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Nombres 35
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

1 Et l’Éternel parla à Moïse, dans les plaines de Moab, près du Jourdain de Jéricho, en disant :

Les villes lévitiques

Versets 1 à 8 — Loi sur les villes lévitiques en général

Cette loi et la suivante sur les villes de refuge se rattachent à la législation élohiste, dont elles portent tous les caractères. Comme la tribu de Lévi n’a pas d’héritage dans le pays de Canaan (Nombres 18.20 ; Nombres 18.23-24 ; Nombres 26.62), Moïse lui assigne quarante-huit villes où les Lévites habiteront et autour desquelles ils auront des pâturages pour leurs bestiaux. Tout en demeurant réunis en groupes, ils pourront ainsi maintenir dans toutes les tribus la connaissance de la vraie religion et il leur sera plus facile de percevoir les dîmes, qui sont leur seule ressource. Ainsi s’accomplit, sous forme de bénédiction la parole de menace prononcée par Jacob, Genèse 49.7 ; voir note.

Leur mode d’habitation décrit par Ézéchiel, d’après lequel ils vivent tous réunis dans un territoire d’environ quatre-vingt-quatre kilomètres carrés au nord du temple, a évidemment un caractère idéal, tandis que l’institution renfermée dans le code sacerdotal se rattache tout naturellement à la circonstance historique du partage de Canaan. Cette institution est donc absolument indépendante de la prophétie d’Ézéchiel et antérieure à celle-ci (Ézéchiel 48.9 et suivants).

Josué 21 raconte comment Josué et Eléazar exécutèrent la loi de Moïse. D’après ce récit il ne semble pas que la prescription de notre verset 8 ait été observée, puisque chaque tribu fournit à peu près le même nombre de villes lévitiques. Mais on peut supposer que les grandes tribus fournirent des villes plus considérables. En général, l’ordonnance relative aux villes lévitiques ne reçut qu’une exécution relative, d’abord parce qu’une partie de ces villes ne furent conquises que plus tard, puis parce que bien des Lévites furent souvent amenés par des circonstances privées et par les malheurs des temps à déserter les villes qui leur avaient été assignées. Mais voir cependant 1 Chroniques 13.2.

Certaines villes, telles que Nob et Silo, quoique n’étant pas lévitiques, devinrent villes sacerdotales par l’établissement du sanctuaire dans leur sein. On a prétendu que la dispersion des Lévites en Canaan était contraire à l’obligation qu’ils avaient de servir au sanctuaire. Mais il y avait des classes de Lévites comme des classes de sacrificateurs ; comparez Josèphe, Antiquités Judaïques VII 14.7. Elles officiaient tour à tour à Jérusalem et à côté de cela elles exerçaient des fonctions civiles et religieuses, comme celles de juges et d’écrivains, dans tout le pays. Le schisme entre les deux royaumes fit naturellement tomber cet ordre de choses pour celui d’Israël.

2 Ordonne aux fils d’Israël qu’ils donnent aux Lévites, sur l’héritage qu’ils posséderont, des villes pour y habiter ; vous donnerez aussi aux Lévites une banlieue autour de ces villes.

Des villes pour y habiter. Les Lévites n’en étaient pas les seuls habitants, comme cela ressort de plusieurs circonstances et en particulier de ce qui est dit de Bethsémès (1 Samuel 6.13 et suivants). Les Lévites avaient du reste le droit de vendre leurs maisons (Lévitique 25.32-33).

Une banlieue. Ce terme désigne les terrains servant de pâturages autour des villes.

3 Et les villes leur serviront pour y habiter ; et les banlieues seront pour leur bétail, pour leurs biens et pour tous leurs animaux. 4 Et les banlieues des villes que vous donnerez aux Lévites seront, à partir du mur de la ville et à l’extérieur, de mille coudées tout autour.

Les mesures indiquées ici ont été comprises de bien des manières ; l’explication la plus simple est celle qui attribue aux Lévites, de chacun des quatre côtés de la ville, une bande de terrain s’étendant depuis la muraille dans la campagne à une distance de mille coudées, sur une largeur de deux mille coudées. Ces quatre pâturages rectangulaires, chacun d’environ un demi-kilomètre carré, étaient la part inaliénable des Lévites (Lévitique 25.34) ; le reste du territoire qui entourait la ville appartenait aux autres habitants. Dans cette explication l’expression tout autour, du verset 4, doit être prise dans le sens de : de chacun des quatre côtés de la ville.

5 Et vous mesurerez, à l’extérieur de la ville, deux mille coudées du côté oriental, deux mille coudées du côté méridional, deux mille coudées du côté occidental et deux mille coudées du côté septentrional, la ville étant au milieu. Telles seront les banlieues de leurs villes. 6 Quant aux villes que vous donnerez aux Lévites, ce sont les six villes de refuge que vous donnerez pour que le meurtrier s’y retire, et vous donnerez en outre quarante-deux villes.

Six villes de refuge : voir verset 9 et suivants.

7 Toutes les villes que vous donnerez aux Lévites seront au nombre de quarante-huit villes, chacune avec sa banlieue.

Quarante-huit villes, soit en moyenne quatre par tribus des deux côtés du Jourdain ; treize d’entre elles étaient le lot des sacrificateurs ; six avaient le caractère de villes de refuge.

8 Pour les villes que vous donnerez sur la propriété des fils d’Israël, vous prendrez plus de celui qui a plus, et moins de celui qui a moins ; chacun donnera de ses villes aux Lévites, à proportion de l’héritage qui lui est échu. 9 Et l’Éternel parla à Moïse en disant :

Loi sur les villes de refuge (9-34)

Chez les peuples anciens, ou régnait, comme aujourd’hui encore chez les Arabes, le droit et même le devoir de la vendetta (la vengeance à exercer sur le meurtrier par le plus proche parent de la victime), existait aussi le droit d’asile, d’après lequel le, meurtrier qui parvenait à se réfugier dans quelque sanctuaire inviolable, y était provisoirement à l’abri de la vengeance. L’ordonnance mosaïque institue et règle dans ce qui suit un droit d’asile analogue ; elle n’est que le développement des principes posés Exode 21.13. Le droit de la vendetta y est reconnu, mais il est limité, d’abord par son application exclusive aux cas de meurtre volontaire, puis par l’établissement de lieux de refuge où le meurtrier est abrité contre la vengeance jusqu’à ce qu’un tribunal compétent ait décidé si le meurtre était volontaire on non ; dans le premier cas seulement il doit être livré au vengeur du sang (comparez Deutéronome 19.1-13). Il semble étrange que six villes seulement aient possédé ce caractère d’abri pour le meurtrier puisque beaucoup de villes fermées auraient pu jouir du même privilège. Mais la difficulté d’atteindre le lieu de refuge devait contribuer à rendre les cas de meurtre même involontaire moins fréquents ; et Dieu voulait donner à ces villes un caractère particulier de sainteté. Elles devenaient semblables aux temples dans lesquels les meurtriers cherchaient parfois un asile ; comparez Exode 21.14 (mon autel).

Versets 9 à 15 — Les six villes de refuge

10 Parle aux fils d’Israël, et dis-leur : Lorsqu’après avoir passé le Jourdain, vous serez entrés dans le pays de Canaan, 11 vous vous choisirez des villes qui soient pour vous des villes de refuge ; là se retirera le meurtrier qui a tué quelqu’un par mégarde.

Par mégarde : voir Lévitique 4.2.

12 Et ces villes vous serviront de refuge contre le vengeur, et le meurtrier ne mourra point avant d’avoir comparu devant l’assemblée pour être jugé.

L’assemblée : non pas celle des magistrats de la ville de refuge, mais celle des magistrats du lieu du domicile du meurtrier ; c’est ce qui ressort clairement des versets 24 et 25.

13 Quant aux villes que vous donnerez, vous aurez six villes de refuge.

Six villes. Ces villes sont réparties également des deux côtés du Jourdain ; deux au sud, deux au centre et deux au nord, de chaque côté.

14 Et vous donnerez trois villes au-delà du Jourdain, et vous donnerez trois villes dans le pays de Canaan : elles seront villes de refuge. 15 Pour les fils d’Israël, pour l’étranger et pour celui qui demeure au milieu de vous, ces six villes serviront de refuge, où se retirera quiconque, aura tué quelqu’un par mégarde.

L’étranger. Il a toujours aux yeux de la loi la même valeur que l’Israélite.

16 S’il l’a frappé avec un instrument de fer, et que la mort s’ensuive, c’est un meurtrier : le meurtrier sera puni de mort.

Caractères du meurtre volontaire et du meurtre involontaire ; conséquences dans les deux cas (16-29)

Les versets suivants renferment des prescriptions à l’usage du tribunal qui, d’après les versets 24 et 25, doit juger de la nature du meurtre. Le cas n’est pas prévu où le meurtrier aurait négligé de se sauver dans la ville de refuge ou aurait été surpris avant de l’avoir atteinte. Le vengeur anrait-il eu le droit de le tuer avant qu’il y eût eu sentence du tribunal ? Il semble, d’après Deutéronome 19.6, qu’il n’aurait pas été envisagé dans ce cas comme coupable d’homicide.

Versets 16 à 18 — Indices extérieurs du meurtre volontaire

17 S’il l’a frappé avec une pierre qui peut donner la mort, et que la mort s’ensuive, c’est un meurtrier : le meurtrier sera puni de mort.

Une pierre qui peut donner la mort, littéralement : une pierre à main, assez grosse pour qu’on ne puisse la lancer qu’en l’empoignant.

18 Ou s’il l’a frappé en prenant un instrument de bois qui peut donner la mort, et que la mort s’ensuive, c’est un meurtrier : le meurtrier sera puni de mort. 19 C’est le vengeur du sang qui fera mourir le meurtrier ; quand il le rencontrera, il le tuera.

Conséquences du meurtre reconnu volontaire. Le meurtrier est livré au vengeur, qui a le droit et le devoir de le tuer là où il le rencontre.

20 Si par haine il a renversé un homme, ou s’il lui a jeté quelque chose avec intention, et que la mort s’ensuive,

Indices moraux du meurtre volontaire, Mêmes conséquences (20-24)

21 ou si par inimitié il l’a frappé de sa main et que la mort s’ensuive, celui qui a frappé sera puni de mort : c’est un meurtrier : le vengeur du sang tuera le meurtrier, quand il le rencontrera. 22 Mais s’il l’a renversé fortuitement et non par inimitié, ou s’il lui a jeté quelque chose sans intention,

Caractères du meurtre qui doit être envisagé comme involontaire (22-23)

23 ou s’il a fait tomber sur lui sans le voir une pierre qui peut donner la mort, et que la mort s’ensuive, sans qu’il soit son ennemi et qu’il lui cherche du mal, 24 l’assemblée jugera entre celui qui a frappé et le vengeur du sang d’après ces lois.

L’assemblée jugera. Les mots suivants : Et le fera retourner dans la ville de refuge (verset 25), montrent qu’il s’agit, non des autorités de cette dernière ville, mais de celles de la ville où le meurtre a été commis. C’est ce qui est dit plus expressément dans la prescription parallèle du Deutéronome, où l’on voit même (Deutéronome 19.12) que les magistrats de cette dernière ville, lorsqu’ils ont constaté le caractère volontaire du meurtre, doivent redemander le meurtrier aux gens de la ville de refuge. On comprend aisément que la question de savoir si le meurtrier avait agi par un mouvement de haine ou dans un sentiment d’inimitié (versets 20 et 21) ne pouvait être jugée en connaissance de cause que par les gens du lieu où il habitait.

25 Et l’assemblée délivrera le meurtrier de la main du vengeur du sang, et le fera retourner dans la ville de refuge où il s’était enfui. Et il y demeurera jusqu’à la mort du grand sacrificateur qui a été oint de l’huile sainte.

Conséquences du meurtre déclaré involontaire (25-29)

Le meurtrier involontaire est renvoyé dans la ville de refuge qui reste son asile jusqu’à la mort du souverain sacrificateur actuel. S’il en sort, il est exposé aux coups du vengeur du sang parce qu’il a méprisé l’institution théocratique. Comparez le cas analogue de Siméi, 1 Rois 2.39-46.

Jusqu’à la mort du grand sacrificateur. Cette mort est envisagée comme inaugurant une période théocratique nouvelle, dans laquelle les meurtres involontaires précédemment commis cessent de déployer leurs conséquences. Des amnisties du même genre ont également lieu chez d’autres peuples à la mort du souverain. Cette prescription n’implique-t-elle pas un temps où la royauté n’existait pas encore en Israël ?

Oint de l’huile sainte : Lévitique 8.12. L’onction, signe de la dignité suprême, fait ressortir l’importance de ce personnage, comme représentant personnel de l’ensemble de la théocratie. Cette prescription est très remarquable, unique en son genre et l’on ne peut s’étonner que bien des interprètes y aient vu un indice prophétique de l’efficace expiatoire de la mort du seul vrai futur sacrificateur.

26 Et si le meurtrier sort du territoire de la ville de refuge où il s’est enfui,

Sort du territoire de la ville. Il y a toujours quelque chose d’anormal dans le sang versé même involontairement ; c’est pourquoi celui qui a occasionné ce malheur ne saurait être exempt de toute peine.

27 et si le vengeur du sang le rencontre hors du territoire de sa ville de refuge, et que le vengeur du sang tue le meurtrier, il n’est pas coupable de meurtre. 28 Car le meurtrier doit demeurer dans sa ville de refuge jusqu’à la mort du grand sacrificateur ; et après la mort du grand sacrificateur, il retournera au pays où se trouve sa possession. 29 Ce sera pour vous une règle de droit de génération en génération, dans tous les lieux où vous habiterez. 30 Toutes les fois qu’un meurtre a été commis, c’est sur la déposition de témoins qu’on fera mourir le meurtrier. Et un seul témoin ne peut déposer pour faire condamner une personne à mort.

Prescriptions subsidiaires (30-34)

Sur la déposition de témoins. La déposition de deux témoins est une condition répétée Deutéronome 17.6 et généralisée comme règle de droit israélite Nombres 19.15.

31 Et vous n’accepterez point de rançon pour la vie d’un meurtrier dont le crime est digne de mort, car il sera mis à mort.

La rançon n’est autorisée pour aucun des deux cas de meurtre. Le sang ne peut être lavé par l’argent ; il ne peut l’être que par le sang, ou par la réparation que Dieu a prescrite en cas de meurtre involontaire (verset 32).

32 Et vous n’accepterez point de rançon pour que celui qui s’est enfui dans sa ville de refuge, puisse revenir habiter dans le pays avant la mort du sacrificateur. 33 Et vous ne souillerez pas le pays où vous êtes, car le sang souille le pays ; car pour le pays il n’y a de propitiation pour le sang qui y a été répandu que par le sang de celui qui l’a répandu.

Vous ne souillerez pas le pays. Le pays lui-même, la Terre sainte, est souillé si le sang, ou du moins la réparation qui a été constituée son équivalent, n’a pas enlevé la tache du sang. La punition du meurtrier n’est donc nullement un meurtre s’ajoutant à un autre meurtre ; elle efface au contraire le premier meurtre.

34 Et vous ne profanerez point le pays où vous demeurez et au milieu duquel j’habite ; car je suis l’Éternel, qui habite au milieu des fils d’Israël.

Vous ne profanerez point : Vous le traiteriez comme un sol profane en le souillant par la non expiation du sang (verset 33).