple, celle du serviteur, qui, étant établi sur ses conserviteurs, les maltraita et se divertit pendant l’absence de son maître ; mais celui-ci, à son retour, le jeta en prison comme un mauvais serviteur. Il y ajouta la parabole des cinq vierges folles et des cinq vierges sages ; et celle du père de famille qui distribue diverses sommes à ses serviteurs, afin qu’ils les fassent valoir pendant son absence. À son retour, il récompense les serviteurs fidèles et laborieux, et punit les serviteurs paresseux et inutiles. Il conclut qu’il en sera ainsi au dernier jour du jugement (Matthieu 25.1-46).

Ce même jour mercredi, 12 de nisan, et 1 d’avril, Jésus dit à ses disciples que la Pâque se devait célébrer dans deux jours, et que le Fils de l’homme serait livré à ses ennemis et crucifié. Ce fut ce même jour que les prêtres prirent la dernière résolution d’arrêter Jésus et de le faire mourir ; et que Judas d’Iscarioth s’obligea de le leur livrer, moyennant une somme de trente sicles, qui font quarante-huit livres douze sols six deniers (Matthieu 26.1-5 ; Marc 14.1-2 ; Luc 22.1-2).

Le jeudi 2 d’avril, et 13 de nisan, Jésus n’entra point le matin, que l’on sache, dans Jérusalem, ou du moins il n’y fit rien qui ait été relevé par les évangélistes. Seulement il y envoya Pierre et Jean, pour y préparer une salle et ce qui était nécessaire pour la Pâque. Sur le soir, il entra dans la ville, et alla dans la maison où Pierre et Jean avaient préparé tout ce qui était nécessaire pour y faire la Pâque le lendemain ; et s’étant mis à table avec eux, il leur déclara que l’un d’eux devait trahir. Judas lui demanda si ce serait lui. Jésus lui répondit qu’il l’avait dit ; mais il lui parla si bas, que les autres apôtres ne s’en aperçurent pas (Matthieu 26.17-25 ; Marc 14.12-21).

Comme il était à table, il leur témoigna le grand désir qu’il avait toujours eu de manger cette Pâque avec eux ; après quoi il institua le sacrement de son corps et de son sang, et le donna à manger et à boire à ses apôtres. Peu de temps après, ses apôtres étant entrés en contestation sur la primauté (Luc 22.25), Jésus, pour guérir cet amour de leur propre excellence, sortit de table et leur lava les pieds (Jean 13.2-15). Puis il les exhorta à l’imiter et à mettre leur gloire à se rendre les uns aux autres toutes sortes de marques de respect et de déférence. Lorsqu’il se fut remis à table, il se troubla et dit à ses apôtres que l’un deux le trahirait. Pierre fit signe à Jean, qui était couché à table au–dessous de Jésus, et qui avait par conséquent sa tête dans le sein du Sauveur, de lui demander qui était celui qui devait le trahir. Jésus lui dit que c’était celui à qui il allait donner un morceau de pain trempé dans la sauce. Dès que Judas eut reçu ce morceau, il se leva de table et s’en alla, transporté par le mauvais esprit, qui était entré dans son cœur. Comme il sortait, Jésus

Lui dit : Faites vite ce que vous faites ; ce qui fut interprété par les autres apôtres, comme s’il lui eût dit d’acheter ce qui était nécessaire pour la solennité, ou de donner quelques aumônes aux pauvres ; car c’était lui qui portait la bourse (Jean 13.21-32).

Jésus les entretint, le reste du repas, sur l’humilité qu’ils devaient exercer les uns envers les autres, sur l’union et la charité qui devaient être entre eux, sur la confiance qu’ils devaient avoir en la Providence et en sa propre bonté pour eux. Il leur promit de leur envoyer un autre Consolateur après son départ. Il prédit à Pierre qu’Il le renoncerait cette même nuit, et avant le chant du coq. Après quelques discours semblables (Jean 13.33 ; 14.1-20 ; Luc 22.33-38 ; Matthieu 26.30), il se leva de table, et ayant dit l’hymne d’actions de grâces, il sortit de la ville avec eux. En chemin il leur fit encore un assez long discours sur l’union qu’ils devaient avoir avec lui, sur les souffrances auxquelles ils devaient être exposés, sur le Saint-Esprit qu’ils devaient recevoir, sur sa passion, sa mort et sa résurrection prochaines ; sur le scandale que sa mort leur devait causer, sur leur fuite et sur le renoncement de Pierre (Jean 15-17). Tout cela marquait bien qu’il savait toutes choses, et qu’il n’allait à la mort que parce qu’il le voulait.

Après avoir passé le torrent de Cédron, il vint au lieu nommé Gethsémani, où il y avait un jardin. Il y entra avec ses apôtres. Et comme il y avait été fort souvent, Judas savait parfaitement l’endroit. Lors donc qu’il y fut arrivé, il dit à ses apôtres de l’attendre jusqu’à ce qu’il eût fait sa prière. Et ayant pris avec lui Pierre, Jacques et Jean, il tomba dans une profonde tristesse ; et il leur dit :

Mon âme est triste jusqu’à la mort. Demeurez ici, veillez et priez, afin que vous n’entriez pas en tentation. Et s’étant éloigné d’environ un jet de pierre, il se mit à genoux ; et se prosternant le visage contre terre, il dit :

Mon Père, toutes choses vous sont possibles ; faites, s’il vous plaît, que ce calice passe loin de moi : toutefois que votre volonté soit faite, et non pas la mienne. Alors un ange du ciel vint pour le consoler ; et étant dans cette agonie, il continua plus longtemps sa prière ; et il sortait de son corps une sueur comme de gouttes de sang qui coulaient jusqu’à terre (Luc Matthieu 26.36-39 ; Marc 14.32-36 ; Jean 18.1-2 ; Luc 22.40-42).

Il se leva jusqu’à trois fois de son oraison, et alla voir ses apôtres, qu’il trouva toujours endormis. Enfin la troisième fois il leur dit que celui qui le devait trahir était proche, et qu’il fallait aller au-devant de lui. En effet Judas était entré dans le jardin avec une troupe de soldats, à qui il avait donné ce signal : Saisissez celui que je baiserai, et menez-le sûrement. Il s’approcha donc de Jésus pour le baiser. Jésus lui reprocha doucement son crime, en lui disant : Judas, vous livrez le Fils de l’homme par un baiser ! En même temps, s’approchant de la troupe de soldats, il leur dit : Qui cherchez-vous ? Ils répondirent : Jésus de Nazareth. Jésus dit : C’est moi. À ces mots, ils tombèrent tous à la renverse. Il leur fit une seconde fois la même demande ; et ils répondirent de même qu’ils cherchaient Jésus de Nazareth. Jésus leur dit : Si c’est moi que vous cherchez, laissez aller ceux-ci.

Alors ils se jetèrent sur Jésus ; et le lièrent. Pierre tira son épée, et coupa l’oreille à un serviteur du grand prêtre ; mais Jésus guérit aussitôt cet homme, en touchant son oreille et il dit à Pierre :

Remettez votre épée dans le fourreau ; car tous ceux qui prendront l’épée périront par l’épée (Matthieu 26.47-54 ; Marc 14.40-47 ; Luc 22.47-51 ; Jean 18.4).

Jésus fut conduit d’abord chez Anne, beau-père de Caïphe. Anne avait été grand prêtre, et Caïphe l’était actuellement cette année-là. Anne interrogea Jésus sur sa doctrine et sur ses disciples. Jésus lui parla avec beaucoup de liberté, et lui dit qu’il n’avait rien enseigné en secret, et que tous les Juifs étaient témoins de sa doctrine. En même temps un des serviteurs du pontife lui donna un grand soufflet, en lui disant : Est-ce ainsi que vous parlez au pontife ? Jésus lui dit : Si j’ai mal parlé, faites-le voir ; sinon, pourquoi me frappez-vous ? Anne renvoya Jésus à Caïphe, qui demeurait apparemment dans la même maison ; et les soldats qui avaient arrêté Jésus commencèrent à faire du feu dans la cour, car il faisait froid ; et Simon Pierre, qui avait suivi Jésus de loin avec un autre disciple, qui était connu chez Caïphe, était entré dans cette cour, à la faveur de cet antre disciple, et se chauffait avec les autres, attendant ce qui en arriverait (Jean 16.15-18 ; Matthieu 26.58).

Caïphe, ayant fait venir les prêtres et les docteurs de la loi dans sa maison, fit comparaître Jésus devant leur assemblée ; et ils cherchaient des témoignages contre lui, pour le condamner à mort : mais ils n’en trouvaient point d’assez forts. Enfin il se présenta un homme qui lui avait ouï dire : Je détruirai dans trois jours le temple de Dieu, et je le rétablirai dans un pareil nombre de jours. Ce témoignage n’était pas exactement vrai, et il ne suffisait pas pour condamner un homme à mort. Pendant tout ce temps, Jésus demeurait dans le silence. Alors Caïphe le conjura, au nom du Dieu vivant, de dire s’il était le Christ. Il l’avoua, et dit de plus qu’il viendrait un jour sur les nues, à la droite du Père, pour exercer le jugement. À ces mots, le grand prêtre déchira ses habits et dit : qu’avons-nous besoin de témoins ? vous avez tous oui ses blasphèmes ; qu’en pensez-vous ? Ils répondirent : Il est digne de mort (Matthieu 26.59-66 ; Marc 14.54-64). Tout ceci se passait pendant la nuit. L’assemblée sortie, Jésus fut remis entre les mains des soldats, qui lui firent mille outrages et mille insultes.

La servante du grand prêtre, ayant envisagé Pierre, dit : Assurément cet homme était avec Jésus de Nazareth. Pierre le nia. Un moment après, il sortit de la cour et alla dans le vestibule ; et aussitôt le coq chanta. Une autre servante l’ayant encore considéré, dit qu’assurément il était de la suite de Jésus. Pierre le nia avec serment. Enfin, environ une heure après, quelqu’un de la compagnie assura qu’il était du nombre des disciples de Jésus, et que son langage même montrait qu’il était Galiléen. Un des parents de Malcus (Malc), que Pierre avait frappé, lui soutint qu’il l’avait vu dans le jardin : mais Pierre le nia avec protestation, et soutint qu’il ne connaissait point cet homme. En même temps le coq chanta pour la seconde fois ; et Jésus qui était dans la même cour, jetant les yeux sur saint Pierre, ce regard le remplit de douleur et de confusion. Il se souvint de la prédiction de Jésus sur son renoncement ; et sortant de la cour, il pleura amèrement (Matthieu 26.67-75 ; Marc 14.18-75 ; Luc 22.56-63 ; Jean 18.25-26).

Aussitôt qu’il fut jour [vendredi 3 d’avril, 14 de nisan, les prêtres, le sénat et les docteurs s’assemblèrent et firent comparaître Jésus devant eux. Ils lui demandèrent s’il était le Christ, il avoua qu’il était le Christ et le Fils de Dieu. En même temps ils le déclarèrent digne de mort. Mais comme les Romains, qui étaient alors les maîtres du pays, leur avaient ôté le droit de vie et de mort, et qu’ils pouvaient bien déclarer qu’un homme était coupable, mais non pas le condamner dans les formes, ni le faire exécuter à mort, ils l’amenèrent à Pilate, gouverneur de la province, et l’accusèrent de trois chefs :

1° Qu’il était perturbateur du repos public ;

2° Qu’il enseignait qu’il ne fallait pas payer les tributs à l’empereur ;

3° Qu’il se disait Christ et Fils de Dieu [La mention Fils de Dieu n’y est pas] (Luc 23.2 ; Jean 18.21). Pilate l’interrogea et lui demanda s’il était roi des Juifs ou Messie. Jésus lui répondit qu’en effet il était roi, mais que son royaume n’était pas de ce monde (Matthieu 27.1-10 ; Marc 15.1-2 ; Luc 23.2-3 ; Jean 18.25-26).

Comme les Juifs accusateurs de Jésus n’étaient point entrés dans le prétoire ou dans la maison de Pilate, de peur de se souiller, parce qu’ils voulaient manger la pâque le jour même sur le soir [Le jour commençait et finissait le soir, au coucher du soleil, ou à notre sixième heure de l’après-midi. Ainsi le jour pascal allait commencer au soir de notre 3 d’avril ; alors allait commencer aussi 15 de nisan. La pâque devait être mangée le 14, et c’est aussi le 14 que Notre-Seigneur et ses apôtres la mangèrent ; mais quand cette cérémonie arrivait, comme cette année, la veille du jour du sabbat, les juifs la remettaient au jour même du sabbat]., Pilate, après avoir interrogé Jésus, sortit dehors et leur déclara qu’il ne trouvait en lui aucun sujet de le condamner. Cependant ils continuaient de l’accuser fortement, sans que Jésus répondit un seul mot à leurs accusations. Pilate, ayant su que Jésus était Galiléen, le renvoya à Hérode, roi ou tétrarque de Galilée, qui était alors à Jérusalem. Hérode avait depuis longtemps envie de voir Jésus, dont il avait ouï dire tant de merveilles ; et il lui fit plusieurs questions, auxquelles Jésus ne répondit rien, ce qui étonna et indigna tellement Hérode et sa cour, qu’ils le couvrirent par dérision d’un mauvais habit d’écarlate, pour insulter à sa royauté ; et Hérode le renvoya à Pilate. Depuis ce temps, Hérode et Pilate devinrent bous amis ; car auparavant ils étaient mal ensemble (Luc 23.8-12).

Pilate, ayant de nouveau interrogé Jésus, déclara aux Juifs que ni lui ni Hérode n’ayant rien trouvé en lui qui méritât la mort, il se contenterait de le faire châtier et le renverrait. Et voyant qu’ils insistaient toujours, il leur proposa de leur délivrer Jésus ou Barabbas, comme il avait accoutumé de leur accorder la vie de quelque coupable à la fête de Pâque ; mais ils demandèrent Barabbas, et crièrent qu’il fallait crucifier Jésus. Pilate, après avoir fait encore quelques tentatives pour délivrer l’innocent, se laissa vaincre par leurs cris et leurs menaces ; et craignant quelque sédition, il se fit apporter de l’eau, lava ses mains, leur dit qu’il se déchargeait de sa mort, et le leur abandonna pour être crucifié. Or, il était environ la troisième heure ou neuf heures du matin, lorsque la sentence fut prononcée, et Jésus fut livré aux soldats romains, pour être exécuté à mort. Ils lui firent premièrement mille insultes sur sa royauté, le revêtirent d’un mauvais manteau de pourpre, lui mirent une couronne d’épines sur la tête et un roseau en forme de sceptre à la main ; et faisant semblant de le saluer et de lui rendre leurs hommages, ils lui crachaient au visage et lui frappaient la tête avec le roseau qu’il avait en main (Matthieu 27.24-29 ; Marc 15.15-19 ; Luc 23.24-25 ; Jean 19.1-16).

Après cela ils le chargèrent de sa croix et le conduisirent au Calvaire, petite colline au nord et au couchant de la ville. Comme Jésus était extrêmement épuisé et que la croix était fort lourde, les soldats romains qui le conduisaient prirent un nommé Simon, qu’ils rencontrèrent, pour lui aider à la porter, soit qu’il la portât tout entière ou qu’il en portât seulement l’extrémité derrière Jésus. Lorsqu’il fut arrivé au Calvaire, on lui présenta à boire du vin mêlé de myrrhe ou de fiel ; mais, l’ayant goûté, il n’en voulut point boire. On l’attacha donc à la croix entre deux voleurs : l’un à sa droite et l’autre à sa gauche. Il pria pour ceux qui le crucifiaient. Saint Marc (Marc 15.25) dit qu’il était environ la troisième heure du jour, c’est-à-dire neuf heures du matin ; mais saint Jean (Jean 19.14) dit qu’il était environ la sixième heure, c’est-à-dire environ midi. Il pouvait être onze heures du matin ou environ.

Pilate fit mettre sur sa croix la sentence de sa condamnation, en ces termes : Jésus de Nazareth, roi des Juifs. Les Juifs auraient voulu qu’il eût mis : Jésus, prétendu roi des Juifs ; mais il ne voulut rien changer. Les soldats partagèrent entre eux ses habits ; mais pour sa tunique, ils la tirèrent au sort, n’ayant pas voulu la couper, parce qu’elle était sans couture et tout d’une pièce, faite au métier, comme il s’en faisait alors et comme il s’en fait encore aujourd’hui en Orient. Les magistrats, les prêtres, le peuple, les voleurs mêmes qui étaient en croix comme lui, lui insultaient et lui disaient : Si tu es le Fils de Dieu, sauve-toi à présent toi-même. Cependant un des deux voleurs reprit son compagnon, reconnut l’innocence de Jésus, et le pria de se souvenir de lui quand il serait dans son royaume ; et Jésus lui promit qu’il serait ce jour-là même avec lui dans le paradis (Matthieu 27.39-44 ; Marc 15.29-32 ; Luc 23.35-43). Marie, mère de Jésus, Marie de Cléophas et Marie Madeleine, avec saint Jean l’évangéliste, étaient alors au pied de sa croix ; et Jésus dit à sa mère, en lui montrant le disciple bien-aimé : Femme, voilà votre fils. Puis, s’adressant à l’apôtre, il lui dit : Voilà votre mère. Et depuis ce temps, saint Jean la tint toujours auprès de lui comme sa mère (Jean 19.25-27).

Environ l’heure du midi, qui était la sixième heure, du jour, le soleil fut couvert de ténèbres jusqu’à la neuvième heure, ou trois heures après midi. À la neuvième heure, les ténèbres se dissipèrent, et Jésus cria à haute voix : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné ? Alors on lui présenta à boire du vinaigre dans une éponge ; et l’ayant goûté, il dit : Tout est consommé ; et baissant la tête, il expira (Matthieu 26.48-50 ; Jean 19.28-30 ; Marc 15.33.47). Alors le voile du temple se déchira depuis le haut jusqu’en bas, la terre trembla, les rochers se fendirent, les tombeaux s’ouvrirent, et plusieurs corps de ceux qui étaient morts ressuscitèrent et apparurent à plusieurs après la résurrection de Jésus-Christ (Matthieu 27.51-54). Or, les Juifs, ne voulant pas que les corps demeurassent à la croix le lendemain, qui était le grand jour du sabbat ou la pâque, demandèrent à Pilate qu’on les en ôtât et qu’on leur rompit les jambes, afin de les faire mourir plus promptement : ce qui fut exécuté à l’égard des deux voleurs. Mais pour Jésus, l’ayant trouvé déjà mort, on ne lui rompit point les jambes : on se contenta de lui ouvrir le côté d’un coup de lance, et il en sortit de l’eau et du sang (Jean 19.31-37).

Sur le soir, Joseph d’Arimathie, qui était un des disciples de Jésus et un sénateur fort distingué, vint demander à Pilate le corps de Jésus, pour l’enterrer avant le coucher du soleil ; car c’était la veille du sabbat, dont le repos commençait au coucher du soleil. [Alors allait commencer aussi le 15 de nisan]. Pilate l’accorda, et Joseph mit le corps de Jésus dans son tombeau creusé dans le roc, et qui était dans un jardin, près du lieu où il avait été crucifié. Le tombeau était fermé par une pierre qui en bouchait l’entrée ; mais les prêtres, craignant que les disciples de Jésus ne vinssent enlever son corps, y mirent des gardes et scellèrent la pierre qui fermait l’entrée du tombeau, afin qu’on n’y pût toucher. Le lendemain [samedi 4 avril et 15 de nisan], qui était le grand jour du sabbat, on demeura en repos, selon la loi ; mais après le coucher du soleil [16 de nisan], dès qu’il fut permis d’agir et d’acheter, les saintes femmes qui voulaient embaumer le corps du Sauveur, parce qu’il avait été mis dans le tombeau un peu à la hâte, achetèrent des drogues et des aromates pour lui rendre ce devoir. Et le lendemain [dimanche 5 avril et 16 de nisan], de très-grand matin et avant le jour, elles sortirent de la ville pour aller au Calvaire. Mais Jésus était déjà ressuscité [Voyez Jonas, parmi les notes, celle que j’ai tirée de M. Cahen], et les soldats qui avaient été témoins de sa résurrection étaient revenus à la ville (Matthieu 27.62-66 ; 28.1-4 ; Marc 16.2-4 ; Luc 24.1-4 ; Jean 20.1-2).

Ces femmes, étant arrivées au tombeau, virent deux anges en forme humaine, vêtus d’habits blancs, et tout éclatants de lumière, qui leur dirent : Ne craignez point. Vous cherchez Jésus de Nazareth crucifié ; il n’est point ici : il est ressuscité. Venez et voyez le lieu où il était. Dites à ses disciples et à Pierre qu’il est ressuscité et qu’il sera avant vous en Galilée. Marie-Madeleine, plus prompte que les autres, courut rapidement à Jérusalem, et dit aux apôtres que l’on avait enlevé le corps de leur Maître et qu’elle ne savait ce que l’on en avait fait. Pierre et Jean accoururent aussitôt au sépulcre. Jean arriva le premier, mais n’entra pas dans le tombeau ; Pierre y étant entré vit les linges qui avaient enveloppé le corps du Sauveur et le suaire qui lui couvrait la tête ; Jean les vit de même : et après cela ils s’en retournèrent à Jérusalem (Jean 20.2-8). Marie, qui était aussi revenue au tombeau, s’étant penchée pour voir au dedans de la grotte, y vit deux anges, l’un au pied, et l’autre à la tête du sépulcre, qui lui dirent : Pourquoi pleurez-vous ? Elle répondit : On a emporté mon Seigneur, et je ne sais où on l’a mis. En même temps, s’étant retournée, elle vit Jésus sous la forme d’un jardinier. Elle lui dit : Si c’est vous qui l’avez pris, dites-moi où vous l’avez mis, afin que je l’emporte. Jésus lui dit : Marie. Aussitôt elle le reconnut et se jeta à ses pieds pour les baiser. Mais il lui dit : Ne me touchez point ; je ne vais pas encore à mon Père. Allez dire à mes frères que je vais monter à mon Père et à leur Père, à mon Dieu et à leur Dieu (Jean 20.11-17 ; Marc 16.9-10). Marie revint donc à Jérusalem et raconta aux disciples ce qu’elle avait vu. Jésus apparut encore aux autres femmes comme elles revenaient du tombeau ; il leur parla et elles l’adorèrent. Mais les apôtres les traitèrent de visionnaires et ne crurent pas ce qu’elles rapportaient (Matthieu 28.9 ; Marc 16.10-11 ; Luc 24.9-11 ; Jean 20.18).

Le même jour, dimanche, [cinquième jour d’avril ou] seizième de nisan et lendemain de la pâque, deux disciples de Jésus s’en retournaient vers la Galilée et allaient coucher à Emmaüs, à soixante stades ou environ deux lieues et demie de Jérusalem. Jésus se joignit à eux dans le chemin, sous la forme de voyageur ; et leur ayant demandé ce qu’ils disaient, ils lui parlèrent de sa mort et de sa passion, qui faisaient l’entretien de tout Jérusalem. Nous espérions, ajoutèrent-ils, que ce Jésus rachèterait Israël ; et toutefois voici le troisième jour que cela s’est passé. Il y a même des femmes qui assurent l’avoir vu et lui avoir parlé. Alors Jésus les reprit de leur peu de foi, leur montra par les Écritures que le Christ devait souffrir et entrer ainsi dans sa gloire. Lorsqu’ils furent arrivés à Emmaüs, ils invitèrent Jésus de demeurer avec eux et comme il faisait semblant de vouloir aller plus loin, ils le contraignirent d’entrer dans le logis avec eux. Étant à table, il bénit le pain et le leur donna : alors leurs yeux s’ouvrirent, ils le reconnurent, et il disparut de leur présence. À l’heure même ils retournèrent à Jérusalem, où ils trouvèrent les apôtres assemblés ; ils leur racontèrent ce qui leur était arrivé, et ils apprirent que Jésus était aussi apparu à Pierre (Luc 24.13-34 ; Marc 16.12).

Ils étaient encore ensemble lorsque Jésus se fit voir au milieu d’eux, quoique les portes fussent bien fermées. Cette vue les troubla et les remplit de frayeur ; mais il les rassura, leur disant : La paix soit avec vous. Considérez mes pieds et mes mains, et voyez que c’est moi-même. Touchez-moi : un esprit n’a ni chair, ni os. Il demanda s’ils avaient quelque chose à manger ; et comme on lui eut présenté un morceau de poisson rôti et un rayon de miel, il en mangea en leur présence ; et soufflant sur eux, il leur dit : Recevez le Saint-Esprit. Les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez. Or, Thomas, un des douze, n’était point avec eux lorsque Jésus vint, et il dit : Si je ne vois dans ses pieds et dans ses mains les trous des clous, et si je ne porte ma main dans son côté, je n’en croirai rien.

Huit jours après [dimanche 12 d’avril], les apôtres étant tous ensemble, Jésus parut de nouveau dans la chambre et leur dit : La paix soit avec vous. Puis, s’adressant à Thomas, il lui dit : Mettez votre doigt dans les plaies de mes pieds et de mes mains, et portez votre main clans mon côté ; et ne soyez plus incrédule. Thomas répondit : Mon Seigneur et mon Dieu ! Jésus lui dit : Thomas, vous avez cru parce que vous avez vu : heureux ceux qui croiront sans avoir vu (Jean 20.19-31 ; Luc 24.36-41)

Les apôtres s’étant rendus en Galilée après l’octave de la pâque, Jésus se manifesta à eux sur la mer de Tibériade. Pierre, Thomas Nathanaël, Jacques, Jean et deux autres disciples étaient sur cette mer et travaillaient à pêcher, lorsque Jésus parut le matin sur le bord et leur demanda s’ils n’avaient rien pris. Ils répondirent que non, quoiqu’ils eussent travaillé pendant toute la nuit. Il leur dit de jeter leurs filets à la droite de leur barque, et qu’ils prendraient du poisson. Ils les jetèrent, et leurs filets se trouvèrent si pleins de poissons, qu’ils se rompaient. Le disciple bien-aimé reconnut que c’était Jésus, et dit à Pierre : C’est le Seigneur. Aussitôt Pierre se ceignit, car il était nu, et se jeta à la nage pour arriver au bord avant la barque. Les autres tirèrent le filet à bord, et il se trouva dedans cent cinquante-trois gros poissons, sans que ce grand nombre eût fait rompre le filet. Alors Jésus leur dit d’apporter de leur pêche ; et ils trouvèrent du feu préparé, avec un poisson qui rôtissait, et du pain. Ils mangèrent avec lui, et nul ne lui demanda qui il était ; car il était évident que c’était Jésus (Jean 21.1-14).

Alors Jésus dit à Pierre, par trois fois consécutives : Pierre, m’aimez-vous plus que tous ceux-là? Pierre répondit de même, trois fois, qu’il l’aimait de tout son cœur ; et Jésus lui dit autant de fois : Paissez mes brebis ou mes agneaux. Il ajouta, voulant marquer de quelle mort il mourrait : Lorsque vous étiez jeune, vous vous ceigniez comme un voyageur et vous alliez où vous vouliez ; mais lorsque vous serez vieux, un autre vous ceindra et vous mènera où vous ne voudriez point aller. Suivez-moi. Pierre le suivit ; et voyant le disciple que Jésus aimait qui suivait aussi, il dit à Jésus : Et celui-ci, que fera-t-il ? Jésus répondit : Si je veux qu’il demeure jusqu’à ma venue, que vous importe ? Suivez-moi. Le bruit se répandit donc parmi les frères que ce disciple ne mourrait point ; mais le Seigneur ne lui avait pas dit cela. Et c’est sur ce fondement que plusieurs ont avancé que saint Jean l’évangéliste n’était pas mort. Sur quoi on peut voir notre dissertation sur la mort de saint Jean, dans le tome de l’Évangile de ce saint apôtre (Jean 21.15-24).

Les disciples du Sauveur s’étant assemblés tous ensemble sur une montagne dans la Galilée, Jésus se montra à eux tous. L’ayant vu, ils l’adorèrent ; mais quelques-uns doutèrent que son corps fût un vrai corps : car pour sa résurrection et sa présence, il ne parait pas qu’on ait pu former sur cela le moindre doute. Jésus leur dit : Toute puissance m’a été donnée au ciel et en la terre. Allez, instruisez toutes les nations, et baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ; et je demeurerai avec vous jusqu’à la fin des siècles (Matthieu 28.16-20). On croit que ce fut dans cette occasion qu’il se fit voir à plus de cinq cents frères ensemble, dont plusieurs vivaient encore lorsque saint Paul écrivit sa seconde Épître aux Corinthiens (1 Corinthiens 15.5-6), l’an de Jésus-Christ 57.

Ensuite Jésus ordonna à ses disciples de s’en aller à Jérusalem, parce qu’il y devait monter au ciel en leur présence. Il se fit encore voir à eux, mangea avec eux, leur fit des reproches de leur incrédulité sur le sujet de sa passion et de sa résurrection, leur montrant par les Écritures que cela devait s’accomplir de cette sorte. Il leur ouvrit l’esprit et leur donna l’intelligence des Écritures, leur dit d’aller prêcher l’Évangile par tout le monde, leur donna le pouvoir de faire toutes sortes de miracles, leur enjoignit de baptiser et d’enseigner toutes les nations, disant que ceux qui croiraient et seraient baptisés seraient sauvés ; que ceux, au contraire, qui demeureraient dans l’incrédulité seraient damnés. Il leur ordonna de demeurer dans Jérusalem jusqu’à la venue du Saint-Esprit, qui devait les revêtir d’une vertu surnaturelle et de son onction sainte (Marc 16.14-18 ; Luc 24.44-48 ; Actes 1.3-7).

Après cela il les conduisit hors de Jérusalem, jusqu’à Béthanie ; et levant les yeux au ciel, il les bénit et disparut à leurs yeux, étant subitement élevé par une nuée qui le déroba à leur vue. Alors deux anges se présentèrent à eux, qui leur dirent : Hommes de Galilée, qu’admirez-vous, ayant ainsi les yeux élevés au ciel ? Ce Jésus, qui vient de monter aux cieux, viendra un jour de même que vous venez de le voir monter dans le ciel. Ils revinrent donc du mont des Oliviers à Jérusalem, et y demeurèrent tous ensemble en oraison avec Marie, mère de Jésus, et ceux de ses parents selon la chair qui croyaient en lui, jusqu’au jour de la Pentecôte, auquel le Saint-Esprit descendit sur eux en forme de langues de feu (Marc 16.19 ; Luc 24.49-53 ; Actes 1.5-14 ; Actes 2.1-4).

Voilà le précis de l’histoire de la vie de Jésus-Christ, rangée selon l’ordre chronologique et suivant la concorde de l’Évangile. Nous n’y avons point fait entrer des questions de critique et de théologie, que l’on trouve dans les commentateurs ; on peut les consulter dans les sources. Un dictionnaire n’est point un recueil de dissertations, ni un amas de réflexions critiques. J’ai traité de l’adoration des mages, du baptême institué par Jésus-Christ, de la dernière pâque, des ténèbres arrivées à la mort du Sauveur, de la résurrection de ceux qui ressuscitèrent avec lui, dans des dissertations. J’ai parlé de sa croix dans l’article de ce dictionnaire où ce nom se trouve. On peut consulter les chronologistes, sur les années de sa vie ; et Bimoeus, sur les circonstances de sa naissance, de sa passion et de sa mort. Nous avons traité des habits des Hébreux, et par occasion des habits de Jésus-Christ, dans une dissertation à part ; et Braunius traite au long cette matière, dans ses livres des habits des prêtres hébreux. Ainsi je me dispenserai d’entrer dans l’examen de ces particularités.

La vertu de faire des miracles est si connue dans Jésus-Christ, non-seulement parmi les chrétiens, mais aussi parmi les mahométans, que c’est une espèce de proverbe parmi eux, pour louer un ouvrier habile, que de dire : Il a le souffle du Messie, parce que Jésus-Christ, par son seul souffle, non-seulement ressuscitait les morts mais aussi donnait la vie aux choses inanimées. Ils tiennent, conformément au faux Évangile de l’enfance de Jésus, que pendant sa jeunesse il formait des oiseaux d’argile, et puis d’un seul souffle les faisait envoler. Ils assurent qu’il ne fut que trois heures dans le berceau ; ils l’appellent quelquefois l’Esprit du Père, expression qui est tirée de quelques écrits des Pères ; ils reconnaissent qu’il est né sans père, de la Vierge Marie ; ils lui donnent un frère nommé Okil ou Okaïl, mais c’est un frère à la mode des Hébreux, qui donnent ce nom aux cousins germains. Ils croient qu’il est monté au ciel ; qu’il détruira l’empire de l’Antéchrist ; qu’il exerce sa toute-puissance dans le ciel, où il est notre médiateur, et occupe la place d’honneur dans le quatrième ciel, qui est l’empyrée, selon leur système. Ils reconnaissent que l’Évangile donne la vie de l’âme et le renouvellement du cœur. Voici comme s’exprime sur cela un poète mahométan ; il parle à Jésus-Christ : Le cœur de l’homme affligé tire toute sa consolation de vos paroles ; l’âme reprend sa vie et sa vigueur, entendant seulement prononcer votre nom. Si jamais l’esprit de l’homme peut s’élever à la contemplation des mystères de la Divinité, c’est de vous qu’il tire ses lumières pour les connaître, et c’est vous qui lui donnez l’attrait dont il est pénétré. Croirait-on que ces paroles soient d’un homme qui ne reconnaît pas la divinité de Jésus-Christ ?

Les Juifs lui rendent bien moins de justice : il y en a parmi eux qui ont eu l’impiété de dire que l’âme d’Ésaü était passée en l’âme de Jésus-Christ ; qu’il était né d’un nommé Panthère et d’une jeune coiffeuse qu’il avait débauchée ; que Jésus eut l’adresse de voler dans le temple le nom ineffable de Dieu, qu’il le cacha dans une plaie qu’il se fit en s’ouvrant la peau, et se déroba ainsi à deux lions formés par art magique, qui étaient placés l’un à la droite et l’autre à la gauche du sanctuaire, et qui jetaient des rugissements effroyables lorsque quelqu’un y entrait ou qu’il en sortait ; que par la vertu de ce nom il ressuscita d’abord un mort et guérit un lépreux à Bethléem, lieu de sa naissance. Le bruit de ces miracles lui attira une foule de peuple qui le mena à Jérusalem, comme en triomphe, monté sur un âne.

Les prêtres, jaloux de sa réputation et de sa gloire, présentèrent requête a Hélène qui régnait alors avec son fils Monbaz ou Hircan, et lui demandèrent la punition de Jésus. Il comparut devant elle et la mit dans ses intérêts par de nouveaux prodiges. Alors un des prêtres, nommé Juda, s’offrit de faire tomber le crédit de Jésus, en apprenant comme lui à prononcer le nom de Jéhovah, pourvu qu’on se chargeât du péché qu’il commettrait ; il l’apprit et vint défier Jésus. Ils s’élevèrent tous deux en l’air par la vertu de ce nom : Juda entreprit de faire tomber son antagoniste, il n’y put réussir qu’en faisant de l’eau sur lui. À ce moment, ils tombèrent l’un et l’autre, parce qu’ils se trouvèrent souillés, et que la vertu du nom sacré les abandonna.

Jésus courut se laver dans le Jourdain, et commença à faire de nouveaux miracles. Juda, se trouvant inférieur à lui, et ne voulant pas toutefois se désister de son entreprise, se rangea au nombre de ses disciples, étudia ses démarches, et les découvrit aux prêtres. Jésus ayant voulu venir dans le temple, on l’arrêta avec plusieurs de ses disciples. Les autres prirent la fuite et se retirèrent dans les montagnes. Jésus étant ainsi tombé au pouvoir de ses ennemis, fut attaché à la colonne de marbre qui était dans la ville ; ou l’y fouetta, on le couronna d’épines, et dans sa soif, on lui présenta du vinaigre à boire. Le sanhédrin l’ayant condamné à mort, il fut lapidé. On voulut ensuite pendre son cadavre à un bois ; mais le bois se rompit, parce que Jésus, prévoyant le genre de sa mort, l’avait enchanté par le nom de Jéhovah.

Juda, qui ne perdait aucune occasion de faire tomber son crédit, courut chercher dans son jardin un grand chou, auquel son corps mort fut attaché. On voulut ensuite le mettre dans un tombeau ordinaire ; mais Juda, craignant que ses disciples ne l’enlevassent et ne publiassent qu’il était ressuscité, l’ensevelit dans le canal d’un ruisseau dont il avait détourné l’eau, puis il y fit couler l’eau de nouveau, afin qu’on ne pût savoir le lieu de sa sépulture. La précaution de Juda n’empêcha pas qu’on ne publiât qu’il était ressuscité. La reine Hélène le crut et déclara qu’il était Fils de Dieu ; mais Juda fit voir l’erreur de la reine et l’imposture des disciples de Jésus, en produisant son corps mort. On l’attacha à la queue d’un cheval, et on le trama jusque devant le palais de la reine, qui fut enfin désabusée.

Cependant la religion de Jésus se répandait partout, par le moyen de douze hommes qui couraient les provinces et les royaumes, et prêchaient sa doctrine et ses miracles. Ce progrès affligea les sages des Juifs. Ils députèrent un nommé Simon Képha pour y remédier : il apprit le nom de Jéhovah, et se rendit dans la métropole des Nazaréens ; il les convainquit à force de miracles qu’il était envoyé de la part de Jésus, et les engagea à lui promettre de faire tout ce qu’il demanderait. Il leur défendit de maltraiter les Juifs, et leur ordonna de célébrer la fête de la lapidation de Jésus, et le quarantième jour de sa mort, au lieu de la fête de Pentecôte. Ils le lui promirent, à condition qu’il demeurerait avec eux. Simon y consentit ; on lui bâtit une tour nommée Peter, dans laquelle il demeura enfermé pendant six ans, ne vivant que de pain et d’eau : après ce terme il mourut.

Élie vint ensuite à Rome, et soutint aux Romains que Simon les avait trompés, et que c’était lui que Jésus avait chargé de ses ordres : il leur commanda de se faire circoncire sous peine d’être noyés, d’observer le premier jour de la semaine au lieu du samedi ; mais, dans le même moment qu’il parlait ainsi, une pierre tomba sur sa tête et l’écrasa ainsi périssent tous les ennemis de Dieu. C’est la conclusion du roman ridicule et abominable que les Juifs ont composé sous le nom de Toledos de Jésus, ou génération et histoire de Jésus ; on lui a donné ce nom, à l’imitation de l’Évangile de saint Matthieu, qui a le même titre : Liber generationis Jesu Christi filii David.

Il y a encore un autre livre qui porte le même titre, et qui fut publié par M. Huldric en 1705. Il suit de plus près l’Évangile ; mais il commet des fautes et des anachronismes insoutenables. L’auteur, qui prend le nom de Jonathan et qui se dit contemporain de Jésus-Christ, et demeurant à Jérusalem, fait naître Jésus-Christ sous le règne du grand Hérode, ce qui est conforme à la vérité et contraire à ce que les Juifs enseignent communément, que Jésus-Christ naquit l’an du monde 3671, ce qui revient au règne d’Alexandre Jannée ; mais il se trompe grossièrement quand il fait mourir Jésus-Christ sous le même règne d’Hérode. L’auteur croit que ce prince ayant reçu des plaintes contre Panthère, prétendu père de Jésus, se transporta à Bethléem, et y fit massacrer tous les enfants. Il donne à Jésus pour précepteur Josué, fils de Serachia, qui avait étudié sous Akiba, qui n’a vécu que plus de cent ans après Jésus-Christ : il dit qu’Hérode consulta sur le fait de Jésus-Christ les sénateurs de Vorms, habitant dans la terre de Césarée ou dans l’empire ; qu’Hérode et son fils firent la guerre aux disciples de Jésus, qui s’étaient retirés à Haï dans les déserts de Judée ; qu’ils adoraient Jésus et son image, aussi bien que Marie, sa mère ; qu’ils demandèrent du secours au roi de Césarée contre Hérode le fils. Que d’ignorances et de pauvretés !

Il ne faut que lire ces deux impertinents ouvrages pour en concevoir tout le mépris qu’ils méritent.

Cependant les Juifs s’entretiennent dans leur aversion du christianisme par de pareils ouvrages. Ils ont fait plus, puisque, pour se tirer d’embarras sur les objections qu’on leur fait sur le temps auquel le Messie doit paraître, ils ont abrégé la chronologie de l’Ancien Testament, et ont placé la naissance du Sauveur en l’an du monde 3671, c’est-à-dire, 329 ans avant sa véritable époque. Ils ont altéré le texte de quelques prophéties qui étaient trop claires pour Jésus-Christ, et ont détourné le sens de presque toutes les autres qui le regardent, et dont l’accomplissement est plus marqué et plus évident. Ils confondent les caractères du Messie : les uns veulent qu’il soit venu il y a longtemps, mais qu’il demeure caché parmi les hommes ; les autres l’attendent, mais maudissent ceux qui supputent les temps de sa venue ; d’autres soutiennent que la venue du Messie n’est pas un article de foi. Quel entêtement ! quelle mauvaise foi !

Les Pères (Eusèbe…) nous apprennent que, dès le commencement du christianisme, les Juifs envoyèrent par tout le monde pour décrier Jésus-Christ et sa doctrine, et pour faire croire que ses disciples étaient des imposteurs qui, après l’avoir furtivement tiré du tombeau avaient publié qu’il était ressuscité. Saint Matthieu (Matthieu 28.12-13) raconte qu’après la résurrection du Sauveur, les gardes qu’on avait mis à son tombeau vinrent donner avis aux princes des prêtres de ce qui était arrivé ; et que ceux-ci ayant tenu conseil entre eux donnèrent aux soldats de grandes sommes d’argent pour les engager à dire que, pendant qu’ils dormaient, ses disciples étaient venus enlever son corps ; ce que les soldats ne manquèrent pas de publier.

Ahmed-Ben-Cassem-Al-Andacousi, more de Grenade, qui vivait l’an de Jésus-Christ 1599, cite un manuscrit arabe de saint Caecilius, archevêque de Grenade, qui fut trouvé avec seize lames de plomb, gravées en caractères arabes, dans une grotte proche de la même ville. Dom Petro de Castro y Quinones, archevêque de la même ville, en a rendu lui-même témoignage. Ces lames de plomb, qu’on appelle de Grenade, ont été depuis portées à Rome, où, après un examen qui a duré plusieurs années, elles ont été enfin condamnées comme apocryphes, sous le pontificat d’Alexandre 7. Elles contiennent plusieurs histoires fabuleuses touchant l’enfance et l’éducation de Jésus-Christ et la vie de la sainte Vierge. On y lit, entre autres choses, que Jésus-Christ étant encore enfant, et apprenant à l’école l’alphabet arabique, interrogeait son maître sur la signification de chaque lettre, et qu’après en avoir appris de lui le sens et la signification grammaticale, il lui enseignait le sens mystique de chacune de ces lettres.

On peut voir sur l’article Évangile les faux Évangiles qu’on a publiés de la vie, de l’enfance, et de la prédication de Jésus-Christ.

On a beaucoup écrit sur la forme, sur la beauté, sur la taille de Jésus-Christ. Les uns ont prétendu qu’il avait été le plus beau d’entre les enfants des hommes d’autres ont soutenu qu’il n’avait ni beauté ni grâce à l’extérieur ; les uns l’ont fait d’une taille très-avantageuse, d’autres ont prétendu qu’il était petit. Il est bon de donner ici le précis des raisons qu’on apporte pour soutenir ces divers sentiments.

Ceux qui soutiennent que Jésus-Christ était le plus bel homme qui fut jamais, se fondent principalement sur ces paroles de l’Écriture (Psaumes 45.2-3) : Vous êtes le plus beau d’entre les enfants des hommes, la grâce est répandue sur vos lèvres. De plus il était d’un excellent tempérament ; tout ce qui peut contribuer à la beauté se rencontra dans sa conception, dans sa naissance, dans son éducation ; et rien de ce qui peut rendre un homme difforme ou mal fait n’a pu s’y rencontrer ; ni dérèglement de l’imagination d’une mère, ni incommodités d’une grossesse ou d’un accouchement, ni excès dans la nourriture, ni dérangement dans la conduite. Le corps du Sauveur a dû être l’ouvrage le plus parfait, puisqu’il a été conçu d’une Vierge très-pure et très-sainte, et par l’opération du Saint-Esprit.

Les Pères n’ont pas parlé d’une manière uniforme sur cette matière. Saint Jérôme croit que l’éclat et la majesté qui brillaient sur le visage du Sauveur étaient capables de lui gagner tous les cœurs ; c’est ce qui lui attira avec tant de facilité la plupart de ses apôtres ; c’est cette majesté qui renversa ceux qui vinrent pour l’arrêter dans le jardin des Oliviers. Saint Jean de Damas raconte qu’Abgare, roi d’Edesse, ayant envoyé un peintre pour tirer le portrait du Sauveur, cet homme fut si ébloui de la splendeur qui éclatait sur son visage, qu’il fut obligé de renoncer à son entreprise ; et Jésus-Christ, pour satisfaire la dévotion du roi, prit la toile du peintre, l’appliqua sur son visage, et y imprima son portrait qu’il envoya au roi Abgare.

Nicéphore croit que saint Luc fit les portraits de Jésus-Christ, de la sainte Vierge et des apôtres, et que c’est par ce moyen que leurs images au naturel se sont répandues par toute la terre. Il est certain qu’on a toujours eu dans l’Église une certaine tradition sur la figure et sur la taille de Jésus-Christ et des apôtres. Or, voici comme je dépeins le Sauveur d’après les images qu’on croit peintes par saint Luc : Il était très-beau de visage, et sa hauteur était de sept sphitames, ou sept pieds ; ses cheveux tiraient sur le blond, n’étant pas fort épais, mais un peu frisés ou crépus ; ses sourcils étaient noirs et ne formaient pas exactement le demi-cercle. Il avait les yeux grands, vifs et tirant sur le jaune ; le nez long, la barbe noire et assez courte ; mais il portait les cheveux longs ; car le ciseau ne passa jamais sur sa tête, et nulle main d’homme ne la toucha, sinon celles de la Vierge sa mère, quand il était encore enfant. Son cou n’était ni roide ni élevé, et son port n’était ni haut ni fier. Il portait la tête un peu penchée ; son teint était à-peu-près de la couleur du froment ; son visage ni rond ni en pointe : mais il était, comme celui de sa mère, un peu allongé et assez vermeil. La gravité, la prudence, la douceur et la clémence étaient peintes sur sa face ; en un mot, il ressemblait parfaitement à sa divine Mère.

Saint Bernard dit que les peuples le suivaient et étaient attachés à sa personne par l’attrait de ses grâces, par la douceur de ses discours et par l’éclat de sa beauté. Saint Chrysostome dit de même que les peuples étaient comme cloués au Sauveur, ne pouvant se lasser de le voir et de l’admirer. Dans le même endroit, expliquant ces paroles d’Isaïe (Isaïe 53.2) il dit : « Gardez-vous bien d’entendre ceci de la laideur du corps ; à Dieu ne plaise que nous le prenions en ce sens ; mais nous l’entendons du mépris qu’il a fait de tout ce que le monde estime, et de la bassesse dans laquelle il a voulu paraître. » On pourrait accumuler quantité d’autres témoignages des auteurs plus nouveaux, et des raisons de convenance, pour prouver la beauté du Sauveur ; on les peut voir dans les auteurs qui ont écrit exprès sur cette matière.

Venons à ce qu’on dit pour montrer que Jésus-Christ n’était pas beau. Voici ce qu’en dit le prophète Isaïe (Isaïe 52.14-15 ; 53.2-3) : Il paraîtra sans gloire au milieu des hommes, et sans beauté au milieu des enfants des hommes… Il s’élèvera devant le Seigneur comme un rejeton et comme une racine qui sort d’une terre aride. Il n’a ni éclat ni beauté. Nous l’avons vu, et il n’avait rien de beau ni d’aimable ; il était dans le mépris comme le dernier des hommes ; un homme de douleur et éprouvé par l’infirmité. Son visage était comme abattu et méprisé, et nous ne l’avons point connu. Nous l’avons pris pour un homme frappé de Dieu, pour un lépreux et réduit dans la dernière humiliation. C’est pour nos péchés qu’il a été frappé, etc. Tous les commentateurs conviennent que ce passage doit s’entendre du Messie. Saint Paul (Php 2.7) confirme ce qu’on vient de lire, en disant que Jésus-Christ s’est humilié en prenant la forme d’un serviteur, et en paraissant parmi nous comme un homme. Les évangélistes n’ont parlé en aucun endroit de sa beauté.

Les plus anciens Pères ont reconnu qu’il n’était nullement beau (saint Irénée…). Celse objectait aux chrétiens que Jésus-Christ, comme homme, était petit et mal fait, et d’une naissance basse et obscure. Celse en inférait que Jésus-Christ n’était donc pas Dieu. Origène répondait qu’il était écrit que le corps de Jésus-Christ n’était point beau, mais non pas qu’il était d’une naissance obscure, ni petit de corps. Saint Clément d’Alexandrie, dans plus d’un endroit, avoue que Jésus-Christ n’avait pas la beauté du corps, mais celle de l’âme ; qu’il est venu sans cette beauté corporelle qui plaît aux yeux, de peur que les hommes, s’attachant à cet attrait extérieur, ne perdissent le goût et l’estime des choses spirituelles qu’il leur annonçait. Saint Cyrille d’Alexandrie s’exprime, à-peu-près de même, et soutient que la beauté qui lui est attribuée dans le psaume doit s’entendre de la beauté de l’âme, d’une beauté tout intérieure, et qu’il a paru dans une forme très-peu belle au dehors.

Les anciens Pères latins ne sont pas moins formels pour ce sentiment. Tertullien dit tout net que Jésus-Christ n’était pas beau ; que son extérieur n’avait rien qui lui attirât de la considération et du respect. Qui aurait osé cracher contre son visage, s’il ne l’eût en quelque sorte mérité par son peu d’apparence ? Saint Augustin avoue que Jésus-Christ, comme homme, n’avait ni beauté, ni éclat ; mais comme Dieu, il était le plus beau des enfants des hommes. La plupart des anciens, comme Eusèbe, saint Basile, Théodoret, saint Ambroise, saint Isidore de Péluse, l’auteur du Commentaire sur les psaumes imprimé sous le nom de saint Jérôme, expliquent de même l’endroit du psaume 45, de la beauté de Jésus-Christ selon sa divinité.

De tout ce qu’on vient de voir, on peut conclure que les chrétiens de la première antiquité ont cru que Jésus-Christ avait été plus laid que beau selon sa nature humaine ; que le sentiment contraire est plus moderne ; que l’un et l’autre peut se soutenir ; que ni l’un ni l’autre n’est article de foi. On peut consulter les auteurs qui ont écrit exprès sur cette matière, comme M. Rigaut, le P. Vassor, et la dissertation que nous avons fait imprimer à la tête de notre Commentaire sur Isaïe. M. l’abbé Boileau, doyen de la Sainte-Chapelle de Paris, avait fait une dissertation où il prétendait montrer que Jésus-Christ était petit. Il le prouvait principalement parce que Zachée, le voulant voir, monta sur un arbre pour le distinguer dans la foule. Il explique ces dernières paroles de Jésus-Christ, au lieu qu’ordinairement on les entend de Zachée [M. Peignot, dans un livre intitulé : Recherches sur la personne de Jésus-Christ, examine en chrétien sincère et en critique instruit la question de l’aspect extérieur de l’Homme-Dieu. Ces recherches sont divisées en quatre parties. Dans la première il donne des détails sur la personne de Jésus-Christ, tirés de différents écrits ; dans la deuxième, il s’occupe des différents portraits de Jésus-Christ que croit avoir été exécutés de son vivant et sur sa propre figure ; il parle, dans la troisième, de la statue qui fut érigée au Sauveur par l’Hémorroïsse ; enfin, la quatrième se compose de la dissertation de dom Calmet sur la beauté de Jésus Christ. M. Peignot a fait de semblables recherches sur la personne de la sainte Vierge, sur ses habitudes et sur ses portraits. Elles sont à la suite de celles dont la personne de Jésus-Christ avait été l’objet. Enfin, M. Peignot termine son ouvrage par un Essai analytique sur la généalogie et la famille de Jésus-Christ. Et le tout forme un vol in 8° de 23 275 pages ; Dijon, 1821. Sans examiner son Essai sur la généalogie de Jésus-Christ, j’ai remarqué qu’il avait fait erreur dans sa liste des ancêtres du Sauveur, à propos de Jéchonias (Matthieu 1.11-12). Après Josias (verset 10), il suppose Joachim ; citant ensuite l’évangéliste, il dit (verset 11) : Jéchonias et ses frères (Joachan et Mathaniam)… puis il suppose Joachin fils de Jéchonias, et, verset 12, mentionne Salathiel. Voyez Jechonias]

Jésus (2)

Ou Josué, fils de Josédech, fut le premier grand prêtre des Juifs, après le retour de la captivité de Babylone. Ou ne sait pas trop précisément combien d’années il exerça la souveraine sacrificature. Son premier soin, après son arrivée à Jérusalem, fut de rétablir les sacrifices, de régler les offices et l’ordre des prêtres et des lévites, et enfin de rebâtir le temple, autant que le pouvait permettre l’état où les Juifs se trouvaient alors.

Les prophètes Aggée et Zacharie parlent assez souvent de Jésus, fils de Josédech. Aggée (Aggée 1.1-2) s’adresse à lui et à Zorobabel pour les exciter à bâtir le temple du Seigneur, après la mort de Cyrus et de Cambyse ; et la seconde année de Darius, fils d’Hystaspe, roi de Perse (An du monde 3485, Avant. Jésus-Christ 515, Avant l’ère vulgaire 519), l’Esprit du Seigneur anima Jésus et Zorobabel (Aggée 2.5-9) ; et Aggée leur prédit, de la part du Seigneur, que dans peu de temps il ébranlerait le ciel, la terre et la mer, et toutes les nations ; et que le Désiré de toutes les nations viendrait dans le monde, et que la nouvelle maison, ou le nouveau temple qu’ils lui élevaient alors, serait comblé de gloire.

Zacharie (Zacharie 3.1-2) raconte que le Seigneur lui fit voir le grand prêtre Jésus, fils de Josédech, qui était debout devant l’ange du Seigneur, et Satan, qui était debout à sa droite pour l’accuser. Et l’ange du Seigneur dit à Satan : Que le Seigneur te réprime, lui qui a élu Jérusalem pour sa demeure, et qui a, pour ainsi dire, retiré ce tison du milieu du feu. Or, Jésus était revêtu d’habits sales. Et l’ange dit : qu’on lui ôte ses vêtements sales ; et il dit à Jésus : Je vous ai dépouillé de vos iniquités et je vous ai revêtu d’habits précieux. En même temps il lui fit mettre sur la tête une tiare éclatante ; et l’ange lui dit : Si vous marchez dans les voies du Seigneur, vous gouvernerez sa maison et vous garderez son temple ; et je vous donnerai un ange pour marcher avec vous. Enfin Dieu lui promet d’envoyer son serviteur l’Orient ; c’est-à-dire le Messie, qui parut en effet sous le second temple.

Le même prophète (Zacharie 4.2-3) ayant eu une vision de deux oliviers qui étaient, l’un à la droite, et l’autre à la gauche du chandelier d’or dans le temple, et qui faisaient couler l’huile dans les lamperons de ce chandelier, l’ange du Seigneur lui dit que ces deux oliviers étaient Jésus, fils de Josédech, et Zorobabel, fils de Salathiel, qui sont les deux oints qui sont debout devant le Dominateur de toute la terre. Zacharie reçut aussi ordre du Seigneur (Zacharie 6.11) de prendre l’or que lui offriraient les principaux des Juifs, d’en faire des couronnes pour mettre sur la tête de Jésus, fils de Josédech, et de lui promettre la venue de l’Homme surnommé l’Orient, c’est-à-dire, du Messie, qui devait vraiment bâtir un temple au Seigneur, et qui devait s’y asseoir sur son trône. Ce temple nouveau qu’il devait bâtir à Dieu est l’Église chrétienne, qu’il a établie, et où il a mis son trône. Au lieu d’Orient, on peut traduire le Germe. Quelques-uns, sous le nom de Germe ou d’Orient, entendent à la lettre Zorobabel, qui était le Germe de la maison de David ; mais Zorobabel étant contemporain à Jésus, il était inutile de lui promettre sa venue. Ils étaient revenus ensemble de la captivité de Babylone. Jésus, fils de Sirach, auteur du livre de l’Ecclésiastique (Ecclésiaste 49.14), loue Jésus, fils de Josédech, et Zorobabel, comme des anneaux qui étaient à la main du Seigneur, et comme les principaux auteurs du second temple, qui fut bâti au retour de la captivité, pour la gloire éternelle du Seigneur. Jésus, fils de Josédech, eut pour successeur dans la grande sacrificature son fils Joacim, qui fut grand prêtre sous le règne de Xerxès. Voyez Joseph. Antiquités judaïques 1. 2 chapitre 5, initio.

Jésus (3)

Fils de Navé, ou Jésus, fils de Nun. C’est le même que Josué, dont nous parlerons ci-après dans son article.

Jésus (4)

Fils de Sirach, auteur du livre de l’Ecclésiastique (Ecclésiaste 1.29), était, selon Génébrard dans sa Chronique, de la race du grand prêtre Jésus, fils de Josédech. Quelques exemplaires grecs lui donnent pour aïeul Eléazar, père de Sirach de Jérusalem ; mais Jésus, fils de Sirach, qui parle de lui-même au chapitre (Ecclésiaste 50.29), et dans tout le chapitre 51 et en quelques autres endroits de son livre de l’Ecclésiastique, ne parle jamais ni de sa prétendue qualité de prêtre, ni de ses aïeux. Seulement il nous apprend qu’il a souhaité la sagesse, qu’il l’a demandée à Dieu avec instance, prosterné devant son temple ; qu’il a beaucoup voyagé, pour se perfectionner dans l’étude (Ecclésiaste 51.18 ; 34.10-12) ; qu’il a beaucoup étudié, qu’il a couru beaucoup de dangers (Ecclésiaste 34.13), qu’ayant été noirci par des calomnies auprès du roi, il s’était vu dans un péril imminent de mort (Ecclésiaste 51.5-8) ; mais que, par la miséricorde du Seigneur, il en avait été garanti.

Il dit qu’il est le dernier de sa nation qui ait écrit des sentences morales (Ecclésiaste 33.16). Enfin Jésus, son petit-fils, et traducteur de son ouvrage, témoigne que son aïeul était dans une très-haute réputation de sagesse. Voyez le prologue qui est à la tête de ce livre. On ignore qui était Sirach, père de Jésus, et on ne sait pas certainement le nom du père de Jésus, petit-fils de l’auteur et traducteur de son ouvrage.

Les Arabes ont connaissance de cet écrivain et de ses ouvrages. Ils croient que lui ou son aïeul a été vizir de Salomon, et ils lui donnent une femme fort vertueuse qui se nomme Fikia, et dont la vie a été écrite en Arabe. On trouve aussi un livre arabe intitulé : Les Sentences et la Sagesse de Jésus, fils de Sirach.

Nous avons parlé assez au long du livre de l’Ecclésiastique dans l’article Ecclesiastique. On peut voir ce que nous avons dit, et de l’auteur, et du livre, et de sa canonicité, et de son traducteur, et du temps auquel ils vivaient l’un et l’autre. Nous n’en dirons pas davantage en cet endroit.

Jésus (5)

Autrement Jason, grand prêtre des Juifs, intrus en la place d’Onias 3. Voyez ci-devant Jason.

Jésus (6)

Fils de Phabis, grand prêtre des Juifs, successeur d’Ananel et prédécesseur de Simon, fils de Boéthus. Il ne fut que peu de temps pontife. Il fut déposé par le grand Hérode, l’an du monde 3981, avant Jésus-Christ 19, avant l’ère vulgaire 23. On ne sait aucune particularité de sa vie.

Jésus (7)

Fils de Sias, souverain pontife des Juifs, succéda à Eléazar, et eut pour successeur Joazas, sous le règne d’Archélaüs, fils d’Hérode. Ce Jésus, fils de Sias, ne fut pontife au plus que quatre ans, ayant été déposé en 4009, et son prédécesseur n’ayant été-établi qu’en 4004.

Jésus (8)

Fils de Damnée, grand prêtre des Juifs, fut établi par le roi Agrippa, l’an de Jésus-Christ 63, et déposé la même année. Il succéda à Ananus, et eut pour successeur Jésus, fils de Gamaliel.

Jésus (9)

Fils de Gamaliel, grand prêtre des Juifs, successeur de Jésus, fils de Damnée, et prédécesseur de Matthias, fils de Théophile. Les deux pontifes Jésus, fils de Damnée, et Jésus, fils de Gamaliel ayant chacun leur parti dans le temple et dans la ville, disputèrent le pontificat les armes à la main. Agrippa, pour apaiser cette sanglante dispute, les déposa tous deux, et mit en leur place Matthias, fils de Théophile, l’an de Jésus-Christ 64.

Jeta