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Juges 6
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Juges 6

Gédéon (chapitres 6 à 8)

Israël ne profita pas des expériences du passé il s’attira un nouveau jugement dont les Madianites furent les exécuteurs. Ce châtiment, qui se faisait sentir surtout à certains moments de l’année, mit cependant Israël dans un état plus misérable que tous les précédents. Mais la délivrance fut d’autant plus glorieuse.

Gédéon, qui en fut l’instrument, résista à une première tentation qui résulta de la victoire, mais non à une seconde ; et il finit par donner lui-même à son peuple l’occasion de satisfaire son penchant à l’idolâtrie, ce qui attira sur toute sa famille et sur le peuple une sévère punition. L’histoire de Gédéon est traitée avec plus de détails que celle des juges précédents.

1 Et les fils d’Israël firent ce qui est mauvais aux yeux de l’Éternel, et l’Éternel les livra entre les mains de Madian, sept ans.

Nouvelle infidélité et nouveau châtiment du peuple (1-6)

Entre les mains de Madian. Ce peuple nomade habitait dans le désert, à l’est des Ammonites et des Moabites et jusque dans les contrées du midi, aux environs du Sinaï (Exode 2.15 ; Exode 3.1). Les tribus du désert voisin de la Palestine s’étaient relevées de la rude défaite que leur avait infligée Israël vers la fin de la vie de Moïse (Nombres 31.1-18) ; voir sur Madian Genèse 25.2, note.

2 Et la main de Madian fut puissante contre Israël. Par crainte de Madian, les fils d’Israël se firent les antres qui sont dans les montagnes, et les cavernes et les citadelles.

Se firent les antres : non pas se les creusèrent, mais se les arrangèrent et les agrandirent pour servir d’habitations.

Qui sont dans les montagnes. Au moment où le rédacteur écrivait, ils existaient encore et l’on y reconnaissait la main de l’homme.

3 Et quand Israël avait semé, Madian montait avec Amalek et les fils de l’Orient et ils montaient contre lui.

Et quand Israël avait semé. Les bandes ennemies arrivaient au temps qui précédait la moisson.

Avec Amalek : peuple également pillard venant du sud (Genèse 36.12).

Et les fils de l’Orient : désignation générale des tribus du désert à l’est de la Palestine. Encore aujourd’hui les plaines de la Palestine sont exposées à de semblables déprédations. Il reste à peine six endroits habités dans la belle plaine d’Esdraélon ; les paysans préfèrent chercher des demeures plus sûres dans les montagnes qui la dominent.

4 Et ils établissaient leur camp au milieu d’eux et dévastaient les produits de la terre jusque vers Gaza et ne laissaient rien de vivant en Israël, ni brebis, ni bœufs, ni ânes.

Ils passaient probablement au nord du pays des Ammonites et traversaient le Jourdain au-dessus de Beth-Séan (verset 33) où se trouve le plus important de tous les gués du Jourdain ; de là ils montaient sur le plateau par le Wadi-El-Djalud et inondaient la plaine d’Esdraélon et les contrées environnantes, allant même au sud jusqu’à Gaza.

Leur camp : un camp fortifié qui leur servait de centre et d’où ils partaient, pour leurs razzias.

5 Car ils montaient avec leurs troupeaux et leurs tentes et arrivaient nombreux comme des sauterelles ; ils étaient innombrables, eux et leurs chameaux, et ils venaient dans le pays pour le dévaster. 6 Et Israël fut très affaibli par Madian, et les fils d’Israël crièrent à l’Éternel. 7 Et lorsque les fils d’Israël eurent crié à l’Éternel au sujet de Madian,

L’Éternel répond aux cris des Israélites par la bouche d’un prophète qui leur fait sentir la vraie cause du mal. Si le Dieu qui a déployé en leur faveur, à plusieurs reprises, une si grande puissance, les laisse aujourd’hui dans cet état, ce n’est pas que son bras soit raccourci : la faute en est à eux seuls.

8 l’Éternel envoya aux fils d’Israël un prophète qui leur dit : Ainsi parle l’Éternel, Dieu d’Israël : Je vous ai fait monter d’Égypte et je vous ai fait sortir de la maison de servitude.

Un prophète. Cette apparition, ainsi que celle de Débora, montre que depuis Moïse et Marie, sa sœur, l’esprit prophétique n’avait pas cessé d’agir en Israël.

9 Et je vous ai délivrés de la main des Égyptiens et de la main de tous vos oppresseurs, et je les ai chassés devant vous et je vous ai donné leur pays. 10 Et je vous ai dit : Je suis l’Éternel votre Dieu ; vous ne craindrez pas les dieux des Amorrhéens, dans le pays desquels vous habitez. Et vous n’avez pas obéi à ma voix.

Vous ne craindrez pas : vous n’adorerez pas.

11 Et l’ange de l’Éternel vint, et il s’assit sous le térébinthe d’Ophra qui appartenait à Joas, de la famille d’Abiézer. Et Gédéon, son fils, battait du froment dans le pressoir pour le mettre à l’abri de Madian.

Histoire de Gédéon (6.11 à 8.35)

Versets 11 à 24 — Apparition de l’ange de l’Éternel à Gédéon

L’appel est adressé à Gédéon par l’ange de l’Éternel, peut-être en sa qualité de chef des armées célestes, comme dans le cas de Josué (Josué 5.14), car il s’agit d’une guerre à entreprendre.

Et il s’assit. Il arrivait sous la figure d’un voyageur fatigué ; comparez Genèse 18.2.

Sous le térébinthe : celui sous lequel Gédéon éleva l’autel qui subsistait encore au temps où écrivait l’auteur (verset 24).

Ophra… Cette ville située en Manassé, à l’ouest du Jourdain, est différente de celle du même nom en Benjamin, Josué 18.23 ; sa situation n’est pas connue. Joas en était le chef ou cheik (verset 15).

Et Gédéon, son fils. Gédéon (abatteur d’arbres) était rempli de haine contre les ennemis à cause du massacre de ses frères (Juges 8.18-19). Il était ainsi prédisposé à la mission à laquelle Dieu l’appelle.

Battait du froment : avec le fléau et non, comme d’ordinaire, au moyen d’un chariot ou d’un attelage.

Dans le pressoir : non dans un endroit découvert, comme sont les aires en Orient, mais dans un de ces emplacements creusés dans le roc, à plan incliné, d’où le moût descend dans un second creux plus petit, tels que Robinson en a trouvé de très antiques en Palestine.

Vaillant héros ! Cette parole se rapporte autant à ce que deviendra Gédéon qu’à ce qu’il est déjà.

12 Et l’ange de l’Éternel lui apparut et lui dit : L’Éternel est avec toi, vaillant héros ! 13 Et Gédéon lui dit : Pardon, mon seigneur ; si l’Éternel est avec nous, pourquoi toutes ces choses nous sont-elles arrivées ? Et où sont toutes ses merveilles que nos pères nous ont racontées en disant : L’Éternel ne nous a-t-il pas fait monter hors d’Égypte ? Et maintenant l’Éternel nous a abandonnés et nous a livrés entre les mains de Madian.

Mon seigneur. Rien n’indique que Gédéon veuille donner par là à son interlocuteur un titre divin. Le terme hébreu adoni est un simple titre de politesse respectueuse.

14 Et l’Éternel se tourna vers lui et dit : Va avec cette force que tu as, et délivre Israël de la main de Madian ; ne t’ai-je pas envoyé ?

Et l’Éternel… Le narrateur envisage l’Éternel comme un avec l’ange de l’Éternel, qui le représente ; comparez Genèse 18.1-33.

Avec cette force que tu as. Elle te suffira du moment que c’est l’Éternel qui te choisit et qui t’envoie.

Ne t’ai-je pas envoyé ? Ces mots font comprendre à Gédéon qui est celui qui lui parle.

15 Et Gédéon lui dit : Pardon, mon Seigneur ! Avec quoi délivrerais-je Israël ? Voici, mon millier est le plus pauvre en Manassé, et je suis le plus petit dans la maison de mon père.

Le texte hébreu substitue maintenant au mot adoni celui d’Adonaï qui ne s’applique qu’à Dieu. Gédéon n’envisage plus la délivrance comme impossible ; mais, comme Moïse, il est inquiet du moyen et voudrait, par défiance de lui-même, se soustraire à une telle tâche. La portion de sa tribu à laquelle il appartient (mon millier) est privée de toute influence sur la tribu et lui-même est le plus pauvre de sa famille.

16 Et l’Éternel lui dit : Je serai avec toi, et tu battras Madian comme un seul homme.

Comme un seul homme : d’un seul coup, comme on tue un homme.

17 Et Gédéon lui dit : Si réellement j’ai trouvé grâce à tes yeux, donne-moi un signe que c’est toi qui me parles.

Après cette promesse Gédéon ne peut plus douter que son visiteur ne lui parle au nom de Dieu ; seulement il demande un signe qui lui prouve que cette apparition n’est pas une illusion, mais une divine réalité.

18 Veuille ne pas t’éloigner d’ici jusqu’à ce que je revienne vers toi, que j’apporte mon offrande et que je la dépose devant toi ; et il lui dit : Je resterai jusqu’à ton retour.

Mon offrande : le repas qu’il veut offrir à son hôte, conformément à la loi de l’hospitalité. Il l’appelle une offrande (mincha) parce qu’il a reconnu en lui un hôte divin.

19 Et Gédéon entra et apprêta un chevreau et un épha de farine en gâteaux sans levain ; et il mit la chair dans un panier et le jus dans un pot, et les apporta vers lui sous le térébinthe et les lui offrit.

Epha. Sur cette mesure de capacité, voir à Ésaïe 5.10 ; Exode 29.40.

Tous ces détails conviennent à un repas, non à un sacrifice proprement dit.

20 Et l’ange de Dieu lui dit : Prends la chair et les pains sans levain et pose-les sur ce rocher et verse le jus. Et il fit ainsi.

L’ange fait de ce repas un sacrifice (20-21)

Un rocher voisin servira d’autel, les pains sans levain d’oblation ; la viande sera la victime, le jus la libation et le feu qu’il allume du bout de son bâton représentera le feu qui sur l’autel consume les victimes.

21 Et l’ange de l’Éternel avança le bout du bâton qu’il avait à la main et toucha la chair et les pains sans levain. Et le feu monta du rocher et consuma la chair et les pains sans levain. Et l’ange de l’Éternel disparut à ses yeux.

Le feu monta du rocher. C’est là le signe demandé au verset 17. Mais il remplit Gédéon de crainte.

Disparut à ses yeux : disparition subite, différente de celle racontée Juges 13.20.

22 Et Gédéon vit que c’était l’ange de l’Éternel et il dit : Malheur, Seigneur Éternel ! Car c’est pour cela que j’ai vu l’ange de l’Éternel face à face.

Comparez Exode 20.19.

23 Et l’Éternel lui dit : Sois en paix, ne crains point, tu ne mourras pas.

L’Éternel lui dit : soit par une révélation intérieure, soit par une voix qui se fit entendre.

24 Et Gédéon bâtit là un autel à l’Éternel et il l’appela : L’Éternel-Paix. Il existe encore aujourd’hui à Ophra d’Abiézer.

Gédéon bâtit là un autel : en souvenir de cette manifestation, gage de la délivrance pour lui et pour tout le peuple ; il n’est pas parlé de sacrifice, pas plus que dans le cas analogue Exode 17.15.

25 Et dans cette nuit-là, l’Éternel lui dit : Prends le taureau de ton père et le second taureau de sept ans, et tu détruiras l’autel de Baal, qui est à ton père, et tu abattras l’aschère qui est auprès.

Consécration de Gédéon pour sa mission (25-32)

L’accomplissement d’une mission aussi sainte que celle qui vient de lui être confiée doit commencer par la purification de sa propre maison, qui est encore celle de son père.

Dans cette nuit-là : la nuit qui suivit l’apparition de l’ange de l’Éternel.

Deux taureaux : sans doute pour former un attelage et transporter les matériaux qu’exigera le double acte qu’il va accomplir. L’un est le taureau principal, destiné aux fêtes par son père, le veau gras (Luc 15.23) ; l’autre un second taureau, dont l’âge est spécialement indiqué, soit à cause du caractère sacré du nombre sept, soit par allusion aux sept années qu’avait déjà duré l’invasion madianite. Ce dernier devait servir au sacrifice d’expiation.

L’autel de Baal, qui est à ton père : sur lequel Joas offrait des sacrifices pour sa famille et pour sa ville.

L’aschère : voir Exode 34.13, note, L’aschère était un tronc d’arbre dressé près d’un autel, une idole informe.

26 Et tu bâtiras sur le haut de ce lieu fort un autel à l’Éternel ton Dieu, en arrangeant le bois, et tu prendras le second taureau, et tu offriras un holocauste, avec le bois de l’aschère que tu auras abattue.

Sur le haut de ce lieu fort : au sommet de la colline sur laquelle était bâtie Ophra.

Que tu auras abattue. La délivrance doit être précédée d’un acte de rupture avec l’idolâtrie et de restauration solennelle du culte de l’Éternel.

27 Et Gédéon prit dix hommes parmi ses serviteurs et fit comme l’Éternel lui avait dit, et, comme il n’osait le faire de jour par crainte de la maison de son père et des gens de la ville, il le fit de nuit.

De nuit : la nuit suivante.

28 Et le lendemain matin, lorsque les gens de la ville se levèrent, voici l’autel de Baal était abattu, et l’aschère qui était auprès, coupée, et le second taureau, offert en holocauste sur l’autel qui avait été construit.

Le second taureau : qui n’était pas encore entièrement consumé.

29 Et ils se dirent l’un à l’autre : Qui a fait cela ? Et ils s’informèrent et firent des recherches, et ils dirent : C’est Gédéon, fils de Joas, qui a fait cela. 30 Et les gens de la ville dirent à Joas : Fais sortir ton fils et qu’il meure, car il a détruit l’autel de Baal et coupé l’aschère qui était auprès.

Fais sortir… Ce trait montre à quel degré d’abaissement religieux le peuple était arrivé.

31 Et Joas répondit à tous ceux qui s’élevaient contre lui : Est-ce à vous de prendre parti pour Baal ? Est-ce à vous de lui porter secours ? Quiconque prendra parti pour Baal, sera mis à mort aujourd’hui même. Si Baal est Dieu, qu’il se défende lui-même puisqu’on a abattu son autel.

Joas agit ici comme cheik et juge. Le courage de son fils a ranimé en lui l’esprit théocratique.

Si Baal est Dieu. Un Dieu n’a pas besoin d’autre défenseur que lui-même.

32 Et en ce jour on donna à Gédéon le nom de Jérubbaal, en disant : Que Baal se défende contre lui, puisqu’il a renversé son autel !

Jérubbaal : Que Baal se venge ; nom donné à Gédéon en souvenir de la parole de son père. Nom de malheur si Baal était vraiment Dieu, mais d’honneur, si Baal se montrait impuissant.

33 Et tout Madian, Amalek et les fils de l’Orient se rassemblèrent et ils passèrent le Jourdain et campèrent dans la plaine de Jizréel.

Préparation de la guerre (33-40)

L’armée ennemie était campée dans la plaine sous ses deux chefs principaux, les rois madianites Zébach et Tsalmunna (Juges 8.5).

34 Et l’Esprit de l’Éternel revêtit Gédéon, et il sonna de la trompette, et les Abiézérites s’assemblèrent pour le suivre.

Les Abiézérites. Gédéon s’assure avant tout des gens de sa ville ; ils avaient reconnu en lui le libérateur d’Israël.

35 Et il envoya des messagers dans tout Manassé, et Manassé aussi se rassembla pour le suivre. Et il envoya des messagers dans Asser, dans Zabulon et dans Nephthali, et ils montèrent à leur rencontre.

Puis il s’adresse à sa tribu, Manassé et enfin aux tribus du nord les plus voisines d’Esdraélon.

À leur rencontre : à la rencontre des gens de Manassé, qui venaient du sud.

36 Et Gédéon dit à Dieu : Si réellement tu veux délivrer Israël par ma main, comme tu l’as dit,

Avant d’entrer en campagne, Gédéon éprouve surtout le besoin de s’assurer du secours de Dieu. Car sa foi, quoique réelle, est faible encore ; elle réclame un appui nouveau. Il pourrait dire, comme le père de l’enfant malade : Je crois ! Aide-moi dans mon incrédulité ! (Marc 9.24).

37 voici, je mettrai une toison de laine dans l’aire ; si la rosée est sur la toison seule, et que tout le terrain reste sec, je connaîtrai que tu délivreras Israël par ma main, comme tu l’as dit.

La rosée est extrêmement abondante en Palestine. Nous avions autant de peine, dit un voyageur, à nous protéger contre la rosée durant la nuit que contre la chaleur pendant le jour. Au matin, la couverture de nos tentes était aussi mouillée que si nous l’eussions plongée dans l’eau.

Elle se dépose naturellement sur toutes les surfaces qui lui sont offertes ; sa concentration exclusive sur la toison ne pouvait être que le résultat d’une volonté divine particulière.

38 Et il en fut ainsi ; et le lendemain, il se leva de bon matin, pressa la toison, et en fit sortir la rosée, une pleine coupe d’eau. 39 Et Cédéon dit à Dieu : Que ta colère ne s’enflamme pas contre moi ; que je puisse encore parler une fois. Qu’une fois encore seulement je fasse une épreuve avec la toison : que la toison seule reste sèche, et que la rosée soit sur tout le terrain.

Gédéon pouvait néanmoins penser que, comme la laine attire et absorbe particulièrement l’humidité, le signe précédent n’avait pas une valeur décisive. Tout en comprenant qu’il y a beaucoup de hardiesse à demander une nouvelle épreuve, il le fait cependant ; comparez Genèse 18.32.

40 Et Dieu fit ainsi cette nuit-là. La toison seule resta sèche, et la rosée fut sur tout le terrain.