Appuyez sur Entrée pour rechercher ou ESC pour annuler.

Exode 34
Bible Annotée (interlinéaire)

Verset à verset  Double colonne 

1 Et l’Éternel dit à Moïse : Taille-toi deux tables de pierre comme les premières, et j’écrirai sur ces tables les paroles qui étaient sur les premières tables que tu as brisées.

Le rétablissement de l’alliance

Versets 1 à 7 — L’apparition divine

La rupture des premières tables avait signalé celle de l’alliance du Sinaï ; le rétablissement de ces tables figure celui de l’alliance.

Taille-toi deux tables. Il est convenable que Moïse répare lui-même ce qu’il a fait en brisant les tables précédentes ; c’est ce que font sentir les mots : que tu as brisées.

2 Sois prêt pour demain matin ; monte le matin au mont Sinaï et présente-toi là devant moi au sommet de la montagne.

Au sommet de la montagne. Sur le rocher que Dieu lui avait indiqué Exode 33.21

3 Personne ne montera avec toi. Que personne même ne se montre nulle part sur la montagne. Que même ni menu ni gros bétail ne paisse du côté de cette montagne !

Personne ne montera. La montagne redevient un Lieu très saint, par la présence de l’Éternel, comme au commencement (Exode 19.12-13).

4 Et Moïse tailla deux tables de pierre comme les premières, et le lendemain de bonne heure il monta sur le mont Sinaï, comme l’Éternel le lui avait ordonné, et il prit en sa main les deux tables de pierre. 5 Et l’Éternel descendit dans la nuée, et se tint là avec lui et prononça le nom de l’Éternel.

D’après plusieurs interprètes, ce serait Moïse qui serait le sujet des verbes il se tint là et il prononça.

6 Et l’Éternel passa devant lui et prononça [ces paroles] : L’Éternel, l’Éternel, Dieu compatissant et miséricordieux, lent à la colère et abondant en grâce et en vérité ;

Le récit dit uniquement ce qu’entendit Moïse, car pendant que l’Éternel passait, il ne pouvait rien voir (Exode 33.22).

C’est Dieu qui proclame et qui est proclamé. L’objet de la proclamation est avant tout ce que Dieu avait annoncé à Moïse, sa bonté, qui compatit, pardonne et supporte, mais qui n’exclut pas la justice, qui poursuit le péché et punit le pécheur.

7 qui conserve sa grâce à mille générations ; qui pardonne le crime, la défection et le péché ; mais il ne les laisse pas impunis, poursuivant l’iniquité des pères sur les fils et sur les fils des fils, sur la troisième et la quatrième génération.

À mille générations…, sur la troisième et quatrième génération. Voir à Exode 20.5-6.

8 Aussitôt Moïse s’inclina contre terre et se prosterna,

L’alliance rétablie (8-28)

À l’ouïe de la voix divine, Moïse se prosterne et adore.

9 et il dit : Ah ! Si j’ai trouvé grâce à tes yeux, Seigneur, que le Seigneur daigne marcher au milieu de nous, car c’est un peuple au cou roide que celui-ci, et pardonne nos crimes et nos péchés et fais de nous ton héritage !

Mais il n’oublie pas un instant sa tâche et son peuple : il recommence aussitôt à intercéder et sa prière n’est pas une simple répétition de la précédente, par laquelle il avait réclamé à deux reprises le retour de Jéhova au milieu de son peuple.

Les mots : Car c’est un peuple au cou roide, révèlent sa pensée. Il s’agit non du présent, mais de l’avenir : Que malgré les fautes qu’un tel peuple ne manquera pas de commettre encore, tu marches et continues à marcher avec nous, nous pardonnant, nos crimes.

Et fais de nous ton héritage : ta propriété inaliénable.

10 Il répondit : Voici je fais une alliance : En présence de tout ton peuple je ferai des miracles qui n’ont encore eu lieu dans aucun pays et chez aucune nation, et tout le peuple qui t’entoure verra l’œuvre de l’Éternel ; car c’est une chose redoutable que celle que je fais avec toi.

Le nouveau pacte (10-26)

On a dit : Mais l’alliance n’était-elle pas conclue depuis longtemps ? Oui, mais n’avait-elle pas été rompue ? Ce pacte nouveau, par lequel Dieu la rétablit, repose sur les mêmes bases fondamentales que le précédent, mais les présente à bien des égards sous un jour nouveau. Il renferme deux choses : ce que Dieu promet de faire (versets 10 et 11) et ce qu’il attend du peuple (versets 12 à 26).

Versets 10 à 11 — Ce que Dieu promet

Je ferai des miracles. Il s’agit de ceux par lesquels Dieu introduira le peuple dans la terre promise.

Une chose redoutable : l’épouvantable destruction des nations cananéennes, prélude de celle des Israélites eux-mêmes s’ils deviennent cananéens par leurs mœurs.

11 Prends garde à ce que je t’ordonne aujourd’hui. Je vais chasser de devant toi l’Amorrhéen, le Cananéen, le Héthien, le Phérézien, le Hévien et le Jébusien. 12 Garde-toi de traiter avec les habitants du pays contre lequel tu marches, de peur qu’ils ne deviennent un piège au milieu de vous.

Ce que Dieu demande (12-26)

On a cherché à trouver ici un décalogue et l’on a prétendu y voir une autre forme de celui d’Exode chapitre 20, qui aurait été tirée d’un document différent. Mais les interprètes ne se sont point encore mis d’accord sur la répartition en dix des prescriptions suivantes ; et cette supposition d’un décalogue qui ne serait qu’une autre forme du précédent, est incompatible avec tout le cours des faits tel qu’il vient d’être raconté. À ce moment solennel du rétablissement de l’alliance on s’explique fort bien une instruction qui en inculque de nouveau les bases et qui est en rapport plus direct avec la situation actuelle. Et d’abord, ce qu’Israël devra éviter (versets 12 à 17).

Cette recommandation, en relation directe avec la promesse précédente du secours divin dans la conquête de Canaan, répète et développe celle de Exode 33.14.

13 Au contraire, leurs autels, vous les renverserez ; leurs colonnes, vous les briserez ; leurs idoles, vous les abattrez ;

Leurs idoles, littéralement leurs Astartés. Ce sont les monuments élevés à la déesse de ce nom (la divinité féminine des Phéniciens). C’étaient ordinairement des troncs plantés en terre, figurant la force productive de la nature. Comparez Juges 6.25

14 car tu ne te prosterneras point devant un autre dieu, parce que l’Éternel se nomme le Jaloux ; il est un Dieu jaloux.

Reproduction sommaire du premier et du second commandement (Exode 20.3-6).

15 Ne traite donc point avec les habitants du pays ; quand ils se prostituent à leurs dieux et qu’ils font des sacrifices à leurs dieux, ils t’inviteraient et tu mangerais de ce qu’ils ont sacrifié ;

Cette défense est entièrement nouvelle. Le récit Nombres 25.1 et suivants montre combien le danger était réel.

Quand ils se prostituent… Ce mot est pris au sens moral et il désigne le péché de l’idolâtrie. Dieu, l’époux d’Israël, envisage l’adoration d’autres divinités comme un adultère de la part de son peuple. Cette expression rappelle en même temps l’étroite relation qu’il y avait entre tous ces cultes idolâtres et la pratique de l’impureté. Comparez Juges 3.6

16 et tu prendrais de leurs filles pour tes fils, et leurs filles, se prostituant à leurs dieux, entraîneraient tes fils à se prostituer aussi à eux. 17 Tu ne te feras pas de dieu de métal.

Pas de dieu de métal : expression rappelant le péché récent d’Israël.

Jusqu’ici Dieu a parlé au peuple, en vue de son entrée prochaine en Canaan, de ce dont il devra surtout se garder : ou de ce qui pourrait le conduire à l’idolâtrie. Maintenant Dieu lui inculque la manière dont il devra le servir dans cette terre promise (versets 18 à 26).

18 Tu observeras la fête des pains sans levain comme je l’ai prescrit. Tu mangeras pendant sept jours des pains sans levain au temps fixé du mois d’Abib, car c’est au mois d’Abib que tu es sorti d’Égypte.

La célébration régulière de la fête de Pâques ; comparez Exode 23.15. Cette fête est mise en tête, comme la principale des fêtes annuelles. Les deux autres fêtes viendront plus tard.

19 Tout premier produit du sein maternel m’appartient, et aussi tout premier produit mâle de ton bétail, bœuf ou menu bétail

L’offrande des premiers-nés, qui, comme Exode 13.12, est rattachée étroitement à la fête de Pâques. Voir l’explication Exode 13.12-13 et Exode 23.15

20 et le premier produit de l’âne, tu le rachèteras par une pièce de menu bétail, et si tu ne le rachètes pas, tu lui casseras le col. Tout premier-né de tes fils, tu le rachèteras, et l’on ne paraîtra pas devant moi les mains vides.

L’on ne paraîtra pas : pour célébrer cette fête.

Devant moi : dans le lieu où je serai adoré.

21 Tu travailleras six jours, mais le septième jour tu chômeras ; pendant le labour et la moisson tu chômeras.

La loi du sabbat, comme seconde loi rituelle fondamentale. Au commandement sabbatique, promulgué Exode 20.8, est ajouté un détail relatif à la vie prochaine du peuple en Canaan : le repos sabbatique ne devra subir aucune interruption, même en temps de labour et de récolte.

22 Tu célébreras aussi la fête des Semaines, la fête des premiers produits de la moisson de froment, et la fête de la récolte à la fin de l’année.

Les deux autres grandes fêtes : celle de Pentecôte, ou des Semaines et celle des Tabernacles, ou des récoltes achevées ; comparez Exode 23.16, note. Le nom de fête des Semaines provenait de ce qu’on comptait 7 semaines (49 jours) depuis la Pâque ; le cinquantième jour était la Pentecôte.

23 Trois fois par an tous les mâles d’entre vous paraîtront devant le Souverain, l’Éternel, Dieu d’Israël ;

Les trois pèlerinages annuels (Exode 23.17). Cette institution suppose celle d’un sanctuaire unique. Ici est ajoutée cette promesse remarquable : qu’aucune des nations voisines n’osera profiter de ces temps de pèlerinage pour envahir le territoire d’Israël, tant Dieu aura agrandi le domaine du peuple ; la crainte de la puissance d’Israël les tiendra en respect. Comparez Exode 23.27

24 car je déposséderai des nations devant toi et je te donnerai un large territoire, et nul ne convoitera ton pays quand tu monteras pour paraître devant l’Éternel ton Dieu trois fois par an. 25 Tu ne mêleras pas le sang de mon sacrifice à du pain levé et le sacrifice de la fête de Pâques ne sera pas gardé jusqu’au matin. 26 Tu apporteras les prémices des premiers produits de ton sol à la maison de l’Éternel ton Dieu. Tu ne feras pas bouillir un chevreau dans le lait de sa mère.

La loi des prémices ; voir à Exode 23.16

Il semble que la défense relative au chevreau qui ne doit pas être cuit dans le lait de sa mère, soit rappelée ici pour faire comprendre que dans la loi de l’Éternel tout est sacré, depuis le commandement fondamental, celui du monothéisme, jusqu’au précepte en apparence le moins important, ou, comme a dit Jésus, jusqu’au plus petit trait de lettre.

Pour l’explication, voir à Exode 23.19

27 Et l’Éternel dit à Moïse : Écris, toi, ces paroles-là ; car c’est d’après ces paroles-là que j’ai fait alliance avec toi et avec Israël.

Conclusion (27-28)

Écris, toi, ces paroles-là. Cet ordre ne peut porter que sur les paroles versets 10 à 26, base de l’alliance que l’Éternel traite de nouveau avec son peuple à la suite de la rupture de l’ancienne. Ce n’est point ici en effet une répétition du Livre de l’alliance, c’en est un abrégé fait en rapport direct avec l’établissement d’Israël en Canaan.

Le pronom toi, ajouté à l’impératif écris, distingue expressément la rédaction dont il s’agit ici de celle dont il sera question dans le verset suivant.

28 Et il fût là avec l’Éternel quarante jours et quarante nuits, sans manger ni boire, et l’Éternel écrivit sur les tables les paroles de l’alliance, les dix paroles.

Quarante jours et quarante nuits. Ces mots n’autorisent point à identifier ce séjour avec celui dont il avait été parlé Exode 24.18. Les deux faits sont expressément distingués Deutéronome 9.9 et Exode 10.4-5, aussi bien qu’ils le sont dans notre narration.

Sans manger ni boire. Cette circonstance n’a pas été mentionnée dans le récit Exode 24.18 mais comparez Deutéronome 9.9

L’Éternel écrivit. Il y a littéralement il écrivit. Mais le verset 1 ne laisse aucun doute relativement au sujet du verbe. C’est ce que confirme Deutéronome 10.2-4

Quant aux expressions : les paroles de l’alliance, les dix paroles, le même verset 1 ne permet de les rapporter qu’aux dix commandements promulgués sur Sinaï (chapitre 20). Autrement le récit, que le verset 1 avait commencé de cette manière (J’écrirai…), resterait incomplet et sans conclusion.

29 Et comme Moïse descendait du mont Sinaï, les deux tables du témoignage étaient dans la main de Moïse quand il descendait de la montagne, Moïse ne savait pas que la peau de son visage était devenue rayonnante pendant qu’il parlait avec Dieu ;

Retour de Moïse au camp (29-35)

Moïse vient d’arracher le peuple au courroux de l’Éternel, plus redoutable que celui de Pharaon. Cette lutte intense a ouvert son âme à une relation plus intime avec Dieu et les quarante jours et quarante nuits de communion directe avec Dieu, qui l’ont suivie, ont fait passer à son insu sur son visage comme un reflet de la majesté divine.

Était devenue rayonnante. Le verbe employé : projeter des rayons, vient en hébreu du mot cornes, ce qui a fait que d’anciennes versions ont traduit à tort : son front avait des cornes lumineuses.

L’apôtre Paul attribue une puissance analogue, dans le domaine spirituel, à la contemplation intérieure du Seigneur Jésus glorifié (2 Corinthiens 3.18).

30 et Aaron et tous les fils d’Israël virent Moïse, et voici la peau de son visage rayonnait et ils craignirent de s’approcher de lui.
Remplis de crainte en le voyant, Aaron et les chefs du peuple se tinrent d’abord éloignés de lui et c’est là ce qui fit que Moïse fut averti du phénomène qui s’était produit chez lui. Mais à son appel ils s’approchèrent, ainsi que le peuple (sans doute dans la personne de ses Anciens) et de la bouche de Moïse ils entendirent la répétition abrégée de la loi qu’il avait rédigée d’après l’instruction de l’Éternel (le contenu de versets 10 à 26) ; voir verset 27.

Par rapport à ce sommaire qui, comme nous l’avons vu, se rapportait tout entier et très spécialement à l’établissement du peuple en Canaan, il faut bien se rappeler que les 40 années du désert ont été un imprévu, résultant d’un nouveau péché du peuple, mais qu’au moment où nous place notre récit, cette entrée paraissait un événement très rapproché, qui devait suivre immédiatement le départ du Sinaï.

En se mettant à ce point de vue la différence entre ce nouveau pacte et le Décalogue, donné au moment de l’arrivée à Sinaï, saute aux yeux et l’on ne peut plus songer à les identifier.

31 Alors Moïse les appela, et Aaron et tous les princes de l’assemblée retournèrent vers lui, et Moïse leur parla. 32 Après cela tous les fils d’Israël s’approchèrent, et Moïse leur prescrivit tout ce que l’Éternel lui avait dit sur le mont Sinaï. 33 Et Moïse acheva de parler avec eux et se couvrit le visage d’un voile.

Se couvrit le visage…. ôtait le voile. On explique ordinairement le premier de ces actes par le désir de Moïse de faciliter ses relations avec les Israélites que la vue de son visage resplendissant aurait intimidés. Mais le premier moment de crainte était passé et Moïse venait d’avoir sans voile un long entretien avec eux. Cet emploi du voile semble donc avoir en un autre motif. Voici celui qu’indique saint Paul (2 Corinthiens 3.13) : Moïse voulait éviter que, comme l’éclat de son visage diminuait naturellement entre une visite au sanctuaire et la suivante, le peuple ne s’aperçût de cette diminution, ce qui aurait nui à son autorité. L’acte d’ôter le voile en rentrant dans le sanctuaire, acte qui avait certainement pour but de raviver l’éclat de son visage qui s’évanouissait, s’explique mieux dans l’interprétation de Paul que dans l’opinion commune.

34 Et quand Moïse entrait devant l’Éternel pour parler avec lui, il ôtait le voile jusqu’à ce qu’il sortît. Puis il sortait et disait aux fils d’Israël ce qui avait été ordonné. 35 Et les fils d’Israël voyaient le visage de Moïse dont la peau rayonnait, et Moïse remettait le voile sur son visage jusqu’à ce qu’il entrât pour parler avec l’Éternel.

Les fils d’Israël voyaient : au moment où Moïse sortait d’auprès de Dieu.

Cette description rappelle ce qui a été raconté (Exode 33.8-10) de la manière en laquelle le peuple suivait du regard son médiateur, quand il se rendait auprès de l’Éternel ou revenait d’auprès de lui.

Sur les chapitres 32 à 34

Ce morceau est l’un des passages dans lesquels la critique moderne a cru découvrir le plus grand nombre d’incohérences. On a conclu de ce fait à l’emploi par le rédacteur de trois et même de quatre documents contradictoires.

Nous ne discutons point ici la question des sources auxquelles l’auteur a puisé tout ce récit. La question littéraire est à nos yeux secondaire en comparaison de celle de la valeur historique du contenu. Or, celle-ci nous paraît suffisamment résolue par l’étude que nous venons de faire. Par l’acte d’idolâtrie grossière auquel il venait de se livrer, Israël avait rompu l’alliance qu’il avait contractée avec Dieu. Il avait perdu sa dignité de peuple de l’Éternel ; il ne méritait plus de l’avoir pour conducteur et de posséder sa Demeure au milieu de son camp. Bien plus, il avait mérité de périr. Car la peine capitale était prononcée sur le crime d’idolâtrie.

Que fait Moïse ? Par son intercession héroïque et persévérante, il reconquiert successivement toutes ces positions perdues. Le récit mentionne quatre actes d’intercession, tous suivis d’effet.

Le premier, Exode 22.11 et suivants, est celui par lequel il obtient la conservation du peuple ; Dieu ne le détruira pas pour y substituer un peuple nouveau descendant de Moïse lui-même (verset 14).

Le second acte d’intercession est raconté Exode 32.30 et suivants : l’Éternel n’abandonnera pas entièrement Israël, il lui donnera un ange pour le conduire.

Par la troisième intercession, rapportée Exode 33.12, Moïse obtient de l’Éternel qu’il retire cet arrêt de dégradation et qu’il continue à conduire lui-même le peuple en la personne de l’ange qui s’appelle sa Face (Exode 33.14).

Mais Dieu n’a rien dit encore de sa propre habitation au milieu d’Israël ; l’ordre de partir de Sinaï, donné déjà deux fois (Exode 32.34 et Exode 33.1-3), subsiste encore et il est incompatible avec la construction du sanctuaire dont Dieu a montré le modèle à Moïse. La réhabilitation d’Israël ne sera complète que lorsque l’ordre du départ immédiat aura été retiré et la permission de construire le sanctuaire rendue. C’est là l’objet de la quatrième intercession (Exode 33.15-16). Moïse supplie l’Éternel de permettre qu’un signe visible et reconnaissable à tous montre qu’il marche lui-même avec le peuple. Ce signe, ce sera la Demeure de l’Éternel dressée de nouveau au milieu du camp. Cette dernière demande lui est aussi accordée (Exode 33.17).

Après que Moïse a ainsi regagné par son intercession tout ce que le peuple avait perdu par son péché, il sent le besoin d’une nouvelle faveur pour lui-même en vue de la tâche qu’il a devant lui et il demande à Dieu de mettre le sceau à toutes les grâces qu’il vient de lui accorder, en lui donnant de le connaître mieux qu’il ne l’a connu jusqu’alors (Exode 33.18) ; et cette dernière prière est encore exaucée (Exode 34.5 et suivants).

Qu’y a-t-il d’incohérent, de contradictoire dans une telle histoire ? Cette série d’intercessions et d’exaucements ne se justifie-t-elle pas sans peine ? Il faut sans doute qu’à côté de cela Israël comprenne la gravité de la faute qu’il a commise et du danger qu’il a couru. Voilà pourquoi la mort des trois mille hommes (Exode 32.28) doit lui rappeler le châtiment que tous auraient mérité de subir. Il doit aussi sentir qu’il est indigne d’invoquer Dieu comme son Dieu et de s’appeler encore son peuple. Voilà pourquoi le remplacement de l’Éternel par un simple ange lui est deux fois annoncé. Enfin il est nécessaire que le transfert de la Tente sacrée hors du camp lui mette clairement sous les yeux le divorce qui s’est produit entre l’Éternel et lui et la déchéance qu’il s’est attirée. Ce n’est que par cette sévérité, compagne de la grâce, qu’il pourra mesurer la gravité de son péché, la grandeur du pardon accordé et le prix d’un intercesseur tel que Moïse.

Malgré toutes les critiques dont la narration de ces trois chapitres a été l’objet, il nous paraît donc qu’on ne peut rien imaginer de plus suivi, de plus conséquent, de plus saint, de plus profondément pédagogique que l’histoire ici racontée. On comprend ainsi la parfaite convenance et l’application directe à la situation actuelle de ces paroles qui pourraient paraître banales, mais dans lesquelles se résume si bien l’esprit de toute cette scène : Le Dieu compatissant et miséricordieux, qui pardonne le crime, la défection et le péché, mais qui ne les laisse pas impunis (Exode 34.6-7).

Tout en laissant ouverte la question des sources auxquelles le narrateur a puisé, ce récit et en le comprenant dans le sens qu’il y a attaché lui-même, nous constatons sa véracité absolue et sa parfaite impartialité, par la franchise avec laquelle il met au grand jour, d’un côté, le péché de son peuple et, de l’autre, la honteuse faiblesse et la lâcheté d’Aaron, le futur grand sacrificateur. Il n’y a assurément dans ce récit aucune trace de vanité nationale ou d’étroitesse sacerdotale. La vérité de Dieu y règne seule.