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Maison
Dictionnaire Biblique Westphal Calmet

(Hébreu, beth ; grec, otkia)

1. Origines

L’histoire des habitations humaines en Palestine remonte jusqu’à l’époque indéterminée de l’âge paléolithique (voir Palestine, paragraphe VIII).

De récentes fouilles et découvertes, en particulier, ont permis de connaître les habitants préhistoriques que trouvèrent sur place les Sémites (appelés dans la Bible « Cananéens et Amoréens ») en envahissant la Palestine, deux ou trois mille ans avant Jésus-Christ. Les hommes de cette race primitive, encore au stade néolithique, travaillaient et utilisaient les silex, l’os et le bois. La plupart d’entre eux vivaient dans des grottes, nombreuses dans le relief de la Palestine, et qui plus tard reçurent des destinations diverses : lieux de refuge, abris pour le bétail, pour les brigands, très souvent sépultures (Genèse 19.30 ; Genèse 23.19 ; Josué 10.16 ; 1 Samuel 22.1 ; Jérémie 7.11 etc.).

Dès que l’homme préhistorique, maître des animaux, posséda des troupeaux, il dut quitter ses cavernes et habiter sous des tentes (voir ce mot), afin de se déplacer facilement pour changer de pâturages (voir Nomadisme, Vie pastorale). Il ne faut pourtant pas croire que la maison ait succédé à la tente dans l’histoire de la civilisation : maisons et tentes ont coexisté longtemps, en Palestine, et on les y trouve toutes deux encore de nos jours. La tente est l’habitation du nomade berger, et la maison celle du cultivateur et de l’artisan. Dans les couches inférieures des fouilles de Guézer, on a trouvé les restes des fondations de huttes de pisé remontant à l’âge de pierre, sans doute l’œuvre des hommes des cavernes : c’est la première forme connue de la maison.

On s’imagine souvent la maison antique, construite à la romaine : spacieuse, fraîche, à pièces donnant sur un atrium ou cour intérieure ; de telles maisons (semblables aux habitations mauresques d’aujourd’hui) se trouvaient sans doute dans les grandes villes, et il devait y en avoir à Jérusalem ; mais c’étaient exclusivement des demeures de riches. Les maisons communes étaient semblables à celles que l’on voit en Orient encore aujourd’hui, et particulièrement en Palestine (cf. Bbl. Fam., grav. 19) ; elles ont la forme d’un gros cube régulier.

2. Plan

Les fouilles montrent en effet que les siècles n’ont pas changé grand’chose au mode de construction des maisons. Le plan de ces habitations est d’ailleurs si simple aujourd’hui qu’il n’a guère pu l’être davantage autrefois.

La construction syrienne actuelle en Palestine donne donc une idée juste de la maison d’autrefois. Quatre murs sans fenêtres, un toit forment toute l’habitation ; bêtes et gens y logent. Le jour entre par la porte, qui sert aussi de cheminée. Parfois une cour, un vestibule, à l’entrée d’une maison riche (Marc 14.66 ; Marc 14.68 ; Actes 12.13). Suivant le degré d’aisance, le bâtiment est plus ou moins grand et divisé alors en deux pièces à la suite l’une de l’autre, la première pour le détail, la seconde, surélevée, occupée par le paysan et sa famille. Une troisième catégorie de maisons est composée de trois ou quatre pièces : écurie, salle commune et chambre à coucher, cellier. C’est bien ainsi que les fouilles de Guézer montrent la maison cananéenne (qui fut pour les Hébreux le type de construction).

La grandeur de la pièce variait : une grande chambre, dit la Mischna, avait 4,50 x 3,50 m, une petite : 3,50 x 2,50 m. La hauteur, suivant le modèle de construction du temple, était égale au quart du périmètre.

3. Matériaux de construction

Le premier qui fut utilisé est le bois ; il est même probable que l’ancêtre de la tente et de la maison fut la hutte de feuillage, abri de fortune. La fête juive des Tabernacles (tabernaculum = tente, hutte) rappelait qu’à la sortie d’Égypte le peuple avait utilisé ce modèle primitif d’habitation. Le bois servait de cadre, de charpente, sur laquelle on jetait la glaise, le « pisé » (On pétrissait le mortier avec les pieds : Néhémie 3.14).

Plus tard, avec la glaise comprimée et séchée — au feu ou au soleil — les Palestiniens firent des briques (Jérémie 43.9 ; Ésaïe 9.9) ; mais les Babyloniens (Genèse 11.3) et les Égyptiens (Exode 1.14) les avaient depuis des siècles précédés dans cette voie. Parfois on cuisait les briques au four ; souvent on mêlait de la paille hachée avec l’argile (cf. Exode 5.7 et suivants) et l’on triturait le mélange avec les pieds avant de le mouler. Les briques des fouilles sont de dimensions différentes, soit en parallélépipède, soit en cube. Les plus grosses qu’on ait trouvées avaient environ 0.50 x 0,35 x 0,15 m. La Mischna indique que le modèle type doit être un cube de 0,75 m de côté.

Les maisons plus spacieuses et plus luxueuses étaient bâties en pierre (Ésaïe 9.9). On utilisait toutes sortes de pierres : celles des champs, celles des carrières brutes, mais aussi les pierres de taille (1 Rois 5.17) sciées sur place, à la grandeur demandée. Ces mêmes matériaux sont plus tard, d’après la Mischna, couramment employés (pierres de taille, moellons, briques).

Les palais étaient pavés ou revêtus de marbre. Le mortier le plus commun : argile, se trouvait quelquefois remplacé par le gypse (Ésaïe 33.12) et peut-être aussi par le bitume (voir ce mot) ou asphalte (Genèse 11.3).

La charpente était ordinairement en sycomore (Ésaïe 9.9), plus rarement en olivier, en cèdre, en santal. La construction de la « Maison de l’Éternel » (1 Rois 6.1 et suivant) apporte des précisions sur les bois rares parfois employés. On se servait aussi de bois pour le toit et les décorations intérieures des palais.

4. Fondation et rites

Très souvent, le sol de la Palestine s’y prêtant, on prenait le rocher pour assises de la maison (Matthieu 7.24). Dans les terrains ordinaires, on faisait reposer les fondations sur de grosses pierres (voir plus loin).

Le jour de la fondation était fêté par des réjouissances, comme il l’est aujourd’hui encore (Esdras 3.10 et suivant). Ce même jour voyait aussi se dérouler tout un cérémonial sacrificiel dont l’Ancien Testament ne parle guère, mais que les découvertes des fouilles ont révélé : on y a trouvé très fréquemment, sous les portes des maisons ou sous le coin des murs de fondation, des jarres contenant des squelettes d’enfants — souvent pliés dans la position fœtale ; à Méguiddo, le squelette d’une jeune fille de 15 ans enseveli sous les fondations d’une forteresse ; à Thaanac, celui d’un enfant de 10 ans ; on a trouvé également des squelettes d’adultes (figure 88 à 91). Longtemps on crut qu’il s’agissait de sépultures, mais le lieu et les conditions de ces enfouissements s’opposent à cette hypothèse.

D’ailleurs, d’après 1 Rois 16.34 il n’y a aucun doute sur ces rites de fondation : Hiel de Béthel sacrifia deux de ses fils (l’aîné et le plus jeune) pour la reconstruction de Jérico. Cette coutume, certainement cananéenne, fut plus ou moins adoptée par les Israélites ; on ne connaît pas exactement les détails de la cérémonie, mais les résultats des fouilles permettent d’affirmer que, jusqu’à la deuxième moitié de la monarchie israélite, le rite de fondation s’accompagnait d’un sacrifice vivant : l’enfant était enterré soit tout vif, soit après avoir été sacrifié ; avec la jarre contenant le cadavre, on en déposait d’autres renfermant des pots, des écuelles et une lampe.

Plus tard, on abandonna le sacrifice vivant : on n’enfouit plus qu’une jarre avec les ustensiles habituels, Ta lampe étant généralement mise entre deux écuelles. Le rite sanglant avait disparu, il n’en restait que le symbole.

5. Le mur

Nous en avons vu de trois sortes : les murs d’argile, de briques et de pierres.

Les fouilles de Lakis ont montré par endroit des murs d’argile, les uns brun foncé avec un peu de paille, d’autres jaune orangé avec beaucoup de paille. À Guézer, on a trouvé une maison remarquablement bâtie de rangs alternés de briques rouges et blanches, la couche rouge épaisse de 0,10 m, la blanche de 0,12 à 0,13 m. Mais les habitations de Guézer sont en général faites de pierres tout à fait communes, et il est bien rare d’y trouver des blocs taillés spécialement pour les angles des murs ou les embrasures des portes. De plus, les joints sont larges et irréguliers, comblés avec de la boue où l’on a mêlé des cailloux, dans les endroits les plus larges. Ces défauts de construction s’expliquent par le fait qu’à cette époque primitive chacun bâtissait sa propre maison ; les maçons professionnels (voir Arts et métiers) n’étaient employés qu’aux constructions de grande importance (résidences royales, temples, murailles des villes) ; il s’ensuit que les pierres travaillées ne sont citées, dans l’Ancien Testament, qu’à propos de tels édifices (1 Rois 5.17) ou de riches demeures (Amos 5.11 ; Ésaïe 9.9).

Plus tard — et cela se voit dans les fouilles de Guézer, par les maisons postérieures à l’exil — les pierres furent bien travaillées et polies, comme nos briques modernes. Le sol palestinien renfermait beaucoup de belles pierres, faciles à tailler. Entre ces deux extrêmes : murs en mauvaises pierres, et murs en pierres de taille, prend place le mur en moellons ou pierres de carrière grossièrement équarries à coups de marteau. Nous avons vu quel était le mortier habituel à cette époque.

En général, on faisait des murs très épais, pour assurer d’abord la solidité malgré les défauts de construction, et ensuite la fraîcheur constante. Leur épaisseur variait de 0,45 à 0,60 m, et les cloisons ne dépassaient pas 0,20 à 0,30 m. À quatre mille ans de distance, on trouve dans notre pays même des genres de construction identiques : dans nos campagnes, pour construire un mur, on commence par chercher des pierres en creusant sur place, puis on le bâtit avec un mortier d’une composition analogue au mortier des Hébreux ; et les murs de ces maisons sont très épais pour les mêmes raisons qu’autrefois.

On a dit que le mur était souvent bâti à même le roc ; quand celui-ci manquait, on faisait reposer les angles du mur sur des blocs de pierre plus ou moins plats, la maison était ainsi assise sur ces grosses pierres et elle était à peu près aussi résistante que bâtie sur le rocher. La pose de ces blocs dispensait de creuser de profondes fondations. Aujourd’hui encore, en France, la plupart des maisons de la campagne sont bâties sur des pierres semblables. Il faut voir une allusion à cette coutume dans Ésaïe 28.16 ; Psaumes 118.22 ; Job 38.6, etc. (voir Angle).

Beaucoup expliquent « pierre d’angle » (Marc 12.10) de façon différente : cette pierre serait au contraire posée au faîte du mur, sur l’angle, afin de le consolider. Dans Ésaïe 28.16, sans aucun doute il s’agit de fondation, ce que confirme le fait que cette pierre d’angle servira de pierre d’achoppement. Les blocs de fondement avaient une surface d’un ou deux mètres carrés, une épaisseur variable, mais pour plus de solidité le mur reposait sur leur milieu ; ainsi la pierre d’angle dépassait l’arête de la maison, souvent au-dessus du sol, et l’on pouvait s’y heurter et tomber : la pierre d’angle devenait pierre d’achoppement. L’apôtre Pierre est comparé à la « pierre » d’angle sur laquelle sera fondée l’Église (Matthieu 16.18).

Des murs aussi sommairement construits étaient souvent déformés, bombés en dedans ou en dehors (Psaumes 62.4) ; de plus l’humidité les imprégnait facilement, ils se couvraient de mousse, de salpêtre à l’intérieur : sans doute la « lèpre » de certains passages (Lévitique 14.34) ; comparez notre expression : un mur lépreux. Malgré leur épaisseur, les murs étaient d’une solidité relative ; l’infiltration d’un toit en mauvais état pouvait provoquer des lézardes et l’effondrement.

Aujourd’hui encore, dans les oasis sud-algériennes, sous une forte averse d’une heure ou deux, les huttes de pisé des nomades sont totalement écrasées. À Damas, à Tibériade, on a vu récemment de violentes pluies laver les murs en en détachant des parcelles de terre qui devenaient des ruisseaux de boue ; c’est probablement ce que veut dire Zacharie 9.3. De toute façon, la pluie était le grand ennemi des maisons, comme le montrent nombre d’images des prophètes (Amos 6.11 etc.). Dans Ézéchiel 13.11 ; Ézéchiel 13.17 est décrit avec couleur l’orage qui fait crouler la maison ; on y voit aussi la confirmation d’un usage courant encore aujourd’hui, en Orient et en Europe : par précaution contre les pluies, on recouvre de plâtre la terre qui sert de mortier sur le mur ; mais une violente averse peut encore l’entamer.

À l’intérieur, on enduisait le mur d’un crépi de mortier (Lévitique 14.42) ou d’une couche de chaux (Daniel 9.5). À l’extérieur, il devait y avoir un badigeon semblable (Ézéchiel 22.28), souvent renouvelé, qui donnait à la maison un aspect de propreté (Actes 23.3, cf. Matthieu 23.27).

Les murs des demeures aisées étaient badigeonnés en couleur (Jérémie 22.14). Les riches les faisaient aussi couvrir de lambris (Aggée 1.4) en bois (Ézéchiel 41.16), par exemple de cèdre (1 Rois 6.15 ; Jérémie 22.14) ou de cyprès (2 Chroniques 3.5). Les palais, si l’on en juge d’après celui de Salomon, étaient de tous côtés revêtus de bois précieux sculptés et incrustés d’ivoire (1 Rois 22.39).

Le mur n’avait qu’une ouverture : la porte ; pourtant, les habitations luxueuses possédaient des fenêtres petites et peu nombreuses, qu’on ouvrait à volonté (2 Rois 13.17 ; Siracide 42.11). Celles qui donnaient sur la rue étaient souvent garnies d’épais grillages en bois, ou treillis (Juges 5.28 ; Proverbes 7.6), permettant de voir au dehors sans être vu, comme les moucharabièhs de l’Orient. Le palais de Salomon avait, chose extraordinaire, trois rangées de fenêtres symétriques (1 Rois 7.4).

6. Le sol

Les maisons communes n’avaient que de la terre battue, boue ou argile séchée et tassée ; les fouilles modernes retrouvent ce sol durci des antiques habitations hébraïques, et aussi des édifices publics pavés de dalles ou de blocs de pierre.

Il n’est pas douteux que les maisons luxueuses fussent parquetées de cyprès ou de cèdre, comme le temple (1 Rois 6.15). Dans Luc 11.33 il peut y avoir une allusion à une cave (grec kruptès = crypte, voûte) ; la plupart des traductions ont rendu le mot par « lieu caché ».

Quoi qu’il en soit, les fouilles ont démontré que les villes bâties sur les ruines de vieilles cités utilisaient parfois comme caves les maisons de la couche inférieure. Mais comme une cave impliquait de profondes fondations, le plus généralement on aménageait des grottes en celliers pour garder au frais les aliments que la chaleur de la Palestine gâtait en peu de temps.

7. La terrasse

Le toit des anciennes maisons cananéennes était plat, comme celui de la plupart des habitations orientales. Une légère pente y assurait l’écoulement des eaux de pluie (Proverbes 19.13 ; Proverbes 27.15). Il était entouré d’un parapet, sorte de balustrade que la loi prescrivait par mesure de précaution (Deutéronome 22.8). On avait ainsi une terrasse. Ce toit était supporté par des poutres de bois allant d’un mur à l’autre (Cantique 1.17). Par exception, le toit du temple reposait sur des colonnes de fonte (1 Rois 7.15). Entre les poutres, on plaçait des soliveaux qui supportaient eux-mêmes les lattes faites de roseaux ou de branchages. Par-dessus ce clayonnage, on jetait un mortier fait de chaux et de sable, et de petits cailloux mêlés à de la cendre.

Ainsi s’explique la facile ouverture du toit, à Capernaüm, par les quatre porteurs du paralytique (Marc 2.4) ; le parallèle Luc 5.19 parle moins vraisemblablement d’un toit de tuiles, genre plus occidental. Pourtant, même en Palestine on pouvait utiliser aussi des briques (Ésaïe 65.3).

Le toit de la maison du pauvre était une épaisse couche de terre : l’herbe y poussait par les temps humides (Psaumes 129.6). Les habitations plus aisées avaient des solives de sycomore et de cèdre (Ésaïe 9.9).

On a trouvé à Guézer des rudiments de gouttières et de chéneaux en terre cuite ; les citernes exigeaient des conduites en gouttières : la Mischna en décrit deux sortes. On accédait à la terrasse par un escalier extérieur (Marc 13.15 etc.) ; les grands édifices en possédaient sans doute à l’intérieur (1 Rois 6.8).

Les utilisations de la terrasse étaient très diverses.

On allait chercher sur le toit la fraîcheur des soirées et des nuits (2 Samuel 11.2) ; on s’en servait aussi pour des usages domestiques (Josué 2.6). Par les grandes chaleurs, on y dressait des tentes et l’on y dormait, ce qui se fait encore (1 Samuel 9.26).

On y traitait aussi les affaires secrètes (1 Samuel 9.25) ; on s’y retirait pour se recueillir dans la prière (Actes 10.9), ou cacher sa douleur (Ésaïe 15.3 ; 2 Samuel 18.33) ; être assis dans un coin du toit signifiait mener une vie triste (Proverbes 21.9).

Lors d’une émeute, on pouvait s’y sauver, s’y défendre (Juges 9.51), ou voir du haut de la terrasse ce qui se passait (Ésaïe 22.1). À la fête des Tabernacles on dressait sur les toits des tentes ou des huttes de feuillage (Néhémie 8.16).

Du haut d’un toit le hazzan annonçait le vendredi soir que le sabbat commençait (comme aujourd’hui le muezzin des minarets musulmans) ; la maison avec sa terrasse constituait en effet une chaire improvisée, d’où l’expression : crier sur les toits (Matthieu 10.27).

Des terrasses servirent aussi à des cultes idolâtres (Jérémie 19.13 ; Sophonie 1.8).

La terrasse couverte, en partie généralement, formait une salle spacieuse, commode les jours de pluie ; on l’appelait parfois chambre haute, c’est-à-dire chambre d’en-haut (grec, huperôon, Actes 1.13 ; anagaïon, Luc 22.12). Jésus s’y rendait souvent avec ses disciples, et ce doit être là qu’on amena le paralytique, au travers du toit ; celui de la terrasse n’aurait guère permis un tel travail (Marc 2.4) ; d’ailleurs un des Talmuds rapporte un fait semblable. La chambre haute servait à loger les étrangers ; la vie privée étant murée, en Orient, l’hôte se trouve ainsi logé au dehors (1 Rois 17.19). La Sunamite fit construire une de ces chambres pour Élisée (2 Rois 4.9).

Encore aujourd’hui la chambre haute est le caractère distinctif des maisons syriennes. D’ordinaire, celles de la Palestine n’avaient pas d’étage ; on devait en trouver cependant à Jérusalem et à Samarie, les deux capitales. Le palais de Salomon avait trois étages (1 Rois 7.4) ; le temple en avait aussi (1 Rois 6.6). La chute d’Eutyche, par la fenêtre d’un troisième étage, s’est produite dans une maison grecque (Actes 20.9).

8. La porte

Quatre parties la composaient : battants, seuil, linteaux, deux montants. Le ou les battants étaient en bois et tournaient sur deux gonds de bois (Proverbes 26.14), dont l’un entrait dans un trou pratiqué sur le seuil, et l’autre dans un trou pratiqué dans le linteau. Comme les Égyptiens et les Babyloniens, les Hébreux devaient entourer de bronze les gonds et les crapaudines des lourdes portes. Celles du temple étaient revêtues d’or (1 Rois 7.50). On trouve encore dans le Hauran des portes faites d’un seul bloc de pierre, avec gonds de pierre. Le livre des Rois (1 Rois 6.34) mentionne aussi des portes pliantes, ou panneaux mobiles.

Le seuil (voir ce mot) dut être toujours en pierre. Tous les peuples primitifs, les Hébreux aussi bien que les autres, attachaient une importance magique au seuil, parce que tout ce qui entrait dans la maison passait par là. On le « sanctifiait » et le « consacrait » en enfouissant au-dessous un enfant ou son symbole (cf. plus haut).

Les montants ou dormants étaient des poutres carrées (1 Rois 7.5). Il y en avait aussi an pierre. Le Deutéronome (Deutéronome 6.9 et Deutéronome 11.20) prescrivait d’enfermer dans une petite boîte en bois ou en métal un rouleau de parchemin portant les paroles de Deutéronome 6.4 ; Deutéronome 6.9 ; Deutéronome 11.13 ; Deutéronome 11.21 ; on clouait la boîte sur les montants (figure 156), d’où son nom actuel de mezuza, signifiant : montant. C’est encore la coutume chez les Israélites. L’usage primitif était probablement de mettre des inscriptions sur les montants eux-mêmes, ce qui se faisait aussi en ancienne Égypte et dans les pays musulmans, ainsi que sur le linteau, partie la plus élevée de la porte (Psaumes 24.7 ; Psaumes 24.9 voûtes) ; d’où leur aspersion avec le sang de l’agneau pascal (Exode 12.7-22).

Les portes se fermaient au moyen d’une barre de bois fixée à l’intérieur, qu’on pouvait tirer du dehors par un lacet, on en passant la main par un trou pratiqué dans la porte (Cantique 5.4). On y mettait souvent une serrure en bois, comme il y en a encore dans certaines maisons syriennes, composée schématiquement d’une forte règle glissant dans une espèce de boîte en bois et dont une extrémité va se loger dans une gâche fixée au montant de la porte ; quand on pousse cette règle, qui fait office de verrou pour « barrer » la porte, trois ou quatre taquets verticaux tombent perpendiculairement et s’engagent dans des trous de la règle (Juges 3.23-25) ; on ne peut donc tirer le verrou pour ouvrir la porte sans soulever les taquets : il y faut la clé de la serrure. C’est une autre règle portant autant de clous que la serrure a de taquets ; par le trou creusé dans la porte, on l’engage dans la serrure parallèlement au verrou, et au-dessous de lui ; quand la clé se trouve sous les trous, on la soulève, les taquets remontent et l’on peut tirer la barre. Cette disposition de taquets permettait de faire des serrures de sûreté, quoique rudimentaires. Les maisons somptueuses et les palais avaient des portiers (Marc 13.34) ; c’étaient parfois des femmes (Jean 18.17).

Dans les habitations royales, la garde militaire se tenait aux portes ; en faire partie était considéré comme une distinction (1 Rois 14.27 ; Esther 2.21). L’expression : dans les portes (Exode 20.10, etc.) désignait l’intérieur des villes entourées de remparts.

9. Dédicace

La maison terminée, sa dédicace était un rite. Bien que l’Ancien Testament ne donne de détails que sur les dédicaces de temples ou d’édifices publics (Lévitique 8.10 ; 1 Rois 8.1 et suivant, Esdras 6.16 ; Néhémie 3.1 ; Néhémie 12.27, 1 Macchabées 4.52 et suivant), il est probable que les maisons privées recevaient aussi cette consécration (Deutéronome 20.5), occasion de sacrifices, d’aspersions sanglantes et de formules d’actions de grâces.

La signification primitive de ce rite est le désir de se rendre propices les esprits tutélaires de la maison. Les bédouins modernes ont encore un rite de dédicace pour leurs tentes. Chez les mahométans, même civilisés, le sacrifice est indispensable pour la prise de possession d’une maison ou d’un édifice public. Il n’y a pas très longtemps qu’on a vu de tels sacrifices à Damas pour l’inauguration d’une installation électrique ; plus récemment, au Caire, on égorgeait un mouton sur les rails d’une ligne de tramway, avant de la mettre en service. Persistance d’un rite dont l’idée sans doute a disparu.

10. Le mobilier

Le confort est inconnu de l’Orient, où la vie en plein air est possible toute l’année. La maison de l’homme du peuple, même à l’époque de Jésus, était aussi nue que celle du plus misérable Arabe de nos jours.

Dans sa pièce unique se trouvaient les tapis (Exode 22.27) où l’on s’enroulait pour dormir, ou bien une simple couchette portative (Marc 2.9), la batterie de cuisine, d’une extrême simplicité, et les outils du maître de la maison. Il s’y trouvait aussi des nattes ou des coussins pour s’y accroupir à l’orientale, des vases pour les besoins du ménage et le coffre servant d’armoire. La maison possédait encore une lampe, un boisseau, des outres pour le vin, un balai, un moulin.

Les Évangiles nomment certains de ces objets avec l’article défini : le chandelier, le boisseau (Matthieu 5.15), car il n’y en avait qu’un par demeure. La lampe était d’argile, avec une ou plusieurs mèches trempant dans l’huile (Matthieu 25.4) ; on la plaçait sur un pied ou sur une pierre d’un mur en saillie. Le boisseau était un objet essentiel ; en principe il servait de mesure, mais aussi de tiroir et de sac. Retourné par terre, il devenait une table : on posait la lampe dessus — et non dessous (Marc 4.21). Les petites tables mauresques d’aujourd’hui, rondes et basses, gardent encore la ligne du boisseau retourné qui est leur origine. L’usage du balai (voir ce mot) est rapporté dans quelques textes (Luc 15.8 etc.). Les outres (Marc 2.22) étaient en peau de chèvre, elles conservaient le vin et lui communiquaient un goût affreux, pourtant fort apprécié des Orientaux.

Toute maison avait un moulin (voir ce mot). Deux vases en pierre servaient à conserver le grain. Les maisons aisées possédaient aussi quelques sièges, escabeaux, marchepieds, des lits, une table.

L’intérieur des habitations luxueuses ressemblait sans doute aux maisons des riches Romains : meubles sculptés et incrustés d’ivoire (1 Rois 22.39), tapis épais, divans garnis de coussins (Proverbes 7.16 ; Ézéchiel 13.18), lits faits en bois de cèdre et parfumés ; voir (Cantique 3.9 ; Proverbes 7.17) Lit. Le livre de Judith parle même de moustiquaires (voir ce mot). Par temps froid, dans les maisons pauvres, on allumait un feu au milieu de la pièce, et l’on conservait les tisons sous une espèce de tambour carré garni d’un tapis. Les riches avaient dans leurs « chambres d’hiver » des foyers, sortes de braseros (Jérémie 36.32). La fumée sortait par la porte ou les fenêtres.

11. Cuisine

La plupart des ustensiles de cuisine étaient en terre : la cruche pour puiser l’eau fraîche (Genèse 24.15 ; Marc 14.13), les vases (parfois en pierre : Jean 2.6) pour les provisions liquides ou solides, les jarres pour l’huile et les olives (1 Rois 17.12).

La maison possédait aussi des paniers ou des corbeilles à pain ou à fruits (Deutéronome 26.2) et même à viande (Juges 6.19). Des objets fort utiles : le pétrin, la huche, étaient de simples écuelles en bois ; il y avait d’autres bols en bois (Lévitique 15.12) et en terre (Juges 5.25).

Dans 1 Samuel 2.14 sont énumérés quatre récipients que les diverses traductions appellent différemment : chaudière, chaudron, marmite, pot, poêle, casserole, etc. Ces instruments étaient en terre cuite (voir Poterie), en pierre ou en bronze (1 Rois 7.45). La poêle citée dans Lévitique 2.5 ; Lévitique 7.9 ; 1 Chroniques 23.29 (makhabath) devait être une plaque de fer comme dans Ézéchiel 4.3 ; celle de Lévitique 2.7 ; Lévitique 7.9 (markhèchèth) est plutôt une marmite ou casserole ; celle de 2 Samuel 13.9 (masréth), un pétrin ; celle de 1 Samuel 2.14 (pâroûr), un pot ; celle de 2 Chroniques 35.13 (tsélakhâh), un plat.

Citons encore le couteau (Juges 19.29) et la fourchette (1 Samuel 2.13). À table, chacun puisait avec les doigts dans les plats, qui étaient en terre chez les pauvres, et en métaux précieux chez les riches (Proverbes 19.24 ; Nombres 7.13 ; 1 Rois 10.21). Les coupes de Salomon étaient aussi en or (1 Rois 10.21). Voir Pain, Repas, etc.

12. Sens figurés

Le mot maison peut exprimer diverses significations connexes, par exemple :

  • endroit : « c’est ici la maison de Dieu » (Genèse 28.17),
  • palais : « maison du roi », etc. (2 Samuel 15.35 ; Amos 7.13 ; Jérémie 36.22),
  • temple : « maison de JHVH » (2 Samuel 12.20 ; 1 Rois 6.1),
  • famille : « entre dans l’arche, toi et ta maison » (Genèse 7.1 ; Actes 10.2), etc. ;

Tout le contenu de 2 Samuel 7 roule sur les deux sens du terme : maison matérielle, palais ou temple, et maison personnelle : descendance, dynastie : « maisons de Saül et de David » (2 Samuel 3.1 etc.), peuple : « maison d’Israël » (Ésaïe 5.7 etc.), pays : « l’Égypte, maison de servitude » (Exode 13.3 etc.).

La description de la vieillesse dans Ecclésiaste 12.3 compare la décrépitude du corps humain à la vétusté d’une maison, et l’oppose à la « demeure éternelle » (verset 7), le tombeau.

On sait que Jésus a fait une certaine place aux maisons dans ses paraboles (Matthieu 5.15 ; Matthieu 7.26 ; Matthieu 12.25 ; Matthieu 12.44; Luc 15.25 etc.) ; Pierre parle de la « maison spirituelle » constituée par les chrétiens, « pierres vivantes » (1 Pierre 2.5).

Ls F.


Numérisation : Yves Petrakian