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Heve
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

Ou Ève (1). C’est le nom de la première femme. Hevah en hébreu dérive de la même racine (Genèse 3.20) que haïm, la vie ; parce qu’elle devait être la mère de tous les vivants. Le Seigneur, ayant créé l’homme, dit (Genèse 2.18-20) : Il n’est pas bon que l’homme soit seul ; faisons-lui une aide semblable à lui. Il lui envoya donc un profond sommeil ; et pendant qu’il était endormi, Dieu tira une de ses côtes, en forma une femme, et l’amena à Adam. Alors Adam dit : Voilà maintenant l’os de mes os, et la chair de ma chair. Celle-ci s’appellera Ischa, comme qui dirait humaine [Voyez Femme, note], parce qu’elle a été tirée de l’homme. C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme ; et ils seront deux en une même chair. On croit qu’elle fut créée le même jour qu’Adam, c’est-à-dire, le sixième jour de la création, et après qu’Adam eut fait la revue des animaux que Dieu avait créés, et sur lesquels le Seigneur lui avait donné l’empire et l’inspection.

Adam et Ève furent placés dans le paradis terrestre aussitôt après leur création, et Dieu leur défendit de toucher à un certain fruit, avec menace de les faire mourir, s’ils y touchaient. Ils y demeurèrent quelques jours dans la simplicité et l’innocence ; étant nus, sans rougir de leur nudité. Mais le démon, jaloux de leur bonheur, prit la forme d’un serpent, ou plutôt se cacha dans un serpent réel, et s’étant présenté devant Ève, il lui dit (Genèse 3.1-2) : Pourquoi Dieu ne vous a-t-il pas permis de manger indifféremment de tous les fruits de ce jardin ? Ève lui répondit que Dieu leur avait défendu de toucher à un seul arbre, de peur qu’ils ne mourussent, que pour tout le reste, ils en mangeaient librement. Mais le serpent répliqua : Assurément vous ne mourrez point ; car Dieu sait qu’aussitôt que vous aurez mangé de ce fruit, vos yeux seront ouverts, et vous serez comme des dieux, par la connaissance que vous aurez du bien et du mal. Ainsi il voulait faire passer Dieu pour un menteur, ou un jaloux, qui enviait à sa créature une perfection et un bonheur, ou qui la menaçait d’un mal dont elle n’avait rien à craindre.

La femme, voyant donc que ce fruit était bon à manger, et beau à la vue, en prit, en mangea, et en donna à son mari, qui en mangea aussi. Alors leurs yeux furent ouverts, et Es reconnurent qu’ils étaient nus. Ils couvrirent leur nudité avec des feuilles de figuier, et allèrent se cacher au fond du bois. Dieu les y alla trouver, leur reprocha leur désobéissance, et il dit à Ève : Je multiplierai vos douleurs et vos grossesses ; vous mettrez au monde vos enfants dans la douleur, et vous serez sous la puissance de l’homme. Et à Adam : Parce que tu as écouté la voix de ta femme, etc la terre est maudite,… tu mangeras ton pain à la sueur de ton front. Après cela Dieu donna à Adam et Ève des habits de peaux, et les chassa hors du Paradis. Or Adam connut sa femme Ève, et elle conçut et enfanta Caïn (Genèse 4.1-3), en disant : J’ai possédé un homme par le secours de Dieu. Elle eut ensuite Abel et quelques filles, et enfin Seth ne nomme que ces trois fils d’Adam et d’Ève ; mais elle témoigne assez qu’ils en eurent beaucoup d’autres, lorsqu’elle dit qu’ils eurent des fils et des filles (Genèse 5.4). On ne sait pas l’année de la mort d’Ève. On présume qu’elle mourut vers le même temps qu’Adam, environ la neuf cent-trentième année du monde.

Les mahométans prétendent qu’Ève donna à son premier fils le nom de Abd-al-hareth, c’est-à-dire, serviteur, ou fils d’un jardinier, ou d’un laboureur, parce qu’Adam fut le premier qui cultiva la terre, suivant ce qui est dit dans la Genèse (Genèse 2.15), qu’il fut mis dans le Paradis pour le cultiver. Ils révèrent encore aujourd’hui la grotte d’Ève, dans la montagne de Gérahem, à trois mille pas de la Mecque. La montagne d’Arafat, à dix milles de la Mecque, a tiré son nom de la rencontre d’Adam et d’Ève qui se reconnurent et se rencontrèrent, disent-ils, en cet endroit, après une longue absence. Ils croient que le tombeau de la première femme est à Gidda, sur la mer Rouge, à deux journées de la Mecque, dont elle est pour ainsi dire le port. Ils tiennent de plus que-les eaux du déluge commencèrent a sourdre, ou à sortir du four d’Ève, qui s’était conservé jusqu’alors, et avait passé de main en main jusqu’à Noé.

Les Orientaux ont rendu quelques honneurs à Adam et à Ève, comme à des bienheureux. Les Grecs en font la fête ou la mémoire le 19 de novembre. Les Maronites en font aussi commémoration dans leur liturgie. Pierre Natal a mis Adam et Ève à la tête des saints-du premier âge du monde, dans la semaine que nous appelons la septuagésime, après le 22 de janvier. On peut voir l’article d’Adam. Saint Épiphane dit que les Gnostiques avaient composé un écrit sous le nom d’Évangile d’Ève, dans lequel on lisait mille choses honteuses. D’autres hérétiques disaient qu’Ève avait eu Caïn et Abel, non de son mari, mais d’un commerce monstrueux avec le démon. Les Manichéens soutenaient qu’Adam et Ève n’avaient pas été créés de Dieu, mais qu’ils tiraient leur origine de Sada et Nebroda, princes de l’impureté. Les Brachmanes des Indes croient que le péché du premier homme consiste dans la connaissance charnelle qu’il eut d’Ève, que le démon lui présenta. Voyez Fabricius, Apocryph. V et Test page 101, 102. On parle aussi d’un livre intitulé : Les Prophéties d’Ève, qu’on prétend avoir été composé par l’ange Raziel, précepteur d’Adam.

(1) C’est par abus qu’on écrit : Ève ; il faudrait écrire et prononcer Hève, car il y a une aspiration.