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Safran

C’est par ce mot que nos versions, et presque toutes les autres, ont traduit l’hébreu karkom, nommé avec le nard et d’autres plantes aromatiques (Cantique 4.14). On a cru pouvoir entendre le karkom du curouma ou souchet, sorte de safran indien qui se divise en deux espèces, la longue et la ronde ; l’analogie du nom hébreu militerait en faveur de cette traduction. Les feuilles du curcuma sont lancéolées, d’un vert de mer, la corolle a quatre feuilles ; des cinq étamines quatre sont stériles ; les racines sont charnues, genouillées, intérieurement d’un jaune rouge, et bonnes pour la teinture ; la graine est renfermée dans une espèce de capsule à trois loges, à peu près ronde. Cette plante originaire des Indes pouvait être connue en Palestine. Cependant il est hors de doute que le nom de karkom comprenait aussi, à cause de la grande ressemblance des couleurs, la famille du véritable safran, du crocus sativus, et comme cette plante était tout à la fois plus belle et plus connue, c’est elle que tous les anciens interprètes, les Septante, la Vulgate, la version arabe, ont vu dans le passage du Cantique. Le crocus vient naturellement et sans culture en Orient ; il abondait dans la vieille Cilicie ; on le cultive dans l’Europe méridionale. C’est une plante bulbeuse dont les feuilles sont comme celles de l’herbe ; en automne on voit sortir presque immédiatement de l’oignon, une fleur d’un violet mat, de la forme d’un lys, et de la grandeur d’une petite tulipe. Le pistil, qui se trouve au milieu de la fleur, se termine par trois stigmates filandreux très odoriférants, d’une couleur qui varie de l’orange à l’écarlate. Ce sont ces stigmates qui, étant séchés, forment le safran du commerce. Les anciens faisaient un très grand usage de ce produit ; ils en composaient des eaux de senteur dont on arrosait les théâtres et les grandes salles, que l’on faisait entrer comme assaisonnement dans certaines nourritures, gâteaux, compotes, etc. : on en faisait même de petites fontaines artificielles. Les parfumeurs en composaient des huiles, des onguents, des pommades ; les cuisiniers employaient vigoureusement cette plante dans leurs sauces, les médecins enfin s’en servaient pour leurs malades. La Vulgate a traduit aussi par safran l’hébreu tholah (de Lamentations 4.5), mais voir Cramoisi, Écarlate.

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