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Jérémie 14
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

Plan du commentaire biblique de Jérémie 14

À l’occasion de sécheresses prolongées (chapitres 14 et 17)

Le prophète essaie d’intercéder pour Juda ; le Seigneur repousse cette tentative (Jérémie 14.1 à 15.9) ; plaintes amères de Jérémie ; l’Éternel redresse l’esprit du prophète et lui donne des directions pour l’avenir (Jérémie 15.10 à 17.4) ; enfin le prophète tire au grand jour la cause cachée de la ruine ; il prie pour sa propre délivrance ; l’Éternel rappelle au peuple le chemin du salut (Jérémie 17.5-27).

Le trait caractéristique de la conduite de Jérémie dans cette portion de son livre, c’est qu’il conteste avec Dieu comme avec un juge qui paraît tour à tour indifférent et implacable. Jérémie avait invoqué les jugements de Dieu sur les persécuteurs des justes ; ici il adresse un appel ardent, mais inutile, à la miséricorde de Dieu en faveur des rebelles de son peuple. Le beau rôle, dans cette double lutte entre l’homme et Dieu, semble appartenir à l’homme. Mais la justice de Dieu, soit qu’elle diffère ses jugements, soit qu’elle les déchaîne sans miséricorde, aura toujours raison contre la raison humaine, car elle n’est que la sainteté de Dieu en action dans l’histoire.

1 Parole de l’Éternel qui fut adressée à Jérémie à l’occasion des sécheresses.

Des sécheresses. Le pluriel indique qu’il s’agit ici de sécheresses prolongées et restées célèbres, comme le tremblement de terre mentionné Amos 1.1 ; Zacharie 14.5. Voir la mention de ce même fléau Jérémie 3.3 ; Jérémie 5.24-25 ; Jérémie 12.4. Il est inutile de rechercher la date de ce morceau, d’autant plus que tous ces discours, prononcés en diverses circonstances, ne furent rédigés que plus tard dans la forme sous laquelle nous les possédons ici (chapitre 36).

2 Juda est en deuil ; ses portes languissent ; elles gisent en vêtements noirs sur la terre, et le cri de Jérusalem s’élève.

Tableau de la sécheresse qui étend ses ravages sur les villes et les campagnes, sur les hommes et les animaux.

Les portes ; la partie mise pour le tout : les villes et leurs habitants. La porte de la ville est en Orient le lieu où les hommes se rassemblent ; Ruth 4.1 ; 1 Samuel 4.18 ; Job 29.7.

Gisent en vêtements noirs… littéralement : sont noires jusqu’en terre. Dans cette image sont réunies la couleur et l’attitude du deuil. Les Juifs et les Orientaux s’assoient sur le sol, dans le deuil ; Ésaïe 3.26 ; Job 2.13.

Le cri… Les cris seuls montent, tout le reste est gisant à terre.

3 Les grands parmi eux envoient les petits chercher de l’eau ; ils vont aux citernes, ne trouvent pas d’eau, reviennent avec des vases vides ; ils sont confus, honteux, et ils se couvrent la tête.

Se couvrent la tête : signe d’extrême tristesse ; 2 Samuel 15.30 ; 2 Samuel 19.4. Il y a égalité dans la misère.

4 À cause du sol crevassé, parce qu’il n’y a pas eu de pluie sur la terre, les laboureurs sont confondus, ils se couvrent la tête.

Sol crevassé… : par suite de la sécheresse. Le mot hébreu comporte et le sens moral (consterné) et le sens physique (crevassé).

5 Car même la biche dans la campagne met bas et abandonne ses petits, parce qu’il n’y a pas d’herbe ;

La biche. La tendresse bien connue de cet animal pour ses petits est elle-même en défaut.

6 les onagres se tiennent sur les hauteurs, ils aspirent l’air comme des dauphins ; leurs yeux s’éteignent, parce qu’il n’y a pas de verdure.

Sur les hauteurs, où ils ont chance de trouver encore un peu d’air frais.

Comme des dauphins… Le terme employé signifie ordinairement chacal ; mais dans quel but Jérémie comparerait-il les onagres aux chacals ? Il faut donc appliquer ici cette expression à quelque habitant des eaux, crocodile, dauphin ou autre, qui a l’habitude d’aspirer l’air de temps en temps au-dessus de l’eau.

7 Si nos péchés témoignent contre nous, ô Éternel, agis pour l’amour de ton nom ! Car nos révoltes se sont multipliées ; nous avons péché contre toi.

Première intercession du prophète en faveur de son peuple : Si tu ne trouves plus de raisons en nous pour nous pardonner, cherches-en du moins en toi-même.

L’honneur du nom de l’Éternel ne serait-il pas compromis auprès des Gentils, si son peuple périssait ? Ne voulant plus délivrer, Dieu ne serait-il pas suspect de ne pas le pouvoir ? Le Dieu d’Israël serait-il pour sa propre terre comme un homme en voyage qui ne porte qu’un faible intérêt aux endroits où il passe une nuit.

8 Ô toi, l’espoir d’Israël, son libérateur au temps de la détresse, pourquoi serais-tu comme un étranger dans le pays, comme un voyageur qui y dresse sa tente pour la nuit ? 9 Pourquoi serais-tu comme un homme éperdu, comme un héros impuissant pour délivrer ? Et pourtant tu habites au milieu de nous, ô Éternel ; ton nom est invoqué sur nous, ne nous délaisse pas ! 10 Voici ce que dit l’Éternel à ce peuple : C’est ainsi qu’ils aiment à courir çà et là sans retenir leurs pieds ; or, l’Éternel ne met plus son plaisir en eux ; maintenant il va se souvenir de leurs iniquités, et châtier leurs péchés.

Réponse de Dieu : Ils sont punis par où ils ont péché. S’ils sont réduits à errer çà et là pour trouver de l’eau, c’est parce qu’ils ont couru de tous côtés après les cultes païens et les mœurs étrangères (Jérémie 2.25). Tel est le sens du : c’est ainsi que…, qui a embarrassé plusieurs interprètes.

Remarquons que la raison avancée par le prophète, l’honneur de Dieu, n’est pas même prise en considération dans cette réponse. Les intérêts de Dieu ne sauraient contrarier les exigences de sa justice.

11 Et l’Éternel me dit : N’intercède pas en faveur de ce peuple ;

N’intercède pas : même défense que Jérémie 7.16 et Jérémie 11.4. Leurs retours vers le bien et leurs observances rituelles ne seront qu’apparences et mensonges.

Épée, famine, peste : les trois fléaux de Dieu nommés déjà Lévitique 26.25 ; 2 Samuel 24.13.

12 quand ils jeûneront, je n’écouterai pas leurs supplications ; quand ils m’offriront des holocaustes et des offrandes, je ne les agréerai pas ; je vais les détruire par l’épée, la famine et la peste. 13 Et je dis : Ah ! Seigneur, Éternel, voici : ce sont les prophètes qui leur disent : Vous ne verrez pas d’épée, et vous n’aurez pas la famine, car je vous donnerai dans ce lieu-ci une paix assurée.

Le prophète revient à la charge. Il a encore une circonstance atténuante à alléguer en faveur du peuple : ils ont été séduits par les faux prophètes qui leur ont promis la prospérité sur cette voie.

14 Et l’Éternel me répondit : C’est le mensonge que ces prophètes prophétisent en mon nom. Je ne les ai pas envoyés, je ne leur ai rien commandé, et je ne leur ai point parlé ; visions de mensonge, divinations, vanité, imposture de leurs propres cœurs, voilà leurs prophéties.

Cette excuse est aussi repoussée. On ne devait pas écouter ces prophètes de mensonge et sans mandat.

15 C’est pourquoi l’Éternel parle ainsi au sujet des prophètes qui prophétisent en mon nom sans que je les aie envoyés et qui disent : L’épée et la famine ne seront pas dans ce pays. C’est par l’épée et la famine qu’ils périront, ces prophètes-là,

Cette prédiction contre les faux prophètes ne leur est pas adressée à eux-mêmes. Car son but n’est que de renforcer la menace faite au peuple qui se laisse séduire par eux. Sens : Si tel est le sort de ceux à qui vous vous confiez, quel sera le vôtre ?

Eux, leurs femmes… Tous ont participé au crime ; Jérémie 7.18.

Je verserai. Cette méchanceté qu’ils ont fait monter jusqu’à moi, je la reverserai sur eux sous forme de châtiments.

16 et les gens auxquels ils prophétisent seront jetés dans les rues de Jérusalem par la famine et par l’épée, et personne ne leur donnera la sépulture, à eux, à leurs femmes, à leurs fils et à leurs filles, et je verserai sur eux leur méchanceté. 17 Et tu leur diras cette parole : Mes yeux se fondront en larmes nuit et jour et ne cesseront point. Car un grand désastre va frapper la vierge, fille de mon peuple ; c’est une plaie très douloureuse.

On a supposé qu’il y avait ici une lacune dans le texte, parce que la suite de la phrase semble ne pas répondre au commencement : Tu leur diras cette parole. C’est bien mal comprendre ce beau passage : Dis-leur que, ne pouvant plus intercéder pour eux, il ne te reste plus qu’à pleurer sur eux. Luc 19.41.

18 Si je vais dans les champs, voici des hommes percés par l’épée ; si j’entre dans la ville, voilà des gens malades de faim. Car même le prophète, même le sacrificateur, vont mendier dans un pays, et ils ne savent pas lequel.

Le prophète, le sacrificateur : l’élite du peuple. Si ceux-là sont réduits à la mendicité, qu’en est-il des autres ?

Dans un pays… Double mal : ils sont forcés d’aller mendier le pain de l’étranger ; et ils ne savent pas même de quel côté se tourner pour cela.

19 As-tu décidément rejeté Juda ? Ton âme a-t-elle pris Sion en dégoût ? Pourquoi nous as-tu frappés sans qu’il y ait pour nous de remède ? Nous attendons la paix, et rien de bon ne vient, le temps de la guérison, et voici l’épouvante.

Troisième tentative d’intercession et troisième refus de Dieu (14.19 à 15.9)

Dans ses deux intercessions précédentes, Jérémie en avait appelé successivement aux intérêts de Dieu et de sa gloire, qui lui commandaient de pardonner et aux circonstances qui atténuaient la faute d’Israël. Dans cette troisième prière, il a recours à un moyen suprême. Excuser à tout prix le coupable peut avoir pour effet d’accroître l’irritation du juge ; mais résistera-t-il à une confession complète de la faute, qui donne pleinement raison à sa colère elle-même ? Résistera-t-il surtout au souvenir de ses propres bienfaits ? Et pourtant cette dernière tentative reste aussi infructueuse que les précédentes.

L’attente si cruellement frustrée, décrite dans ce verset, paraît nous reporter aux temps qui suivirent la mort de Josias et la défaite de Méguiddo.

20 Ô Éternel, nous connaissons notre méchanceté, le péché de nos pères ; car nous avons péché contre toi. 21 Pour l’amour de ton nom, ne dédaigne pas, ne profane pas le trône de ta gloire ; souviens-toi, ne brise pas ton alliance avec nous !

Ne profane pas ; littéralement : Ne traite pas… comme choses vaines, ou abandonnées à la merci des événements.

Le trône de ta gloire : le sanctuaire de Dieu à Jérusalem.

22 Parmi les vaines idoles des nations, en est-il qui fassent pleuvoir ? Est-ce le ciel qui donnera les pluies ? N’est-ce pas toi, ô Éternel, notre Dieu ? Et nous espérons en toi, car c’est toi qui as fait toutes ces choses.

Ces mots se rapportent à la sécheresse.

Est-ce le ciel qui donnera les pluies ? Bien des gens se l’imaginent, même en pays chrétien.

Comment Dieu ne nous secourrait-il pas, puisque nul autre ne peut le faire ?