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Ammonites
Dictionnaire Biblique Westphal Calmet

Groupement de Sémites habitant à l’est du Jourdain, entre le pays de Gad et le désert arabique. La tradition biblique les rattachait à Lot, et leur père était ce Ben-Ammi, signifiant : fils de mon père, né de l’union incestueuse de Lot et de sa fille cadette (Genèse 19.38). Il est remarquable que les textes assyriens désignent les Ammonites avec l’expression « Bêt-Ammânou » (de même Bêt-Omri signifie Israël).

Dans l’Ancien Testament on les appelle Bené-Ammon ou Ammonites (seul, Psaumes 83.8 dit Ammon). Ben-Ammi était frère puîné de Moab (Genèse 19.37) et les deux peuples, Ammonites et Moabites, voisins géographiquement, sont sans cesse nommés ensemble (Juges 10.6 ; 2 Chroniques 20.1).

Les Ammonites avaient exterminé une race de géants, les Zam-zummim (Deutéronome 2.20), et pris leur territoire, limité sensiblement au nord par le Jabbok, au sud par l’Arnon, à l’ouest par le Jourdain (Juges 11.13). Toute cette région était d’ailleurs très convoitée et les Ammonites durent compter avec les Moabites (au IXe siècle, Mésa domine le pays de l’Arnon), avec les Amoréens qui s’établirent à Hesbon, et finalement avec les Israélites, qui eurent grand’peine à se frayer un passage au milieu de populations très peu accueillantes.

Les Ammonites tenaient solidement la ligne du Jabbok (Nahr-ez-Zerkà), frontière naturelle (Nombres 21.24 ; Deutéronome 2.37 ; Deutéronome 3.16), et leur capitale Rabbath était dans un site facile à défendre (Deutéronome 3.11). Ils ne renonçaient d’ailleurs pas à s’étendre et espéraient profiter de l’état anarchique d’Israël. Avec les Moabites, ils franchirent le Jourdain et prirent Jérico (Juges 3.13 et suivant), mais Éhud rétablit la situation. Peu après, ils se heurtèrent à Jephté qui défendait le pays de Galaad (Juges 11.4-11 ; Juges 11.32 ; Juges 12.1-3), puis à Saül, venu au secours de Jabès (1 Samuel 11) ou préoccupé d’affermir sa toute récente royauté (1 Samuel 14.47). David pratiqua d’abord une politique de conciliation (2 Samuel 10.2), mais la guerre reprit plus violente que jamais : Rabbath fut occupée (2 Samuel 11.1) et le pays durement traité. Il témoigna pourtant plus tard sa sympathie à David fuyant Absalom (2 Samuel 17.27-29), et l’un des siens fut compté au nombre des héros du roi (2 Samuel 23.37).

Salomon choisit quelques-unes de ses femmes chez les Ammonites (1 Rois 11.1) et l’une d’elles, Naama, fut la mère de Roboam (1 Rois 14.21 ; 1 Rois 14.31 ; 2 Chroniques 12.13). Après Salomon, Ammon dut retrouver son indépendance. Il entra dans la coalition générale qui arrêta Salmanasar II dans ses progrès vers l’Ouest, puis, avec Moab et Édom, fit la guerre à Josaphat, roi de Juda (2 Chroniques 20). D’après les Chroniques, les Ammonites payèrent tribut à Ozias (2 Chroniques 26.8), puis à Jotham (2 Chroniques 27.5). La menace assyrienne occupant Israël, Ammon envahit le pays de Galaad et le saccagea (Amos 1.13-15).

Profitant toujours des événements et pratiquant la politique de l’opportunisme, les Ammonites occupèrent le territoire de Gad (Jérémie 49.1), aidèrent Nébucadnetsar II (604-561) à venir à bout de Jéhojakim (2 Rois 24.2, cf. Ézéchiel 21.28 ; Ézéchiel 25.2), mais se retournèrent contre lui (Jérémie 27.3) et, pendant le siège de Jérusalem, accueillirent chez eux des Juifs fuyards (Jérémie 40.11). Ce qui ne les empêcha pas de faire assassiner Guédalia (Jérémie 40.13ss ; Jérémie 41.1-3), ainsi que les Juifs de son entourage. Les Ammonites étaient plus que jamais en exécration (Deutéronome 23.3) et s’opposèrent, par tous les moyens, à la reconstruction des murs de Jérusalem (Néhémie 2.10 ; Néhémie 2.19 ; Néhémie 4.3 ; Néhémie 4.7 ; Néhémie 6.17-18). Néhémie et Esdras déclarèrent illégaux tous les mariages conclus avec les Ammonites (Néhémie 13.23, Esdras 9.12), ce qui n’améliora évidemment pas les rapports. Les Ammonites eurent d’ailleurs leur attention ramenée vers l’est et le sud de leur pays, par la menace nabatéenne. Ils n’échappèrent pas non plus aux contre-coups de la suprématie des Ptolémées ou des Séleucides. Leur capitale, Rab-bath, fut reconstruite au IIIe siècle avant Jésus-Christ, par Ptolémée Philadelphe, qui l’appela de son nom : Philadelphie. Au IIe siècle avant Jésus-Christ, Judas Macchabée franchit le Jourdain, pour livrer de nombreuses batailles aux Ammonites commandés par Timothée (1 Macchabées 56-8,31,37-44).

À l’époque romaine, Philadelphie fit partie de la Décapole et connut une grande prospérité. Les ruines nombreuses de Philadelphie (aujourd’hui Amman) en témoignent (un magnifique théâtre est bien conservé). Justin Martyr parle encore d’Ammonites (Dial. Tryph., 19). Finalement leur nom même disparut. Nous ne connaissons rien de la civilisation proprement ammonite. La langue était probablement très proche de l’hébreu (l’hébreu ancien dérive très exactement du phénicien, comme le seul exemplaire de la langue moabite, à ce jour connu, la stèle de Mésa ; et Moab était voisin d’Ammon). Le dieu des Ammonites était Milkom (Melek = roi), véritable dieu national, comme Kamos pour Moab (1 Rois 11.7) ; il eut un haut-lieu à Jérusalem (2 Rois 23.13). Divinité redoutable, à qui l’on immolait des enfants, et qui reçut cette preuve de vénération à Jérusalem même. Des rois donnèrent l’exemple et firent « passer leurs enfants par le feu » (2 Rois 16.3 ; 2 Rois 17.17 ; 2 Rois 21.6) en l’honneur de Moloch. Les prophètes avaient protesté (Jérémie 7.31) ; Josias souilla l’emplacement qui se trouvait dans la vallée de Hinnom (2 Rois 23.10). La civilisation ammonite ne dut pas arriver à un bien grand développement et celle de Moab lui fut certainement supérieure. Elle put disparaître sans laisser grande trace. Sans les vestiges de l’époque romaine, rien d’elle n’aurait subsisté, et pourtant la puissance ammonite fut redoutable. Avec elle, Israël eut toujours à compter.

A. P.


Numérisation : Yves Petrakian