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Cham
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet Bost

Fils de Noé, et frère de Sem et de Japhet. On croit qu’il était le dernier des fils de Noé (Genèse 9.24). Un jour que Noé avait pris du vin avec excès, Cham l’aperçut couché dans sa tente et découvert d’une manière indécente. Au lieu de le cacher, il s’en alla le dire à Sem et à Japhet. Ceux-ci, se couvrant d’un manteau et marchant en arrière, allèrent jeter ce manteau sur leur père, et couvrirent ainsi sa nudité. Noé, à son réveil, ayant appris ce qui s’était passé, dit : Que Chanaan soit maudit, et qu’il soit l’esclave des esclaves envers ses frères. Ces paroles font conjecturer que Chanaan avait averti Cham, son père, de la nudité de Noé ; d’autres croient que Noé voulut frapper Cham d’une manière plus sensible en donnant sa malédiction à Chanaan, son Noé ajouta : Que le Seilneur, le Dieu de Sem, soit béni ; que Cham soit esclave de Sem ; que Dieu étende la possession de Japheth ; que Japheth demeure dans les tentes de Sem, et, que Chanaan soit son esclave. [Voyez alliance, parmi les notes].

Cham eut une très-nombreuse postérité : il fut père de Chus, de Mezraïm, de Phut et de Chanaan. Nous parlerons des descendants de chacun de ses fils dans leurs articles particuliers, et du pays qu’ils occupèrent. À l’égard de Cham, on croit qu’il eut l’Afrique entière en partage, et qu’il la peupla par ses enfants. Pour lui, il demeura dans l’Égypte, qui passe pour la plus fertile partie de l’Afrique l’Afrique est nommée la Terre de Cham en plus d’un endroit des Psaumes (Psaumes 77.51 ; 104.23 ; 105.22). Dans Plutarque, l’Égypte est nommée Chémia. On remarque des vestiges du nom de Cham dans Pso-chemmis, Psitta-chemmis, qui sont des cantons d’Égypte. Enfin on croit qu’Ammon, adoré dans l’Égypte et dans la Lihye, n’est autre que Cham, fils de Noé.

L’auteur du Tharik-Thabari enseigne que Noé ayant donné sa malédiction à Cham et à Chanaan, l’effet de cette malédiction fut que non-seulement leur postérité fut asservie à ses frères, et née pour ainsi dire dans l’esclavage, mais aussi que tout à coup la couleur de leur chair devint noire ; car ils tiennent que tous les noirs viennent de Cham et de Chanaan. Noé, voyant ce changement si prompt, en fut attendri, et pria Dieu qu’il lui plût d’inspirer aux maîtres de Chanaan un amour de tendresse et de compassion pour lui. Et cette prière de Noé fut exaucée ; car, si l’on voit encore aujourd’hui l’effet de la malédiction de Noé dans la servitude des descendants de Cham, nous y remarquons aussi l’effet de sa prière, en ce que cette sorte d’esclaves noirs est chérie et recherchée en tous lieux.

Plusieurs ont cru que la postérité de Cham était la seule ou du moins la principale cause de la construction de la tour de Babel ; qu’elle en inspira le dessein aux autres, et forma le dessein présomptueux d’élever une tour qui s’élevât jusqu’au ciel, pour rendre leur nom célèbre dans tous les siècles et pour se mettre en état de ne pas craindre un nouveau déluge si Dieu voulait l’envoyer sur la terre. Nous n’aurons pas de peine à avouer que l’entreprise des bâtisseurs de Babel était criminelle aux yeux de Dieu ; l’auteur de la Sagesse (Sagesse 10.5) l’appelle un consentement d’iniquité ; mais il n’est pas juste d’en charger sans preuves la seule race de Cham.

Un auteur arabe nous assure que Cham fut le premier qui répandit l’idolâtrie sur la terre, qui inventa les thèmes célestes et la magie, fut auteur de diverses superstitions, à cause de quoi on l’appela Zoroastre ou Adris le Prophète, c’est-à-dire l’image d’un astre, ou un feu qui luit en tout temps.

La fable a conservé quelques vestiges de l’histoire de Cham. On raconte qu’un jour Myrrha, épouse, ou, selon d’autres nourrice d’Hammon et mère d’Adonis, étant accompagnée de son fils, trouva Cinyras qui dormait dans sa tente tout découvert et dans une posture indécente ; elle courut aussitôt en donner avis à Hammon. Celui-ci en avertit ses frères, qui, pour sauver à Cinyras la honte de se trouver nu à son réveil, le couvrirent de quelque chose. Cinyras, ayant appris ce qui s’était passé, donna sa malédiction à Adonis, et poursuivit Myrrha dans l’Arabie, où, après avoir erré neuf mois, elle fut changée en l’arbre qui porte la myrrhe. Hammon est le même que Cham, et Adonis le même que Chanaan [Au mot Jupiter, dom Calmet dit : « Jupiter est Cham, Neptune est Japheth, Sem est Pluton. On s’est expliqué ailleurs plus au long sur ce sujet n Il n’indique pas en quel endroit. Ce n’est pas à l’article de Cham, où il dit seulement que Ammon, le Jupiter des Égyptiens et des Libyens, est le même que le troisième fils de Noé. Delort de Lavaur a fait sur ce sujet des recherches intéressantes, et nous allons les reproduire pour réparer l’omission de dom Calmet].

Sur le partage que Noé fit de toute la terre entre ses trois enfants, les poètes, dit le savant que nous venons de nommer, partagèrent l’empire de l’univers entre les trois enfants de Saturne. Ceux qui en ont examiné les rapports ont trouvé que da Cham ils avaient fait leur Jupiter, maître du ciel et de la terre, des dieux et des hommes ; de Japheth. Neptune avec l’empire de la mer ; et de Sem, Pluton, le maître et le dieu dei morts et des enfers.

C’est ce qui se justifie par tout ce que l’antiquité nous on apprend et par les différents noms qu’on avait donnés à Jupiter, tirés en partie non-seulement des différentes fonctions qu’on lui attribua, mais des divers noms de Cham ou Ham, qui eut dans son partage l’Égypte et la Lihye, d’où ce pays-là, et particulièrement l’Égypte, est appelé, dans nos Écritures, la Terre de Cham, et par Plutarque Chémia, par les Égyptiens la Terre de Hum. Toute l’Afrique en fut nommée la Terre de Hamon, et les Égyptiens appelèrent Jupiter, Hammon, dont le célèbre temple, visité par Alexandre, était dans la Libye, et un autre du même nom, à Méroé, dans l’Éthiopie. Plutarque dit, au commencement de son Traité d’Isis et d’Osiris, que le nom propre de Jupiter était Amoun ou Hamilton et Ammon.

Bérose, chaldéen, dit qu’Ammon fut un roi de Libye qui épousa Rhéa, fille du ciel, et fut père de Bacchus ; qu’il fut en danger de périr de soif dans les déserts de la Libye, lorsqu’un bélier lui découvrit une fontaine ; qu’en reconnaissance il bâtit un temple à son père. Hammon, dont la statue a la tête d’un bélier avec des cornes an front (figure sous laquelle il apparut aussi à Hercule) : c’est ce qui a été tiré de l’histoire de Moïse (Exode 34.29-31, mêlée avec celle de Noé), lorsqu’il descendit de la montagne, où Dieu lui avait donné les Tables de la loi, le visage éclatant des rayons de lumière qui ressemblaient à des cornes (Exode 34.35). Il parut ainsi au peuple, et c’est comme on le dépeint. La fontaine que Dieu fit naître pour Moïse dans le désert est assez connue. Les ennemis des Hébreux débitaient qu’elle leur avait été découverte par un animal sauvage.

La ville de Jupiter, en Égypte, appelée par les Grecs Diospolis, était appelée en hébreu la Ville d’Amon.

Le nom propre grec de Jupiter est Zeus, du même sens que celui de Cham, l’usage des Grecs étant de conserver la signification des noms qu’ils prenaient des autres nations, comme nous le ferons voir, dans la suite, par l’aveu même de leurs auteurs. Ce nom grec veut dire chaleur, du verbe zeô, chauffer, brûler, ce que signifie Cham et Ham eu hébreu.

Saturne fut mutilé par Jupiter, son fils, parce que Cham découvrit la nudité de son père, et que le mot hébreu qui signifie découvrir est presque le même que celui qui signifie mutiler.

Les habiles ne croyaient qu’un Jupiter ; mais, comme on rassemblait en lui le pouvoir de diverses fonctions, on en fit plusieurs dieux, et on lui donna différents noms. Cicéron en compte trois : l’un né de l’Air ; l’autre, du Ciel ; et le troisième, fils de Saturne, dont on voyait le tombeau dans l’île de Crète, où il avait régné. Il y en a qui en comptent jusqu’à trois cents. Chaque nation voulait en avoir un de son pays et lui donner des noms en sa langue.

On le croyait, et il était appelé le premier des dieux, comme Nemrod ou Bélus, descendant de Cham, fut le premier homme adoré comme un Dieu. Bélus était aussi le Jupiter des Babyloniens et des Assyriens.

Sanchoniathon, dans la Théologie des Phéniciens, compte Bélus parmi les enfants de Saturne, et assure que c’était Jupiter ; et comme Nemrod est connu dans l’Écriture sous le nom de puissant sur la terre et de vigoureux chasseur, on a fait Jupiter grand dans le monde et ou l’a appelé le Chasseur. Les conquêtes des enfants de Cham, qui, les premiers, portèrent leurs armes dans l’Asie sur le partage de Sem, le firent regarder comme le plus puissant, et firent appeler Jupiter Victorieux et Aimant le butin.

Ils l’appelèrent aussi Père du jour, de l’assurance que Dieu avait donnée à Noé, père de Cham, de conserver le jour et la nuit dans leur ordre immuable, et de ce que Noé ouvrit le jour à tout le genre humain en ouvrant l’arche.

Les Grecs, outre le nom de Zeus, du même sens que celui de Cham, appelaient aussi Jupiter Égyptien, et quelquefois le Nil (du partage de Cham), Dieu de la guerre et de la victoire, et Répandant la fureur, ce qui convient à Cham et à sa famille.

Le nom d’Aigiokos, formé d’aigos ou aigis, une chèvre, et son bouclier de peau de chèvre, appelé oegide, étaient pris d’un habit des habitants de la Libye, où Cham régna et où il fut adoré sous le nom d’Hammon. Cet habit était appelé, aigis : sans doute la peau ou le poil de chèvre y entrait et en faisait partie.

Il fut aussi nommé Laboureur et l’Inventeur du labourage, et par les Phéniciens, Dagon, du même sens, parce que la famille de Noé répandit la méthode de travailler la terre, qu’elle avait apprise de lui. Les titres de Libérateur et de Sauveur, sous lesquels on dédia des temples à Jupiter, n’ont jamais mieux convenu qu’à Noé, père de Cham. On lui a donné divers autres noms, pris des lieux où il était adoré et des sujets pour lesquels il était honoré ou invoqué.

On voit, dans les violences, les usurpations et les désordres des guerres, qui ont commencé par Cham et par sa famille, maudits par Noé, l’original de ce que la fable a feint, que l’âge de fer avait succédé, sous Jupiter, à l’âge d’or, qui était sous Saturne. Voyez Japheth et Sem.

C’est donc à tort qu’on en a douté, Cham est le Hammon des Égyptiens et le Jupiter des Grecs et des Latins. Il est le père des Égyptiens, des Éthiopiens et des Nègres.

La troisième race d’hommes connue de Moïse et des Hébreux, dit Malte-Brun, est représentée comme la postérité de Cham ou Sam, troisième fils de Noé ; et les malédictions dont tous les écrivains hébreux la chargent semblent prouver qu’elle a dû différer des peuples sémitiques, soit par sa constitution physique, soit par sa langue et ses mœurs. Le nom même de Cham ou Ham signifie, en hébreu, la couleur foncée de ces peuples, ou la chaleur du climat sous lequel ils habitent. Ce nom se retrouve évidemment dans celui de Cham ou Chamia, donné à l’Égypte par les indigènes dans les temps anciens et modernes. Il est également Incontestable que le nom d’un des fils de Ham, Mizr (au pluriel Mizraïm.), est le même qui, chez les Arabes et les Turcs, désigne encore l’Égypte, principalement le Delta. Ce point de la géographie mosaïque semble donc très-clair ; et, s’il nous est impossible de retrouver d’une manière certaine tous les peuples indiqués comme descendants de Mizraïm, il nous est pourtant permis de croire que les Hébreux connaissaient toute l’Égypte et une partie des côtes africaines du golfe Arabique. On ne peut guère non plus douter que le nom de Kusch, donné à l’un des fils de Ham, ne désigne les peuples de l’Arabie méridionale et orientale ou les géographes grecs et romains connurent les villes ou les peuples de Sabba, de Subbatha, de Regma et autres, dont les noms, selon les auteurs hébreux, appartenaient à des descendants de Kusch. Voyez Chus, Égypte, Éthiopie, Libye].