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Aseneth
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

Fille de Putiphar, et épouse du patriarche Joseph (Genèse 41.45). Elle fut mère d’Ephraim et de Manassé (Genèse 41.50 ; 46.20). On doute si Aseeeth est fille du même Putiphar qui acheta Joseph, et qui trompé, par les calomnies de sa femme, le jeta dans un cachot (Genèse 37.36 ; Genèse 39.1 ; Genèse 41.45-50 ; Genèse 46.20). Les Hébreux cités dans Origène, racontent qu’Aseneth découvrit à Putiphar, son père, ce qui s’était passé entre Joseph et sa mère, et le détrompa sur les soupçons qu’il avait d’abord conçus contre son serviteur. Saint Jérôme, l’abbé Rupert, Tostat, et quelques autres sont aussi persuadés qu’Aseneth est la fille de Putiphar, premier maître de Joseph.

Mais la plupart des Pères et des interprètes sont d’un sentiment contraire :

1° Le nom de Putiphar, beau-père de Joseph, s’écrit en hébreu différemment de celui qui l’acheta lorsqu’il fut d’abord amené dans l’Égypte.

2° L’Écriture n’ayant pas dit que ce fût le même Putiphar, on a lieu de croire que c’en était un autre. Cette circonstance était trop remarquable pour n’être pas relevée.

3° Saint Augustin remarque que la dignité de prêtre d’Héliopolis, que l’Écriture donne à Putiphar, beau-père de Joseph, ne paraît pas compatible avec la qualité de maître des cuisiniers, ou capitaine des gardes de Pharaon, que l’Écriture donne à Putiphar, maître de Joseph.

4° Enfin la ville d’Héliopolis, nommée en hébreu On, est trop éloignée de celle de Tanis, où le roi d’Égypte tenait sa cour, pour croire que le même Putiphar, qui avait cet emploi dans cette cour, pût faire sa résidence à On, qui en est à plus de quinze lieues.

Ces raisons ont déterminé la plupart des commentateurs à croire qu’Aseneth, épouse de Joseph, n’était pas fille de Putiphar, à qui Joseph fut vendu en arrivant en Égypte. Ces preuves ne sont pas toutefois sans réplique comme on l’a montré dans l’article de Putiphar.

Si l’on est curieux de fables, on peut lire dans les Rabbins un long récit de la manière dont Aseneth devint l’épouse de Joseph.Voici comme Vincent de Beauvais raconte son mariage : La première des sept années de stérilité, Joseph, visitant l’Égypte, arriva aux environs d’Héliopolis, où demeurait Putiphar, conseiller de Pharaon, qui avait une fille nommée Aseneth, d’une beauté toute extraordinaire. Elle demeurait dans une tour joignant la maison de son père. Cette tour avait dix chambres, ou dix appartements ; dans le premier étaient les dieux d’Aseneth, auxquels elle immolait tous les jours des sacrifices ; le second contenait les parures d’Aseneth, ses habits précieux, ses pierreries ; le troisième était rempli de tous les biens de la terre. Les sept autres appartements étaient habités par des vierges qui servaient Aseneth, lesquelles étaient toutes d’une rare beauté, et qui n’avaient jamais parlé à aucun homme.

La chambre d’Aseneth avait trois fenêtres, l’une à l’orient, l’autre au midi et.l’autre au septentrion. On y voyait un lit d’or avec des rideaux de pourpre brodés d’or ; et autour de cette tour, il y avait une cour environnée de murs fort élevés de pierres de taille, où l’on voyait quatre portes de fer gardées par dix-huit jeunes hommes bien armés. À la droite du parvis, il y avait une fontaine et un bassin pour recevoir les eaux qui arrosaient les arbres du jardin.

Aseneth était grande comme Sara, bien faite comme Rebecca, belle comme Rachel. Joseph étant venu dans ce canton, fit dire à Putiphar qu’il logerait dans sa maison. Putiphar s’en réjouit, et dit à sa fille que Joseph, le fort de Dieu, devait venir loger dans sa maison, et qu’il voulait le lui faire épouser. Elle répondit qu’elle ne voulait point d’un esclave, mais qu’elle n’aurait pour époux qu’un fils de roi. En même temps, on avertit que Joseph arrivait. Aseneth monta promptement à son appartement, et voyant Joseph arriver, assis sur le char de Pharaon, qui était tout d’or, tiré par quatre chevaux plus blancs que la neige ; Joseph, vêtu d’un manteau de pourpre broché d’or, ayant sur la tête une couronne d’or ornée de douze pierres précieuses et tenant à la main un rameau d’olivier et un sceptre d’or : aussitôt qu’elle l’eut aperçu, elle fut troublée, voyant son extrême beauté et dit : Voici le soleil qui vient à nous dans son char. Je ne savais pas que Joseph était un fils de Dieu ; car quelle est celle qui peut engendrer une telle beauté ?

Joseph étant entré dans la maison, on lui lava les mains, et il demanda : Qui est cette femme que j’ai remarquée par cette fenêtre ? car il craignait qu’elle ne fît comme quantité d’autres femmes, qui lui envoyaient des présents et qui le recherchaient. Putiphar lui dit qu’elle était sa fille, qu’elle n’avait jamais parlé à aucun homme et n’en pouvait souffrir aucun, que, s’il le souhaitait, elle viendrait lui faire la révérence. Joseph répondit : Si elle est vierge, qu’elle vienne, et je l’aimerai comme ma sœur. La mère de la fille monta et l’amena, et Putiphar lui dit : Saluez votre frère, qui hait toutes les femmes comme vous haïssez tous les hommes ; embrassez-le. Joseph étendit sa main, la lui mit sur le sein, en disant qu’il ne souffrirait pas qu’une personne qui adorait les idoles le touchât.

Aseneth en fut touchée jusqu’aux larmes. Joseph la bénit ; elle renonça à ses idoles et se toucha malade de douleur. Joseph étant sur le point de partir, Putiphar voulut le retenir ; mais il ne voulut pas demeurer, et promit de revenir dans huit jours. Pendant tout ce temps, Aseneth demeura vêtue de noir, jeta ses idoles par les fenêtres et ne prit point de nourriture. Au huitième jour, au lever de l’aurore, un ange du ciel vint consoler Aseneth, lui dit de manger, de se revêtir de ses plus beaux habits, que son nom était écrit dans le livre de vie, qu’elle ne s’appellerait plus Aseneth, mais de grand Refuge. En même temps, elle lui servit du pain et du vin, et il lui demanda un rayon de miel. Elle lui dit qu’elle était fâchée de n’en pas avoir : Allez, lui dit-il, dans votre garde-manger et vous en trouverez. En effet, elle en trouva ; l’ange le prit et en mangea un très-petit morceau, et donna le reste à Aseneth. Les abeilles vinrent et firent leur miel dans la main de cette vierge, puis s’envolèrent au ciel par le commandement de l’ange.

Aseneth pria l’ange de donner aussi sa bénédiction à sept vierges qui étaient avec elle dès l’enfance et avaient été nourries dans le même appartement. L’ange les bénit toutes et disparut à leurs yeux. Un moment après, on vint lui annoncer le retour de Joseph. Elle accourut au devant de lui, lui raconta que l’ange lui avait dit qu’elle serait son épouse. Dès le lendemain, Joseph la demanda pour femme à Putiphar, et il la lui accorda.

J’omets plusieurs particularités moins importantes. En voilà assez pour juger du mérite de la pièce et pour en inspirer tout le mépris qu’elle mérite.

Les Orientaux ont aussi composé des livres mystiques contenant les amours de Joseph et de Zoleikab, fille de Pharaon, roi d’Égypte et femme de Putiphar, maître de Joseph. Ils expliquent ces histoires à-peu-près comme nous faisons le Cantique des Cantiques de Salomon, c’est-à-dire d’une manière morale et relevée, de l’amour de l’âme envers son Dieu. Voyez ci-après Joseph.