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Animal
Dictionnaire Biblique Westphal

L’animal est un être vivant doué d’une organisation perfectionnée (systèmes nerveux, locomoteur, etc.), qui lui permet de s’affranchir du milieu extérieur. Cependant l’animal ne peut se passer du monde végétal, qui lui est inférieur, mais dont il reste tributaire parce que le végétal constitue l’intermédiaire indispensable entre le monde minéral inorganique et lui, en réalisant, à l’aide du rayonnement solaire, les synthèses ternaires qui rendent assimilables, pour les organismes animaux, les corps bruts de la nature.

Les recherches biologiques récentes ont insisté sur le caractère animal de l’homme : il serait puéril de nier que l’organisation physiologique de l’homme est en tous points semblable à celle des mammifères : la médecine expérimente sur des animaux pour mettre au point les thérapeutiques humaines. Mais cette comparaison, dont le mérite fut de battre en brèche un anthropocentrisme naïf, fait ressortir les caractères spécifiques de la race humaine qui, s’ils ne font pas de l’homme un être isolé dans la nature, suffisent cependant à en faire un être singulier, que le Créateur a appelé à dépasser le stade de l’animalité et à dominer sur les animaux (Genèse 1.28) et sur l’être animal qui se retrouve en lui (1 Corinthiens 15.44 Jacques 3.15), dégageant ainsi ce qui est sa particularité originelle et sa vocation divine (1 Corinthiens 2.14).

La Bible parle souvent des animaux. L’animal est un être mystérieux ; son existence est assez incompréhensible, car il détient une vie analogue à celle de l’homme et en est cependant très différent. L’animal se compose d’une chair qui varie avec les espèces et d’une âme contenue dans son sang (Lévitique 17.10) ; c’est pour cette raison que l’animal doit toujours être saigné avant d’être mangé (Genèse 9.4 ; Lévitique 7.27 ; 1 Samuel 14.33 ; Actes 15.29 ; Actes 21.25).

Une distinction très nette doit être faite entre les animaux qui sont utiles à l’homme et ceux qui lui sont inutiles ou nuisibles. La principale richesse des tribus nomades d’Israël était le bétail. D’immenses troupeaux paissaient dans le désert (voir ce mot) ; vaches, brebis et chèvres fournissaient du lait dont la crème était utilisée (Deutéronome 32.14 ; Ésaïe 7.22 ; Proverbes 27.27), ainsi que les fromages (2 Samuel 17.29 ; Job 10.10). Pour l’alimentation, le bœuf et le veau étaient sans doute plus estimés que la chèvre ou le mouton ; un veau gras était un mets des plus délicats (1 Samuel 28.24; Luc 15.27). La brebis était certainement l’animal domestique le plus commun, parce que le plus sobre et le plus facile à parquer. Elle est très fréquemment citée dans la Bible, soit comme bête d’élevage (1 Samuel 17.15 ; 1 Samuel 17.34 etc), soit comme victime pour les sacrifices (2 Chroniques 7.5 ; 2 Chroniques 15.11 etc.), soit enfin comme image (Psaumes 78.52 ; Psaumes 119.176 ; Ésaïe 53.6 etc.). Il existait une véritable législation pour les troupeaux, qui prévoyait la perte éventuelle des bêtes et établissait les responsabilités. Les troupeaux étaient conduits par les chiens (Job 30.1, cf. Ésaïe 56.10), parqués avec soin (Nombres 32.16 ; 1 Samuel 24.4 ; Michée 2.12) et recensés (Lévitique 27.32 ; Jérémie 33.13).

Pour les déplacements importants, les Israélites utilisaient le chameau (Genèse 12.16 ; 2 Chroniques 14.15), monture nomade par excellence (Genèse 24.14 ; Genèse 31.34) et qui faisait partie de toute riche maison (Genèse 30.43 ; Job 1.3), bien qu’il fût interdit d’en consommer la chair (Lévitique 11.4). L’âne, plus commun, était également très apprécié comme monture (Genèse 22.3 ; 2 Samuel 17.23 ; 2 Samuel 19.26, etc.), et comme animal de labour (Ésaïe 30.24), le sol ne demandant pas de labours profonds. Il n’en est pas de même du cheval, d’importation étrangère, pour lequel il semble que l’Israélite ait toujours eu une certaine méfiance (Deutéronome 17.16 ; 2 Rois 2.11 ; 2 Rois 6.17 ; Ésaïe 31.1 ; Zacharie 9.10 ; Zacharie 12.4), mêlée de crainte en raison de sa vigueur et de son agilité (Psaumes 147.10 ; Job 39.22 ; Habakuk 1.8), et parce que, peu utilisé pour les soins domestiques ou agricoles, il était considéré comme un animal de guerre (Proverbes 21.31 ; Proverbes 30.31 ; Jérémie 12.5 ; Osée 1.7). Le mulet était connu (2 Samuel 13.29 ; 2 Samuel 18.9) et aurait certainement avantageusement remplacé l’âne, si la loi n’avait pas interdit sa production en défendant le croisement des espèces (Lévitique 19.19).

La loi du livre de l’Alliance et du Deutéronome prescrivait aux Israélites d’être bons pour les animaux : elle ordonnait de porter aide à l’âne ployant sous le faix, même s’il appartenait à un ennemi (Exode 23.5 ; Deutéronome 22.1-4). Le repos de l’homme devait s’étendre aussi aux animaux (Exode 23.12 ; Deutéronome 5.14) ; il était défendu de museler le bœuf foulant le grain (Deutéronome 25.4), et de cuire un chevreau dans le lait de sa mère (Exode 23.19 ; Exode 34.26 ; Deutéronome 14.21). Cette dernière interdiction ne devait pas avoir seulement des motifs d’ordre sentimental : elle fait penser à certains procédés magiques ; peut-être aussi se figurait-on, à l’origine, que cette pratique aurait pour effet de faire tarir le lait de la chèvre (d’après Bible du Centenaire). En dehors même de la Loi, un proverbe israélite rattache à la piété envers Dieu les égards pour l’animal domestique : « Le juste a soin de la vie de son bétail, mais les entrailles des méchants sont cruelles » (Proverbes 12.10). Il y avait du reste autre chose que la sollicitude de l’homme pour l’animal ; il y avait jusqu’à une certaine solidarité. « Pour l’homme antique, spécialement le cultivateur, il n’y a pas démarcation très rigoureuse entre l’espèce humaine et les animaux. » (Bertholet.) Non seulement les soins à leur donner fixent des dates et des fêtes dans la vie familiale, comme la tonte des brebis (1 Samuel 25.4 ; 1 Samuel 25.8 ; 1 Samuel 25.36 ; 2 Samuel 13.23 et suivants), mais encore ils sont associés aux fautes et aux sanctions : (Lévitique 20.15) le bœuf qui tue une personne n’est pas tué comme bête dangereuse, mais lapidé comme bête criminelle et il est interdit d’en consommer la chair (Exode 21.28 et suivants), le sang humain est vengé sur les animaux comme sur l’homme (Genèse 9.6).

Sans doute il faut voir dans la familiarité de vie des bergers ou des agriculteurs avec leurs bêtes l’origine d’un certain nombre de noms d’animaux domestiques donnés à des personnes : Rachel = Brebis, Egla = Veau, Caleb = Chien, Gemalli = Chameau, Jonas = Colombe, etc., etc. ; quant aux noms d’animaux sauvages, ils peuvent avoir été considérés comme protégeant leurs porteurs contre leurs ennemis : Laïs = Lion, Suai = Renard, Aja = Autour, Paréos = Puce, etc. (voir plus loin la question du totémisme). La solidarité de l’Israélite avec son bétail introduit dans ses sacrifices une note personnelle, intime, presque affective, qui le met déjà sur la voie du sacrifice vivant de la personne à Dieu, où seront appelés les rachetés de Jésus-Christ.

Parmi les animaux non domestiques, plusieurs espèces étaient recherchées pour l’alimentation : il convient de citer d’abord le gibier (Genèse 27.9 ; Lévitique 17.13 ; Lamentations 3.52). La chasse se pratiquait de manières variées : citons le piège (Ecclésiaste 9.12) et le filet qui servait non seulement pour les oiseaux (Psaumes 124.7 ; Proverbes 7.23 ; Amos 3.5), mais aussi pour le gros gibier (Ésaïe 51.20). Deutéronome 14.6 nous apprend que l’Israélite consommait le lièvre, le daim, le bouquetin, la gazelle, l’antilope.

Cependant l’aliment préféré était certainement le poisson : pendant la marche au désert, son absence fut amèrement regrettée (Nombres 11.5), et en Palestine la pêche jouait un rôle bien plus important que la chasse. Le poisson était objet de commerce (Néhémie 13.16 ; Sophonie 1.10) ; il y avait à Jérusalem une porte des Poissons (Néhémie 12.29), qui donnait vraisemblablement accès à un marché au poisson. On péchait le plus souvent au filet (Ézéchiel 47.10 ; Habakuk 1.16), mais aussi à la ligne (Amos 4.2 ; Matthieu 17.27). Les espèces de poissons connues ne sont pas mentionnées (Ézéchiel 47.10), mais seul était comestible le poisson ayant écailles et nageoires (Lévitique 11.9).

D’autres animaux jouaient encore un rôle important dans la vie des Israélites. Le serpent était l’animal rusé (Genèse 3.1) et maudit (Genèse 3.14) ; son anatomie spéciale et sa morsure venimeuse lui ont toujours valu une place privilégiée dans l’esprit des peuples (Psaumes 140.4 ; Proverbes 23.32 ; Proverbes 30.19 ; Ésaïe 65.25 ; Jérémie 46.22 ; Amos 9.3 ; Matthieu 10.16 ; 1 Corinthiens 10.9). Il faut aussi mentionner les « reptiles » ; ce mot qui, aujourd’hui, désigne une classe zoologique bien définie, s’appliquait à un grand nombre d’espèces, tantôt reptiles, tantôt arthropodes (Insectes, Lévitique 11.22 ; Myriapodes Lévitique 11.42, etc.), ainsi que certaines espèces volantes (Lévitique 11.20), bien que le mot insectes paraisse s’appliquer plus particulièrement aux insectes volants (Deutéronome 28.42). Les reptiles étaient redoutés et méprisés (Lévitique 11.20 ; Lévitique 11.42 ; Lévitique 22.5 ; Michée 7.17 ; Habakuk 1.14). Parmi eux, la sauterelle mérite une mention spéciale ; elle était considérée comme comestible (Lévitique 11.22 ; Matthieu 3.4), mais était aussi très redoutée en raison des dégâts qu’elle pouvait causer : (1 Rois 8.37 ; Amos 4.9 ; Amos 7.1 ; Psaumes 78.46 ; Deutéronome 28.38) ses invasions peuvent détruire des récoltes entières (Joël 1), et leur nombre est considéré comme immense (Nahum 3.15; Joël 2.10 ; Exode 10.16).

Les bêtes fauves constituaient aussi un danger. Il est dit que la Palestine fut occupée par les Cananéens de peur qu’elle ne devînt la proie des bêtes sauvages (Exode 23.29). Citons le lion (2 Rois 17.25) et l’ours qui menacent les troupeaux (1 Samuel 17.34) et les enfants : (2 Rois 2.24) la fureur de l’ourse privée de ses petits est proverbiale (2 Samuel 17.8) ; puis le léopard (Cantique 4.8), le loup (Jérémie 5.6 ; Habakuk 1.8), le renard (Cantique 2.16), le chacal, animal odieux par excellence (Ésaïe 13.22 ; Ésaïe 34.13).

Le bonheur des temps futurs comportera la paix avec les fauves (Ésaïe 11.8-8 ; Osée 2.18), ou leur extermination (Lévitique 26.6 ; Ézéchiel 34.25).

La plupart des cultes voisins d’Israël représentant et adorant les dieux sous l’image d’animaux sacrés, la loi et les prophètes condamnent continuellement cette idolâtrie (Exode 32 ; 1 Rois 12.28-13.3 etc.). L’utilisation considérable des bêtes pour les sacrifices, en particulier pour les sacrifices sanglants, s’appuyait en l’épurant sur la vieille idée que c’était un moyen de créer et d’entretenir entre l’adorateur et son dieu un lien du sang, une consanguinité, et par là une communion. Certains savants voient même l’origine de ces sacrifices dans le totémisme : l’animal sacrifié, toujours de la même espèce, représentait la divinité elle-même, était le totem du clan, qui portait son nom, et qui ne mangeait jamais de sa chair en dehors des repas cérémoniels (Robertson Smith, Rel. Sem.). Cette hypothèse n’est nullement démontrée : les noms d’animaux donnés à des personnes peuvent s’expliquer beaucoup plus simplement que par les totems (voir plus haut) ; de même, « les interdictions alimentaires de l’Ancien Testament peuvent protester aussi bien contre toute autre forme du culte des animaux que contre le totémisme » (Bertholet). Alors que les païens érigeaient tant d’animaux en idoles, la Révélation biblique se borne à montrer en certains animaux des symboles, comme le serpent d’airain (Nombres 21.8 et suivant), — qui devint lui-même une idole (2 Rois 18.4), — surtout comme les « êtres vivants » des visions d’apocalypses (Ézéchiel 1 ; Daniel 7 ; Apocalypse 4).

Voir article aux divers noms d’animaux. H. L.


Numérisation : Yves Petrakian