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Zabiens
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

(Zabiim) : On dit que les Zabiens sont d’anciens Chaldéens attachés à l’astrologie et au culte des astres, et dont la principale occupation était de former des talismans sous certains aspects des astres. On doute si les Zahiens étaient un peuple particulier, ou une secte de philosophes ; ou si leur nom marque simplement leur religion, leur pays, ou leur situation. On propose sur cela cinq ou six sentiments divers. Les uns croient que le nom de Zabiens vient de Zaba, ou plutôt Saba, fils de Chus ; ou de zaba, une armée, parce qu’ils adoraient l’armée du ciel ; ou de l’arabe tzabin, qui signifie le vent d’orient, parce que ces peuples étaient Chaldéens, et connus sous le nom d’Orientaux. Spencer, qui a fort examiné cette matière, croit que la meilleure étymologie est celle qui a été proposée par Scaliger, qui croit que Zabiim signifie les Orientaux, ou les Chaldéens ; mais il prétend qu’on ne doit pas borner ce nom aux seuls Chaldéens, et qu’il doit s’étendre à tous les peuples qui ont suivi leurs principes, comme les Égyptiens, les Nabathéens, les chananéens, les Syriens et autres, en sorte que le nom de Zabien marquerait une espèce de secte fort répandue dans tout l’Orient.

Mais quelle était la religion et la philosophie des Zabiens ?

Quelques-uns croient que c’était la plus ancienne religion du monde. Il y en a qui en mettent l’origine sous Seth, fils d’Adam ; d’autres, sous Noé ; d’autres, sous Nachor, père de Tharé, et aïeul d’Abrahain. Maimonide croit qu’Abeaham suivait les principes et la religion des Zabiens, avant qu’il fût sorti de la Chaldée. Un des principaux articles de cette religion était le culte des astres, et une sorte de magie ; ce qui fait dire à Spencer qu’ils étaient païens, et que leur religion, telle qu’elle a été connue par les auteurs juifs et arabes, qui en parlent, n’a été formée que sur le déclin du judaïsme, et qu’elle a emprunté diverses choses des anciens Chaldéens, des Juifs, des platoniciens et des gnostiques ; qu’ils ont fait un mélange de tout cela, dont leur religion est composée. Il ajoute que le nom des Zabiens, et même leur religion, comme elle est aujourd’hui, est fort récente, et ne surpasse pas les temps de Mahomet, puisqu’on ne trouve ni leur nom, ni leur religion marqués dans aucun auteur ancien, ni grec, ni latin, ni dans aucun ouvrage écrit avant l’Alcoran.

M. Hyde, dans son Histoire de la religion des Perses, s’est appliqué à prouver que les anciens Zabiens n’étaient point gentils. Il prétend que Sem et Élam sont les premiers auteurs de leur religion ; si dans la suite elle se trouva chargée de quelques superstitions, Abraham la réforma, et soutint sa réformation contre Nemrod, qui la persécuta ; que Zoroastre vint ensuite, et rétablit le culte du vrai Dieu, qu’Abraham avait auparavant enseigné. Il est vrai que les Zabiens, ou les anciens Perses, entretenaient un feu éternel sur leurs autels et dans leurs temples ; mais on voyait la même chose sur l’autel du temple de Jérusalem, où les prêtres avaient soin de nourrir un feu qui ne s’éteignait jamais. Ils paraissaient adorer le soleil ; mais on prétend que ce n’était qu’un culte subalterne, et subordonné au culte du vrai Dieu. Les restes des anciens Perses, qui sont encore aujourd’hui dans l’Orient, soutiennent à ceux qui les interrogent, que le respect qu’ils ont pour le soleil, est un culte purement civil, semblable à celui qu’on rend aux rois et à leurs ministres.

On prétend que la religion des Zabiens est la plus ancienne des religions du monde, après la religion d’Adam et des patriarches, qui était la seule véritable.L’unité d’un Dieu et la nécessité d’un médiateur étaient originairement une persuasion générale et régnante parmi tous les hommes. L’unité d’un Dieu se découvre par la lumière naturelle ; le besoin que nous avons d’un médiateur pour avoir accès à l’Être suprême est une suite de cette première idée. Mais les hommes n’ayant pas eu la connaissance, ou ayant oublié ce que la révélation avait appris à Adam des qualités du médiateur, ils en choisirent eux-mêmes, par le moyen desquels ils pussent s’adresser au Dieu suprême. Ce fut le premier pas vers l’idolâtrie. Ne voyant rien de plus beau ni de plus parfait que les astres, dans lesquels ils supposaient que résidaient des intelligences, qui animaient et qui gouvernaient ces grands corps ; ils crurent qu’il n’y en avait point de plus propre pour servir de médiateur entre Dieu et eux. Et comme les planètes étaient de tous les corps célestes les plus proches de la terre, et celles qui avaient le plus d’influence sur elle, ils leur donnèrent le premier rang parmi ces médiateurs, et sur ce pied-là ils en firent l’objet de leur culte.

Telle fut l’origine de toute l’idolâtrie qui a eu cours dans le monde. D’abord on dressa des tentes ou des chapelles à ces puissances, puis on leur dressa des statues ou des images. Ces chapelles n’étaient, dans les commencements, regardées que comme des demeures sacrées où les intelligences avaient leurs habitations ; et ceux qui les y adoraient ne-leur rendaient qu’un culte relatif à la planète qui en était la maîtresse. Ils s’avisèrent ensuite de faire des statues, dans lesquelles ils croyaient qu’après leur consécration, ces intelligences étaient aussi présentes par leurs influences que dans les planètes, et que les prières qu’on leur adressait, avaient autant d’efficace devant l’une que devant l’autre. Cc fut là l’origine de l’adoration des statues ou simulacres.

On leur donna le nom de planètes qu’ils représentaient, et qui sont les mêmes que ceux qu’elles ont aujourd’hui. Aussi trouvons-nous Saturne, Jupiter, Mars, Apollon, Mercure, Vénus et Diane placés dans le premier rang dans le culte des anciens. C’était là ce qu’ils appelaient les grands dieux. Ensuite l’opinion que les âmes des gens de bien pouvaient après leur séparation du corps servir de médiateurs et d’intercesseurs auprès de Dieu pour les hommes, ayant prévalu dans les esprits, on déifia plusieurs de ceux qu’on croyait justes et dignes de cet honneur ; ainsi le nombre des dieux s’augmenta dans le monde.

Cette religion prit son origine chez les Chaldéens. La connaissance qu’ils avaient de l’astronomie contribua à les y porter. C’est ce qui obligea Abraham à quitter la Chaldée. Des Chaldéens ce culte se répandit dans tout l’Orient, de là en Égypte, de l’Égypte en Grèce, et de la Grèce parmi toutes les nations d’Occident. Les premiers auteurs de cette superstition étaient connus dans l’Orient sous le nom de sabbéens ou de zabiens. Les restes de cette ancienne secte subsistent encore aujourd’hui dans l’Orient sous le nom de sabbéens, qu’ils prétendent avoir reçu de Sabius fils de Seth ; ils ont encore parmi eux un livre qu’ils attribuent à Seth, et qui contient la doctrine de leur secte.

À cette secte des sabbéens était diamétralement opposée celle des mages, qui avaient horreur des images et des idoles, et n’adoraient Dieu que par le feu. Ils prirent naissance dans la Perse et s’étendirent dans les Indes, où ils subsistent encore aujourd’hui. Ils reconnaissaient deux principes, l’un du bien, l’autre du mal. On peut voir ce que nous avons dit sous l’article Mages.

Pour revenir aux Zabiens, comme tout le système que nous venons d’exposer sur leur origine et leur progrès n’est fondé ni sur des preuves de fait, ni sur le récit des historiens anciens, ni sur aucun monument authentique, nous sommes obligés d’avertir le lecteur que tout gela n’est qu’une hyperbole, probable à la vérité, mais peu assurée ; voici quelque chose de plus précis tiré des auteurs orientaux, qui nous apprennent quelle est la secte des zabiens, et quels sont leurs sentiments.

Le nom de sabbéens ou zabiens, n’est pas le nom d’une nation particulière, mais celui d’une religion connue dans l’Orient, et de ceux qui la professent ; il n’est pas bien certain en quoi consiste principalement la religion des zahiens. Les Orientaux mêmes sont fort différents sur ce sujet ; mais il est très-constant que cette religion est une des trois auxquelles Mahomet a donné sa protection, et une espèce d’approbation dans l’Alcoran ; ces trois religions sont le judaïsme, le christianisme et le zabéïsme, parce qu’elles ont ou prétendent avoir des livres composés par des patriarches et des prophètes, que Mahomet et les musulmans reconnaissent.

Selon Houssain Vaez, dans sa paraphrase Persienne de l’Alcoran, les zabiens ont diverses observances tirées du judaïsme, du christianisme et du mahométisme ; ils honorent les anges d’un culte religieux ; ils lisent les psaumes de David ; ils prient tournés tantôt au midi et tantôt au septentrion. Il y en a qui croient qu’ils sont dans les principes des saducéens.

Ils ont aussi, dit M. d’Herbelot, un livre qu’ils attribuent à Adam, et qu’ils regardent comme leur Bible, dont les caractères sont tout à fait particuliers, mais dont la langue est presque entièrement chaldaïque. Ils ont une grande vénération pour saint Jean-Baptiste, duquel ils se disent disciples ; ils pratiquent une espèce de baptême, ce qui leur a fait donner par nos voyageurs le nom de

Chrétiens de Saint-Jean. Voyez ce que nous avons dit sur cet article. [Voyez aussi Gnostiques]. Leur langage est presque entièrement syrien ou chaldéen.

Ben-Schunab, auteur persan, nous dit encore quelque chose de plus précis sur les zabiens, qu’il nomme Sirians ou Syriens. Ils sont, selon lui, les descendants de la plus ancienne nation du monde, ils parlent encore aujourd’hui, au moins dans leurs livres, la langue d’Adam et de ses enfants ; ils ont reçu leur religion et leur loi de Seth et d’Énoch, dont ils prétendent avoir encore aujourd’hui les livres, remplis d’instructions morales pour fuir le vice et pratiquer la vertu. Ils prient Dieu sept fois le jour, avec une application si sérieuse, « ils n’y mêlent aucune autre action. Ils jeûnent pendant le cours entier d’une lune, depuis le lever jusqu’au coucher du soleil, sans boire ni manger chose quelconque. Ce jeûne finit toujours à l’équinoxe du printemps.

Ils honorent le temple de la Mecque, et ont aussi beaucoup de respect pour les pyramides d’Égypte,à cause qu’ils croient que Sabi, fils d’Edon ou d’Énoch est enterré sous la troisième. Mais leur principal pèlerinage se fait, en un lieu proche de Haram, qui est l’ancienne Carne en Mésopotamie, que quelques-uns croient être le lieu de la naissance d’Abraham, et qui est certainement le lieu d’où il partit pour se rendre avec toute sa famille dans la terre de Chanaan [Voyez Charan et Haran]. Quelques-uns veulent que les zabiens respectent particulièrement ce lieu à cause de Sabi, fils de Mari, qui vivait du temps d’Abraham, et duquel ils tirent plus probablement leur origine, et peut-être leur religion, que de Sabi, fils d’Énoch, qui vivait avant le déluge.

Ben-Hazem dit que la religion des zabiens est non-seulement la première et la plus ancienne, mais aussi la générale et la seule religion du monde jusqu’au temps d’Abraham, duquel toutes les autres religions sont descendues ; et les Arabes, dans toutes leurs histoires, disent ordinairement que les anciens Perses, Chaldéens, Assyriens, Grecs, Égyptiens et Indiens étaient tous zabiens avant qu’ils eussent embrassé le judaïsme, le christianisme ou le mahométisme, et les chrétiens orientaux ne font point difficulté de dire que le grand Constantin quitta la religion des zabiens pour prendre celle des chrétiens.

Quelques-uns confondent les zabiens avec les mages, ou guèbres, ou gaures, adorateurs du feu dans la Perse ; mais les plus exacts les distinguent.

On ne trouve pas le nom de zabiens dans l’Écriture ; et si nous en traitons ici, ce n’est qu’à cause que les rabbins et les commentateurs en parlent assez souvent, et prétendent que Moïse les a eus en vue dans plusieurs de ses lois cérémonielles, soit pour les contredire ou pour rectifier les usages et les cérémonies des zabiens. On peut voir Spencer dans son second livre de Legibus Hebroeorum ritualibus.