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Sépulture
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

Les Hébreux ont toujours eu grand soin de la sépulture des morts. Parmi eux être privé de la sépulture était un des plus grands déshonneurs que l’on pût faire à un homme. On ne refusait ce devoir à personne, pas même aux ennemis. Mais on ne l’accordait à ceux qui s’étaient donné la mort qu’après le toucher du soleil ; et on croyait que leurs âmes étaient précipitées dans l’enfer. Ce grand soin des sépultures venait de la persuasion où ils étaient de l’immortalité de l’âme. L’Écriture menace les méchants comme d’un souverain malheur d’être privés de la sépulture. Un homme qui vivrait longtemps, et aurait eu cent fils, s’il meurt et qu’il soit privé, de la sépulture, je soutiens qu’il est pire qu’un avorton, dit le Sage (Ecclésiaste 6.3). Jérémie (Jérémie 8.2) menace les rois et les prêtres, et les faux prophètes qui ont adoré les idoles, de faire jeter leurs os hors de leur sépulture, comme le fumier qu’on jette sur la terre. Le même prophète (Jérémie 22.18-19) prédit que Joakim, roi de Juda, qui bâtissait sa maison dans l’injustice, qui se livrait au crime, à l’avarice, à la violence ; il lui prédit qu’il sera enseveli de la sépulture des ânes ; qu’il sera jeté à la voirie hors des portes de Jérusalem. On remarque que Jason, qui avait privé plusieurs Juifs de la sépulture, fut traité de même, qu’il mourut dans une terre étrangère, et fut jeté aux champs comme une charogne, sans pouvoir être mis même dans un tombeau étranger. Les gens de bien faisaient consister une partie de leur dévotion à ensevelir et à enterrer les morts, comme on le voit par l’exemple de Tobie.

Il n’y avait rien de déterminé pour le lieu de la sépulture des morts. On voyait des tombeaux dans la ville, on en voyait à la campagne, on en voyait sur les chemins, dans les jardins, dans les montagnes. Ceux des rois de Juda étaient dans Jérusalem (1 Rois 2.10 ; 11.43 ; 14.31 ; 15.8 ; 24.12) et dans les jardins du roi (2 Rois 26.18-20). Ézéchiel (Ézéchiel 43.7-9) insinue qu’ils étaient creusés sous la montagne du temple, puisque Dieu dit qu’à l’avenir sa montagne sainte ne sera plus souillée par les cadavres de leurs rois. Le tombeau que Joseph d’Arimathie avait préparé pour lui-même, et dans lequel il mit le corps du Sauveur, était dans son jardin (Jean 19.41 ; 20.15). Celui de Rachel était sur le chemin de Jérusalem à Bethléem ; celui des Machabées était à Modin (2 Machabées 13.25-29) sur une hauteur, d’où on le pouvait voir de loin tant de la terre que de la mer. Nous en avons donné la description sous les articles des Machabées et de Jonathas. Les rois d'Israël avaient leurs sépultures dans Samarie ; Samuel fut enterré dans sa maison ; Moïse, Aaron, Eléazar, Josué, dans des montagnes ; le roi Saül et Débora, nourrice de Rébecca, sous des arbres. On assure que les tombeaux du peuple même de Jérusalem étaient dans la vallée de Cédron. Là étaient aussi les cimetières pour les étrangers.

Les Juifs appellent le cimetière la maison des vivants, pour marquer leur créance de l’immortalité de l’âme et de la résurrection ; et lorsqu’ils y arrivent portant un corps mort, ils s’adressent à ceux qui y reposent, comme s’ils étaient encore vivants, et leur disent : Béni soit le Seigneur qui vous a créés, nourris, élevés, et enfin tirés du monde par sa justice. Il sait le nombre de vous tous, et il vous ressuscitera dans le temps. Béni soit le Seigneur, qui fait mourir, et qui rend la vie. Leur respect pour les tombeaux va jusqu’à bâtir des synagogues et des lieux, de prières près de ceux des grands hommes et des prophètes. Par exemple, ils ont des synagogues près des tombeaux d’Ézéchiel, de Zacharie, de Mardochée et d’Esther. Ils vont prier auprès des sépulcres, persuadés comme nous de l’efficace des prières pour les morts, et de l’intercession des saints. Les rabbins enseignent qu’il n’est pas permis de renverser les tombeaux, ni de troubler le repos des morts en enterrant un autre mort dans la même fosse, même après un long temps, ni de traverser le cimetière par un aqueduc, ni par un grand chemin ; ni d’y aller cueillir du bois, ni d’y laisser paître du bétail.

Lorsque les Juifs sont arrivés avec le convoi au cimetière, on récite la bénédiction adressée aux morts, comme on l’a vu ci-devant : on met le corps à terre ; et si c’est une personne de considération, on fait son éloge, et une espèce d’oraison funèbre ; puis ils font le tour de la fosse, en récitant une assez longue prière qu’ils appellent la Justice du jugement, parce qu’on y rend grâces à Dieu d’avoir prononcé un jugement équitable sur la vie et la personne du mort. Elle commence par ces paroles du Deutéronome (Deutéronome 32.4) : Le Dieu fort, son œuvre est parfaite ; et on met un petit sac rempli de terre sous la tête du mort ; on cloue et on ferme le cercueil. Si c’est un homme, dix personnes font dix tours autour de lui, et font une prière pour son âme ; le plus proche parent déchire un coin de son habit, on descend le mort dans la fosse, le visage tourné vers le ciel ; on lui crie : Allez en paix, ou plutôt : Allez à la paix, selon les talmudistes. Les plus proches parents lui jettent les premiers de la terre sur le corps, puis tous les assistants avec la main ; ou avec des pelles. Après cela ils se retirent marchant à reculons ; et avant de sortir du cimetière, ils arrachent par trois fois quelque brin d’herbe, et la jettent derrière leur dos, en disant : Ils fleuriront comme l’herbe de la terre (Psaumes 16.16).

Je ne remarque dans l’antiquité aucun exemple d’épitaphe mise sur les tombeaux des Hébreux ; car celui qu’on nous rapporte d’Adoniram, trouvé en Espagne, et quelques autres de pareille autorité, nous n’y faisons aucune attention. L’on érigeait les monuments en mémoire d’un roi, d’un héros, d’un prophète, d’un guerrier : le tombeau parlait assez, et la mémoire de la personne se perpétuait parmi le peuple. Le roi Josias, détruisant les tombeaux des faux prophètes de Baal et des prêtres des veaux d’or, remarqua, parmi les autres, une pierre sépulcrale (2 Rois 23.17) qu’on lui dit être le tombeau de cet homme de Dieu qui vint annoncer à Jéroboam qu’un roi nommé Josias brûlerait sur l’autel de Béthel les os des faux prophètes (1 Rois 13.2). Il n’y avait donc point d’épitaphe. Absalon donna à son tombeau le nom de Main d’Absalon (2 Samuel 18.18). Les tombeaux des rois, qui étaient dans des cavernes creusées dans le roc n’étaient pas sans doute ornés d’épitaphes.

Voici la formule des épitaphes des Juifs d’aujourd’hui : Cette pierre est placée à la tête de N., fils de N., qui a été enterré le jour de N., l’an N. Qu’il repose dans le Jardin d’Éden, avec tous les justes qui y sont dès le commencement : Amen, Amen, Sélah. Ou bien : Que son âme soit liée dans le Jardin d’Éden : Amen, Amen, Amen, Sélah. Ou autrement : Ce monument, ou cette colonne est érigée près la tête de très-illustre, très-sainte et très-pure vierge Rébecca, fille du sieur Samuel, lévite, qui est morte en bonne réputation le N. du mois N., l’an N. Que son âme soit liée dans le Jardin d’Éden :Amen, Amen, Amen, Sélah. Mais ces formules ne sont ni anciennes, ni uniformes. Benjamin de Tudèle dit que, voyageant par la Palestine, il remarqua cette inscription sur le tombeau d’Abraham : Ici est le sépulcre d’Abraham, notre bienheureux père, Mais tout cela est fait après coup. Voyez ci-devant Sépulcre, et notre dissertation sur les funérailles des Hébreux, imprimée à la tête de l’Ecclésiastique, et le livre de Jean Nicolaï : de Sepulcris Hebrœorton, et ci-devant ce que nous avons dit sur l’article Morts.

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