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Matthias
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet Westphal Bost

Matthias (1)

Saint Matthias, apôtre, fut d’abord au rang des disciples du Sauveur, et il est du nombre de ceux qui avaient été avec lui depuis le baptême de saint Jean-Baptiste jusqu’a l’ascension (Actes 1.21-22). Il y a toute apparence qu’il fut du nombre des septante disciples, comme l’enseignent saint Clément d’Alexandrie et quelques autres anciens. Nous ne savons rien de sa jeunesse et de son éducation, car nous ne comptons pas pour quelque chose ce qu’on en lit dans Abdias. Après l’ascension du Sauveur, les apôtres s’étant retirés à Jérusalem pour y attendre la venue du Saint-Esprit, qui leur avait été promis (Actes 1.15-16), Pierre se levant au milieu des frères, qui étaient au nombre d’environ six vingts, il leur dit : Il faut que ce que le Saint-Esprit a prédit dans l’Écriture, par la bouche de David, touchant Judas, qui a été le conducteur de ceux qui ont pris Jésus, soit accompli. Il était dans le même rang que nous, et avait part au même ministère ; mais ayant livré son Seigneur, il a acquis un champ de la récompense de son péché ; c’est-à-dire, il a fourni aux prêtres de quoi acheter un champ, en leur rendant ce qu’ils lui avaient donné pour récompense de son crime et de sa trahison. Il s’est livré au désespoir, il s’est pendu ; il a crevé par le milieu du ventre, et toutes ses entrailles se sont répandues. [Voyez Judas].

C’est de lui qu’a parlé le Psalmiste, en disant : Que leur demeure devienne déserte, qu’il n’y ait personne qui l’habite, et qu’un autre prenne sa place dans l’épiscopat (Psaumes 108.8), ou dans l’intendance, l’inspection, l’emploi qui lui avait été confié. Il faut donc qu’entre ceux qui ont été en notre compagnie pendant tout le temps que le Seigneur Jésus a vécu parmi nous, à commencer au baptême de Jean jusqu’au jour qu’il est monté au ciel, on en choisisse un qui soit avec nous témoin de la résurrection. Alors ils en présentèrent deux : Joseph, appelé Barsabas, et surnommé le Juste, et Matthias ; et se mettant en prières, ils dirent : Seigneur, vous qui connaissez les cœurs de tous les hommes, montrez-nous lequel de ces deux vous avez choisi, qu’il entre dans ce ministère et dans l’apostolat, dont Judas est déchu par son crime. Aussitôt il les tirèrent au sort, et le sort tomba sur Matthias ; et dès lors il fut associé aux onze apôtres. Nous avons traité la question des élections par le sort dans une dissertation imorimée à la tête des Actes des apôtres [Il faut le remarquer, c’est Pierre qui, dans l’assemblée des six vingts frères, se leva et prescrivit un remède au scandale causé par Judas, en annonçant son intention de procéder sans retard au remplacement de ce traître. Pourquoi est-ce Pierre ? C’est que Pierre est le chef, c’est qu’à lui, et à lui seul, est confiée la charge de confirmer ses frères. En conséquence il agit avec une plénitude de puissance qu’aucun des six vingts qui l’environnent ne songe même à partager.

« On le voit donc, dit M. Charles de Riancey, après avoir rapporté le récit de l’historien sacré : Pierre exerce ses fonctions pastorales ; il se montre vraiment le pasteur souverain et le chef, non-seulement a l’égard des fidèles, mais aussi à l’égard des autres pasteurs. À cette vue, l’un des Pères les plus éloquents, le patriarche de Constantinople, la bouche d’or de la Grèce, saint Jean Chrysostome, s’écrie dans une de ses homélies : « Comme il est brûlant de zèle ! comme il connalt le troupeau qui lui a été confié par le Christ ! comme il est bien le prince dans cette assemblée ! comme il est toujours le premier à prendre la parole ! » Plus loin il le remarque encore : « Il est le premier dans toute l’affaire, et jouit de l’autorité de tous, parce qu’en effet il les a tous dans sa main. C’est la conséquence du discours du Christ : Confirme tes frères. »

Quoique dom Calmet, à propos de l’élection par la voie du sort, renvoie à sa dissertation sur ce sujet, on ne sera pas fâché de trouver ici une observation de M. de Riancey. En principe invariable, dit-il, l’Église condamne formellement tout ce qui semble vouloir livrer au hasard les choses qui appartiennent à la prudence humaine, et par-dessus tout, celles qui appartiennent à l’Esprit-Saint ; elle annulle et punit toute élection aléatoire, aussi bien que toute élection entachée de simonie. Est-il donc croyable que les apôtres aient livré à des chances imprudentes l’auguste dignité de l’apostolat ? À ce sujet Denys le Petit veut donner une explication, et on lit dans un de ses ouvrages : « Le sort qui a désigné Matthias, par l’intervention divine a donné naissance à des sentiments divers et, selon moi, mauvais. Je, dirai le mien à mon tour. Il me semble que l’Écriture indique par ce nom de sort quelque privilège divin et d’honneur éminent, qui fit comprendre à l’asemblée sur qui se portait l’élection divine, » Mais, il faut l’avouer, l’explication est plus obscure que la difficulté, qui s’évanouit quand on l’examine avec franchise et simplicité. Les apôtres n’avaient pas encore reçu l’Esprit-Saint ; ils étaient encore juifs, et vivaient selon les coutumes hébraïques. Or sans doute le sort ne fut jamais l’unique principe d’élection chez les Juifs, surtout pour le suprême pontificat : on n’en voit que peu d’exemples avant la ruine de la cité sainte ; mais au temps d’Auguste il entrait souvent pour quelque chose dans la désignation des sacrificateurs et dans l’ordre des fonctions sacerdotales. Les apôtres agirent selon leur coutume et en toute humilité de cœur. D’ailleurs ils avaient avec discernement choisi dans la foule deux hommes d’une égale vertu aux yeux de tous, deux hommes dont le témoignage leur paraissait devoir être également certain, deux hommes dont le moins heureux portait le surnom de Juste ; ensuite ils prièrent avec ardeur, ils demandèrent la grâce d’en haut ; puis ils donnèrent les sorts. C’était, pour eux, s’en remettre au jugement de Dieu.

Des dangers particuliers à cette époque durent, il est vrai, attirer l’attention sur ce fait très-naturel en lui-même. À cette occasion il se répandit parmi les chrétiens un livre intitulé : les Sorts des apôtres ; puis on vit une pratique appelée : les Sorts des saints. Il faut penser qu’alors, en Orient et en Occident, la magie avait une action journalière et une influence puissante. Les vieux dogmes des castes remis en honneur, les fables mythologiques du vulgaire, les fourberies des Simon et des Apollonius, les rêveries chimériques des philosophes d’Alexandrie, tout cela la faisait revivre avec l’espoir d’égaler les merveilles du christianisme. Le christianisme même n’était pour beaucoup de sages qu’une éclatante magie dont il fallait saisir et dévoiler les secrets. Par une réaction trop explicable, des opérations superstitieuses pouvaient aussi et devaient tâcher de s’introduire parmi les fidèles, et plus elles trouvaient d’excuse et d’appui au dehors, plus il était nécessaire qu’elles fussent écartées avec vigilance du chaste sein de l’Église. Ainsi, dès que les livres des sorts, ceux surtout quise mettaient sous le patronage révéré des apôtres et des saints, furent connus, les papes et les conciles les rejetèrent parmi les apocryphes. L’Église ne souffre aucun soupçon ; elle ne veut pas laisser prétexte à l’accusation la moins fondée ; pur miroir qui reflète la lumière du Verbe, elle ne laisse s’élever aucun nuage entre sa surface éclatante et le soleil qui l’éclaire.

Au reste, peu après cette élection, l’Esprit-Saint la confirma, en descendant visiblement sur les fidèles au cénacle…

Les Grecs croient que ce saint a prêché, et qu’il est mort dans la Colchide. Sa vie fut publiée par un moine de Saint-Matthias de Trèves, qui dit en avoir reçu l’original hébreu d’un juif, qui le lui expliqua en langue vulgaire, dans le douzième siècle. Cette Vie porte que saint Matthias était de Bethléem, de la tribu de Juda, d’une naissance illustre ; qu’il fut très-bien instruit dans sa jeunesse par un homme incomparable, nommé Siméon ; qu’après la Pentecôte il eut pour partage la Palestine, où il prêcha avec beaucoup de succès, et où il fit plusieurs miracles : que trente-trois ans après la passion, le jeune Ananus ayant fait mourir saint Jacques le Mineur à Jérusalem, saint Matthias fut pris dans le même temps dans la Galilée, et amené devant Ananus, qui, voyant qu’il persistait à confesser Jésus-Christ, le condamna àêtre lapidé, ce qui fut aussitôt exécuté, et puis on lui trancha la tête. Mais cette histoire ne passe pas pour fort authentique et il y a plus d’un savant qui la regardent comme une pieuse fable. On croit avoir ses reliques à Rome ; mais la fameuse abbaye de Saint-Matthias, près de Trèves, se vante du même avantage, et, comme l’on croit, avec plus de fondement. Les Grecs font sa fête le 9 d’août, et les Latins le 24 de février.

Les anciens hérétiques ont supposé un faux Évangile à saint Matthias, et les Pères n’en ont parlé que pour le rejeter et pour témoigner que l’Église ne le recevait pas. Saint Clément d’Alexandrie cite quelque chose des traditibns de saint Matthias. Il y a assez d’apparence que c’étaient les hérétiques basilidiens, marcionites et valentiniens qui avaient forgé ces mauvais ouvrages, puisqu’ils se vantaient de suivre les sentiments de saint Matthias. Voici ce qu’on citait de ce saint apôtre : Si le voisin de l’élu pèche, l’élu pèche lui-même ; car s’il s’était conduit comme le veut la raison, ou le Verbe, son voisin aurait eu tant de respect pour sa vie, qu’il n’aurait point péché. Et ailleurs : Qu’il faut combattre sa chair, et en user de manière qu’on ne lui accorde rien pour la sensualité et pour le plaisir ; mais faire croître son âme par la foi et la science. Et encore : Admirez les choses présentes. C’est là le degré pour parvenir à une connaissance plus relevée. Le même saint Clément dit que quelques-uns confondaient saint Matthias avec Zachée le publicain ; mais ce sentiment n’est pas soutenable, puisque Zachée ne fut converti que peu de jours avant la passion du Sauveur (Luc 19.2-3), et que saint Matthias, comme on l’a vu, avait été des premiers disciples de Jésus-Christ (Actes 2.21-22).

Matthias (2)

Fils de Théophile, grand sacrificateur des Juifs, succéda à Simon, fils de Boëthus, l’an du monde 3999, un an avant la naissance de Jésus-Christ, et quatre ans avant l’ère vulgaire. Il ne fut qu’un an souverain pontife. Il eut pour successeur Joazar, fils de son prédécesseur Simon. Hérode le Grand déposa Matthias, parce qu’il crut qu’il était entré dans le complot de Matthias, fils de Margaloth, et de Judas ; fils de Sariphée, qui avaient arraché de dessus la porte du temple une aigle d’or que ce prince y avait fait mettre. Josèphe raconte que durant le pontificat de Matthias, ce grand prêtre étant tombé en pollution la nuit qui précédait le jour de l’expiation solennelle, et se trouvant par là hors d’état de faire les fonctions de son ministère, commit pour ce jour-là, en sa place, Joseph, fils d’Ellem, son parent, qui exerça la souveraine sacrificature un seul jour.

Matthias (3)

Fils d’Ananus, grand prêtre des Juifs, succéda à Simon Cantharus, l’an du monde 4044, de Jésus-Christ, de l’ère vulgaire 41. Il eut pour successeur Ælioneus, fils de Cithéus l’an du monde 4045, n’ayant gardé qu’un an cette dignité. Josèphe raconte que le roi Agrippa ayant offert la grande sacrificature à Jonathas, fils d’Ananus, il s’en excusa, disant qu’il se croyait indigne d’un tel honneur, et qu’il lui suffisait de l’avoir possédé déjà une fois ; car il avait été grand prêtre auparavant ; mais en même temps il suggéra au roi Matthias son frère, comme plus propre à cet emploi, ce qui fut agréé par Agrippa.

Matthias (4)

Fils de Théophile, grand prêtre des Juifs, succéda à Jésus, fils de Gamaliel, l’an du monde 4068, de Jésus-Christ 68, de l’ère vulgaire 65. Il fut déposé trois ans après, pour faire place à Phannias, fils de Samuel, dernier grand prêtre de cette nation, et sous lequel le temple fut pris et brûlé par les Romains, l’an 73 de Jésus-Christ, 70 de l’ère vulgaire. Ce fut sous Matthias que la guerre s’alluma entre les Juifs et les Romains. Matthias persuada au peuple de faire venir dans Jérusalem Simon de Gioras, pour l’opposer à Jean, et pour balancer sa trop grande autorité. Mais Simon, se voyant maître de la ville, oublia les obligations qu’il avait à Matthias, et il le fit mourir avec trois de ses fils, sans vouloir seulement les entendre ; car on les accusait de favoriser les Romains.

Matthias (5)

Juif du parti des Macédoniens ou des Syriens, fut envoyé par Nicanor à Judas Machabée, pour lui faire des propositions de paix (2 Machabées 14.19). Le nom de Matthias est comme l’abrégé de Mathanias ou de Mathathias, qui signifie le don de Dieu.