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David
Dictionnaire Biblique Westphal Bost Calmet

Signifiant : bien-aimé. Second roi d’Israël, le plus grand de tous ; fondateur de la dynastie, qui prend de lui son nom. Il était fils d’Isaï, Bethléhémite ; d’après 1 Samuel 16.10 le cadet de huit frères. Sa biographie s’étend depuis 1 Samuel 16 jusqu’à 1 Rois 2. Une narration postérieure, de valeur historique très inférieure, se trouve dans 1 Chroniques 11-29. Particulièrement dans 1 Samuel la narration est puisée à différentes sources, qu’il n’est pas toujours facile de concilier. Ainsi, pour les débuts de David, avons-nous trois récits indépendants, que nous allons brièvement esquisser.

  1. Dans le premier récit (1 Samuel 16.1-13), Samuel vient à Bethléhem, sur l’ordre de l’Éternel, pour choisir un successeur à Saül. Les sept fils d’Isaï passent devant lui, mais aucun d’eux n’est l’élu de JHVH. À la fin, sur l’insistance de Samuel, on envoie chercher le cadet qui faisait paître les brebis. David arrive : « il était blond, avec de beaux yeux et un aspect agréable » (1 Samuel 16.12). Et c’est sur sa tête que le prophète verse l’huile sacrée.
  2. Dans le deuxième récit (1 Samuel 16.14-23), David est décrit comme « musicien habile, guerrier vaillant, parlant bien et beau de visage » (1 Samuel 16.18). Il vient à la cour de Saül pour jouer de la harpe et calmer ainsi l’humeur farouche du roi, tourmenté par un esprit mauvais. Le roi le prend en vive affection et en fait son écuyer.
  3. Le troisième récit (le plus célèbre des trois) décrit le combat du jeune David avec le géant Goliath (1 Samuel 17). Ici David est de nouveau le jeune pâtre que son père envoie au camp d’Israël s’informer de la santé de ses frères. Il y arrive et entend l’orgueilleux défi du Philistin. Enflammé d’une ardeur généreuse, il se déclare prêt à marcher contre cet impie, « qui ose insulter les armées du Dieu vivant ». Saül lui déconseille d’exposer ainsi sa vie, puis lui offre ses propres armes, mais elles sont trop lourdes pour le jeune garçon. Dans le simple attirail du berger, sa fronde a la main, il s’avance vers Goliath « au nom de l’Éternel des armées ». Une pierre adroitement lancée frappe le géant au front et l’abat ; puis David lui coupe la tête de sa propre épée. À remarquer qu’après la victoire Saül s’enquiert de la famille du jeune homme, qu’il ne paraît pas connaître (verset 66-68).

De ces trois récits, le premier rattache la future royauté de David à l’intervention du prophète Samuel, qui, sur l’ordre de l’Éternel, l’aurait, dès son adolescence, substitué à Saül, le roi infidèle. Dans le deuxième, David vient à la cour comme un guerrier (cf. 1 Samuel 14.52) et un habile musicien. C’est le récit que la critique actuelle considère comme le plus historique. Le troisième récit met en lumière le courage du jeune berger et sa foi inébranlable en l’Éternel, qui lui assure la victoire. On entrevoit dans cet exploit prodigieux le héros d’Israël qui délivrera son peuple du joug des Philistins. La beauté littéraire et la valeur religieuse de cet épisode sont hors de contestation. Mais qu’en est-il de son historicité ? À ce propos l’on remarque qu’il se concilie difficilement avec le récit précédent, dans lequel David est déjà à la cour du roi comme son écuyer. Bien plus, le même exploit est attribué dans 2 Samuel 21.19 à un certain Elchanan de Bethléhem. L’admiration populaire aurait-elle transféré au roi illustre la prouesse d’un de ses guerriers ? Beaucoup de critiques le pensent. D’autre part, il est permis d’admettre quelque confusion de noms (cf. la variante de 1 Chroniques 20.5) ; et le récit de 1 Samuel 16.14-23 pourrait être hors de place et devoir être transféré après le chapitre 17.

De toute façon, ce sont ses victoires contre les Philistins qui placent David au premier rang des guerriers d’Israël. Les femmes chantent de lui : « Saül a frappé ses mille et David ses dix mille » (1 Samuel 18.7). Le fils du roi, le généreux Jonathan, se prend d’une amitié passionnée pour le jeune héros. Celui-ci gagne aussi le cœur de Mical, la fille de Saül, et il obtient sa main comme prix de sa vaillance. Mais tant de succès excite l’humeur soupçonneuse de Saül, qui voit dans l’astre naissant une menace pour sa sûreté et pour son trône. Dès ce moment la narration se déroule comme une longue série d’embûches et de poursuites de Saül contre son rival trop heureux. Pendant que David joue de la harpe devant le roi, celui-ci cherche à le clouer au mur d’un coup de lance (1 Samuel 18.10 et suivant 1 Samuel 19.9 s, doublet). Saül envoie ses gens pour saisir David dans sa maison, mais la ruse de sa femme fidèle lui permet de s’échapper et de se rendre auprès de Samuel à Rama (chapitre 19). L’intervention de Jonathan en faveur de son ami ne fait qu’empirer la situation (chapitre 20). Maintenant la rupture entre Saül et David est consommée : David est un fuyard et devient le chef d’une bande de gens hors la loi (400 hommes d’après 1 Samuel 22.2, 600 d’après 1 Samuel 27.2). La protection que les sacrificateurs de Nob accordent au héros fugitif attire sur eux la terrible vengeance du roi (chapitres 21 et 22). La narration insiste sur la parfaite innocence de David, qui, malgré le traitement indigne et outrageant dont il est l’objet, épargne par deux fois la vie de « l’Oint de l’Éternel » : dans la caverne d’En-Guédi, puis dans le campement nocturne au désert de Ziph (chapitres 24 et 26, sans doute un doublet). L’épisode de la rencontre de David et d’Abigaïl nous dépeint au vif le héros prompt à venger dans le sang une insulte imméritée, puis se laissant fléchir par l’intervention habile d’une femme généreuse (chapitre 25).

La fin de cette triste odyssée fut la grave résolution prise par David de chercher un asile chez les Philistins. Avec sa troupe de 600 hommes il se mit au service d’Akis, roi de Gath, qui lui assigna comme résidence la ville de Tsiklag. De cette ville David faisait de fréquentes razzias contre les Amalécites et d’autres tribus du désert, tout en laissant croire à Akis qu’il pillait le pays de Juda (chapitre 27). Mais lorsque, peu après, les Philistins reprirent la lutte contre Israël, David se trouva devant l’angoissante perspective de devoir marcher contre son propre peuple. La défiance bien naturelle des princes des Philistins délivra David de la terrible impasse où il s’était mis. Pendant que les Philistins s’avancent vers le pays d’Israël, David remporte une éclatante victoire sur les Amalécites, qui venaient de brûler Tsiklag pendant son absence ; et il envoie aux anciens de Juda une part du riche butin (chapitres 29 et 30). À l’annonce de la catastrophe de Guilboa, où périrent au champ d’honneur Saül et ses fils, David composa cette émouvante élégie, qui réunit dans la même complainte l’ami incomparable et le roi qui l’avait injustement poursuivi (2 Samuel 1.17-27).

Maintenant la route est enfin libre pour David. Il se rend à Hébron, l’ancienne ville de Juda, riche en souvenirs des patriarches, et y est proclamé roi sur cette tribu (2 Samuel 2). Il s’ensuit une guerre civile entre David et Isboseth (ou Esbaal, 1 Chroniques 8.33 ; 1 Chroniques 9.39) fils de Saül, que son oncle Abner établit roi sur le reste d’Israël. Mais l’un et l’autre périssent bientôt d’une mort violente, et les représentants de tout Israël, rassemblés à Hébron, acclament David roi sur toute la nation. C’était aux environs de l’an 1000 (2 Samuel 5).

Les débuts du nouveau règne furent marqués par deux actes décisifs dans l’histoire du peuple d’Israël : la victoire sur les Philistins et le choix de Jérusalem comme capitale. Les Philistins, qui s’étaient tenus à l’écart pendant la guerre civile, interviennent, mais trop tard, pour maintenir leur suprématie sur Israël. Ils sont battus à plusieurs reprises, et le peuple hébreu est enfin délivré du joug étranger (2 Samuel 5.17-25 ; 2 Samuel 21.15-22). Avec la clairvoyance d’un grand monarque, David comprit la nécessité d’avoir une capitale plus centrale qu’Hébron. Il jeta son dévolu sur la vieille cité jébusite, située sur les limites de Juda et de Benjamin. La ville était tenue pour imprenable (cf. le dicton : 2 Samuel 5.6 ; 2 Samuel 5.8) ; mais par un heureux coup de main, sans doute en pénétrant dans la forteresse par un canal souterrain, Joab, le vaillant capitaine de David, parvint à s’en emparer (2 Samuel 5.6 ; 2 Samuel 5.9). David fit de Jérusalem la capitale politique et religieuse d’Israël. Il y transporta en grande pompe, au milieu des acclamations du peuple, l’Arche, le vénérable objet sacré mosaïque, laissé à l’abandon depuis les temps de Silo (chapitre 6).

Après avoir ainsi affermi son pouvoir, David entreprit les grandes guerres contre les peuples environnants : Moabites, Édomites, Syriens, Ammonites furent tour à tour battus et subjugués par David et ses vaillants généraux, Joab et Abisaï (chapitres 8, 10, 12). Aux yeux de la postérité, le fils d’Isaï apparut de plus en plus comme le héros par excellence, et son règne comme l’âge d’or de la théocratie jéhoviste.

À l’intérieur, David s’organisa fortement. L’illustre monarque était entouré d’une pléiade de vaillants paladins, les gibborim (2 Samuel 23.8-39). Pour sa sûreté personnelle, il avait une garde du corps, composée surtout d’éléments étrangers : les Kéréthiens et les Péléthiens (2 Samuel 8.18 ; 2 Samuel 15.18). Nous connaissons la liste de ses principaux fonctionnaires (2 Samuel 8.15-18 ; 2 Samuel 20.23-26). Sous ce rapport aussi son règne marque un progrès décisif sur celui de Saül. David est vraiment le fondateur de la monarchie israélite.

En regard des côtés lumineux, les ombres ne manquent pas dans ce règne. La triste aventure de David avec Bath-Séba (adultère aggravé de meurtre) est trop connue pour qu’il soit nécessaire de la rappeler en détail. Relevons plutôt avec quelle sévérité ce crime, assez commun chez un despote oriental, est jugé par l’histoire sainte. Le prophète Nathan se rend chez le roi coupable et lui dénonce son crime ; et le roi, repris dans sa conscience, s’écrie : « J’ai péché » (chapitres 11 et 12). Le mauvais exemple du roi agit comme une Némésis vengeresse sur sa famille. L’aîné, Ammon, fait violence à sa demi-sœur Tamar ; il est tué par son frère Absalom (chapitre 13). Puis, c’est la révolte d’Absalom, proclamé roi à Hébron. Le vieux roi abandonne sa capitale et se réfugie, avec ses fidèles, au delà du Jourdain, tandis que le fils usurpateur entre à Jérusalem. Les vicissitudes de cette révolte sont retracées dans un récit riche en détails, qui fait revivre devant nous les principaux personnages de ce drame : David et Absalom, Ahitophel et Husaï, Joab, Siméi, Bar-zillaï, etc. Le dénouement eut lieu, comme on sait, par la mort d’Absalom, à la bataille dans la forêt d’Éphraïm (chapitres 15-19). Moins dangereuse fut la révolte de Séba, promptement domptée : indice de la rivalité toujours latente, entre Israël et Juda (chapitre 20). Les derniers jours du roi furent encore troublés par la tentative de son fils Adonija, maintenant l’aîné, pour s’assurer le trône. L’habile intervention de Bath-Séba, secondée par Nathan, déjoua le complot et aboutit au sacre de Salomon, du vivant de son père (1 Rois 1). Bientôt après se terminait la vie orageuse de David (1 Rois 2.1-11), qui, par ses exploits militaires et son talent d’organisation, avait fait de son peuple une nation puissante et respectée.

En retraçant à grands traits la vie de David, nous nous en sommes tenus à la narration des livres de Samuel, dont plusieurs pages sont très rapprochées des événements (2 Samuel 9-20 ; 1 Rois 1 et 1 Rois 2). La narration parallèle de 1 Chroniques, très postérieure, nous montre comment on envisageait la figure de David plus d’un siècle après l’exil. David y apparaît comme un saint avec la couronne sur la tête ; ses fautes et les côtés sombres de son règne sont soigneusement passés sous silence. Nous le voyons entièrement occupé aux préparatifs pour la construction du temple, réglant d’avance tous les détails de l’organisation du culte. Par contre, d’après 2 Samuel 7, David renonça, sur les conseils du prophète Nathan, à son projet de bâtir une maison à l’Éternel, qui préférait séjourner sous une tente, selon la simplicité de l’âge mosaïque.

On a porté sur le caractère de David des jugements très différents, et la critique a souvent réagi avec exagération contre la canonisation traditionnelle. On comprend le mot de Reuss : « C’était un héros ; on provoque la critique, très mal à propos, en voulant en faire un saint ». Il est facile de relever dans la vie de David maints traits de duplicité et même de cruauté envers ses ennemis (cf. 1 Samuel 21.1 ; 1 Samuel 21.13-15 ; 1 Samuel 27.9-11 ; 2 Samuel 8.2). C’étaient les mœurs d’un âge encore à demi-barbare. Mais il ne faut pas exagérer. Il est arbitraire d’accuser David d’avoir inspiré l’oracle qui réclama la mort de sept fils de Saül (2 Samuel 21). Quant au traitement infligé aux villes des Ammonites, les nouvelles versions (la Version Synodale comme la Bible de Kautzsch en Allemagne), par une légère correction du texte, excluent tout sujet de scandale : David ne jeta pas tout un peuple à périr dans des fours (voir ce mot) et sous des scies, mais l’employa à différents travaux de scierie et de fours à briques : ce qui est un peu différent (2 Samuel 12.31) ! De même, pour les dernières volontés de David touchant Joab et Siméi (1 Rois 2.5-9), au lieu d’y voir un testament des rancunes du vieux monarque, on les mettra plus facilement sur le compte de son successeur, ou bien on se rappellera l’idée antique que les crimes impunis attirent la malédiction sur un pays.

Mais, à côté des ombres, que de traits lumineux dans son caractère ! Sa générosité envers ses ennemis, sa promptitude à pardonner à ses adversaires ; (cf. 2 Samuel 19) l’ardeur chevaleresque qui le soutint dans tant de combats ; (cf. 2 Samuel 23.15-17) sa foi religieuse qui lui fit toujours rechercher l’aide de l’Éternel au milieu des vicissitudes et des dangers de sa vie agitée ; et son humilité sous l’accusation du prophète Nathan et dans l’acceptation des épreuves de ses dernières années (2 Samuel 15.25 ; 2 Samuel 16.11), tous ces traits et d’autres encore placent le roi David au rang des personnages les plus attrayants et sympathiques de l’Ancien Testament

David est-il l’auteur, en tout ou en partie, des psaumes qui portent son nom ? Nous tenons comme sûrement établi que David fut un poète (2 Samuel 1.19-27, élégie sur Saül et Jonathan ; 2 Samuel 3.33, sur la mort d’Abner ; Amos 6.5) et, étant données sa piété personnelle et sa confiance en l’Éternel, un poète religieux, un psalmiste. Mais quant à savoir quels chants de notre Psautier remontent réellement jusqu’à lui, il est malaisé de le déterminer, et les critiques actuels, même conservateurs, renoncent à dresser une liste de psaumes davidiques. Le Psaume 18, reproduit dans 2 Samuel 22, est celui qui a le plus de chance de remonter, au moins dans sa partie centrale, au grand roi. Le Psaume 51, bien qu’expression d’un repentir individuel, semble présupposer l’enseignement des prophètes. Il est d’ailleurs reconnu aujourd’hui que l’expression « Psaumes de David » signifie psaumes appartenant au recueil de David plutôt que composés par David (voir Psaumes).

La renommée de David est allée en grandissant à travers les âges. Il devint le modèle sur lequel furent jugés tous les rois postérieurs (cf. 1 Rois 11.34-38 ; 1 Rois 15.3-5 ; 2 Rois 18.3 ; 2 Rois 22.2), et le type du roi idéal de l’avenir, du Messie (Ésaïe 11.1 ; Jérémie 23.5 ; Ézéchiel 34.23 ; Osée 3.5). Et notre Sauveur lui-même ne dédaigna pas le titre de « fils de David », dont il fut salué par les foules (Marc 10.47 ; Matthieu 12.23 ; Matthieu 21.9 etc.). Th. L.


Numérisation : Yves Petrakian