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Frontaux
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

C’est un carré de peau de veau dure qui renferme quatre morceaux de parchemin, sur lesquels les Juifs écrivent quatre passages de la loi, et qu’ils mettent sur le front. Voici comme Léon de Modène décrit les frontaux : On écrit sur quatre morceaux de parchemin, avec de l’encre faite exprès et en lettres carrées, ces quatre passages, un sur chaque morceau :

1° Consacrez-moi tous les premiers-nés des hommes, etc depuis le commencement du chapitre 13 de l’Exode jusqu’au v. 10.

2° Depuis le v. 11 du même chapitre jusqu’au v. 16 : Et lorsque le Seigneur vous aura fait entrer dans le pays des chananéens, et ce qui suit.

3° Depuis le v. 4 du chapitre 6 du Deutéronome : Écoutez, Israël ; le Seigneur votre Dieu est le seul Dieu ; et ce qui suit jusqu’au v. 9 du même chapitre.

4° Depuis le v. 13 du chapitre 11 du même livre : Si vous obéissez à tous les commandements que je vous fais, etc., jusqu’à la fin du v. 21 du même chapitre ; et tout cela pour obéir à ces paroles de Moïse (Exode 13.16) : Ces commandements seront comme un signe dans votre main, et comme quelque chose qui est pendu entre vos yeux, afin que sous vous en souveniez.

On attache ensemble ces quatre petits morceaux de parchemin et on en forme un carré sur lequel on écrit la lettre schin, puis on met par-dessus un petit carré de peau de veau dure, d’où il sort deux courroies larges d’un doigt, et longues d’une coudée et demie ou environ. Ce carré se met sur le milieu du front, et les courroies, après avoir ceint la tête, font un nœud en forme de lettre, puis viennent se rendre devant l’estomac : on l’appelle Teffila-Schel-Rosch, ou tephila de la tête. Les plus dévots le mettent non-seulement à la prière du matin, mais aussi à celle du midi ; mais le commun des Juifs ne le met qu’à la prière du matin. Il n’y a que le chantre de la synagogue qui est obligé de le porter à midi comme au matin.

On demande si l’usage des frontaux et des autres phylactères a été ordonné à Moïse, comme une observation littérale et d’obligation ; en sorte que, de tout temps, les Hébreux les aient portés ou aient été obligés de les porter. Les sentiments sont partagés sur cela. Ceux qui en croient l’usage d’obligation rigoureuse se fondent sur le texte de Moïse, qui en parle d’une manière positive, et comme des autres préceptes de la loi ; il veut qu’on écrive les commandements de Dieu sur les portes des maisons ; qu’on les écrive comme un signe sur ses mains, et comme un ornement sur son front (Exode 13/16). S’il y a obligation d’écrire ces commandements sur sa porte, comme le texte l’insinue, il n’y en a pas moins pour les écrire sur ses mains et sur son front. Du temps de Jésus-Christ l’usage en était tout commun, non-seulement dans la Judée, mais aussi parmi les Juifs indiens, perses et babyloniens, selon saint Jérôme. Et longtemps auparavant, les docteurs que le grand prêtre Eléazar envoyait à Ptolémée Philadelphe, roi d’Égypte, parlaient de ces phylactères comme d’une chose reçue de tout temps parmi eux, et en rapportaient le commencement à Moïse.

On ajoute, pour confirmer ce sentiment, que, du temps de Moïse, les païens étaient chargés d’amulettes ou de préservatifs, remplis de superstitions, et même de choses sales et honteuses ; que, pour guérir son peuple de ces mauvais usages, ou pour le prévenir et l’en garantir, il lui ordonna de porter sur leurs mains et sur leurs fronts des phylactères ou préservatifs d’une autre sorte, c’est-à-dire, les paroles saintes de ses ordonnances.

D’autres soutiennent, au contraire, que les préceptes de Moïse, qui parlent de ces écritures sur les portes, des signes sur la main, et des frontaux entre les yeux, se doivent prendre dans un sens allégorique et figuré, pour dire qu’il faut être fort soigneux à conserver le souvenir de la loi de Dieu, et à observer ses commandements ; qu’il faut les avoir toujours présents, et ne les oublier jamais. Il est certain qu’avant la captivité de Babylone on n’en voit pas la moindre trace dans l’histoire des Juifs. Jamais les prophètes n’ont invectivé contre l’omission ou la négligence de cette pratique, jamais il n’en a été question dans les réformes des mœurs des anciens Hébreux. On ignore le temps auquel on a écrit l’ouvrage qui contient l’histoire de la prétendue version des Septante et de la mission des soixante-dix Docteurs, par le grand prêtre Eléazar ; mais les savants sont aujourd’hui assez d’accord que toute cette histoire est faite à plaisir, et qu’elle n’est guère plus ancienne que Josèphe et Philon l’usage reçu et presque général dans tout l’Orient, du temps de Notre-Seigneur, de porter des phylactères et des frontaux, ne décide ni pour l’antiquité de cette pratique, ni pour son utilité. Jésus-Christ ne l’a pas absolument condamnée, elle est d’elle-même fort indifférente ; mais il en a condamné l’abus, qui consistait en ce que les Pharisiens les portaient avec affectation, et plus grands que le commun des Juifs. Encore aujourd’hui, les Juifs caraïtes, qui ne s’attachent qu’à la lettre de la loi et méprisent les vaines traditions des Pharisiens, appellent les autres Juifs des fines bridés, parce qu’ils portent de ces téphilims et de ces frontaux). On peut voir ci-après phylactères.

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