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Esdras et Néhémie (livres d’)
Dictionnaire Biblique Westphal

Titre

Ces deux livres, classés dans nos Bibles parmi les livres historiques, figurent dans la Bible hébraïque parmi les « Écrits », immédiatement avant les Chroniques. Primitivement ces livres n’en formaient qu’un seul, sous le nom d’Esdras. Deux autres écrits religieux juifs portent le nom d’Esdras : un livre apocryphe (voir ce mot), qui se compose d’extraits des Chroniques et des livres canoniques d’Esdras et de Néhémie, et un écrit apocalyptique (voir Apocalypses), qui appartient à la catégorie des Pseudépigraphes.

La numérotation diffère suivant les versions ; dans les versions grecques :

  • 1 Esdras = Esdras apocryphe,
  • 2 Esdras = Esdras canonique,
  • 3 Esdras = Néhémie canonique ;

Dans les versions latines :

  • 1 Esdras Esdras canonique,
  • 2 Esdras = Néhémie canonique,
  • 3 Esdras = Esdras apocryphe,
  • 4 Esdras = Esdras apocalyptique.

Les références du présent ouvrage désignent ces deux derniers par les abréviation : Apocryphe Esdras (l’apocryphe), Pseudo-Esdras (l’apocalyptique ou pseudépigraphe).

Contenu

Le livre d’Esdras-Néhémie se rapporte à l’époque de la restauration de Jérusalem, après l’édit libérateur de Cyrus (538 avant Jésus-Christ). Il comprend deux parties distinctes, qui ne correspondent pas à la division actuelle des livres, soit :

  1. Esdras 1 à 6 (de l’édit de Cyrus jusqu’à la reconstruction du temple : 538-516) ;
  2. Esdras 7 à Néhémie 13 (l’œuvre d’Esdras et de Néhémie : 458 à 432 ?).

On remarque une lacune de près de 60 ans entre 516 et 458. I Esdras 1 à 6. Le chapitre 1.1, 3 reproduit les deux derniersvoir du livre des Chroniques, soit l’édit de Cyrus (cf. version plus officielle), Esdras 6.3-5 Esdras 5-11 : indication d’un premier départ sous la conduite de Sesbatsar, auquel Cyrus fait remettre les objets sacrés emportés du temple de Jérusalem. Le chapitre 2 présente une difficulté, car il donne une liste de personnes qui seraient retournées à Jérusalem « avec Zorobabel, Jésua, Néhémie, etc. ». Or, Zorobabel, Jésua, Néhémie ne sont point contemporains ; en outre, cette liste se retrouve à peu près identique Néhémie 7.6 ; Néhémie 7.73, où elle est mieux en place, si on y voit un état des Juifs établis à Jérusalem au Ve siècle, et revenus à diverses époques. Au chapitre 3, nous trouvons des Juifs revenus à Jérusalem avec le prêtre Jésua et le gouverneur Zorobabel (qui paraît avoir succédé à Sesbatsar) ; ils relèvent l’autel des holocaustes, célèbrent la fête des Tabernacles, et posent en grande pompe les fondements du temple. Le chapitre 4 rapporte les efforts des ennemis pour entraver les travaux de reconstruction du temple. Il y a un anachronisme dans les versets 4-23, qui parlent d’une démarche faite à ce moment auprès d’Assuérus (Xerxès) et d’Artaxerxès ; comme ces deux rois régnèrent après Darius (chapitre 6), ces versets doivent avoir été transposés et leur vraie place serait après le chapitre 10 ; les travaux dont il est question ne sont pas ceux du temple, qui n’est pas mentionné, mais ceux du relèvement des murailles. Au chapitre 5, nous voyons la reprise des travaux du temple, à l’appel des prophètes Aggée et Zacharie. Les gouverneurs de la Palestine tentent bien de s’y opposer, mais le roi Darius, ayant pris connaissance de l’édit de Cyrus, ordonne de laisser les Juifs continuer leur travail (Esdras 6.1 ; Esdras 6.12). Le temple peut enfin être achevé « la sixième année du règne de Darius », et solennellement consacré un peu avant la fête de Pâque (voir 13,22).

II Esdras 7 à Néhémie 13

Cette seconde partie est tout entière consacrée à l’œuvre d’Esdras et de Néhémie. La septième année du roi Artaxerxès (458 avant Jésus-Christ), Esdras, prêtre et scribe, revient à Jérusalem, porteur d’une lettre du roi l’accréditant auprès des gouverneurs palestiniens. Le chapitre 8 donne la liste des chefs de familles qui revinrent avec Esdras et le récit de leur voyage. Esdras est désolé en découvrant le misérable état moral et religieux de la ville et exprime sa douleur dans une prière d’humiliation (chapitre 9). Il ordonne le renvoi des femmes étrangères (chapitre 10). À Suse, en Perse, Néhémie, échanson du roi Artaxerxès, apprend la misère de Jérusalem et adresse à Dieu une fervente prière (Néhémie 1). Le roi autorise Néhémie à se rendre à Jérusalem (Néhémie 2.1 ; Néhémie 2.8) ; dès son arrivée, il invite les Juifs à relever les murs de la ville (Néhémie 2.9 ; Néhémie 2.20). Le travail est activement poursuivi (chapitre 3) et achevé en peu de temps, malgré les attaques des ennemis (chapitres 4 et 6). Au chapitre 5, Néhémie reproche aux riches leur cupidité. Au chapitre 7, liste de ceux qui sont revenus de l’exil (cf. plus haut, Esdras 2). Au chapitre 8, récit de la solennelle assemblée devant laquelle Esdras lit le livre de la Loi, au moment de la fête des Tabernacles. Le même mois, jeûne solennel (chapitre 9) et renouvellement de l’alliance avec Dieu (chapitre 10). Le chapitre 11 indique la répartition des familles à Jérusalem et aux alentours ; le chapitre 12 donne de nouvelles listes de prêtres et de lévites, raconte la solennelle et joyeuse dédicace des murs de la ville et fixe les dîmes et revenus de la classe sacerdotale. Le chapitre 13 parle d’un nouveau voyage de Néhémie à Jérusalem, où il rappelle énergiquement les exigences de la loi de Dieu.

Composition du livre

Le livre d’Esdras-Néhémie présente une étroite parenté avec le livre des Chroniques, dont il forme la suite ; même style, même intérêt pour le culte. Les deux livres ont le même auteur, le Chroniste, et leur date de rédaction doit être fixée au IIIe siècle avant Jésus-Christ (voir Chroniques).

Esdras et Néhémie ne sont donc pas les auteurs, mais les principaux héros, des livres qui portent leurs noms. Les matériaux employés par le Chroniste sont de trois sortes :

  1. Les Mémoires d’Esdras et les Mémoires de Néhémie, où nous trouvons l’emploi de la première personne singulier ; ce sont pour Esdras : Esdras 7.27-9.15, et pour Néhémie : Néhémie 1.1-7.1-3 ; Néhémie 12.31 ; Néhémie 13.4 ; Néhémie 13.31 ; on peut y ajouter Néhémie 10.1-11.14 ; Néhémie 13.1 ; Néhémie 13.3. Ces Mémoires ne nous sont pas donnés dans leur teneur primitive ; ils ont fait partie d’un ouvrage historique antérieur et n’ont été utilisés que très fragmentairement. Les Mémoires de Néhémie paraissent avoir été moins retravaillés que ceux d’Esdras.
  2. Des fragments transcrits en araméen, langue sémitique apparentée à l’hébreu et devenue peu à peu, à partir de l’exil, l’idiome courant des Juifs. Ces fragments araméens comprennent Esdras 4.8-6.18 et Esdras 7.12-26 et rapportent principalement des lettres officielles. Ils proviennent d’une collection araméenne de documents relatifs à la reconstruction du temple et des murs.
  3. Des documents généalogiques et statistiques : liste des membres de la communauté vers 400 (Néhémie 7) ; liste des bâtisseurs de la muraille (Néhémie 3) ; liste de prêtres et de lévites (Néhémie 12).

Valeur historique

La valeur des documents utilisés par le Chroniste est très inégale et sa tendance ritualiste et cléricale influence son jugement. Nous avons montré déjà que son récit était très fragmentaire. Il n’a pas non plus le sens de la chronologie ; ses récits se suivent sans toujours beaucoup d’ordre et il cite parfois comme se rapportant à une époque des faits qui appartiennent à une autre. Mais ce livre est le seul témoignage historique que la Bible nous donne de cette époque (voir Aggée, Zacharie). Le désordre de son contenu amène les historiens qui jugent l’œuvre de Néhémie antérieure à celle d’Esdras (voir ce mot), à en proposer une répartition différente. Nous la donnons, non comme certaine, mais comme vraisemblable : Esdras 1 à 6, construction du temple (538-516 avant Jésus-Christ) ; Néhémie 1 à Néhémie 7, et Néhémie 11 à Néhémie 12, premier séjour de Néhémie à Jérusalem (445) ; Néhémie 13 et Néhémie 10, seconde visite à Jérusalem (432) ; Esdras 7-10, arrivée d’Esdras (après 432) ; Néhémie 8 et Néhémie 9, promulgation de la Loi et renouvellement de l’alliance.

Aug. G.


Numérisation : Yves Petrakian