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Esther 3
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Esther 3

Élévation d’Haman, décret contre les Juifs, projets d’Haman contre Mardochée (chapitres 3 et 4)

Chapitre 3 Haman, favori du roi, obtient un édit de mort contre les Juifs

1 Après ces choses le roi Assuérus agrandit Haman, fils d’Hammédatha, Agaguite ; il l’éleva et plaça son siège au-dessus de tous les princes qui étaient avec lui.

Après ces choses. L’élévation d’Esther eut lieu la septième année du roi (Esther 2.16). L’extermination des Juifs devait avoir lieu la douzième (Esther 3.7). Ces mots nous transportent donc en 471 ou 473.

Haman. Ce nom, qui est en sanscrit celui de la planète Mercure, correspond à l’Omanès des classiques.

Hammédatha, le Madatès de Quinte-Curce, ancien nom perse : Donné par la lune.

Agaguite. Les rabbins prennent tous ce nom dans le sens de descendant d’Agag, ce qui est certainement le plus naturel et voient dans Agag le roi amalékite de ce nom (1 Samuel 15.8). Voir Josèphe, Antiquités Judaïques, XI, 6, 5. Ainsi, en la personne de Mardochée, un descendant de Saül aurait fini par l’emporter sur les descendants de la famille royale de ces antiques ennemis d’Israël (Exode 17.8-16). C’est ainsi que les Juifs ont compris cette donnée, car à chaque fête de Purim, outre le livre d’Esther, ils lisent dans les synagogues le passage du Pentateuque qui concerne Amalek. Il est vrai qu’Haman, son père et ses fils (Esther 9.7-9) ont des noms perses. Mais cette famille pouvait être établie dans ces contrées depuis longtemps.

D’autres pensent que notre auteur, en présentant le nouveau personnage qui entre en scène comme un Agaguite, fait sans doute allusion au roi Agag contemporain de Saül et mis en pièces par Samuel, mais sans vouloir pour cela faire d’Haman un descendant de ce roi ou un membre de cette tribu ; Agaguite voudrait dire simplement : ennemi juré des Juifs.

Il l’éleva : à la dignité de grand-vizir.

2 Tous les serviteurs du roi qui étaient à la porte du roi fléchissaient les genoux et se prosternaient devant Haman, car le roi l’avait ainsi ordonné à son égard ; mais Mardochée ne fléchissait pas le genou et ne se prosternait pas.

Assuérus veut qu’on rende à Haman les honneurs royaux (Hérodote III, 86 ; VII, 136).

Mais Mardochée… Les Juifs se prosternaient sans scrupule devant les rois (2 Samuel 14.4 ; 2 Samuel 18.28 ; 1 Rois 1.16) et il est difficile de penser que Mardochée ait pu se dispenser de le faire quand il entrait (Esther 8.1) auprès d’un monarque que l’on n’abordait qu’ainsi. Ce n’est pas comme adorateur exclusif du vrai Dieu qu’il reste debout quand passe Haman, mais plutôt comme juif et par haine de race : L’Éternel a guerre à tout jamais avec Amalek (Exode 17.16) !

3 Et les serviteurs qui étaient à la porte du roi, dirent à Mardochée : Pourquoi transgresses-tu l’ordre du roi ? 4 Et comme ils lui disaient cela chaque jour et qu’il ne les écoutait pas, ils le rapportèrent à Haman pour voir si les paroles de Mardochée tiendraient, car il leur avait déclaré qu’il était Juif.

Tiendraient : s’il tiendrait bon quand il serait en face des menaces de Haman ; ou bien : si cette excuse serait considérée par le roi comme valable.

5 Haman vit que Mardochée ne fléchissait pas le genou et ne se prosternait pas devant lui. Et Haman fut rempli de colère

Haman semble n’avoir pas remarqué que Mardochée ne se prosternait pas devant lui, avant que les serviteurs du roi le lui aient fait observer. Mais surtout, maintenant qu’il est averti que Mardochée est un Juif, ce refus prend à ses yeux une grande importance.

6 et il dédaigna de porter la main sur Mardochée seul, car on lui avait dit quel était le peuple de Mardochée, et Haman chercha à détruire le peuple de Mardochée, tous les Juifs qui se trouvaient dans tout le royaume d’Assuérus. 7 Au premier mois qui est le mois de Nisan, la douzième année du roi Assuérus, on jeta le Pur, c’est-à-dire le sort devant Haman, pour chaque jour et pour chaque mois, jusqu’au douzième mois qui est le mois d’Adar.

Bien que les grands massacres aient toujours été chose assez ordinaire en Orient, ainsi celui des Mages à l’accession de Darius, fils d’Hystaspe, au trône ; celui des Scythes sous Cyaxare (Hérodote III, 79 ; I, 106), c’était là une grande entreprise : il fallait s’assurer la faveur du ciel et lui demander d’indiquer le jour favorable (Ézéchiel 21.26, note). Les Perses ne faisaient rien sans consulter la divinité et aimaient mieux, par exemple, éviter plusieurs jours une bataille que de la livrer sans avoir trouvé des présages favorables (Hérodote IX, 38, 45).

Nisan : le mois de la Pâque. La joie de la grande délivrance passée fut changée en deuil par la menace d’une ruine prochaine.

La douzième année : cinq ans après l’élévation d’Esther.

Pur, mot persan signifiant partie, sort et dont on a rapproché le latin pars, le français part. En perse moderne bâra signifie fois, cas et pâra ou pâre, morceau, pièce.

Pour chaque jour et pour chaque mois. Nous ignorons de quelle manière on tira au sort (Ézéchiel 21.26), mais il résulte du texte que l’on consulta le sort pour tous les jours de tous les mois de l’année qui commençait et que le jour et le mois qui obtinrent les meilleurs résultats, furent considérés comme désignés par la divinité. Haman ne se laissa pas détourner de son projet par la décision du sort, qui semblait en avoir éloigné l’exécution le plus possible. Le sort recula l’exécution de ce plan d’un an entier, afin de donner à Mardochée et à Esther le temps d’en arrêter l’exécution et de faire donner des ordres tout contraires.

Adar. Voir Esdras 6.15 ; correspondant à la nouvelle lune de février-mars.

8 Et Haman dit au roi Assuérus : Il y a un peuple dispersé et différent des peuples de toutes les provinces de ton royaume ; leurs coutumes diffèrent de celles de tous les autres peuples et ils n’observent pas les décrets du roi. Il ne convient pas au roi de les tolérer.

Dès que le sort eut donné à Haman la certitude qu’un jour favorable ne manquerait pas à l’exécution de son projet, il passa à gagner le roi.

Dispersé : donnant par conséquent en tous lieux un mauvais exemple.

Différent, troublant l’harmonie de l’empire.

Ils n’observent pas… : verset 3.

9 Si le roi le trouve bon, qu’on écrive pour les faire périr, et je pèserai dix mille talents d’argent dans les mains des intendants, pour les faire porter dans les trésors du roi.

Dix mille talents d’argent : à prendre sur les dépouilles de la peuplade anéantie. Entre 300 et 400 tonnes d’argent (1 Chroniques 29.7 ; 2 Rois 5.23). D’après Hérodote le revenu régulier de l’empire était de 14500 talents d’argent (III, 95), en sorte que, si nous avons affaire ici au même talent, Haman offrait au roi un peu plus des deux tiers des recettes annuelles de son trésor. Il y avait là de quoi lever tout scrupule.

10 Et le roi ôta son anneau de sa main et le donna à Haman, fils de Hammédatha, Agaguite, ennemi des Juifs.

Son anneau : pour qu’Haman en scellât le décret royal.

Et le donna à Hamar,…, ennemi des Juifs. L’auteur énumère tous les titres et qualificatifs d’Haman, pour faire sentir la grandeur du danger. Telles étaient les mains où se trouvait l’anneau roval !

11 Et le roi dit à Haman : L’argent t’est donné et le peuple aussi, pour lui faire ce que bon te semblera.

Il ne convient pas que le roi paraisse faire payer son consentement. D’ailleurs le zèle d’Haman mérite d’être récompensé.

Le peuple aussi : comme s’il s’agissait d’une chose.

12 Les secrétaires du roi furent appelés le treizième jour du premier mois et l’on écrivit, selon ce qu’avait ordonné Haman, aux satrapes du roi, aux gouverneurs de chaque province, aux chefs de chaque peuple, à chaque province, selon son écriture, à chaque peuple selon sa langue ; on écrivit au nom du roi Assuérus et on scella de l’anneau du roi.

Les secrétaires de Xerxès sont mentionnés plus d’une fois par Hérodote (VII, 100 ; VIII, 90). Ils semblent avoir toujours été aux ordres du roi, prêts à écrire ses édits et à noter ce qui lui paraissait mémorable.

Le treizième jour : peut-être parce que le sort avait désigné ce jour-là comme le plus favorable (verset 13).

Du premier mois. Pourquoi tant se hâter et mettre entre l’exécution et la menace un aussi long intervalle (neuf mois peut-être pour les provinces les plus éloignées) ? Pour laisser aux Juifs le temps de s’enfuir et pour s’emparer plus facilement de leurs biens ? Non ! Haman, se méfiant de l’humeur changeante du roi, veut battre le fer pendant qu’il était chaud.

Aux chefs de chaque peuple. Après les employés royaux (satrapes, gouverneurs) sont nommés les princes de chaque peuple, les descendants des anciens rois des divers peuples vaincus.

13 Des lettres furent envoyées par les courriers à toutes les provinces du roi, pour qu’on exterminât, qu’on égorgeât et qu’on détruisit tous les Juifs, depuis l’enfant jusqu’au vieillard, les petits enfants et les femmes en un seul jour, le treizième jour du douzième mois, qui est le mois d’Adar, et que leurs biens fussent mis au pillage.

Par les courriers : les célèbres courriers établis en Perse (Esther 1.22).

Au pillage. Tout en donnant cet encouragement à la rapacité de ses administrés, Haman se réserve, sans que l’on nous dise comment, de prélever sur ce butin sa bonne part (verset 11).

14 Le texte du rescrit portait qu’il fût promulgué un décret dans chaque province, faisant savoir à tous les peuples qu’ils se tinssent prêts pour ce jour-là.

Pour plus de sûreté et afin que l’ordre fût universellement connu et exécuté, les satrapes et gouverneurs (verset 12) furent chargés de rendre obligatoire la participation au massacre.

15 Les coureurs partirent en toute hâte par l’ordre du roi, et le décret fut promulgué dans Suse, la forteresse. Et le roi et Haman étaient assis à boire, et la ville de Suse était dans le trouble.

À Suse, où le décret fut promulgué au moment où partirent les courriers, les juifs comptaient peut-être beaucoup d’amis parmi les sectateurs de Zoroastre. Le trouble de la ville s’explique sans peine si l’on admet que l’opinion de la femme d’Haman à l’égard des Juifs (Esther 6.13) était celle de la population en général.

Était dans le trouble : Ne savait que penser. Voir le même verbe Exode 14.3 et Joël 1.18, où nous l’avons rendu par : ils se sont égarés, et : ne savent où aller.