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Baptême
Dictionnaire Biblique Bost Westphal

Ce mot indique primitivement l’acte de plonger, de tremper, puis de laver et de nettoyer. Dans l’original du passage (Marc 7.8), il y a « le baptême des pots et des coupes ». Pris dans le sens religieux, ce mot n’implique pas nécessairement, quoique certaines congrégations le prétendent, l’idée d’une immersion totale. Tous les passages allégués en faveur de cette assertion peuvent admettre une interprétation moins littérale, et indiquer seulement que celui qui devait recevoir le baptême, et celui qui devait l’administrer, entraient l’un et l’autre des pieds dans l’eau à une hauteur indéterminée, et que ce dernier répandait peut-être avec la main de l’eau sur la tête du néophyte (voir Actes 8.38). Le mot de l’Évangile, que Jean baptisait à Énon « parce qu’il y avait là beaucoup d’eau » (Jean 3.23), ne prouve pas davantage cette immersion absolue. Dans ces pays brûlants, les torrents, et jusqu’à un certain point les rivières, sont sujets à se dessécher presque entièrement dans certaines saisons de l’année ; on vit un roi, Achab, et l’un de ses principaux officiers, se mettre personnellement en chemin pour aller chercher des endroits un peu arrosés, (1 Rois 18.5-6. v. encore 2 Rois 3.9), etc.). Dans le passage de l’Évangile qu’on vient de citer le mot beaucoup pourrait donc parfaitement signifier ce qu’ici, dans la zone tempérée, nous appellerions un peu, d’autant plus que le mot eaux est dans le grec au pluriel ; ce qui semblerait indiquer, presque avec certitude, non pas une eau profonde, mais une grande ramification du torrent, qui permettait peut-être à Jean-Baptiste de faire baptiser simultanément en plusieurs endroits. La raison la plus puissante peut-être pour repousser l’idée des baptêmes par immersion totale, c’est l’obligation absolue où aurait été la multitude qui venait se faire baptiser par Jean au désert (Marc 1.5), d’apporter des vêtements de rechange et de se déshabiller ainsi complètement, hommes et femmes. La chose semble inadmissible et impraticable. À combien plus forte raison dans nos climats, et dans les profondeurs du Nord ! On allègue que le baptême chrétien devant être l’image d’un ensevelissement, et de la mort à une vie précédente, à laquelle succède une résurrection, l’immersion totale représente mieux la chose. Mais l’Évangile n’est pas si matériel qu’il s’asservisse à représenter à ce point-là les idées qu’il veut figurer. Il donne quelques signes, et celui qui a de l’intelligence comprend.

Nous venons de dire quel est le sens du baptême, du moins du baptême chrétien ; et pour nous borner à ce qui regarde l’Écriture sainte, il nous semble que c’était même la signification de toutes les espèces de baptêmes religieux dont nous parle la Bible ; car elle en indique plusieurs à différentes époques de la vie théocratique, et différents peut-être dans les cérémonies qui en accompagnaient l’application. Jacob et sa famille se lavèrent avant de s’approcher de Dieu à Béthel (Genèse 35.2). Les Hébreux en firent autant avant d’entrer dans l’alliance de l’Éternel en Sinaï (Exode 19.14 ; 1 Corinthiens 10.2). Aaron et ses fils se lavèrent également lorsqu’ils furent initiés à la sacrificature (Exode 29.4). Enfin, sous le ministère de Jean, même avant le baptême chrétien proprement dit, le baptême devint le sceau de la nouvelle alliance, ayant alors déjà la même signification qu’il eut plus tard, bien qu’il n’annonçât pas aussi clairement la doctrine du Père, du Fils et du Saint-Esprit (Actes 19.3). Dans ces différents cas, et quel que soit le sens spécial que pourraient donner à la chose ceux qui étaient lavés, le baptême était toujours un rite d’initiation.

Quant au baptême chrétien, la belle signification dont nous venons de parler est positivement indiquée par Paul (Romains 6.3-11) ; elle est pleine de grandeur et correspond exactement aux idées que se faisaient déjà les esséniens, et que se sont faites, après eux, les moines catholiques romains, du renoncement au monde qui doit caractériser toute âme vraiment pieuse. Seulement les deux sectes que nous indiquons ici bornaient ce renoncement à quelques individus dont elles faisaient une sorte d’élite, tandis que Jésus et son Évangile imposent cette sainte et douce obligation à tout fidèle. Dans ce sens-là, le baptême d’un homme qui embrasse la foi correspond presque en tout point à ce qu’est la prise du voile chez une religieuse, l’endossement de l’uniforme chez un militaire, la robe virile chez les Romains. Ce n’est qu’un type, un symbole, mais un symbole parlant. Et c’est par ces considérations qu’on doit expliquer ce qui est dit dans l’endroit de l’épître aux Romains, indiqué plus haut, « que nous sommes ensevelis avec Christ par le baptême : » c’est évidemment par la foi en Christ, et par le don que nous lui faisons de nous-mêmes, que nous sommes ensevelis avec lui, et non par la cérémonie même. Mais comme le symbole se liait étroitement, pour ceux à qui Paul écrivait, à la foi dont il s’agit, l’apôtre argumente de l’un comme de l’autre. Cela se fait tous les jours : il n’est pas un militaire à qui l’on ne puisse dire : Tes épaulettes, ta cocarde, ton uniforme t’ont fait renoncer à ton père et à ta mère, au foyer de ta famille, et à ses douceurs ; tu es mort à la vie civile, tu ne vis plus que pour défendre ta patrie et pour obéir à tes nouveaux supérieurs.

Sans doute cette signification symbolique du baptême s’applique bien plus naturellement et plus réellement à ceux qui ont reçu le baptême après avoir embrassé l’Évangile par conviction, qu’à ceux qui l’ont reçu enfants. Mais, dans les deux cas, elle reste pourtant. Et peut-être, ce qu’on peut dire de plus sage en faveur du baptême des enfants (la Bible laissant cette question pour le moins indécise), c’est que la foi étant un devoir aussi bien que le moyen du salut, l’enfant du chrétien peut être consacré au Seigneur, même avant son consentement, comme on voit un enfant né dans la troupe, porter dès ses plus jeunes années le costume de soldat, quitte à lui de refuser plus tard, ou même de déserter. Ce n’est du reste pas ici le lieu d’examiner la question difficile et délicate du baptême des enfants.

Un passage assez obscur, relatif à ce sujet, et qui est, selon nous, généralement mal traduit, est celui où Pierre dit que le baptême qui nous sauve n’est pas celui par lequel sont nettoyées les impuretés de la chair 1 Pierre 3.21). On ajoute ensuite : « Mais c’est la promesse faite à Dieu d’une conscience pure » (ou quelque autre version semblable). Il faut traduire : Mais c’est la recherche que fait de Dieu une conscience pure.

Le baptême n’est qu’un symbole, mais ce serait se tromper grandement que d’en conclure qu’il peut être négligé ou aboli, comme chez les quakers, par exemple. Les symboles sont une des choses qui ont les racines les plus profondes dans la nature humaine ; le peuple est plein de cette idée. Des barbares font un pacte, et ils élèvent une pierre sur le lieu de la transaction, « afin qu’elle soit témoin de leurs promesses ». Un juge prononce une sentence de mort, il brise un bâton en la prononçant ; tous les assistants frémissent. Un manœuvre revêt l’uniforme, c’est un homme nouveau. Un prêtre romain élève son idole, et chacun peut apercevoir le frémissement qui parcourt l’église au moment où la foule adore, sans s’en douter, le Numen... Satan, qui s’est mis sous le symbole à la place de Dieu !

Les symboles, la représentation des choses spirituelles par des objets ou des actes matériels, se retrouvent dans l’Écriture, comme ils se trouvent dans la nature. Ils sont un besoin, et souvent un moyen, un secours, une obligation ; ils sont aussi une profession, un acte public, et c’est dans ce sens, mais dans ce sens seulement, que Jésus parlant à Nicodème (Jean 3.3), met le baptême d’eau sur la même ligne que le baptême d’esprit.

La controverse relative au baptême des adultes, toujours fort vive en Angleterre, aux Etats-Unis et aux Indes Orientales, n’a jeté qu’une lueur fugitive sur le continent, où des questions malheureusement bien plus graves, ont dû forcément accaparer et absorber l’attention des chrétiens. C’est à Genève, en 1825, que cette question a été le plus chaudement discutée (la Famille Baptiste, la Famille Baptisée, etc.) ; dès lors les baptistes suisses, tout en conservant leurs principes, se sont fondus dans les troupeaux déjà existants ; quelques Eglises pédo-baptistes ont même pris des mesures spéciales, destinées à faciliter aux baptistes leur admission sans gêner en rien leur conscience. Parmi les rares ouvrages publiés en France en faveur du baptême exclusif des adultes, nous citerons, comme complet et curieux, le « Catéchisme du Baptême » d’après les saintes Écrituress et un grand nombre d’auteurs pédobaptistes (Douai 1843), Des rapports entre le Baptême et la Cène (1849), Recherches sur le Baptême, par J.-B. Crétin.

Au reste, la question de fond ne peut sérieusement souffrir de difficultés ; le baptême des petits enfants est la conséquence logique du système des Eglises nationales ; le baptême des adultes, des adhérents, des professants, est la conséquence logique du système des Eglises de professants, quelque nom qu’on leur donne d’ailleurs, Eglises indépendantes, libres, dissidentes ou autres. L’Eglise primitive baptisait ceux qui croyaient, parce qu’alors, l’accession à l’Eglise était un fait individuel et volontaire ; si l’on fait de l’Eglise, en en dénaturant la notion, un établissement d’évangélisation et d’appel, point de vue qui peut se soutenir par des raisons spirituelles et morales plutôt que scripturaires et ecclésiastiques, le baptême des enfants est justifié ; les baptisés sont les appelés ; mais si l’Eglise ne comprend que les adhérents ou les élus, le baptême n’appartient plus qu’aux adultes. L’honorable B. Noël, en quittant l’Eglise anglicane, s’est fait rebaptiser ; il a été plus logique dans sa conduite que ceux qui l’ont précédé ou suivi en Suisse, en Ecosse et en France ; il n’a pas quitté un nationalisme pour un autre.

Les baptistes compromettent souvent leur cause par l’étroitesse et l’exclusivisme avec lequel ils s’attachent, non seulement à leur point de vue quant au baptême des adultes, mais encore au baptême par immersion. Une forme n’est pas un dogme fondamental. À cet égard, ils subiront aussi l’influence de l’alliance évangélique.